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La Taupinière

Summary:

En plein milieu de l'été, l'officier de police Franck Peine prend en charge un appel de deux jeunes Vagos, les cousins Croute, qui ont découvert le corps ensanglanté du journaliste Earl Bailey. L'enquête qui semblait n'être qu'une simple affaire de règlement de compte, le mène cependant bien plus loin qu'il ne l'imaginait.

Chapter 1

Summary:

TW : mort, cadavre, traumatisme, emetophobie, sang

Chapter Text

 

Une chaleur étouffante englobait Los Santos, faisant partiellement fondre le bitume et rendant brulante toute surface exposée au soleil. L'absence totale d'une quelconque brise n'améliorait en rien la situation, et les rues étaient presque vides, à l'exception de quelques promeneurs courageux, des pauvres employés municipaux, et des voitures de police en patrouille. L'un des malchanceux agents dans cette position peu enviable était Franck Peine, qui tentait de ne pas penser à la fournaise malgré la climatisation cassée de sa voiture qui ne parvenait qu'à lui propulser un flot d'air chaud dans le visage sans le rafraichir d'une quelconque façon. Sans personne dans les rues, l'après-midi était calme et rien ne se passait, ne rendant l'attente dans la chaleur que plus longue encore. Pourtant, quelques jours plus tôt, la banque Pacific avait été braquée par le gang des Families, qui avaient emporté avec eux des dizaines de millions de dollars. Le commissariat avait été en ébullition, tandis que tous les agents étaient mobilisés à retrouver où se cachaient les gangsters, mais ces derniers étaient depuis le braquage totalement introuvables. Quelques fausses alertes avaient eu lieu, mais aucune trace des mallettes ne semblait vouloir être trouvée. Au vu de la chaleur, tout le monde travaillait au ralenti, et la journée ne s'annonçait en rien palpitante. Cependant, la radio grésilla et la voix du capitaine y retentit :

"On a un appel à côté du parking automobile de l'aéroport, qui le prend ?"

Franck décrocha la radio et répondit, tentant de cacher la lassitude dans sa voix et l'envie de finir sa journée au plus vite :

"Je suis à Alta Street, je le prend mon capitaine."

Il changea alors la destination prévue sur son GPS et se dirigea vers l'aéroport en direction de l'origine de l'appel. Plissant les yeux, il chercha celui qui l'avait passé en circulant sur la bande de stationnement de l'aéroport, désertée par les touristes et les riverains, et vit alors deux jeunes garçons courir dans sa direction en agitant les bras. Il arrêta sa voiture sur le trottoir et baissa la vitre avant de les interroger :

"C'est vous qui avez appelé, les garçons ?"

L'un des deux, qui possédait un t-shirt de baseball aux manches jaunes ainsi que des cheveux noirs, hocha la tête. Cependant, son expression alarma immédiatement Franck : le jeune garçon était livide, ses yeux étaient humides, et il semblait visiblement terrifié. Son compère, un autre garçon de son âge portant un t-shirt semblable aux manches violettes et avec une teinture blanche, ne disait quant à lui pas un mot. Son expression était encore plus épouvantable, et l'officier sortit alors de sa voiture. Voyant que les deux jeunes garçons semblaient terriblement angoissés, il leur demanda le plus calmement possible :

"Dites moi, comment vous vous appelez ?

- Moi c'est Antoine Croute, et lui c'est Daniel Croute, on est cousins."

Franck reconnut alors les noms. Ces deux jeunes étaient plus ou moins sans domiciles fixes, et semblaient délaissés par les services sociaux.  Bien que Peine ne les avait encore jamais croisé, leurs noms revenaient régulièrement dans les conversations au commissariat, pour des affaires de vol à l'étalage, généralement de nourriture ou d'alcool. Un ou deux mois plus tôt, il avait entendu des discussions affirmant qu'ils avaient été recueillis par le gang des Vagos. Il réalisa alors que si deux jeunes membres de gang affichaient cet air bouleversé, il devait s'être passé quelque chose de grave, dramatique. Il leur répondit le plus calmement possible :

"Je suis l'officier Peine. Qu'est-ce qui se passe ?"

Alors que Antoine allait répondre, Daniel se précipita vers une poubelle et y vomit, avant de se redresser avec une mine plus piteuse encore qu'auparavant. Après un regard triste pour son cousin, Antoine bégaya d'une voix tremblante, agitant les bras de façon incohérente :

"Il, il, il y a quelqu'un de mort d...dans le parking. Mais je... j'vous jure que c'est pas nous m'sieur, j'vous jure qu'on, qu'on, qu...qu'on y est pour rien !

- Du calme, personne ne vous accuse, d'accord ? Est-ce que vous pouvez me montrer où il se trouve ?"

Antoine hocha la tête et tendit sa main à Daniel, qui la prit. Ils se mirent alors à marcher en direction du parking, tandis que Franck saisissait sa radio :

"J'ai un potentiel décès dans le parking de l'aéroport, je vais investiguer les lieux.

- Reçu" répondit le capitaine "Je préviens deux unités, je vous les envoie en fonction du rapport."

Ils entrèrent alors dans le parking, et les cousins prirent leur courage à deux mains avant de dire :

"Il est au fond à droite.

- Entendu. Restez ici, d'accord ?"

Franck avança dans le parking qui n'était pas épargné par la chaleur pesante malgré l'ombre qu'il offrait. Les deux cousins restèrent immobiles, collés l'un à l'autre, observant l'officier avancer, une main prête à saisir son arme. Il remarqua alors une masse sombre dans le coin indiqué par les deux jeunes garçons et s'y dirigea. S'approchant, il finit par distinguer un corps gisant dans une marre de sang. Une fois à quelques mètres, il reconnut alors la personne qui se trouvait devant lui. Il saisit sa radio immédiatement et rapporta d'un ton pressant :

"Ici officier Peine, j'ai un corps dans le parking à côté de l'aéroport. Je pense que c'est Earl Bailey, le journaliste. Tout indique un homicide.

- Putain de merde…" jura le capitaine "J'envoie deux équipes dans votre direction officier.

- Reçu capitaine. Il faudrait également envoyer un membre du LSMS pour permettre une prise en charge psychologique rapide, les deux témoins ayant découvert le corps sont les deux cousins Croute et ils sont en état de choc. Pas d'autres témoins connus, ni de victime.

- Reçu, je vous envoie ça."

Un examen visuel plus approfondi du corps du journaliste montra à Peine que quiconque avait tué Bailey s'était acharné. Une profonde plaie indiquait que sa jugulaire avait été tranchée, ou au moins qu'un couteau y avait été planté, et une balle lui avait également été tirée dans le front. L'officier resta cependant à bonne distance du cadavre afin de ne pas troubler les prélèvements ADN et de ne pas modifier la scène de crime, et il retourna vers les cousins. Devant leur détresse affichée, il leur affirma à nouveau :

"Ne vous en faites pas, personne ne vous accuse de quoi que ce soit. Il y a un psychologue du LSMS qui est en route pour vous prendre en charge, on s'occupera de votre déposition plus tard, d'accord ?"

Les cousins hochèrent la tête, tandis que des sirènes de police se faisaient entendre au loin. Quelques minutes plus tard, l'agent Panis sortit de sa voiture, frottant sa barbe qu'il avait bien envie de raser à cause de la chaleur, ainsi que Michael, dont le cou était baigné de sueur à cause de son mulet noir. Franck leur exposa la situation, et les agents bouclèrent rapidement les lieux, étendant des bandeaux "Crime Scene" aux entrées du parking et s'assurant qu'aucun civil ne rentre. Quelques minutes plus tard, un SUV du LSMS se gara devant les lieux, et la docteur Martoni en sortit, après être venue en vitesse, en témoignaient sa chemise blanche mal ajustée et ses cheveux attachés à la hâte en un chignon. Franck lui résuma rapidement ce qui était arrivé, et elle repartit alors avec les cousins en direction de l'hôpital, tandis que d'autres voitures de police arrivaient. Le capitaine Bill Boid ne tarda pas, s'épongeant le front avec un chiffon et la cravate légèrement desserrée, accompagné du lieutenant Kuck qui quant à lui dégoulinait de sueur malgré ses cheveux rattachés en queue de cheval et ne semblait pas à l'aise du tout sous la chaleur. Boid demanda immédiatement :

"Bon, qu'est-ce qu'on a ?

- Mort à l'arme blanche et par arme à feux." répondit Peine "Pour le moment, j'envisage un assassinat, aucune arme n'étant présente sur les lieux. Les deux garçons qui ont découvert le corps sont pris en charge psychologiquement par le LSMS.

- Bien. Je veux qu'il n'y ait aucun civil sur les lieux. Vous me photographiez la scène, vous numérotez les éléments, et quand tout ça est fait on fait venir le LSMS pour la prise en charge du corps et l'autopsie."

Malgré la fournaise, les lieux furent le témoins d'une grande agitation durant la demi-heure suivante, tandis que des agents allaient et venaient et que la scène était méticuleusement rapportée. Tandis que le capitaine supervisait les opérations, le lieutenant Kuck vint vers Peine et lui demanda :

"Dites, les deux jeunes qui ont trouvé le corps, allez au LSMS les attendre, et vous les amenez au commissariat quand ils auront fini, d'accord ? Vous savez, si c'est les cousins Croute ils sont pas bien malins, je sens qu'ils auront oublié la moitié des infos d'ici quelques heures et ça va énerver le capitaine. Merci bien officier Peine."

Peine hocha la tête avant de reprendre sa voiture et de se diriger vers le LSMS, la tête pleine de questions pour l'instant sans réponse.

Chapter 2

Summary:

TW : trauma, évocation de violences policières

Chapter Text

Antoine et Daniel se tenaient la main sur le divan de la salle principale de l'aile psychiatrique de l'hôpital. Ici aussi la chaleur était écrasante, malgré un ventilateur qui remuait l'air chaud de la pièce. Daniel avait toujours du mal à parler, et Antoine assurait courageusement la liaison avec leurs interlocuteurs. Ils étaient pour l'instant seuls, la docteur Martoni étant sortie quelques minutes de la salle avant de commencer leur examen. Cependant, cet isolement éphémère aidait autant les cousins qu'il ne faisait empirer leur état. Si rester dans un environnement bienveillant était agréable, la pensée de ce qu'ils avaient vu était encore très présente. Daniel regarda son cousin, les larmes aux yeux :

"Ils vont penser que c'est notre faute, on aurait jamais dû sortir dans la rue aujourd'hui"

Antoine ne répondit pas. Il était du même avis, et était bien trop perturbé pour mentir de façon crédible afin de rassurer Daniel. Il se contenta de resserrer légèrement sa prise sur la main moite de son cousin, qui posa doucement sa tête sur son épaule. La porte grinça alors, et Vanessa Martoni entra dans la salle, avec deux canettes de soda fraiches en main, qu'elle leur tendit avec un sourire rassurant. Les deux jeunes garçons les prirent et en burent une gorgée après une légère hésitation. La fraicheur de la boisson les fit légèrement frissonner mais apaisa la sensation d'intense chaleur leur pesant sur les épaules, tandis que Vanessa s'asseyait en face d'eux avec un calepin et un crayon. D'une voix douce, elle affirma :

"Les garçons, vous savez, je ne suis pas policière. Je ne vais pas vous demander de me dire tout ce que vous avez vu. Ce qui m'importe, moi, c'est que vous me parliez de comment vous vous sentez, de ce qui vous inquiète, et mon travail sera de vous aider. D'accord ?"

Les cousins hochèrent la tête, et Vanessa demanda alors :

"Alors dites moi, qu'est-ce qui vous inquiète le plus actuellement ? De quoi vous avez besoin de parler le plus ?"

Antoine hésita, puis répondit en tentant de maitriser les tremblements de sa voix :

"Ben... Ben vous savez y a les Vagos qui nous ont pris avec eux depuis quelques mois, du coup on a déjà fait quelques bêtises, et du coup, enfin…"

Il hésita à poursuivre, et Vanessa l'encouragea d'un doux hochement de tête, qui agitèrent légèrement ses cheveux brun-roux. Le jeune garçon inspira profondément avant de dire d'une traite :

"Du coup on a peur que la police se dise juste que bah, on est des Vagos, et que oh là là, encore les Croute, c'est toujours des problèmes quand ils sont dans le coin, c'est encore eux qui ont fait ça sauf que là même qu'ils ont tué quelqu'un, et qu'ils fassent pas d'enquête et qu'on se retrouve en prison alors qu'on a rien fait et qu'on était juste sur là quand c'est arrivé. Et qu'en prison en plus on sera pas ensemble, et qu'ils vont nous séparer, et qu'on a pas envie de se perdre alors qu'on a rien fait. Et on a très peur de plus pouvoir se voir, et que si on peut plus se voir on sait pas si on va tenir, tout ça parce que les agents ils vont se dire que comme on est des Vagos on est forcément coupable et qu'ils vont pas chercher plus loin."

Daniel se contenta de hocher la tête et de chuchoter son approbation de ce que venait de dire son cousin. Vanessa les observa d'un regard compréhensif tout en notant ce qui avait été dit. Après quelques secondes d'un silence qui n'était perturbé que par le bourdonnement du ventilateur et du son du crayon sur le papier, elle leur répondit alors :

"Vous savez les garçons, la police a des procédures spéciales. Si rien ne montre que c'est de votre faute, ils ne peuvent pas vous mettre en prison pour rien. Et même si vous êtes des Vagos, ils n'ont pas le droit de vous emprisonner juste pour ça. Ce n'est pas illégal en soit de faire partie d'un gang. Mais votre peur est tout à fait comp...

- Je vais plus pouvoir dormir." L'interrompit Daniel, qui avait lâché cette phrase comme si elle était au bout de se lèvres depuis de longues minutes sans pouvoir sortir. Après un silence durant lequel Vanessa prépara son crayon pour prendre de nouvelles notes, et lui montra qu'elle était à l'écoute de ce qu'il allait dire, il reprit. "J'arrête pas de le revoir, il veut pas partir de mes pensées. J'ai l'impression que même quand je ferme pas les yeux, je continue de le voir.

- Vous me parlez de celui qui est mort, c'est bien ça ?" Demanda Vanessa avec délicatesse. Daniel hocha légèrement la tête, montrant qu'il avait encore du mal à accepter de dire ce mot, comme si la simple pensée d'avoir vu un homme mort lui était insupportable. Prenant son courage à deux mains, il continua :

- "Je sais pas comment arrêter de le voir, j'arrête pas d'entendre en boucle ce qu'il nous a dit avant d'entrer dans le parking, j'ai l'impression que c'est notre faute ce qui est arrivé. On l'a vu rentrer, et on a rien fait."

Vanessa fronça légèrement les sourcils en finissant de noter, avant de demander :

"Il vous avait parlé avant de rentrer dans le parking ?"

Les cousins hochèrent la tête, en silence. Vanessa ne demanda pas de détail sur cette affirmation, mais nota quelques phrases, puis les interrogea à nouveau :

"Et vous dites que vous l'avez vu rentrer et que vous n'avez rien fait, mais comment est-ce que vous auriez pu savoir ce qui allait lui arriver dans le parking ? Vous n'aviez aucun moyen d'agir, vous n'avez aucune responsabilité dans ce qui est arrivé vous savez."

Daniel hésita un instant avant de répondre :

"Non... Je parle pas de celui qui est mort. Il y a quelqu'un d'autre qui est arrivé en courant dans le parking, après lui, et on a rien fait."

Vanessa eut un léger sursaut qu'elle tenta de cacher mais que les cousins remarquèrent malgré tout, et elle nota à nouveau quelques lignes sur son calepin, avant de répondre :

"Vous savez, même pour cela, vous n'aviez aucun moyen d'agir. Par contre, écoutez moi bien : c'est vraiment très important que vous gardiez bien en mémoire tout ce que vous avez vu, et que vous disiez tout aux policiers quand ils vont vous poser des questions, d'accord ? Plus vous leur direz en détail ce qui est arrivé, mieux ils pourront enquêter, et donc moins de soupçons ils risquent d'avoir sur vous. C'est bien compris ?"

Les cousins montrèrent qu'ils avaient compris, légèrement rassurés par ce que la psychologue leur disait, mais cependant toujours terrifiés de la perspective d'être envoyés en prison pour rien. Ils burent une nouvelle gorgée de soda, et Daniel demanda timidement :

"Est-ce qu'on risque d'avoir des problèmes parce qu'on a rien fait pour empêcher l'autre monsieur de rentrer ?

- Aucun." Répondit la psychiatre. "Des problèmes vous pourriez en avoir si vous l'aviez vu agresser le journaliste sans rien faire, mais vous ne l'avez que vu rentrer. Vous ne pouvez pas prédire l'avenir, personne ne pourra vous reprocher de n'avoir pas pu empêcher ce qui est arrivé."

Daniel baissa doucement les yeux, rassuré, et but à nouveau. Antoine interrogea Vanessa à son tour :

"Madame, est-ce qu'on peut avoir des problèmes juste parce qu'on est des Vagos ?"

Même si elle avait déjà répondu à cette appréhension des deux jeunes garçons, elle expliqua à nouveau, patiemment :

"Non, ne vous inquiétez pas. Ce n'est pas illégal de faire partie d'un gang, ce qui peut vous attirer des ennuis c'est de faire des choses illégales. Et ça, peu importe ce que vous avez pu faire à d'autres moments, on ne peut pas vous le reprocher aujourd'hui, même si vous êtes des Vagos. Par contre, j'ai une petite question par rapport à ça.

- Ils nous obligent pas à être avec eux madame, j'vous jure ! C'est nous qui voulons, ils sont très gentils avec nous !" se défendit immédiatement Antoine. Vanessa lui sourit gentiment avant de répondre :

- Je ne l'ai jamais remis en question. Simplement, avec ce qui est arrivé, vous allez avoir besoin de séances psychologiques, au moins une fois par semaine. Et c'est là que je me questionne : est-ce que les Vagos seront d'accord ?

- Bah oui bah oui !" rétorqua Daniel "Ils sont gentils avec nous, ils ont vu qu'on dormait dans la rue donc ils nous ont pris avec eux, ils veulent qu'on aille bien ! Donc si parler avec vous ça nous fait aller bien, ils nous laisseront venir.

- D'accord, très bien, c'est tout ce que j'avais besoin de savoir."

Alors qu'elle allait continuer de les interroger, on toqua à la porte. Elle haussa légèrement la voix pour autoriser à entrer, et l'officier Peine entra dans la salle avant de dire :

"Bonjour madame, je suis désolé mais mes supérieurs veulent qu'on interroge les garçons maintenant.

- Mais la séance n'est pas terminée !

- Je le sais, et je m'en excuse. Je n'avais pas non plus envie de perturber leur prise en charge, croyez moi, mais le lieutenant a insisté. Je ne fais que mon travail, madame."

Vanessa soupira avant de poser son calepin sur la table et de grommeler "Eh bien il va m'entendre, monsieur le lieutenant" puis de répondre à l'officier :

"Très bien, si vraiment ça ne peut pas attendre la séance s'arrête ici. Je vais simplement prendre leurs contacts afin de pouvoir leur indiquer quand se tiendra la prochaine séance. Vous direz à votre lieutenant que la prise en charge psychologique est essentielle dans la procédure de protection des témoins, il est censé être au courant de ça. Antoine, Daniel, on se revoit bientôt. N'oubliez pas tout ce dont on a parlé, essayez de rester calme, et tout va bien se passer, d'accord ?"

Les cousins hochèrent la tête avant de se lever, leur boisson toujours en main, de donner leur numéro à la psychologue et de rejoindre l'officier, qui les attendait dans le couloir. Leurs pas hésitants créaient un petit couinement sur le sol lisse, et il faisaient de façon général peine à voir, comme deux petits chats terrorisés serrés l'un contre l'autre et recroquevillés, retranchés, et terrifiés du monde.

Chapter Text

Les cousins suivirent l'officier vers le parking de l'hôpital. Là, il les fit monter à l'arrière de son véhicule avant de refermer la porte et de monter à l'avant, de démarrer et d'activer immédiatement la climatisation. Ses quelques minutes d'attente dans l'hôpital avaient suffit à transformer à nouveau sa voiture en une étuve bouillante, et les Croute eurent du mal à attacher leurs ceintures tant elles étaient brûlantes. Peine se retourna vers les deux cousins et leur air piteux, hésita un instant avant de proposer :

"Est-ce que vous aimeriez que je mette la sirène ?"

Daniel releva les yeux avec un sourire timide, et Antoine répondit immédiatement, bien que quelque peu craintivement :

"Oh ben oui, enfin si ça vous cause pas des ennuis !"

Peine secoua la tête, vérifia qu'ils étaient bien attachés, puis activa la sirène, le gyrophare, et se rendit au commissariat, profitant de sa position d'agent de police pour aller plus vite que les limitations et passer les feux rouges, tout en faisant bien attention aux autres voitures. A l'arrière, les cousins qui s'étaient au départ sentis comme piégés, souriaient en regardant la voiture aller aussi vite, tout en faisant attention de bien tenir leurs canettes de soda déjà tièdes afin de ne pas en renverser partout avec les à-coups du véhicule. Une fois à quelques rues du commissariat, Peine éteignit la sirène et fit le reste du trajet à une vitesse normale afin de ne pas risquer des réprimandes de ses supérieurs. Il finit par entrer dans le parking, gara la voiture et laissa les deux jeunes garçons sortir avant de les guider vers l'accueil. Après quelques minutes d'attente durant lesquelles le policier disparut dans les méandres du bâtiment, il revint avec de quoi noter, ainsi qu'un policier coiffé d'un mulet noir qui l'accompagnait. Il emmena alors les cousins dans les couloirs à la peinture froide et terne, qui n'aidait pas à améliorer leur humeur. Cependant, la chaleur était moins pressante tandis qu'ils avançaient, rendant l'expérience moins déplaisante. Finalement, il fit entrer Daniel dans une salle, et laissa Antoine à patienter dans le couloir. Devant leur détresse apparente, il précisa :

"Ne vous inquiétez pas, vous serrez réunis dès qu'on vous aura posé les questions. Et vous serez jamais seul, Michael va surveiller aussi."

Daniel fut alors introduit dans une petite pièce blanche, équipée d'un miroir sans teint, d'une table et de deux chaises. Il resta debout, sans vraiment savoir quoi faire de la canette tiède qu'il tenait toujours en main alors qu'elle était vide depuis maintenant plusieurs minutes. Peine entra à son tour et demanda gentiment :

"Tu voudrais un verre d'eau ? Il fait très chaud dehors."

Daniel hocha la tête, et Peine lui prit gentiment sa canette afin d'aller la jeter avant de sortir et de revenir quelques secondes plus tard avec deux gobelets. Il en tendit un au jeune garçon avant de poser l'autre sur la table et de s'assoir, indiquant à Daniel de faire de même. Angoissé, le petit s'assit, observant quelque peu autour de lui. Ce n'était pas la première fois qu'ils étaient interrogés avec son cousin : plusieurs fois déjà la police les avaient ils séparés et cuisinés, mais ce n'était alors que pour des petits délits, des vols de nourriture, de boisson, parfois des squats illégaux, et parfois même étaient-ils allés directement en cellule de dégrisement sans passer par la case interrogatoire. Mais jamais encore n'avaient ils été interrogés sur une affaire aussi grave qu'un meurtre. Peine commença alors l'interrogatoire :

"Bien. Dis moi si je me trompe : tu t'appelles Daniel Croute, tu as 16 ans, pas d'adresse connue ni de tuteurs légaux joignables, même si leurs noms sont notés dans ton dossier. Toi et ton cousin êtes déjà connus pour quelques délits n'ayant résulté qu'en amendes minimes. Je me trompe ?"

Daniel secoua la tête, et l'officier reprit :

"Aujourd'hui à 15 heures 16, vous avec passé un appel au LSPD. Est-ce que tu peux me résumer tout ce qui s'est passé avant cet appel, avec le maximum de détails ?

- Ben euh... Avec mon cousin on se baladait dans la rue, et on se disait qu'il faisait super chaud donc on restait à côtés de l'aéroport parce que y a souvent du vent et que ça fait du bien, et euh, y a le monsieur, enfin, celui qui est...mort... enfin, ce monsieur il est passé et il avait l'air pas rassuré, il regardait partout, et quand il nous a vu, il est venu nous voir et il a dit...euh... attendez, j'essaie de me rappeler bien de ce qu'il a dit... Il a dit qu'il était très important, et que des gens lui voulaient du mal, et que si dans un quart d'heure il était pas sorti du parking, ben on devait appeler la police. Du coup il est reparti et il est rentré dans le parking. Et deux minutes après, il y a un monsieur qui est passé en courant, et il est rentré dans le parking aussi. Là on s'est dit que c'était bizarre mais comme on voulait pas d'ennuis, ben on est resté loin du parking. Et un peu après, y a une voiture qui est sortie du parking, et on s'est dit que c'était le premier monsieur, mais on s'est dit qu'on allait quand même aller voir au cas où, et puis peut-être qu'il allait nous donner un peu d'argent parce qu'on faisait bien ce qu'il disait. Mais après, on est rentrés dans le parking et...enfin..."

Daniel s'arrêta de parler, tandis que Peine prenait des notes. Les yeux du jeune garçon se remplirent de larmes, et le policer poussa quelque peu vers lui le gobelet d'eau, que Daniel saisit et but entièrement, s'arrêtant simplement entre deux sanglots retenus afin de ne pas avaler de travers. Peine relut ses notes, puis demanda doucement :

"Alors, j'ai quelques questions. Le premier monsieur, il vous a dit pourquoi il était important, et pourquoi des gens lui voulaient du mal ?

- Non, il a rien dit du tout, juste ça. C'est pour ça au début avec Antoine, quand il était loin, ben on s'est moqué de lui, parce qu'il était quand même drôlement présun...présompteux...présomptueux.

- D'accord. Et le deuxième monsieur, tu peux me dire à qui il ressemblait ?

- Euh, il était un peu musclé, il était blanc, il avait les cheveux courts et sombres... Il avait des lunettes de soleil... Et je sais pas sinon, j'ai pas bien vu, il est passé en courant.

- D'accord. Et est-ce qu'il venait de la même direction que le premier monsieur ?

- Oui, il est venu du même côté, même que je me suis dit que c'était bizarre et que c'était comme si il l'avait suivi et qu'il essayait de le rattraper, mais je me suis dit que je me croyais dans un film et que c'était juste quelqu'un qui devait être en retard quelque part.

- Bien... J'ai une dernière question, et ensuite tu laisseras la place à ton cousin. La voiture, est-ce que tuas vu qui était dedans, et est-ce que tu saurais la décrire ?

- Euh, j'ai pas vu qui était dedans, c'était loin et y avait des reflets sur le pare brise du coup on voyait rien. Et la voiture je ne sais pas, elle était noire, et elle avait rien d'impressionnant, c'était une voiture normale."

Peine termina de prendre des notes, puis raccompagna Daniel en dehors de la salle, pour y faire rentrer Antoine. En se croisant, les deux cousins échangèrent quelques mots et Antoine intima à Daniel :

"Il faut pas lui dire qu'on est des zadistes, après il dit qu'on est des communistes et qu'il déteste les communistes et il est pas gentil."

Daniel lui montra qu'il avait compris le message, et ce fut au tour de Antoine de passer devant l'officier Peine. Quelques minutes plus tard, il ressortit également, mais Peine ne semblait pas plus avancé qu'après l'interrogatoire de Daniel. Ainsi, la seule piste qu'ils avaient était une description générique et incomplète qui pouvait bien décrire la moitié des hommes de cette ville, une voiture banale qui serait impossible à retrouver, et une information selon laquelle le journaliste avait peur que des gens ne s'en prennent à lui. Peine soupira légèrement, en pleine réflexion, avant de conclure que cette dernière piste, celle de potentiels ennemis de Bailey, serait la plus simple à suivre. Il allait demander au capitaine s'il était possible de se charger de l'enquête, car plusieurs idées pour la suite lui venaient déjà, et que tous les autres agents étaient de toute façon occupés avec l'enquête sur le braquage de la banque Pacific. Cependant, il commença par raccompagner les deux jeunes Vagos à l'accueil du commissariat, avant de leur demander :

"Est-ce que vous avez besoin que je vous appelle un taxi pour rentrer ?

- Non c'est bon m'sieur" répondit Antoine "On va appeler tonton Montoya, il va venir nous chercher.

- Très bien. Je vais juste vous demander de ne pas quitter la ville jusqu'à nouvel ordre et de rester disponibles pour la police, si jamais nous avons de nouvelles questions à vous poser. D'accord les garçons ?

- Bah oui bah oui !" Répondirent-ils en chœur. Antoine poursuivit : "Vous êtes super gentil m'sieur, souvent les autres policiers ils nous aiment pas et ils disent qu'on est bons qu'à faire des problèmes.

- Oui c'est bien vrai ça." Renchérit Daniel "Les autres ils nous traitent comme des idiots, alors que vous ben vous êtes bien plus agréable.

- Et même qu'on a beau dire, m'sieur l'agent" continua Antoine "Ben c'est quand même bien plus rassurant de se dire que les gens qui protègent les citoyens ils sont gentils."

Daniel approuva vigoureusement, tandis que Peine esquissait un sourire. Malgré leur traumatisme récent, ces deux jeunes bouillonnaient d'une énergie intense. Leur jeunesse passée en partie à la rue ne semblait pas avoir réussi à l'entraver, malgré d'évidents problèmes de confiance en eux. Franck espérait pouvoir faire quelque chose pour leur trouver un lieu agréable pour vivre, ou au moins qu'ils reçoivent de l'aide. Ils le méritaient.

Chapter Text

"Ca va, ils vous ont bien traité à la police ?" demanda Inigo, brisant le silence régnant dans la voiture tandis qu'il conduisait les cousins vers Jamestown Street.

Les deux cousins hochèrent la tête, silencieux. Inigo haussa un sourcil, puis passa rapidement sa main sur ses cheveux rasés avant de tenter de lancer à nouveau la conversation :

"On a racheté des glaces, ça vous dit d'en avoir quand on arrive ?"

A nouveau, ils ne dirent pas un mot, se contentant de hocher la tête avec un petit sourire. Le Vagos, comprenant qu'ils n'allaient pas bien du tout, hésita un instant avant d'appuyer sur l'accélérateur et de se mettre à conduire bien plus rapidement que les limitations de vitesse, afin d'arriver au plus vite au quartier. Il ne se formalisa pas des klaxons et appels de phares des quelques automobilistes de sortie malgré la chaleur, se contentant de rouler. Finalement, il arriva et se gara au milieu des autres voitures jaunes. Les cousins sortirent de la voiture et se dirigèrent vers l'une des maisons, où ils entrèrent avant d'aller s'assoir sur le canapé, regardant quelque peu dans le vide sans parler. Inigo ferma la porte afin d'éviter que la chaleur ne rentre, leur jeta un coup d'œil, puis sortit son téléphone pour envoyer des messages. Un jeune homme portant des favoris et une moustache descendit alors l'escalier menant à l'étage, venant visiblement de se réveiller d'une sieste. Il remarqua d'abord Inigo, puis les Croute, et comprit devant leur silence tout sauf habituel qu'il était arrivé quelque chose de grave. Inigo lui fit signe de le suivre, et ils entrèrent dans la cuisine, où le plus vieux ouvrit le congélateur afin d'en sortir des cornets de glace, tout en expliquant rapidement :

"Y a le journaliste qui a été tué et ils l'ont trouvé. La police les a interrogé et là on vient de rentrer.

- Le journaliste ?

- Ouais, celui à qui le jefe donnait de l'argent des fois pour pas qu'il dise ce qu'on faisait.

- Oh d'accord... Il est mort quand ?

- Aujourd'hui, c'est les niños qui l'ont trouvé.

- Mais la police le sait ?

- Matéo, tu m'écoute quand je parle ? On rentre du commissariat là.

- Ils avaient arrêté les Croute pour ça ?

- Non, juste interrogés. Et ils vont pas bien. J'ai prévenu Lenny."

Ils ressortirent alors de la cuisine et Inigo donna les glaces aux cousins, qui le remercièrent et commencèrent à manger. Voir les deux petits qui étaient en temps normal si vifs complètement silencieux le peinait, mais il ne trouvait rien pour les aider. Matéo leur demanda :

"Vous voulez qu'on joue aux jeux-vidéos ?"

Daniel le regarda, le regard incertain, et Antoine répondit doucement :

"Peut-être plus tard."

La porte s'ouvrit alors, laissant passer une jeune femme aux cheveux roses mouillés, qui revenait visiblement de la plage. Elle embrassa rapidement Inigo puis s'accroupit devant les Croute :

"J'vais pas vous obliger, mais si vous avez besoin de vous changer les idées, je suis là !"

Elle leur ébouriffa les cheveux et retourna près de Inigo, laissant les deux cousins manger leur glace. La porte s'ouvrit à nouveau, et une nouvelle fois, c'est une jeune femme qui entra, avec un imposant sac noir en bandoulière et une casquette à l'envers, faisant pester Matéo "Haylie, c'est l'infierno dehors, arrêtez d'ouvrir comme ça !". Sans prêter attention à ses protestations, elle resta sur le seuil et déclara :

"Y a le padre qui veut voir les petits."

Les cousins se levèrent alors, continuant de manger leur glace, et la suivirent à nouveau dans la fournaise à l'extérieur. Elle ébouriffa rapidement les cheveux de Daniel afin de le réconforter, tandis qu'ils traversaient l'impasse en marchant sur l'herbe jaune desséchée. Malgré la chaleur, une femme couverte de tatouages était allongée sur une serviette et prenait le soleil, tandis qu'un homme portant une barbe courte était assis à l'ombre d'un porche juste à côté, lui répétant "Allez rentre hermana, on crève de chaud là" sans qu'elle ne bouge, et sans que lui-même ne décide de la laisser seule dehors. Les Croute firent semblant de ne pas entendre les injures qu'il proférait, et continuèrent de marcher, jusqu'à atteindre une maison où Haylie toqua à la porte. Cette dernière s'ouvrit sur un homme au crâne rasé sur les côtés et portant des cheveux longs et noirs sur le dessus, rattachés en une petite queue de cheval à l'arrière de sa tête. Il eut un petit sourire qui déforma le tatouage d'araignée sur sa joue avant de les laisser rentrer, tandis que Haylie restait dehors, allant visiblement rejoindre la jeune femme prenant le soleil. Il referma la porte derrière les cousins, tandis qu'une femme aux cheveux rouges et noirs leur indiquait le salon. Là, dans la pénombre à cause des volets fermés, était assis Lenny Johnson, en costume marron malgré la chaleur. Il se redressa et rangea le téléphone avec lequel il envoyait des messages, et invita les cousins à s'assoir, puis à raconter ce qu'ils avaient vu. Une fois fait il resta silencieux quelques instants puis demanda :

"Bon, comment vous vous allez ?

- On va pas bien." répondit Daniel, tandis que Antoine approuvait.

- Est-ce qu'il y a quelque chose qui vous ferait plaisir ?

- Non, désolé." affirma Antoine. "On a juste b'soin d'attendre qu'ça passe."

Lenny fronça légèrement les sourcils, puis les interrogea :

"C'est qui le policier qui vous a interrogé ?

- Euh, c'était un m'sieur très gentil" répondit Antoine. "Il a même mis les sirènes pour nous amener au commissariat. Il m'semble que c'était avec un P.

- C'était Peine, le monsieur." compléta Daniel. "Il s'appelait Peine.

- Bon." les réconforta Lenny, avec un visible soulagement sur le visage. "Ca va. Franck Peine, c'est un bon gars, il est du genre sérieux, si c'est lui qui se charge de l'enquête il vous arrivera rien."

Les deux cousins se sourient l'un à l'autre. Malgré les multiples fois où ils avaient été réconfortés, c'était la première fois que quelqu'un leur assurait qu'il ne leur arriverait rien en toute connaissance de cause. Le chef de gang les interrogea à nouveau :

"Et pour le psy ?

- Euh, c'était une madame" l'informa Antoine. "Elle était super gentille, elle était inquiète que vous nous laissiez pas la revoir.

- Bon, ça doit être Martoni." affirma Lenny. "Entre elle et l'autre dingue, vous avez eu de la chance. Mais oui, vous pourrez la voir. Par contre, maintenant, vous allez bien m'écouter, parce que c'est important, d'accord ?

- Oui m'sieur Lenny !" sourit Antoine, tandis que Daniel hochait la tête. "On écoute bien.

- Maintenant, tant que le type qui a fait ça a pas été retrouvé, je ne veux plus que vous sortiez dans la rue sans qu'un Vagos vous accompagne, c'est clair ?

- Mais..." commença à protester Daniel "C'est..."

- Non, je veux pas de protestation. On sait pas si ce que vous avez vu est important ou pas, et vous êtes les seuls témoins connus. Y a peut-être des gens qui vous veulent du mal, et il faut vous protéger. D'accord ?"

Devant leur silence renfrogné, Lenny répéta : "D'accord ?". Les deux garçons baissèrent alors la tête et acceptèrent les conditions. Il resta silencieux quelques secondes, puis demanda :

"Vous savez ce que vous allez faire maintenant ?"

Ils secouèrent la tête, et le jefe répondit alors :

"Vous allez vous détendre de la façon que vous voulez, et vous avez le droit à des glaces à volonté. Ordre du padre, les autres ont pas le droit de refuser."

 

Franck Peine regardait par la vitre, attendant que le capitaine n'arrive au commissariat. L'officier avait l'intention de demander la charge de l'enquête sur le meurtre de Bailey, mais avait peur de ne pas être autorisé, et relégué à l'enquête sur la banque Pacific. Lorsqu'il vit la voiture du capitaine arriver, il se dirigea immédiatement dans sa direction. En le voyant le capitaine, toujours en train de s'éponger le front, ne lui laissa pas le temps de parler et ordonna :

"Officier, vous prenez l'enquête. On a pas le temps de s'y consacrer avec les autres, donc vous vous en chargez."

Franck resta interdit, les sourcils haussés, et agréablement surpris que cela ait été si simple. Devant son expression, le capitaine, qui pensa que Peine était mécontent de cette décision, assena :

"Nan mais, c'est pas une question, c'est un ordre, vous prenez l'enquête, un point c'est tout.

- Oui mon capitaine. J'aurais juste besoin de...

- Prenez le bureau qu'on utilise pour stocker les cartes de l'île."

Le capitaine rentra alors dans le bâtiment, laissant Peine en plan, les sourcils haussés. L'officier n'en revenait pas de la facilité qu'il avait eu à être chargé de l'enquête. Il rentra à son tour, afin de prendre ses marques dans son bureau. Il s'agissait d'une petite pièce, remplie de cartons de cartes diverses montrant l'île sous différentes formes, à différentes dates. Elles étaient parfois utiles lors de certaines enquêtes, et le lieutenant Kuck avait depuis la manie d'en collecter autant que possibles afin de les utiliser, mais la pièce ne servait en réalité qu'à peine une fois par an. Franck poussa les cartons du bureau, puis fit de la place devant le tableau en liège derrière lui. Il l'observa un instant puis alluma l'ordinateur et fit quelques manipulations dessus. Quelques minutes plus tard, il sortit de la pièce avant d'y revenir peu après avec quelques photos, un bloc de post-it, des crayons, une bobine de fil rouge et une boîte de punaises. Il posa tout sur le bureau, puis accrocha la photo de Bailey au centre du tableau, qu'il relia à un post-it où il écrivit "homme à lunette de soleil", à côté duquel il accrocha un post-it avec marqué "voiture noire". Puis il accrocha une photo des cousins, qu'il relia aux trois autres papiers déjà accrochés. Cela ne menait pour l'instant nulle part, mais il avait toujours rêvé de faire ça.

Chapter 5

Summary:

TW : mort, cadavre, noyade

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L'officier Peine ouvrit les yeux, sans comprendre ce qui l'avait éveillé. Le soleil commençait à peine à filtrer à travers les volets défectueux de sa chambre, projetant une lueur orangée sur son mur. Il était probablement cinq heures du matin, bien plus tôt que les huit heures sur lesquelles il avait programmé son réveil. Ses yeux le piquaient après une nuit courte qui ne lui avait semblait-il donné aucun repos. Tandis que la brume de son esprit se dissipait, il prenait progressivement conscience de la sonnerie de son téléphone et de la vibration qu'il provoquait sur sa table de nuit. Secouant la tête, il saisit alors l'appareil en comprenant ce qu'il se passait et décrocha, répondant d'une voix enrouée et endormie :

"Oui, allo ?

- Allo, officier !" asséna le capitaine Bill Boid, bien trop fort pour le pauvre Franck qui venait d'être tiré de son sommeil. "Venez immédiatement au point que je vous envoie, on pense avoir retrouvé le type décrit par les témoins.

- Quoi ? Il s'est rendu ?

- Venez juste, c'est pas mon enquête, je m'assure juste que les procédures soient suivies.

- Les procédures ?"

Boid raccrocha alors, laissant Peine en plan, pas réveillé et sans vraiment comprendre ce qui venait de se passer. Il repoussa ses couvertures et saisit ses habits avant de les enfiler, sortant de chez lui quelques minutes plus tard, après avoir eu tout juste le temps de se passer un peu d'eau fraiche sur le visage et un coup de déodorant. Il descendit les marches de son immeuble le plus vite possible avant de courir vers le commissariat, à proximité duquel il habitait, avant d'aller enfiler son uniforme et de prendre une voiture et de filer vers le point donné par le capitaine. Les rues étaient désertes à cette heure-ci, et son chemin fut rapide et dégagé, lui permettant de ne pas mettre les sirènes afin de ne déranger personne. Une petite brise fraiche parcourait la ville, qui commençait cependant déjà à se réchauffer et promettait d'être aussi étouffante que la veille. Il remarqua qu'il allait de plus en plus vers l'aéroport, mais son GPS finit par lui indiquer de tourner. Finalement, l'officier se gara aux canaux de Vespucci, où plusieurs autres voitures attendaient, ainsi qu'une ambulance. Fronçant les sourcils, il passa sous le bandeau "Crime Scene" qui avait été étendu, pour se diriger vers l'assemblée de policiers et médecins en tenue blanche complète. Deux plongeurs étaient en train de retirer leur tenue, quand Boid remarqua l'arrivée de son agent et vint vers lui. Il lui tapa l'épaule et affirma :

"Je vous passe le relai, officier."

Sans écouter les questions de son agent, il prit sa voiture et repartit, probablement pour dormir après avoir passé une nuit blanche au vu de ses cernes et de sa chemise froissée. Peine se dirigea alors vers le quai et ouvrit alors de grands yeux : un homme correspondant à la description des deux cousins était allongé, mort, en train d'être examiné par les médecins. Il était extrêmement pâle, le teint de peau des corps étant restés longtemps dans l'eau. Ses vêtements étaient gorgés d'eau, et il ne portait pas les lunettes de soleil, seule chose dénotant de la description. De plus, son cou était rougis, violacé par endroits, indiquant une probable strangulation. Peine demanda alors :

"Est-ce que quelqu'un pourrait me mettre au courant de ce qu'on sait ?"

L'un des médecins présent se tourna vers lui. Il était grand, avec une courte barbe et des cheveux bruns courts. Son badge du LSMS indiquait le nom "Holloway", et il parla d'une voix douce :

"Il a l'air d'avoir été étranglé, on l'emmène au LSMS pour autopsie. Il y a visiblement une voiture au fond de l'eau, mais voyez avec cette agente, c'est elle qui est arrivée en premier."

Il indiqua une jeune femme avec un béret blanc. Chloé Sterling, une agente efficace et pleine d'énergie, mais qui cette fois semblait bien plus renfermée qu'à son habitude. Elle fit signe à Franck, qui se rendit vers elle, et elle décrivit alors :

"Vers deux heures, un voisin a entendu un gros son d'éclaboussure. Il n'a rien vu par la fenêtre mais est descendu, et a remarqué une forme sous l'eau. Il a appelé le LSMS, qui sont venus, et quand ils ont comprit que c'était une voiture, ils nous ont appelé. Je suis arrivée vers trois heures du matin, j'ai pris la déposition, et les plongeurs se sont mis à fouiller la voiture. Le corps de cet homme y flottait, visiblement sans ceinture attachée, et on a d'abord cru à une noyade. Ils ont remonté le corps vers quatre heures, Boid est arrivé un peu après, et il a reconnu le fait que cet homme ressemblait à votre rapport, donc il vous a appelé. Et on en est là."

Peine nota toutes les informations dans son esprit. Il n'était pas sûr que cet homme était celui de son enquête, et ne l'espérait pas, sans quoi sa seule véritable piste disparaissait. Il réalisa soudainement qu'il allait devoir demander aux deux jeunes cousins, déjà traumatisés, d'identifier le corps, afin de s'assurer qu'il était bien celui qu'ils avaient vu. Fronçant les sourcils, il se rendit alors compte que si cet homme était mort, alors les deux cousins étaient peut-être aussi en danger. Il serait nécessaire de mettre en place un programme de protection des témoins. Mais trop de pensées occupaient son esprit à  la fois, et il resta sur les lieux durant une heure, relevant un maximum d'informations, avant de repartir vers le commissariat. Il ne fallait pas faire les choses dans le désordre : il allait lancer un appel à témoins sur cet homme, permettre son identification, essayer de déterminer si il était bien le tueur du journaliste, et surtout, comme il l'avait initialement prévu pour cette journée, il allait se rendre à Weazel News, le journal dont le défunt était directeur, afin de parler aux journalistes, et découvrir s'ils étaient au courant de ce qui menaçait leur patron. Il alla dans son bureau, et écrivit "mort (assassiné ?)" sur le post-it "hommes à lunettes de soleil". Il rentra ensuite chez lui, se lava et mangea pour de vrai, avant de reprendre son service. Une fois prêt, il prit de nouveau sa voiture, tandis que les rues se remplissaient de personnes allant au travail et que le soleil était maintenant bien monté dans le ciel, pour se rendre au journal. Là, devant le bâtiment imposant, il gara sa voiture et entra. Il constata que le numéro du jour avait sa Une consacrée à la mort de Earl Bailey, faisant visiblement de Kenneth Manbrock le nouveau directeur. Alors qu'il n'était entré que depuis quelques secondes, cet homme, le même que celui dont la Une disait qu'il était nommé directeur, arriva dans sa direction d'un pas rapide. Il était blanc, avec des cheveux courts et blonds, et semblait nerveux comme si à tout instant son interlocuteur allait le frapper.

"Oui bonjour monsieur l'agent, que puis-je faire pour vous ?

- Bonjour monsieur Manbrock, je suis venu poser quelques questions à votre équipe et à vous par rapport à votre ancien directeur.

- Eh bien je serais enchanté d'y répondre, venez dans mon bureau."

Le journaliste le guida dans les couloirs à un petit bureau rempli de cartons et de dossiers mal rangés. Il s'excusa alors :

"Désolé du désordre, j'étais stagiaire quand le patron est mort, et il m'a nommé directeur, je n'ai pas encore eu le temps de déménager mon bureau vers le sien.

- Il vous a fait directeur alors que vous n'étiez que stagiaire ?

- Oui, je suis aussi surpris que vous. Il a simplement écrit ça sur une petite feuille, qu'il a laissé sur son bureau hier midi, et il nous a dit qu'on pourrait regarder si il était mort.

- Et ça vous a surpris ?

- Ah bah beaucoup monsieur, je suis juste stagiaire.

- Non, désolé je me suis mal exprimé. Est-ce que ça vous a surpris qu'il meurt ? Est-ce qu'il avait des raisons de craindre pour sa vie ?

- Ah ça non. Enfin il était nerveux depuis plusieurs jours, mais il nous a jamais dit pourquoi. Moi je pense qu'il avait fait une grosse découverte et qu'on l'a tué pour ça. C'était le meilleur journaliste monsieur Bailey, comme il disait, l'info n'attend pas.

- Très bien... Est-ce qu'il s'était fait des ennemis ?

- Pas que je sache. Enfin, à chaque article qu'il postait, la moitié de la ville disait que c'était de la diffamation, mais personne l'a jamais menacé.

- D'accord. Est-ce que je pourrais parler à d'autres membres de votre équipe ?

- Oui oui pas de problème, je vous appelle Sally."

Quelques minutes plus tard, une jeune femme en tenue blanche et en jupe noire, aux cheveux noirs relativement courts et avec une voix haut-perché entra dans le bureau. Cependant, mis à part des plaintes sur le fait que malgré sa position égale à celle de Kenneth elle n'ait pas été nommée directrice aussi, elle n'ajouta rien d'intéressant à la déclaration de son collègue. Kenneth appela alors une autre journaliste, mais cette dernière ne répondit pas à son téléphone, malgré plusieurs essais. Il se leva alors de sa chaise, exaspéré, il guida Peine à son bureau. Là, il ne prit pas même la peine de toquer et ouvrit directement la porte avant de dire de façon relativement agressive à la jeune femme se trouvant dans la pièce :

"Eh, vous, quand je vous appelle au téléphone, vous avez intérêt à décrocher. Il y a ce monsieur qui voudrait vous poser des questions."

Sans plus de délicatesse, il planta alors l'officier devant le bureau, la porte ouverte, et reparti sans même dire au revoir. Franck haussa les sourcils avant de demander doucement :

"Est-ce que je pourrais rentrer ?

- Oui, pas de problème !"

La jeune femme était habillée d'une élégante robe blanche à fleurs de diverses teintes de pastel, et ses longs cheveux blonds étaient ramenés en une tresse derrière sa tête. Elle ferma l'ordinateur portable sur lequel elle était en train d'écrire et se concentra sur l'agent en face d'elle. Tandis qu'il fermait la porte derrière lui et qu'il s'asseyait, elle demanda :

"Vous venez par rapport au meurtre du patron, c'est bien ça ?

- Exactement. C'est moi qui ait été le premier à arriver sur les lieux après sa découverte, et on m'a chargé de l'enquête. Est-ce que je pourrais savoir votre nom ?

- Sarah Carter, enchantée !

- Officier Peine, enchanté également. Par rapport aux questions, vos collègues m'ont dit que Bailey n'avait pas d'ennemis, qu'il était nerveux ces derniers jours, et qu'il a nommé le stagiaire directeur.

- J'en suis toujours horripilée de cette nomination. Pourquoi un stagiaire, et pas une personne compétente et ayant fait ses preuves ?

- Justement, cette question m'intrigue. Pensez vous que monsieur Manbrock pourrait être impliqué dans le meurtre son son directeur, car ce dernier l'aurait alors fait passer directeur ?

- Non." affirma alors la jeune femme, sur un ton définitif qui étonna Peine. "Je ne pense pas.

- D'accord, et qu'est-ce qui vous fait penser ça ?"

Sarah regarda autour d'elle et vérifia que la porte était bien fermée, avant de se pencher légèrement en avant et d'affirmer en chuchotant presque :

"Il était sur un gros coup.

- Ah oui, et comment vous le savez ?

- Il y a quelques jours on fêtait une bonne journée de ventes, et il a un peu trop bu. Il a laissé échapper le sujet d'un article qui selon lui, allait faire trembler Los Santos.

- Et quel était le sujet de cet article ?"

Sarah observa un instant Peine, indécise. Elle inspira profondément, l'air hésitante, puis demanda :

"J'aimerais que cette information reste entre vous et moi, et que si elle doit sortir, que vous ne citiez pas sa source. Je préfère ne pas courir de risque, au vu de ce qui est arrivé au patron.

- Je vous le promet."

La journaliste regarda l'officier droit dans les yeux, mal à l'aise et excitée à la fois, et affirma en chuchotant complètement :

"Je dis ça car vous avez l'air digne de confiance. Mais je vous préviens, j'ai noté qui vous étiez et je vais programmer un mail pour être envoyé. Si il m'arrive quoi que ce soit, alors je ne pourrais pas déprogrammer le mail, et des dizaines de personnes seront mises au courant que vous êtes le seul à avoir eu cette information. Le prochain article qu'il allait sortir, d'après lui, portait sur la police."

Peine fronça les sourcils, tandis que son ventre se nouait doucement. Au vu des craintes de Carter, cette affaire était sérieuse, dangereuse, et impliquait donc certaines des collègues de l'officier. Il sentit ses mains devenir moites, et demanda en tentant de garder son calme :

"Qu'est-ce qu'il avait découvert ?

- Encore une fois c'est entre nous. Mais d'après ce qu'il m'a dit, la police est une taupinière, infiltrée par les gangs. Et son article allait exposer les infiltrés au grand jour."

Peine serra la mâchoire, comprenant que ces révélations porteraient un coup sévère à la stabilité de la police et à sa relation à la population. Il interrogea Sarah, en chuchotant à son tour, et contenant son agitation :

"Est-ce qu'il vous a dit qui étaient les agents concernés ?"

Carter secoua la tête, se reculant dans son siège.

"Il ne m'a rien dit du tout. Je sais juste le sujet de son article, mais pas de qui il traite. C'est bien pour ça que je suis aussi prudente dans mes informations, et si cet infiltré c'était vous ?

- Je comprend. Vous avez bien fait madame Carter. Savez-vous s'il est possible de retrouver cet article d'une quelconque façon ?

- Le patron conservait tous ses articles sur son ordinateur personnel, qu'il gardait avec lui en permanence. Mais je suppose qu'il ne l'avait plus sur lui lorsque vous l'avez découvert, n'est-ce pas ?"

Franck réfléchit un instant, avant de répondre, frappé par l'intelligence et la déduction de la journaliste :

"Vous avez raison, il n'avait pas de sacoche, pas d'ordinateur, rien.

- Ca confirme ce que je pensais alors, ceux qui ont fait ça en avaient après lui pour cet article, et ils ont dérobé son ordinateur avant de le tuer. Et maintenant, son tueur est libre, et les découvertes de monsieur Bailey ont été emportées dans sa tombe."

Peine soupira. Une nouvelle fois, sa piste s'arrêtait avant de mener à quoi que ce soit de concret. De plus, avec cette idée en tête, il était impossible de parler de ses découvertes aux autres policiers. Son dernier espoir reposait donc sur l'identification du deuxième mort puis sur l'appel à témoins, qui permettrait donc de relancer la piste. Il se leva et tendit la main à la journaliste, qui la serra en souriant et lui dit :

"Bon courage officier Peine. Cette enquête a l'air particulièrement complexe.

- Merci beaucoup, madame Carter. Si vous avez la moindre information supplémentaire, contactez moi. Et faites attention à vous.

- J'y compte bien !"

Il lui sourit en retour avant de quitter le bâtiment. Il allait falloir maintenant attendre le résultat des autopsies, et le plus dur, il allait devoir appeler les Croute, et leur demander d'identifier un mort.

Chapter 6

Summary:

TW : cadavre, strangulation

Chapter Text

L'officier Peine se rendit à l'hôpital, tandis que la chaleur des rues augmentait toujours plus à l'approche du zénith. Il y fut accueilli une nouvelle fois par le docteur Holloway qui l'informa de l'évolution de la situation :

"Les plongeurs ont découvert un révolver dans la boîte à gants de la voiture, on l'a envoyée au commissariat pour son analyse balistique. Je m'attendais à ce que vous y passiez d'abord avant de venir, donc je n'avais pas jugé bon de vous en avertir puisque je pensais que vous l'auriez appris là-bas.

- Pas de problème. Est-ce que vous sauriez quand le corps du mort sera prêt pour son identification par les cousins ?

- D'ici une petite heure. A moins d'une découverte inattendue, je pense que la résultat de l'autopsie est plus ou moins établi.

- Très bien, je vais rester ici et prévenir les Croute alors. Et j'ai quelques appels à passer.

- Pas de problème, vous pouvez rester à l'accueil, sinon je peux vous permettre l'accès à un des bureaux à l'étage.

- Non, ça ira merci."

Le médecin le salua d'un signe de tête puis retourna à l'étage inférieur pour continuer l'autopsie. Peine sortit alors son téléphone et appela Daniel Croute. Après quelques sonneries, le jeune garçon décrocha :

- Allo ?

- Oui, allô monsieur Croute ? C'est l'officier Peine.

- Ah, d'accord, bonjour. Comment vous allez ?

- J'aurais besoin que vous et votre cousin veniez à l'hôpital. Nous pensons avoir retrouvé l'homme avec des lunettes de soleil, mais il est décédé, et malheureusement vous êtes les seuls à pouvoir identifier s'il est bien celui de l'enquête.

- Ah... C'est vraiment obligé ?

- Malheureusement oui, et croyez moi je suis désolé, si on pouvait faire autrement je ne vous demanderait pas ça.

- D'accord, je préviens mon cousin alors. On doit venir maintenant ?

- D'ici une heure, ça vous convient ?

- Oui oui, de toute façon on a pas vraiment le choix.

- Une dernière chose, est-ce que vous pourriez venir avec une des personnes qui vous loge, ou en tout cas qui gère votre hébergement actuellement ? Il faudrait que je lui parle.

- Pourquoi ?

- Rien d'important, ne vous inquiétez pas.

- D'accord. On arrive alors, bis... euh, à tout de suite.

- A tout de suite."

Il raccrocha en soupirant, mécontent que les cousins aient pour la deuxième fois en deux jours à voir un cadavre. Cependant, même s'il avait préféré ne pas encore le dire lors de leur conversation au téléphone, quelque chose de pire pourrait potentiellement arriver aux cousins. Si la seule piste du meurtre avait été assassinée, les témoins pouvaient être en danger, et rester en ville pourrait être dangereux. Il était nécessaire de mettre en action un programme de protection des témoins, et de les faire habiter en bordure de la ville, au moins pour un temps. Les détails suivants seraient à voir plus tard, mais la première chose à faire était d'en informer le capitaine. Au vu de sa présence sur la scène de crime, cependant, il devait dormir, et le lieutenant Kuck était probablement le plus haut gradé en service actuellement. Peine sélectionna le numéro de son supérieur et l'appela. Ce dernier décrocha alors et répondit de son habituelle voix étrangement aigüe :

- Oui officier Peine ?

- Mon lieutenant, je vous demande l'autorisation de mettre en place un programme de protection des témoins envers les deux cousins Croute et de les reloger temporairement en bordure de la ville, avec une surveillance permanente.

- Ah oui, mais pourquoi donc ?

- Ce n'est pas encore confirmé, mais on a peut-être retrouvé le tueur potentiel de Bailey, lui-même visiblement assassiné.

- Très bien, je vois ça avec le capitaine quand il arrive. C'est une bonne initiative officier, vous savez où les reloger ?

- Pas encore mon lieutenant, j'y réfléchis.

- D'accord, appelez moi quand vous aurez trouvé si tout ça se confirme.

- Bien reçu.

- Allez, au revoir officier."

Le lieutenant raccrocha, laissant Peine silencieux dans le hall d'entrée de l'hôpital, dont les portes automatiques laissaient passer un filet d'air chaud difficilement combattu par la climatisation du lieu. Alors qu'il allait s'assoir, le docteur Holloway sortit de l'ascenseur et arriva vers Peine avec un sachet plastique transparent dans lequel se trouvait une carte d'identité abimée.

"On vient de la trouver dans une poche intérieure de son manteau. Cet homme s'appelle Yann Allée, est-ce que ça vous dit quelque chose ?"

L'officier resta songeur un instant. Ce nom lui semblait effectivement évocateur, et pas associé à de bonnes choses, mais il était cependant incapable de retrouver quoi. Il hocha la tête, et le docteur affirma :

"On va également envoyer ça au commissariat. L'autopsie est presque terminée, il ne s'agit plus que de quelques détails maintenant. Le bilan a déjà été établi, je vous laisse me suivre, le docteur Maison vous expliquera tout ça."

Il se détourna et alla vers l'ascenseur, suivi par le policier. Le médecin appuya sur le bouton correspondant à l'étage "urgences". Une fois descendus, il poussa une porte et guida Peine dans les couloirs du LSMS avant de le mener à la morgue. Là, un vieil homme vouté, portant une tenue intégrale de chirurgie, des lunettes et une moustache blanche bien fournie, était en train d'étendre un fin drap blanc sur le mort. En voyant l'officier, il lui fit un signe de tête, puis s'approcha de lui tout en retirant ses gants :

"Bonjour cher ami, vous êtes chargé de l'enquête c'est bien ça ?

- Possiblement, j'en aurais la confirmation après l'identification du mort.

- Très bien. Sans surprise au vu de son état, cet homme, paix à son âme, a été étranglé et en est mort. La noyade n'a eu aucun effet, la victime étant déjà décédée depuis plusieurs heures lorsqu'elle a été mise à l'eau.

- Plusieurs heures ?

- Oui, une bonne dizaine je pense, mais les résultats ont peut-être été en partie faussés par son passage dans l'eau qui a pu en partie accélérer les premiers stades de décomposition. Sans trop m'avancer, je dirais qu'il était mort depuis six heures, minimum.

- Je note tout ça, merci docteur.

- Mais de rien cher ami. Deux morts en deux jours, que Dieu nous vienne en aide. Et ce pauvre journaliste, découvert par des enfants...

- Ce sont d'ailleurs eux qui doivent venir pour l'identification.

- Seigneur Dieu, vous m'en voyez navré."

Le docteur Holloway reçut alors une alerte sur sa radio, et prévint :

"Il y a des gens à l'accueil, c'est peut-être les cousins ? Officier, vous venez avec moi ?

- J'arrive docteur."

Ils firent alors le chemin inverse, tandis que le docteur maison allait se changer. Dans le hall, les cousins étaient assis, visiblement tendus, tandis que trois Vagos les surveillaient. L'un d'entre eux était Miguel, bras droit de Lenny, et le second était grand et plutôt pâle, celui que les cousins avaient appelé "tonton Montoya". Le dernier n'était autre que Lenny Johnson, chef du gang, portant toujours son costume marron malgré la chaleur étouffante de l'extérieur. Miguel était visiblement en pleine discussion avec un homme étrangement habillé : la trentaine, blanc avec des cheveux bruns foncés, il portait une chemise blanche et une veste de costume grise tachetée de blanc, mais ne portait pas de pantalon, laissant voir à chacun son caleçon noir à cœurs rouges. Peine reconnut là Fabien Torez, l'un des gérants du domaine viticole Montazac-Torez, qui se trouvait sur les hauteurs de la ville. Une idée germa dans son esprit, tandis qu'il approchait le petit groupe, qu'il garda dans un coin de son esprit, avant de déclarer :

"Bonjour messieurs, je vais demander qu'un seul d'entre vous n'accompagne les cousins en bas s'il vous plaît.

- Inigo ?" demanda Lenny, se tournant vers le plus grand des trois gangsters "Tu les accompagnes ?

- Sí Lenny.

- Très bien." conclut Franck, avant de regarder Lenny "Est-ce que je pourrais vous parler après l'identification ? Enfin, si la personne identifiée se confirme être celle qu'ils ont vu ?

- Oui, pas de soucis.

- Et est-ce que monsieur Torez pourrait rester également ?

- Moi ?" s'étonna le vigneron, avant de demander avec un accent du sud "J'ai fait quelque chose de mal monsieur l'agent de police ?

- Non, rien du tout monsieur, j'aurais peut-être juste un service à vous demander. Bien, les garçons, vous êtes prêts ?"

Les Croute relevèrent la tête, peu rassurés, et Miguel leur fit un petit sourire d'encouragement. Ils se levèrent alors et suivirent l'officier, accompagnés par Inigo Montoya. Holloway les guida à nouveau dans l'hôpital jusqu'à la morgue, dans laquelle Montoya ne fut pas autorisé à entrer, et patienta dehors avec le docteur. A l'intérieur, Peine s'assura que les Croute étaient prêts, tandis que Maison observait la scène depuis un coin de la pièce, appuyé sur une cane, et maintenant dans la même tenue que Holloway. "Est-ce que c'est bon ?" interrogea l'officier, tenant entre deux doigts un coin du drap blanc qui recouvrait la tête du cadavre. Les cousins hochèrent la tête, et il releva alors le tissu pour révéler le mort. Les cousins eurent un mouvement de recul avant de se forcer à regarder. Antoine hocha la tête, les larmes aux yeux, et Daniel affirma, la gorge nouée et la voix tremblante et faible : "Oui, c'était lui.". Peine remit immédiatement le drap sur le visage, et fit sortir les deux jeunes garçons de la morgue. Dehors, ils se blottirent contre Montoya, qui les entoura de ses bras et caressa un peu les cheveux de Antoine. Il regarda Peine avec des yeux perçants avant de demander d'un ton tout sauf bienveillant :

"J'espère que c'était utile.

- Oui." répondit l'officier, qui s'en voulait de cette situation malgré l'absence d'alternatives "Ils ont été très courageux, et ils vont aider l'enquête. On peut remonter maintenant."

Ils retournèrent à l'accueil, l'officier restant en permanence sous le regard colérique de Montoya. Tandis que les cousins remplissaient quelques attestations nécessaires pour la procédure, Peine se tourna vers Lenny et Torez et déclara sans trop hausser la voix :

"Les petits ont reconnu le mort. Cela signifie qu'ils sont peut-être en danger, donc je vais vous demander quelque chose qui ne vas probablement pas vous plaire. J'aimerais mettre en place le programme de protection des témoins, au moins pour quelques temps, et reloger les deux cousins en dehors de la ville, le temps que la situation se tasse et qu'ils soient hors de danger.

- Ils sont déjà bien protégés à Jamestown." rétorqua Lenny. "On a aucune raison de les envoyer autre part.

- Ils restent en ville, dans une zone potentiellement dangereuse. Ils seraient mieux protégés hors de la ville, avec une surveillance régulière, et je le répète mais : temporairement. Et c'est là que, justement, monsieur Torez entre en jeu.

- Vous voulez que les minots viennent au domaine." devina Torez "C'est ça que vous avez derrière la tête, non ?

- Exactement. On enverrait les cousins au domaine, sur les hauteurs, au moins quelques semaines. Il y aurait une patrouille régulière de la police, et, si vous le souhaitez, j'interviendrais personnellement pour que les patrouilles ne prennent pas en compte les Vagos. Mais il faut les éloigner de la ville, et puis ça leur fera du bien de ne pas penser à tout ça.

- Il faut que je voie avec Dona, moi je n'ai rien contre." approuva le vigneron.

Lenny Johnson resta silencieux, en pleine réflexion. Il regarda les différentes personnes qui l'entouraient, et considéra les différentes options. Finalement, avec un soupir, il finit par accepter :

"Bon d'accord. A une condition : on doit pouvoir leur rendre visite quand on veut. Et je veux vous entendre promettre encore une fois que le LSPD ne fera rien pour intervenir si elle voit les Vagos dans la zone.

- Je vous le promet. Mes supérieurs ont été prévenus et réfléchissent à la possibilité de ce programme, donc tout n'est pas confirmé, mais je vous tiendrais immédiatement au courant si les choses se précisent."

Le chef de gang accepta et tendit sa main à Peine, qui la serra, puis se tourna vers Torez :

"J'aurais simplement besoin de votre numéro monsieur Torez.

- Pas de soucis, mais vous pouvez m'appeler Fab, F-A-B.

- Entendu Fab. Si tout se confirme, je compte sur vous pour prendre soin d'eux."

Chapter 7

Summary:

TW : Evocation de violence

Chapter Text

Peine retourna au commissariat en voiture, constatant avec un certain soulagement que des nuages commençaient à s'amasser à l'horizon et que la chaleur de ces derniers jours allait peut-être connaître une pause. Après avoir garé sa voiture, il entra dans le bâtiment, où il fut immédiatement abordé par l'agent Némard, reconnaissable à ses cheveux courts roses qui lui avaient plusieurs fois valu des remontrances du capitaine, qui lui tendit un papier :

"Tenez, on m'a chargé de vous passer le résultat de l'analyse balistique pour votre enquête sur le journaliste.

- Merci. Et sinon, vous connaissez un Yann Allée ?

- Moi non, mais le nom me dit quelque chose.

- Il aurait potentiellement des liens avec un gang.

- Essayez de voir avec ceux qui sont dans l'open space et qui sont chargés de l'enquête sur le braquage de la Pacific par les Families. Ils auront peut-être des infos sur lui.

- Ok merci agent Némard."

Tout en se dirigeant vers la salle suggérée, Franck commença sa lecture du rapport. Il se contenta de lire en diagonale jusqu'à la conclusion qui l'intéressait : l'arme trouvée dans la voiture sous l'eau était bien celle d'où avait été tirée la balle retrouvée dans le crâne de Earl Bailey. Yann Allée était donc bien celui qui avait tiré. Après quelques instants, il arriva devant la pièce et rangea le papier dans sa poche avant d'entrer. Là, les agents Panis, Sterling, Monier et Rixxy étaient en poste, en train de faire des recherches sur les ordinateurs, et de lire des documents. Quelques bureaux étaient libres, d'autres agents travaillant sur l'affaire à d'autres horaires. Franck se racla la gorge afin d'être remarqué. Quand les regards furent tournés vers lui, il demanda :

"J'aurais besoin d'avoir des infos sur un certain Yann Allée, quelqu'un connaît ?"

Tous hochèrent la tête, et Panis ouvrit des fichiers sur son ordinateur afin de les montrer à Franck.

"Yann Allée, une petite frappe en lien avec les Families. Il fait pas partie officiellement du gang, mais c'est tout comme. C'est le genre de type qu'ils envoyent faire le sale boulot.

- Il se tient tranquille ces derniers temps" renchérit Chloé Sterling "Sûrement parce que les Families ont d'autres affaires plus importantes à traiter que lui. En temps normal son nom revient souvent dans tout ce qui est bagarres de rue, menaces, ce genre de chose.

- D'accord, merci de votre aide."

Il ressortit de la salle et se rendit dans le bureau qui lui avait été attribué. Il nota "Yann Allée" sur un post-it, et ajouta entre parenthèse "(homme à lunettes de soleil)". Une fois fait, il retira l'ancien post-it sans nom et le remplaça par le nouveau. Il ajouta un petit papier avec marqué "a tué" entre Yann et Earl. Puis il ajouta un post-it où il marqua simplement "tueur", qu'il relia à Yann Allée. Puis il nota "Families ?" sur un autre post-it, qu'il relia à Yann et à "tueur". L'enquête avançait. En prenant en compte tous les éléments connu jusqu'à lors : Earl Bailey allait sortir un article dénonçant l'infiltration des gangs dans la police, mais s'était fait tuer par un homme de main des Families, lui-même retrouvé mort le lendemain. L'important, désormais, était de déterminer qui était le tueur de ce Yann, et s'il était en lien avec les Families, ou au contraire, avec un gang rival. Il alluma alors sa radio et demanda :

"Est-ce que le capitaine est disponible actuellement ?

- Oui, je viens de prendre mon service, qu'est-ce qui se passe ?

- Est-ce que je pourrais vous parler ?

- Oui, venez dans mon bureau. Dépêchez vous, j'ai des choses à faire."

Peine sortit du bureau et se rendit dans celui du capitaine. Ce dernier signait divers papiers et salua l'officier à son entrée, avant de demander le sujet de sa venue :

- En réalité mon capitaine, j'aurais deux choses à vous demander.

- Allez-y ?

- J'aurais besoin d'envoyer un appel à témoins concernant Yann Allée, l'homme retrouvé mort tôt ce matin, afin de savoir où il a été vu en vie pour la dernière fois.

- Très bien, je fais ça dès que possible. Et sinon ?

- Comme les cousins ont...

- C'est votre truc de protection des témoins là, dont Kuck m'a parlé ?

- Oui mon capitaine.

- Ok, dites m'en plus ?

- Comme l'homme que les cousins ont vu était Allée, et qu'il fait grossièrement partie des Families, et que les cousins sont des Vagos, et qu'en plus Allée a été retrouvé mort, j'ai pensé qu'il était peut-être nécessaire de mettre en place un programme de protection des témoins pour eux. J'ai vu avec monsieur Torez, du vignoble, et il était disposé à les accueillir temporairement.

- D'accord. Et les Vagos ?

- J'ai parlé avec Lenny Johnson, il était d'accord à condition de pouvoir superviser la protection et d'y participer.

- Bon, ça me semble pas trop déconnant, tant qu'ils nous empêchent pas de faire notre taf... Ok, je le rappelle dans ce cas, on va mettre ça en place. Normalement au rythme habituel des procédures, ça devrait prendre quelques heures, et les cousins seront relogés vers 16 ou 17 heures. Je vous laisse vous charger de les emmener.

- Bien mon capitaine.

- Autre chose ?

 - Non mon capitaine.

- Ok, bon, dans ce cas vous pouvez y aller."

Franck le salua d'un signe de tête et se retourna. Alors qu'il allait passer la porte, le capitaine l'appela, téléphone déjà en main :

"Peine ?

- Oui mon capitaine ?

- Vous avez bien fait, bonne initiative.

- Merci mon capitaine, je ne fais que mon travail."

L'agent passa la porte et retourna dans son bureau, satisfait de savoir les cousins bientôt en lieu sûr. Une vingtaine de minutes passèrent, et Boid l'appela au téléphone :

"C'est bon, ils sont d'accord au domaine. RDV à 18 heures là-bas, et une heure avant ici. Vous pouvez contacter les Croute et ceux qui s'occupent d'eux."

Peine raccrocha après l'avoir remercié et sélectionna Lenny Johnson dans ses contacts :

"Allô, Peine ?

- Le capitaine a confirmé pour le programme de protection des témoins. Les cousins ont rendez-vous au commissariat à 17 heures, et on les emmène ensuite au domaine pour 18 heures. C'est moi qui me charge personnellement du trajet.

- Ok. Et pour les Vagos ?

- Il n'a pas protesté quand je lui ai dit vos conditions, donc il est sûrement d'accord.

- Très bien, on se voit tout-à-l 'heure dans ce cas.

 

A 17 heures pile, une voiture jaune se gara devant le commissariat, sous le regard de Peine, qui patientait sur le petit espace devant l'entrée. Le ciel était de plus en plus chargé, et si la chaleur diminuait, l'air n'était pas plus respirable qu'auparavant, la fournaise étant remplacée par un temps lourd et sans brise. Le soleil, désormais caché derrière les nuages gris, et l'horizon noircissait à vue d'œil. De la voiture sortirent Miguel, occupé à ajuster sa veste jaune, et Kim, dont les cheveux rouges étaient attachés en une queue de cheval. Après une brève inspection des lieux, ils firent signe aux Croute de sortir de la voiture. Les deux jeunes garçons regardaient partout autour d'eux, visiblement chamboulés d'encore devoir changer de lieu d'habitation si peu de temps après avoir enfin trouvé un logement. Miguel alla derrière la voiture et sortit deux valises, une jaune et une violette, dont il fit coulisser la poignée et qu'il fit rouler jusqu'au trottoir. Peine descendit à leur rencontre et serra la main des deux Vagos avant de se tourner vers les cousins :

"Ne vous inquiétez pas, ce n'est pas pour longtemps. Lorsqu'on sera certain que vous êtes en sécurité en ville, vous pourrez revenir sans problème."

Il remarqua que Daniel avait les joues légèrement humides et retenait un léger tremblement du menton. Antoine, quant à lui, avait les yeux quelque peu rougis mais ne pleurait pas, ou du moins avait-il arrêté quelques minutes auparavant. Le policier leur fit signe de le suivre à la voiture. Daniel prit la valise violette et Antoine la jaune, et ils marchèrent à sa suite, escortés par Miguel et Kim. Une fois arrivés devant l'interceptor que Peine avait au préalable sorti et nettoyé, les deux Vagos restèrent immobiles. Le policier ouvrit le coffre et se chargea d'y déposer les valises avant de le refermer. Il se tourna ensuite vers Miguel, qui affirma alors :

"On va vous suivre le temps du trajet. Une fois qu'on sera certains qu'ils sont bien arrivés, on repartira.

- Entendu. Evitez de rester trop proche de nous, ça pourrait paraître suspect que vous suiviez une voiture de police."

Il entra alors dans sa voiture, et patienta. Dehors, les deux garçons enlaçaient Miguel et Kim, tandis qu'une légère brise tiède se levait. Kim les rassura :

"Vous en faites pas, le domaine est un endroit sûr. Et on viendra vous voir.

- Bah oui" demanda Antoine "Mais quand est-ce qu'on pourra revenir ?

- Dans quelques semaines" répondit Miguel. "Si la police fait bien son travail.

- Mais on devait aller faire du jet-ski" déplora Daniel, la voix légèrement cassée. "Et aussi, Matéo avait promis qu'il allait nous apprendre à faire du surf.

- On fera tout ça" dit Kim, avec un sourire rassurant "Mais l'important pour le moment, c'est de vous protéger, d'accord ?"

Les Croute hochèrent la tête et baissèrent les yeux, avant de rentrer dans la voiture de police et de fermer les portes. Kim et Miguel retournèrent à leur voiture, prêts à les suivre de loin. Tandis que Peine tournait la clef dans le contact, le grondement du moteur se confondit avec celui du tonnerre qui naissait à quelques kilomètres de là.

Chapter Text

Malgré la tendance habituelle au bavardage des deux cousins, le trajet se fit en silence. Personne ne dit un mot, et seul le ronronnement du moteur se fit entendre. Peu de temps avant d'arriver au domaine viticole, tandis que la voiture roulait sur la route entourée de vignes parmi les collines, de petites gouttes d'eau commencèrent à tomber sur les vitres, tandis que le ciel noircissait toujours plus et que le tonnerre devenait de plus en plus audible. Peine vit Antoine se presser contre la vitre et montrer quelque chose à son cousin, et jeta un coup d'œil à son tour. Sur le bord de la route se tenaient quelques sangliers, fouillant entre les racines des arbres. Heureusement, aucune des bêtes ne semblait vouloir se risquer sur la route, et le policier put continuer de conduire sereinement. Finalement, ils arrivèrent en vue de l'imposante maison en pierres blanches et roses, pouvant presque être qualifiée de manoir. Juste à côté de l'entrée trônait un imposant panneau "Montazac & Torez", qui informait tout nouvel arrivant de l'identité des propriétaires des lieux, bien qu'une personne ne connaissant pas ne serait-ce que le nom des deux vignerons était presque impossible à trouver à Los Santos. Le véhicule ralentit tandis que la grille de l'entrée coulissait automatiquement pour leur permettre d'entrer. L'officier se gara sur le parking des visiteurs, juste en face de la porte d'entrée, tandis que la voiture des Vagos alla se garer à côté du garage où étaient stockés les camions du domaine. Peine alluma la sirène une fraction de seconde, afin d'informer de leur arrivée, et ils sortirent de la voiture sous une légère bruine rafraichissante qui leur faisait autant de bien après ces jours de canicules qu'aux plantes desséchées tout autour d'eux. Antoine et Daniel sortirent alors leurs valises du coffre, tout en observant les lieux avec curiosité et un certain enthousiasme, cependant tempéré par leur tristesse de ne plus pouvoir aller en ville durant plusieurs semaines. Fabien Torez sortit alors du bâtiment principal en souriant et leur souhaita d'un ton jovial :

"Bienvenue au domaine les minots ! Moi c'est Fabien Torez, mais vous pouvez m'appeler Fab, F-A-B. Dona arrive, je vais vous faire visiter un peu les lieux en attendant. Eh, Miguel, Kim, comment ça vas gros ?

- Moi ça va Fab, et toi ? T'as tout préparé pour les Croute ?

- Ouais, tout est nickel gros, j'ai demandé à Roy de préparer une chambre pour eux. Dites les minots, j'espère que ça vous dérange pas de dormir dans le même lit ? On avait plus que ça.

- Bah non bah non !" l'informa Antoine "On a l'habitude, on dort souvent ensemble.

- En plus" compléta Daniel" quand il fait froid dans la rue, on a l'habitude de se serrer l'un contre l'autre pour dormir.

- Comment ça dans la rue les p'tiots ?

- Ben..." admit Antoine, légèrement embarrassé "En fait souvent on a pas vraiment d'endroit où dormir, du coup on dort dans la rue.

- Mais on se plaint pas !" affirma fièrement Daniel, en bombant le torse "On a la tête dure, et puis on est débrouillards.

- Bah oui bah oui !

- Miguel, Kim ?" demanda Fab, interloqué "Je croyais que c'était vous qui les logiez ?

- Tu sais Fab" intervint Kim "Ca fait à peine six mois qu'on les loge, et les gamins sont Vagos depuis quoi, deux mois ? Quand y a un Vagos qu'est pas là, il donne sa chambre, et quand tout le monde est là, on tire à la courte paille ! Mais ils ont toujours un endroit où dormir.

- Sauf chez Hayley" précisa Miguel  "Mais ça c'est moi qui veut pas, elle me fait flipper."

Le Vagos frissonna à la simple évocation de la jeune femme couverte de tatouages, et Peine constata que les deux jeunes garçons semblaient comprendre sa sensation. Il était vrai que les quelques fois où il l'avait vue en cellule, cette Hayley lui avait lui-même fait peur, et qu'il faisait toujours de son mieux pour ne pas avoir à la croiser. Torez ne sembla pas vraiment relever la remarque, et répondit simplement :

"Eh bah ici ça sera toujours la même chambre. Alors, lequel est Anthony, et lequel est Damien ?

- Moi c'est Antoine, Antoine Croute !" se présenta le concerné "Chuis un peu les muscles.

- Et moi c'est Daniel, on est cousins.

- Et c'est lui l'cerveau !

- Voilà, c'est moi le cerveau.

- D'accord..." répondit Fab, quelque peu désorienté "Mais du coup, c'est qui Anthony et Damien ?

- Ben c'est personne" rétorqua Antoine, incertain "Enfin je crois pas, si ?

- Non non" le rassura Miguel "Fab, je crois que tu t'es trompé. Y a pas de Anthony et Damien, c'est Antoine et Daniel.

- T'y es sûr gros ?

- Eh mais Fab" rétorqua Kim" on le saurait si on devait ramener des Vagos qui s'appellent Anthony et Damien !

- Nan mais après je sais pas gros, ça se trouve c'est des nouveaux.

- Les seuls Vagos qu'on peut voir comme nouveaux" répondit Miguel "C'est Antoine et Daniel.

- Hein ? Comprempa."

Les Vagos le regardèrent un instant, tentant de juger si leur ami se fichait d'eux ou était réellement perdu. Comprenant que sa confusion était sincère, et d'autant plus incompréhensible qu'elle n'était basée sur rien, Miguel lâcha simplement "J'en peux plus." et Kim se massa les tempes, tandis que Peine intervenait :

"Vous aviez proposé de faire visiter les lieux aux Croute, il me semble ?

- Oui !" répondit vivement Fab, content de trouver un prétexte pour changer de sujet "Je les emmène ?

- Allez-y, je vais vous laisser moi. J'ai un collègue qui devrait pas tarder à arriver pour faire sa patrouille."

L'officier salua alors les personnes présentes, sourit aux deux jeunes garçons, et retourna dans sa voiture avant de quitter les lieux. La pluie s'était quelque peu intensifiée, et Fab en profita pour les amener à l'intérieur. Les cousins tirèrent leur valise à sa suite, et les deux Vagos fermèrent la marche. La porte d'entrée menait sur une salle à manger où trônait une imposante table en bois massif. Derrière se trouvait la cuisine, dont les équipements devaient probablement valoir une fortune. Sur leur gauche, un large et court couloir menait à un beau salon aux meubles démodés mais visiblement hors de prix. De nombreux tableaux étaient accrochés aux murs, et faisaient instantanément comprendre que les propriétaires étaient très riches, à défaut d'avoir bon goût. Les lieux baignaient dans une atmosphère chaleureuse aux tons marrons, rouges et oranges rappelant la robe du vin qui y était produit. A droite se trouvait un couloir semblable, menant cette fois à plusieurs portes, dont une donnant sur un escalier montant à l'étage. C'est dans cette direction que Fab guida les deux adolescents, qui reçurent l'aide des Vagos pour monter leurs valises. En haut, le vigneron ouvrit la première porte à leur gauche dans le couloir, et leur montra leur chambre, une pièce modeste mais confortable, équipée d'une grande étagère, d'un lit double aux draps rouges, et d'un tas de babioles démodées dans les mêmes couleurs que le reste de la décoration. Alors que Fab leur montrait où ranger leurs affaires, il remarqua quelque chose par la fenêtre et affirma alors :

"Y a Dona qui est là, vous rangerez plus tard les minots ! On va faire les présentations."

Laissant leurs valises sur le lit, ils redescendirent et se rendirent sous le porche protégeant la porte d'entrée de la pluie qui ne faisait que gagner en intensité. Une limousine bordeaux équipée de néons blancs était en train de se garer grossièrement, laissant présager que le second propriétaire des lieux était aussi inélégant que son collègue. Une fois la voiture éteinte, un homme en sortit, dont seul le chapeau haut de forme rouge dépassait de derrière le véhicule. Le chapeau se mit en mouvement, et son porteur finit par apparaître, visiblement en pleine conversation téléphonique. Donatien de Montazac, connu de tous dans la ville, portait une longue veste rouge sur une chemise jaune. Si cet ensemble était en lui-même assez laid, il devenait presque banal en contraste avec le pantalon du vigneron, une sorte de bas de pyjama bleu aux motifs de Noël blancs et rouges et surtout ses chaussettes blanches que l'on devinait parfaitement dans des claquettes noires. L'homme portait également des lunettes de soleil aux verres jaunes, ainsi qu'une moustache parfaitement taillée, et remontant à ses extrémités. Le vigneron raccrocha rapidement le téléphone, et approcha du porche d'une démarche assurée, avant de jauger les cousins et de dire d'un ton jovial et charismatique :

"Bien le bonjour, je suis Donatien de Montazac, et vous êtes les deux frère qu'on va loger pendant quelques temps, c'est bien ça ?

- On est cousins m'sieur" l'informa Daniel "Moi c'est Daniel et lui c'est Antoine.

- Oui moi c'est Antoine m'sieur !

- Enchanté de vous rencontrer, Fab m'a rapidement averti de votre arrivée et je n'ai rien trouvé à y redire à la condition que vous aidiez pour la récolte, vous n'avez rien contre j'espère ?

- Bah non bah non !" répondit Antoine avec un certain enthousiasme "De toute façon on peut pas aller en ville du coup on va s'ennuyer si on fait rien !

- Fort bien ! Ca n'est que juste rétribution n'est-ce pas ? Après tout, c'n'est pas vous qui payez le loyer !

- Bah oui, vous avez bien raison m'sieur !" approuva Antoine, trouvant visiblement le vigneron particulièrement appréciable. "On va bien travailler, vous pouvez avoir confiance en nous !

- Tout comme mon cousin a dit" promit Daniel "On va récolter plein de raisin !

- Très bien. Si vous faites du bon travail, on vous versera même un peu d'argent de poche avec Fab, qu'est-ce que vous en dites ?

- Merci beaucoup !" s'enjoua Daniel "Vous êtes un grand homme.

- Bah oui bah oui ! Moi j'me réjouis ! C'est comme Daniel il a dit, vous êtes un grand homme !

- Allons allons, je n'suis qu'un humble viticulteur, et puis je n'serais rien sans mon p'tit Fabien !

- Ok mais bon" rétorqua Antoine "Vous êtes un grand homme quand même.

- Ah bah c'est vous qui le dites !" sourit Montazac, avant de se tourner vers Fab "Je les aime bien les p'tits là ! Bien, on va rentrer alors.

- On va vous laisser" les informa Kim "Vos petites présentations sont très mignonnes mais on a des affaires en ville. On surveillera le domaine. Et si il leur arrive quelque chose..."

Miguel s'approcha de Montazac, et les cousins purent distinguer les mots "Je te tue" prononcés par le gangster, avant qu'il ne retourne vers la voiture en compagnie de sa femme. La voiture jaune démarra et quitta les lieux. L'enthousiasme qui avait gagné les Croute retomba soudainement, tandis qu'ils regardaient la seule famille qu'ils avaient s'éloigner. Au même instant, le tonnerre éclata, et un éclair illumina le domaine, tandis que la pluie redoublait en intensité. Montazac affirma :

"Bon, eh bien c'est le moment de rentrer je crois !"

Il se rendit alors dans la maison. Fab regarda un instant les Croute, qui restaient immobiles, et demanda :

"Vous rentrez les minots ?

- Euh..." hésita un instant Antoine" Je sais pas...

- On va peut-être rester quelques minutes dehors" compléta Daniel, sur un ton mélancolique. "Ca vous dérange pas ?

- Non, du tout. Essuyez bien vos chaussures en rentrant."

Le vigneron passa à son tour la porte d'entrée, laissant les deux cousins dehors. Antoine demanda, incertain :

"T'en penses quoi d'ici, Daniel ?

- Ben... Donatien il a l'air gentil, et puis Fab aussi.

- Oui c'est vrai. Mais toi aussi tu t'sens comme moi ?

- Un peu vide dans le cœur ?

- Oui.

- Moi aussi je me sens un peu vide, oui. Mais peut-être que c'est juste qu'il faut qu'on s'habitue.

- Oui, c'est vrai. Et puis, c'est pas pour longtemps."

Les deux jeunes garçons continuèrent de regarder la pluie tomber, tandis que le grondement du tonnerre continuait et que l'asphalte était progressivement inondée, créant de petits ruisseaux qui s'écoulaient vers les fossés. Daniel hésita un instant, puis demanda :

"Toi aussi tu... Enfin...

- Quoi ?

- Tu continues de voir les morts quand tu fermes les yeux ?"

Antoine ne répondit pas durant quelques secondes, la gorge serrée. Il baissa légèrement les yeux et répondit :

"Oui. J'arrête pas d'les voir dès que j'ai rien pour m'distraire.

- J'ai pas bien dormi cette nuit.

- Oui, j't'ai entendu bouger toute la nuit.

- Toi aussi tu étais réveillé ?

- Oui. J'arrive pas à les faire partir de ma tête.

- Peut-être que la psych...psychio...psy...peut-être que Vanessa va nous aider ?

- J'sais pas... C'est son métier non ?

- Oui, c'est vrai. J'espère que ça ira vite."

Antoine soupira, puis prit la main de son cousin avant de dire gentiment :

"On va faire ça ensemble, t'es fort mon Daniel.

- Toi aussi Antoine."

Chapter 9

Summary:

TW : alcool, mention de mort

Chapter Text

Le lendemain, l'orage était passé, mais la pluie continuait, inondant la chaussée et battant contre les vitres. Lorsque Peine arriva trempé au commissariat pour commencer son service, un jeune homme habillé en blanc et aux cheveux teints en rose vif patientait, assis sur l'un des sièges en plastique à l'accueil. En voyant Franck arriver, il se leva et demanda d'un ton jovial mais sérieux :

"Bonjour, vous êtes l'officier Peine ?

- C'est bien moi, est-ce que je peux vous être utile ?

- J'ai vu l'avis de recherche de témoins et je suis venu, on m'a dit de patienter pour l'officier Peine qui se chargeait de l'enquête. J'm'appelle Kiddy West au fait.

- Très bien monsieur West, veuillez me suivre."

Il guida alors le jeune homme dans les méandres du bâtiment, tentant de ne pas penser à ses vêtements dégoulinants d'eau, jusqu'à la salle d'interrogation, où il s'assit en face de lui. Il demanda alors :

"Bien, alors, quand avez vous vu monsieur Allée pour la dernière fois ?

- C'était y a deux jours, en fin de matinée.

- Le jour de la mort de Earl Bailey ?

- Je crois bien que c'est ça oui.

- Très bien, donc vous me dites l'avoir vu quelques heures avant le meurtre. Où l'avez-vous vu ?

- Au club Unicorn. Vous voyez où c'est ?

- Oui je vois bien, on m'y a déjà envoyé pour arrêter des batailles d'ivrognes. Qu'est-ce qu'il y faisait ?

- Il buvait des verres, il discutait, rien de particulier. Je ne lui parle jamais vraiment, mais comme on est tous les deux des habitués du club, j'ai fini par un peu le connaître.

- Est-ce qu'il vous a semblé nerveux ce jour là ? Agité ?

- Non, enfin pas plus que d'habitude. C'était un gars assez agité, avec l'insulte facile, il avait toujours l'air d'être fourré dans des problèmes pas possibles. Et pas un mec discret, il était du genre à annoncer quand il travaillait sur un braquage.

- Vous savez à quelle heure il est parti ?

- Non. Enfin, je suis parti vers midi alors que lui est resté, donc je sais juste qu'il n'est pas parti avant midi.

- Vous dites qu'il se vantait souvent, est-ce que ce jour là il se vantait aussi ?

- C'est possible. J'avoue que j'ai pas vraiment écouté ce qu'il racontait.

- Est-ce que d'autres personnes pourraient avoir entendu ?

- Oh oui, y a des chances. Y avait pas mal de monde à cette heure-ci, dont les Pichon.

- Pourtant vous semblez être la seule personne à avoir répondu à l'appel à témoin.

- Vous connaissez le Unicorn. C'est pas le genre d'endroit fréquenté par des gens qui aiment la police.

- Je vois. Est-ce que Yann Allée avait des ennemis ? 

- Je le connaissais pas assez pour savoir, mais vu le personnage, ça serait étonnant qu'il en ait pas.

- D'accord... Très bien, merci de votre aide, je vais vous raccompagner vers la sortie. Veuillez rester disponible et ne pas quitter la ville dans les prochains jours, dans le cas où nous aurions besoin de vous interroger à nouveau.

- Entendu m'sieur !"

 

Une fois Kiddy raccompagné dehors, le jeune homme sortit un parapluie rouge et courut vers sa voiture sous le déluge. Peine prévint à la radio :

"Officier Peine, je vais enquêter au Unicorn."

Il prit alors une interceptor et conduisit prudemment sur la route mouillée, en direction du bar. Lorsqu'il arriva, quelques voitures étaient déjà stationnées devant. Le quartier semblait miteux, et la devanture du bar contrastait à peine avec cette constatation. Ses néons roses illuminaient quelques mètres, et ceux entourant la tête de licorne malfonctionnaient, clignotant aléatoirement. Sortant de sa voiture, l'officier se dépêcha afin d'éviter d'être à nouveau trempé, et entra dans l'établissement. Il fut accueilli par une lumière très faible, diffusée par des néons turquoises et rose. La moquette bleue foncé à motif était trempée devant la porte. Il n'y avait que peu de monde. Une vieille femme habillée en vêtements bon marché à motif de jaguar se trouvait derrière le bar et servait un verre à un client. Quelques personnes étaient assises à une table plus loin. Deux, enfin, regardaient les danseuses sur la petite scène entourée de lumières bleues. La musique n'était pas très forte à cette heure-ci, mais d'après ses souvenirs d'intervention, Peine se rappelait bien qu'elle était assourdissante lors des soirées. L'officier alla s'assoir au bar, et la vieille femme demanda d'une voix légèrement tremblante :

"Bonjour m'sieur l'officier, qu'est-ce que je peux vous servir ?

- Rien, merci, je suis en service. Je suis plutôt venu poser des questions. Selon mes informations, un de vos habitués, Yann Allée, a pour la dernière fois été vu dans ce bar il y a deux jours, aux alentours de midi. Est-ce que vous savez à quelle heure il est parti ?

- Yann Allée ? Jamais entendu parler."

La vieille femme bougonna ces mots, froidement, et se détourna immédiatement, sans écouter les appels du policier. Peine fronça les sourcils, voyant bien que ce comportement était hautement suspect. Alors qu'il allait insister, le client assis à sa gauche s'approcha de lui et s'assit alors sur le siège de bar le plus proche. Il s'agissait d'un homme d'une soixantaine d'années, au visage bourru et aux cheveux mi-longs blancs. Il avait une moustache et une petite barbe entourant sa bouche, jaunies par la nicotine des cigarettes qu'il fumait régulièrement à en juger par l'odeur de tabac froid qui se dégageait de lui. Il portait un costume deux pièces marron plutôt laid et probablement aussi vieux que lui. D'une voix rauque, il prit la parole :

"Salut officier, j'ai pas pu m'empêcher de vous entendre parler de Yann à Henriette.

- Bonjour monsieur, effectivement, vous avez des informations sur lui ? Comment vous appelez vous ?

- Johnny Monnay" déclara l'homme, en tendant une main calleuse vers Franck "Vous avez peut-être vu les pubs pour mon entreprise d'éboueurs avec mon associer Gontran Santé.

- Ca me dit quelque chose, monsieur Monnay" affirma l'officier en serrant la main tendue "Alors, vous avez des informations sur monsieur Allée ?

- J'sais pas si on peut appeler ça des infos ma foi. Mais les nouvelles vont vite en ville, et dans l'coin on a tous entendu parler du fait qu'il a canné, quelle histoire ! Alors j'suis curieux !

- Vous l'avez vu il y a deux jours ?

- Oh bah comme d'habitude oui ! J'suis passé vers la fin de matinée, après mon service. Il était là comme toujours, à faire le mariole !

- Vous savez à quelle heure il est parti ?

- Vers treize heure, dans ces eaux là ?

- Est-ce que vous savez si quelqu'un l'a suivi ?

- Oulah, j'ai pas fait gaffe à ça. J'ai juste remarqué qu'il était parti parce qu'il avait arrêté de brailler. Mais du coup, il est mort comment le bougre ?

- Ecoutez monsieur, je pense pas vraiment que c'est à vous de poser des questions sur une enquête en cours pour le moment. Est-ce qu'il s'est vanté d'un projet qu'il allait faire ce jour là, ou dans les jours suivants ?

- Comme toujours, c'est bien pour ça que j'l'écoutais pas. Il est toujours à dire qu'il va braquer untel, menacer madame truc, rien à faire moi.

- Est-ce que vous savez s'il avait des ennemis ?

- Evidemment, qu'est-ce que vous croyez ? Il était possédé c'type, clairement monté à l'envers, il s'était probablement mis tous les gangs de la ville à dos, même les Families alors qu'il en faisait partie. Faut dire qu'il a deux ou trois fois fait rater un projet qu'ils avaient parce qu'il s'est dit que ça s'rait une bonne idée de faire le malin en en parlant. Et ici, y a bien que parce qu'il consommait beaucoup qu'il a pas été viré.

- Vous dites que même les Families en avaient après lui ?

- J'dis pas ça, mais plutôt que s'il avait merdé encore, peut-être qu'ils lui auraient fait prendre congé d'façon un peu brutale. Il était un peu un période d'essai, vous voyez l'genre.

- Mais vous ne savez pas qui aurait pu le tuer ?

- Moi ? Oulah non, et si j'savais, j'le clamerais pas sur les toit. Avec deux morts en deux jours, j'ai pas envie d'surcharger les croquemorts. J'balance pas, c'est pas l'style de la maison.

- Alors pourquoi vous êtes venu me parler si vous ne voulez pas donner d'infos ? 

- Franchement, j'pensais qu'vous seriez un peu plus bavard, comme votre collègue ! On pose des questions, on laisse parler, on a toujours deux ou trois infos sympathiques ensuite.

- Mon collègue ? Lequel ?

- C'est plutôt laquelle ! Une p'tite jeunette avec un béret, elle vient faire une patrouille de temps en temps, donc on tape la discute.

- Chloé Sterling ?

- Ouais c'est ça ! Mais ça fait un bail que j'lai pas vue, elle va bien ?

- Oui vous inquiétez pas.

- Enfin bon, j'vais prendre congé moi. C'est pas très bien vu d'parler aux flics ici, à part la jeunette. Bonne journée officier.

- Bonne journée monsieur Monnay."

Le loubard se leva et posa un billet sur le comptoir pour payer sa boisson, avant de quitter les lieux, commençant déjà à sortir un paquet de cigarettes de sa poche avant même d'avoir franchis le pas de la porte. Peine l'observa un instant, puis se leva à son tour, afin d'aller interroger les autres clients. S'approchant des tables, il reconnut une silhouette familière et alla s'assoir à côté d'elle.

"Bonjour madame Carter"

Chapter Text

La journaliste tourna la tête vers lui d'un air surpris avant de sourire et de répondre en chuchotant à moitié :

"Bonjour monsieur l'agent ! Qu'est-ce que vous faites ici ?

- J'enquête, c'est mon métier. Et vous, comment ça se fait que je vous retrouve dans ce genre d'endroit ?

- Même raison que vous, j'enquête.

- Vous enquêtez ?

- Vous ne pensiez tout de même pas que j'allais laisser cette affaire à la police ? Mon patron est mort à la veille de la publication d'un scoop, et son assassin est retrouvé lui-même assassiné, je ne peux pas rester sans rien faire.

- Je le comprend bien, mais enfin que faites vous ici ?

- Eh bien, n'est-ce pas le dernier endroit où Yann Allée a été vu en vie le jour de sa mort ? Sinon, pourquoi seriez vous ici ?"

Peine haussa les sourcils, interloqué. Comment donc cette journaliste pouvait-elle en savoir autant ? Tentant de ne pas hausser la voix malgré son étonnement, il demanda : 

"Comment avez-vous eu accès à ces informations ? Je viens à peine de les obtenir.

- Je vous l'ai dit monsieur, vous n'êtes pas le seul à enquêter. J'ai mes propres sources en ville, et elles m'ont menées directement ici. Alors j'observe. Je ne prétend pas vous apprendre votre métier, mais on en apprend beaucoup en se contentant de rester immobile et silencieux dans ce genre d'endroit… il suffit de passer outre les vapeurs d'alcools et les fumées de cigarette. Et si tant est que vous ayez gout aux filles en petites tenues, vous risquez même de passer un bon moment. Vous aimez bien l'ambiance, monsieur Peine ?

- Ce n'est pas trop mon genre non.

- Je ne suis pas étonnée" lâcha Sarah avec un petit rire "Vous avez l'air d'être du genre pro et pas tellement un matérialiste. Enfin tout de même, pensez à ajouter quelques décorations dans votre appartement, les murs vides c'est triste."

Peine resta sans mots durant un instant, tandis que Sarah dirigeait à nouveau son regard vers les filles, avec un petit sourire de satisfaction devant son effet sur le policier. Finalement, il l'interrogea, ne comprenant pas comment la journaliste avait pu savoir à quoi ressemblait son appartement :

"Qui vous a décrit mon logement ? Même mes collègues ne viennent jamais.

- Personne, je ne l'ai jamais vu.

- Alors comment…

- Vous savez, monsieur Peine, un scoop ne vous tombe pas tout cuit sur le coin du nez. Il faut avoir du flair, savoir dénicher les bonnes occasions, les petits détails. Et il faut connaître les gens. Et, sans vouloir être insultante, j'en connais beaucoup des comme vous. Deviner à quoi ressemble la décoration de votre appartement n'est pas vraiment le plus dur.

- Eh bien… Je dois avouer que je suis impressionné, madame Carter.

- Merci bien !"

La jeune femme prit une lampée d'eau dans le verre qui se trouvait devant elle, observant l'agent en détail. Gêné, il détourna le regard et le dirigea à son tour en direction des filles. Quelque peu mal à l'aise, ses yeux se baladèrent sur le public, avant que son cœur ne bondisse. Au fond de la salle, dans un coin à peine éclairé, était assise une silhouette familière. Peine, regardant immédiatement ailleurs, chuchota l'air de rien à Sarah :

"Madame Carter ?

- Oui ?

- Sans en avoir l'air, pourriez vous regarder cette personne au fond dans le coin gauche, et me dire si mon impression était la bonne ?"

La journaliste observa le public et attarda une poignée de secondes son attention sur la personne que l'agent avait remarqué. Sans véritablement réagir au départ, sa main se crispa sur son verre durant un court instant et elle détourna le regard avant de chuchoter calmement, avec cependant une certaine excitation dans la voix :

"Si nous parlons bien de la même personne, je pense que votre impression était la bonne. Je vous avais sous-estimé, monsieur, votre sens de l'observation est loin de laisser à désirer, je n'avais rien remarqué.

- Regardons ailleurs, il ne faut pas qu'il nous remarque."

Au même instant, l'homme se leva et ajusta son long manteau. Peine l'observa du coin de l'œil, tandis que l'individu se dirigeait lentement vers le bar, un chapeau dans la main. Lorsque son visage fut exposé à la lumière, le policier et la journaliste virent leur impression confirmée. Il s'agissait là de Marcello Capone, l'un des membres des Families, et suspect dans l'enquête du braquage de la Pacific. Ils continuèrent de le regarder passer sans en avoir l'air, mais alors qu'il était à quelques mètres du bar, l'homme mit son chapeau et courut en direction de la porte. Peine comprit instantanément qu'il les avait remarqué depuis déjà bien longtemps, et se leva précipitamment en prenant son arme en main. Il se mit à la poursuite du gangster, suivit par Sarah, qui le talonnait. Le policier sortit hâtivement de l'établissement, se retrouvant à nouveau dans la rue, sous le déluge. Il remarqua Capone qui s'enfuyait vers sa gauche, et cria :

"LSPD, arrêtez vous !"

Sa cible n'écouta pas et continua de courir, disparaissant derrière un angle. L'officier se hâta à sa suite, les cheveux rapidement trempés. Cependant, à l'angle, l'homme avait disparut. Il n'y avait pourtant aucun moyen de s'enfuir dans cette direction, il n'y avait que l'arrière cour du Unicorn, entourée de grands murs. Dépourvu, Peine baissa son arme, les yeux plissés tandis que la pluie battait son visage. Sarah Carter, dont les cheveux dégoulinaient également, demanda :

"Vous avez vu où il est passé ?

- Non. Il ne peut pas être loin, on l'a perdu de vue à peine dix secondes.

- Pourtant il n'est pas là.

- Merci, j'avais remarqué. Où est-ce qu'il a pu passer ?

- Il n'y a aucune issue à cette cours, c'est un cul-de-sac.

- C'est bien ce qui m'embête. A moins que..."

L'officier fronça les sourcils avant de se diriger vers une porte de service menant à nouveau dans l'établissement. Sarah demanda :

"Vous pensez qu'il y est retourné ?

- Je ne sais pas. C'est la seule issue possible.

- Eh bien, pourquoi on entre pas ?"

La jeune femme s'avança et tenta d'ouvrir la porte, mais cette dernière était verrouillée. Elle se recula, déconcertée, puis s'interrogea à voix haute :

"Comment il a pu entrer si la porte était verrouillée ?"

Peine hésita un instant, puis frappa contre la porte en métal, qui renvoya un grincement sourd. Voyant que personne ne répondait, il tenta à nouveau le coup, frappant plus fort. Cette fois-ci, le bruit du verrou se fit entendre, et la porte s'ouvrit en grinçant, révélant un vieil homme à l'air peu aimable. Peine reconnut là Gérard Pichon, le gérant de l'établissement, et le salua :

"Bonjour monsieur, je suis l'agent Peine, LSPD.

- C'est pour quoi ? Et c'est qui celle là ?

- Je suis Sarah Carter, journaliste au Weazel News.

- Je suis pas intéressé pour faire une interview, maintenant fichez le camp."

Il tenta de refermer la porte, mais Franck passa son pied dans l'entrebaillement, l'empêchant de fermer, et insista :

"Si vous persistez à refuser de répondre aux questions de la police, cette interview aura lieux dans une petite pièce avec un miroir sans teint. Alors ?"

Le vieillard grogna avant d'ouvrir la porte, sans toutefois les inviter à rentrer. La pluie continuait de les tremper toujours plus, tandis qu'il restait protégé. L'officier demanda :

"Est-ce que, durant la dernière minute, vous avez vu passer un homme en imperméable ?

- Non.

- Est-ce que vous l'avez laissé entrer ici ?

- Non.

- Savez vous que votre bar a comme client des suspects recherchés par le LSPD ?

- Pas mon problème, vous avez qu'à mieux rechercher.

- Monsieur, je suis très sérieux, évitez de me faire perdre mon temps.

- Evitez de me faire perdre le miens alors. C'est bon, l'interro surprise est terminée ?

- Non, elle ne l'est pas. Est-ce que vous connaissez Yann Allée ?

- Non. J'ai vaguement entendu dire qu'il était mort.

- Pourtant c'était un client régulier de votre établissement.

- Jamais fait attention.

- Est-ce que vous connaissiez Earl Bailey ?

- Pas le dernier à venir voir les filles, mais ça faisait un bail qu'il était pas passé dans le coin.

- Est-ce que…

- Bon écoutez, je ne sais rien sur vos enquête, d'accord ? Maintenant, j'ai un business à faire tourner.

- Vous risquez de me revoir, monsieur. Plus vous serez difficile, plus ça prendra de temps.

- Je suis quelqu'un de patient. Au revoir, monsieur l'agent."

Il claqua alors la porte au nez de Peine, qui soupira. Sarah fit alors remarquer :

"Il ment.

- Oui, pas besoin d'avoir un flair de journaliste pour s'en rendre compte.

- Pourtant, vous n'avez pas remarqué le sol trempé par des traces de pas venant d'une personne probablement dégoulinante.

- Pardon ?

- Quand il nous a ouvert, il y avait des traces de pas sur le sol. Boueuses, trempées, et là où le sol n'était pas vraiment droit il y avait encore des gouttes en train de rouler. Et le tuyaux de chauffage, sur le mur, avait plusieurs traces humides dessus, alors que l'eau devrait s'évaporer rapidement. Et la seule personne qui a pu laisser des traces aussi récentes dans cet endroit, c'est ?

- Capone... Bon sang, je n'avais même pas remarqué, bravo.

- C'est mon métier, monsieur l'agent.

- Vous feriez une excellente enquêtrice, madame Carter.

- Et vous, vous ne seriez pas un mauvais journaliste."

Peine esquissa un sourire, puis, tendant la paume de sa main ouverte sous la pluie, et observant les gouttes d'eau y tomber, il proposa :

"Je vous paye un café après mon service ?"

La journaliste fit mine de réfléchir avant d'acquiescer :

"Avec plaisir, monsieur Peine."

Chapter Text

"Pardon ?"

La voix du capitaine Boid résonna dans l'habitacle de la voiture depuis la radio. Peine répéta :

"Marcello Capone. J'ai une témoin oculaire qui pourra confirmer.

- Ok, vous êtes où là ?

- Je me suis garé dans une rue à côté du Unicorn pour éviter de rester stationné devant, mais je suis toujours à proximité.

- Qui est votre témoin ?

- La journaliste Sarah Carter, de Weazel News.

- Putain, manquait plus que le torchon soit le premier au courant."

Peine jeta un regard embarrassé à Sarah, qui était assise à côté de lui sur le siège passager, et elle répondit par un sourire amusé tout en secouant la tête. Le capitaine reprit :

"Bon, vous ne bougez pas, ok Peine ? Ne sortez pas de votre voiture, ne changez pas de place. J'envoie immédiatement des équipes sur place pour boucler le périmètre et perquisitionner le bar. Vous n'en parlez à personne, interdiction de faire sortir l'information. On peut pas se permettre de le perdre à nouveau alors que toute la ville attend des résultats.

- Reçu mon capitaine.

- Je reviens vers vous quand on sera en chemin, vérifiez que vous avez votre gilet anti-émeute et des munitions. A tout à l'heure."

L'excitation monta en Peine, qui vit sa respiration s'accélérer. Sarah posa son téléphone sur la plage avant et affirma en souriant :

"Vous voyez, j'obtempère, aucune info ne sortira d'ici avant la fin de la perquisition. Je n'aurais pas envie de faire piquer une grosse colère à monsieur Boid.

- C'est très gentil de votre part. Je vais vous demander de rester ici le temps de la perquisition, ça risque d'être dangereux.

- Je ne peux pas vous garantir de bien me comporter, monsieur Peine. Comme disait feu mon patron, l'information n'attend pas.

- Je ne serais pas responsable s'il vous arrive quelque chose alors que vous êtes sur les lieux d'une intervention policière, madame Carter.

- Ne vous en faites pas, je sais me débrouiller, j'ai vu pire ! Vous aussi, vous allez vous fâcher tout rouge comme monsieur Boid ?"

Peine eut un petit rire devant cette fausse provocation effrontée et regarda dehors, observant le déluge. Il avait la sensation que quoi qu'il fasse ou dise, la journaliste trouverait toujours le moyen de se faufiler et d'assister à l'intervention. Lorsqu'il reporta son regard sur Sarah, cette dernière faisait une petite moue faussement triste en ressortant légèrement sa lèvre inférieure, et demanda :

"Vous êtes sûr que je ne peut pas venir, officier ?

- Vous savez que, même s'il ne vous arrive rien, on risque de vous coffrer pour obstruction aux forces de l'ordre et refus d'obtempérer ?

- Et qui va m'arrêter ? Vous ? C'est de votre faute si je suis au courant pour l'intervention, après tout c'est vous qui m'avez invitée à entrer dans votre voiture le temps de décider de la suite. Vous ne pourrez vous en prendre qu'à vous même !

- Je pourrais. Si j'étais un de mes collègues, c'est pas dit que vous ne seriez pas déjà menottée.

- C'est terrible dites moi, vous pensez que je devrais avoir peur ? Mon dieu, dire qu'une personne qui n'est pas là aurait pu hypothétiquement m'arrêter, j'en ai des frissons. Il n'y a pas à dire, monsieur Peine, vous savez vous y prendre pour intimider."

Le policier dut retenir un rire et ne parla pas durant plusieurs secondes, avant de rétorquer d'un air faussement menaçant et énervé :

"Vous savez, les rues ne sont pas sûres, on est pas à l'abris d'avoir une deuxième perte chez Weazel News. Heureusement que vous allez être bien sage et ne pas gêner l'intervention !"

Cette fois, c'est la journaliste qui se mit à rire, avant de lui frapper l'épaule et d'affirmer :

"Ah, ça y est, monsieur Peine se réveille ! Je me disais bien que vous étiez mollasson, là j'approuve !

- Vous savez, mollasson ou pas, vous passer les menottes ça ne prend que quelques secondes.

- Et une news sur la brutalité policière et le non respect de la liberté d'information, ça ne prend que quelques minutes.

- C'est penser que vous aurez la possibilité d'écrire. Un accident est si vite arrivé pendant la perquisition…"

Alors que Sarah allait répondre, la radio grésilla et la voix du capitaine en sortit une fois de plus :

"Peine, on arrive, préparez vous à intervenir. Panis et Sterling se chargeront de boucler le périmètre, Rixzy et Némard vont évacuer les lieux, et Monier interviendra en même temps que Kuck, vous et moi. Reçu ?

- Reçu mon capitaine. Qu'est-ce qu'on fait pour la journaliste, elle est toujours dans les parages.

- Putain je l'avais oubliée… Je la signale aux autres, on l'empêchera d'approcher le temps de l'intervention. Préparez vous, on est là dans deux minutes."

La radio s'éteignit à nouveau, tandis que Peine vérifiait son matériel. Sarah eut un petit rire :

"Vous ne perdez pas le nord.

- Je vous avait bien dit que gêner l'intervention vous causerait des problèmes !

- Et je vous ai prévenu que j'allais tout de même essayer de venir. Chacun sa route, que le meilleur gagne, monsieur Peine !"

La journaliste sortit alors de la voiture et se mit à courir sous la pluie, tandis que des gyrophares de police se distinguaient au loin, sans sirène afin de ne pas alerter les Pichons. Peine sortit de la voiture, équipé de son gilet et arme en main, et s'approcha de l'entrée. Trois véhicules de police s'arrêtèrent alors, et les officiers en descendirent immédiatement. Panis et Chloé sortirent des barrières, et commencèrent à boucler le périmètre, tandis que le reste se dirigea vers le bar. Le capitaine demanda rapidement à Peine :

"C'est bien la porte arrière dont vous avez parlé ?

- Oui mon capitaine.

- Ok, on y va avec Kuck. Monier se chargera de la salle principale pendant que les autres feront évacuer les clients. Go !"

Guy, Michael et Jean entrèrent alors par la porte principale et les premiers clients se mirent à sortir en vitesse, tandis que Peine, Kuck et Boid contournaient le bar et se rendaient à l'arrière. Boid frappa violement dans la porte et l'ouvrit alors dans un craquement métallique. Quelques filles passèrent en courant, enveloppées dans des manteaux mis à la va-vite, tandis que les policiers entraient dans les lieux. Bernard Pichon, le frère cadet, arriva en vitesse, habillé de sa chemise orange bariolée, ses cheveux roux mal coiffés. Il tendit les mains en avant en affirmant d'une voix affolée teintée d'accents belge et québécois prononcés :

"Eh, allez-y dont' douc'ment présentement !"

Kuck saisit alors ses poignets et plaqua le gérant au mur, ramenant ses bras dans son dos avant de le menotter, malgré les protestations de ce dernier :

"J'oppose aucune résistance, vous z'avez-t-y dont pas b'soin d'user d'brusquerie !"

L'écho des cris dans la salle principale se faisait entendre, ainsi que le raclement des chaises contre le sol alors que les clients quittaient le bar. Une dizaine de danseuses peu habillées et tentant maladroitement de s'envelopper dans leur veste sortirent d'un vestiaire et allèrent rapidement vers la sortie, suivies d'un jeune homme à la peau sombre et aux cheveux noirs ramenés vers l'arrière que Boid saisit alors par le col et plaqua au mur tout en lui passant les menottes :

"Alors Jim, tu pensais que t'allais sortir comme ça ? On a des questions à te poser tu sais !"

Tandis que Kuck surveillait les deux prisonniers, Peine et Boid continuèrent de progresser, avant d'arriver nez à nez avec Gérard Pichon. Ce dernier affichait une expression à la fois colérique et tendue, et leva les mains immédiatement en voyant les deux policiers, avant de se mettre à genoux. Peine lui passa les menottes, tandis que le vieil homme grommelait des insultes. Continuant son avancée, le policier donna un coup dans une porte, qui s'ouvrit alors sur une petite pièce où se trouvaient plusieurs sacs de couchage en désordre.

"Mon capitaine, venez voir ça !"

Boid arriva et haussa les sourcils en voyant les lieux, avant de se tourner vers Pichon :

"Qui est-ce qui dormait ici ?

- Personne, capitaine, j'aime juste bien le style que ça donne !

- On verra ça au commissariat. Peine, emmenez lez vers les voitures, ils seront peut-être plus bavards en cellule."

Le policier fit se relever le vieil homme, et le fit sortir en compagnie de Bernard et Jim, les amenant sous la pluie en direction des voitures. Ils ne dirent pas un mot, tandis qu'ils s'asseyaient à l'arrière des véhicules. Rapidement, la vieille femme servant les boissons au bar fut également embarquée, ainsi qu'une femme d'une quarantaine d'années aux cheveux noirs attachés en queue de cheval. Les clients du bar étaient rassemblés dehors, tentant de s'abriter sous le porche, tandis que les danseuses se faisaient fournir des couvertures de survie par Chloé et Panis. Cependant, il ne semblait y avoir aucune trace de Marcello Capone ni des autres membres des Families, à l'incompréhension de Peine. Avait-il déjà quitté les lieux ? Derrière les barrières, Johnny Monnay observait la scène, cigarette dans la bouche et parapluie au dessus de la tête. En voyant Peine, il affirma en riant :

"Eh bah, j'vois qu'vous avez pas perdu vot' temps ! C'est l'quel qu'a buté Yann alors ? C'est pas mamie rillette quand même ?"

Alors que Peine esquissait un petit sourire, il se retourna et fut ébloui un court instant par le flash d'un appareil photo. Lorsqu'il y vit à nouveau, il constata que Sarah Carter venait de le prendre en photo en train de fermer la porte de la voiture où les Pichons étaient assis. La journaliste lui sourit et baissa son appareil, avant de dire d'un ton satisfait :

"Vous voyez, je vous avait prévenu ! Il tient toujours le café après votre service ?"

Chapter 12

Summary:

TW : menaces, mention de sexe

Chapter Text

"Répondez, qui dormait dans cette pièce ?"

Le capitaine Boid insistait depuis de longues minutes dans la salle d'interrogatoire face à Gérard Pichon, observé par Peine et Kuck derrière le miroir sans teint. Cependant, le vieil homme répétait inlassablement la même réponse d'un ton plein de provocation :

"J'vous l'ai dit, c'est Mickael Jackson, il est pas mort !"

Cette fois, le capitaine se lassa et regarda le miroir avant de déclarer :

"Bon, on le ramène en cellule et on prend le p'tit frère. Peut-être qu'il sera plus bavard."

Gérard Pichon fut escorté en dehors de la salle d'interrogatoire, un petit rictus sur les lèvres, par Michael Rixzy, et bientôt c'est Bernard Pichon qui le remplaça. Boid tenta de jouer au gentil flic, bien qu'il était de notoriété publique qu'il était un impulsif prompt aux crises de colère.

"Votre frère persiste à s'enfoncer dans son mensonge. Mais si vous nous dites la vérité, on peut s'arranger pour vous obtenir une remise de peine, peut-être même une certaine clémence du juge.

- J'ai t-y rin dont à vous dire ! J'ai jamais vu personne dormir dans l'bar présent'ment, y a ben qu'les filles qui faisaient une sieste entre deux danses du ventre parfois.

- Monsieur Pichon, quand les prélèvements ADN seront fait sur ces sacs de couchage et qu'ils révèleront que ce sont les Families qui dormaient dans votre établissement, vous ne pourrez plus jouer à l'idiot. Votre mensonge sera prouvé. Dites nous la vérité dès maintenant et on fera en sorte de vous éviter la prison.

- J'vais pas aller en prison voyez vous, tout simplement pasque j'dit la vérité. Y a personne qui dort dans le bar à part les filles et les clients bourrés. Encore moins d'la racaille comme les Families. Vot' prélèv'ment ils va révéler peau d'zob.

- Bon écoutez, c'est simple, soit vous dites la vérité et on oublie vos petits mensonges, soit les prélèvements ADN vont de toute façon montrer que vous mentez, et vous allez finir en tôle. Vous préférez quoi ?

- Mais enfin m'sieur Boid, vous savez t-y dont qu'j'aime pas grand chose d'plus que la justice ben faite ? Mais y a quequ'chose que j'aime encore plus et c'est mon frère, mon Gégé. Même si y avait-y quoi qu'ce soit dans l'bar, jvous dirait rien. Est-c'que c'est-y ben clair présentement ?"

Le rouquin continua son manège durant encore plusieurs minutes, jusqu'à ce que le capitaine se lasse. Tandis que son sang froid commençait à se réduire à peau de chagrin, il demanda à ramener Bernard en cellule, et ramener Béatrice du Tournesol, la quarantenaire à la queue de cheval. Dans son t-shirt blanc de prison et son pantalon orange fluo trop grand pour elle, elle entra dans la pièce en larmes. Cachant l'expression de pure exaspération qui l'avait prise à son entrée, le capitaine parla d'un ton compatissant :

"Madame Du Tournesol, je comprend que vous soyez bouleversée devant cette situation, mais je vous garanti que tout se passera bien si vous nous dites la vérité, entendu ?"

La femme hocha la tête avant de se moucher bruyamment, mais continuant de pleurer. Boid la laissa quelques secondes, puis, comprenant qu'elle n'allait pas prendre la parole, il demanda :

"Avez vous accueilli les Families dans votre bar ?"

Béatrice hocha la tête tandis que ses larmes continuait de couler. Soulagé, le capitaine laissa échapper un soupir. Enfin, quelqu'un était disposé à parler. Il insista :

"Depuis quand les accueillez vous ?

- Oh ben..." dit elle entre deux sanglots "Ils consomment régulièrement en temps normal vous savez.

- D'accord... Mais depuis quand les cachez vous ?

- Les cacher ? On les cache pas m'sieur ! On est très attachés à la justice m'sieur, on les a pas r'vu depuis l'braquage m'sieur !

- Pardon ? Mais vous venez de me confirmer que vous les accueillez !

- Ben oui m'sieur, c'étaient des clients ! On les accueille comme clients !"

Boid contracta sa mâchoire, agacé. Son espoir d'enfin avancer avait été de courte durée.

"Donc vous affirmez que les Families ne dormaient pas dans le bar ?

- Oh ben si m'sieur, quand ils étaient saoul comme cochon ! Et ça arrivait souvent ça m'sieur !

- Je m'en fiche de ça. Depuis le braquage, est-ce qu'ils dormaient dans le bar ?

- Ah bah ça non m'sieur, jamais Gégé les aurait laissés ! C'est un homme droit et juste mon Gérard.

- Votre Gérard il va aller en prison, vous aussi, et toute votre clique, quand les prélèvements ADN des sacs de couchage vont revenir et prouver qu'il s'agissait des Families. Faites pas l'idiote, dites la vérité et on sera gentils.

- Mais j'dis la vérité m'sieur !"

Après quelques autres répliques du même acabit, comprenant qu'il n'en tirerait rien, Boid demanda à la ramener en cellule, et amener la vieille femme, Henriette. Dans le laps de temps entre les deux, il se mit à crier des insultes afin d'évacuer sa frustration. Il avait beau savoir que les prélèvements allaient mener ce clan tout droit en prison, les voir se payer sa tête de cette façon le mettait hors de lui. Il se calma cependant après avoir été averti de l'arrivée de la vieille femme, et semblait parfaitement posé lorsqu'elle entra. Il lui fit le même topo qu'aux autres, et posa les mêmes questions.

"Avez vous accueilli les Families dans votre bar ?

- Non mais on a accueilli ta mère."

Sa colère était visible, mais le capitaine se retint de jeter son verre d'eau au visage de la vieillarde, avant de répondre :

"Je vais répéter, est-ce que les Families étaient dissimulées dans votre établissement ?

- Non, mais j'vais me répéter : on dissimulait ta mère. Elle faisait danseuse, les clients l'appréciaient beaucoup, elle était même surnommée Betty la Gobeuse.

- Bon, madame, vous savez que vous pouvez vous prendre des charges pour offense ?

- Ouais, et ? Je fais que dire la vérité, c'est pas c'que tu m'demande ? Y a pas de Families dans ce bar. Vous pouvez bien me demander encore quinze fois que vous aurez la même réponse. Je peux repartir maintenant ?"

Boid se massa les tempes, et tenta d'encore la cuisiner. Après quelques minutes, il était entièrement évident qu'il n'en tirerait rien, et il demanda à amener Jim, le dernier membre du clan Pichon n'ayant pas encore été interrogé. Le jeune homme entra la tête baissée, et contempla la table devant lui. Boid recommença la même routine :

"Est-ce que vous dissimuliez les Families dans le bar ? Et ne ment pas, les prélèvements ADN des sacs de couchage vont nous dire tout ce qu'on a besoin de savoir. Nous dire la vérité peut te permettre d'éviter un séjour en prison par contre."

Jim resta silencieux, les yeux rivés sur la table, les muscles contractés, et visiblement tendu.

"Allez Jim. Dis nous la vérité. On peut assurer ta protection si tu le fais."

Le jeune homme secoua la tête, sans lever le regard. Boid insista :

"Si tu parles, on peut négocier une remise de peine, et s'assurer qu'il t'arrive rien.

- Je peux rien dire.

- Pourquoi ça, Jim ?

- Je... Il va m'arriver des problèmes si je parle.

- Pourquoi ? Qui te menace ?

- J'ai pas le droit de parler.

- On peut faire en sorte de te protéger Jim."

Le capitaine s'assit en face de lui, le ton calme et rassurant.

"Si des gens te menacent, on peut obtenir une escorte pour toi. Mais il faut que tu dises la vérité.

- Je vais me faire tuer si je dis quoi que ce soit.

- Non, tu sera protéger. Aie confiance en nous, tu peux tout nous dire. Qui te fera du mal ? Les Families ?"

Le jeune homme regarda sur les côtés, puis leva le regard vers le capitaine avant de légèrement se pencher vers lui. Boid fit de même, et Jim chuchota :

"Mickael Jackson."

 

En salle de réunion, Boid n'en finissait pas de débiter des insultes à un rythme semblant inhumain. Il tournait en rond depuis une heure, ressassant en boucle les moqueries des suspects, leur promettant mille et unes attentions délicates dans un langage fleuri. Peine et Kuck, quant à eux, restaient silencieux. Kuck avait bien tenté de calmer le capitaine, mais sans succès. La seule chose empêchant le capitaine d'entièrement piquer une crise était la perspective de tous les voir moisir en prison suite aux prélèvements ADN. Car ils pouvaient bien le provoquer, se payer sa tête, tout ce qu'ils pouvaient faire était bien de gagner du temps, car les analyses donneraient de toute façon les réponses nécessaires. Cependant, son impatience grandissait, car il n'avait toujours aucune nouvelle de l'équipe chargée de relever les preuves, lui faisant faire les cent pas comme un lion en cage, répétant et répétant les moqueries qu'il avait subies. La porte s'ouvrit enfin sur Guy Monier, et Boid se dirigea immédiatement vers lui, ordonnant sans laisser un instant :

"Commencez les prélèvements ADN ! Je veux les résultats dès qu'ils sont disponibles, même si c'est à une heure du matin."

Monier resta silencieux un instant, évitant le regard de son supérieur et se triturant les mains. Après quelques moments d'hésitation, tandis qu'il ouvrait et fermait sa bouche sans rien dire, tentant de trouver la meilleure façon de formuler ce qu'il avait à annoncer, il finit par lâcher :

"On...On trouve plus les sacs de couchage. Ils ont disparu, on a aucune idée d'où ils sont passés."

Chapter 13

Summary:

TW : mention de mort

Chapter Text

Peine sortit du commissariat en fin de soirée, bien plus tard que ce qu'il avait prévu. La disparition des sacs de couchage, seule preuve incriminant les Pichon dans la protection des Vagos, avait secoué tout le LSPD, et les recherches avaient continué longuement. Toutes les pistes avaient été explorées, toutes les erreurs possibles de stockage, sur le trajet, mais rien n'y avait fait et les sacs restaient introuvables. Si le capitaine et visiblement le reste des effectifs pensait à une ridicule confusion, Peine avait quant à lui depuis l'annonce de cette disparition le soupçon qu'il s'agissait de la fameuse taupe au sein de la police. Il ne pouvant cependant en parler à personne sans preuve, et gardait ses conclusions pour lui, à sa grande frustration. A cause de cette disparition de preuves, les Pichon avaient dû être relâchés en fin d'après-midi, et avaient quittés les lieux avec une mine goguenarde devant la colère des agents devant lesquels ils passaient. Car il n'avait pas pu le faire avant, Peine regarda ses différentes notifications, et remarqua un article très récent de Weazel News. Titré "L'arrestation des Pichon tourne au fiasco, comment le LSPD a commis l'erreur de l'année", il figurait la photo de Franck devant la voiture lors de la perquisition, et plus bas, une photo prise lors de la sortie du clan après sa libération. Sans surprise, l'article était incendiaire envers la police, et ne ménageait pas ses moqueries : "bavures", "vices de procédures", "arrestations abusives", "catastrophe d'organisation". Cependant, malgré toute la frustration que cet article produisait sur Peine, ce qui lui serra le plus les entrailles était le nom de l'autrice : Sarah Carter. Malgré la confiance relative entre elle et lui, la journaliste avait inclus Peine dans l'article. Elle ne manquait évidemment pas de rappeler que ce fiasco arrivait alors que l'enquête sur le braquage de la Pacific était au point mort et que celle sur les deux meurtres récents ne faisait que surcharger davantage encore une équipe "incompétente" d'après ses mots. Malgré la bruine, Peine s'était immobilisé sur le porche devant le commissariat pour lire. Alors qu'il relevait la tête, il constata que Sarah était à quelques mètres devant lui, les mains dans les poches, avec un petit sourire satisfait. La jeune femme demanda :

"Il tient toujours ce café ?"

Le policier ne lui rendit pas son sourire et lui montra l'écran de son téléphone, où la photo de l'arrestation figurait, avant de demander d'un ton particulièrement froid :

"Après ce que vous avez écrit ?

- Je n'ai fait que rapporter des faits. On peut en discuter au café si vous voulez. Vous savez, je n'ai rien contre vous.

- Dans ce cas, pourquoi est-ce que suis montré comme un parfait idiot dans cet article ?

- Ne soyez pas si dur avec vous même ; vous n'avez pas l'air idiot, juste incompétent. Mais ce n'est pas de votre faute vous savez ?

- Ca vous dérangerait de m'expliquer ce que vous voulez dire par là ? Je vous avoue que j'ai du mal à saisir en quoi c'est censé me réconforter.

- Pourquoi ne pas s'expliquer au café, monsieur Peine ? A moins que vous ayez faim et qu'on aille directement acheter un petit quelque chose à manger ?

- Vous avez intérêt à être convaincante, je vous jure que sinon la prochaine fois que je vous vois à proximité d'une intervention, je vous coffre pour obstruction."

Sarah lui fit un petit sourire avec une expression victorieuse et peu intimidée, et il la suivit après avoir rangé son téléphone tandis que sa colère envers elle augmentait. Elle le mena à quelques rues de là, dans une boulangerie encore ouverte, où elle le laissa prendre une part de pizza et une bouteille d'eau avant de la rejoindre à une table. Avant de commencer à manger, il demanda :

"Donc ? Je peux avoir des explications maintenant ?

- Bien sûr ! Je vous doit bien ça après m'avoir donné cette photo de une.

- Si on pouvait éviter les commentaires, ça serait super, madame Carter.

- Bien entendu. Donc, vous n'êtes pas un idiot, monsieur Peine. En vérité, même sans beaucoup vous avoir fréquenté, vous me semblez même bien plus malin qu'une bonne partie de vos collègues.

- Ca nous fait déjà ça en commun.

- Je n'oserais pas le dire, mais bon, c'est vous qui le dites ! En bref, votre incompétence n'est pas liée à vos propres capacités, mais au LSPD. Vous êtes dans un département de police rempli de bons à riens. Vous pouvez bien vous démener, à partir du moment où vous êtes tout seul, vous ne risquez pas d'aller très loin. Qu'à peu près tout le monde travaille sur le braquage et qu'on vous refile un double meurtre à vous tout seul le montre bien. Et même à vous seul, vous êtes arrivé à retrouver un des suspects recherchés dans toute la ville et que vos collègues ont été incapables de pincer. Visiblement, vous avez même mené à la découverte de leur planque, enfin on le saurait si les preuves n'avaient pas disparues.

- Mes collègues ne sont pas responsables de la situation, nous sommes sous pression, tout le monde attend des résultats.

- Peut-être que vous en auriez si vous vous décidiez à passer à l'action concernant les taupes. Les Families disparaissent entre le moment où nous voyons Capone et la perquisition, puis les preuves qui s'évaporent... Vous croyez vraiment que ce sont des coïncidences ?

- Evidemment que non, j'y ai aussi pensé.

- Eh bien parfait, nous sommes sur la même longueur d'onde alors.

- Pour que les Families disparaissent si vite mais laissent des preuves aussi évidentes que les sacs de couchage, c'est qu'ils ont été pris dans l'urgence. Et je vois difficilement comment ils ont pu être à ce point pris dans l'urgence s'il ne savaient pas à l'avance qu'une intervention était en cours de préparation. Ils ont dû être prévenus, par une source interne à la police. Et les Pichon, qui avaient l'air certains de leur libération… Ils n'auraient pas autant fait les fiers s'ils ne savaient pas qu'une taupe allait faire disparaitre les preuves entre temps.

- Exactement ! Mais vous savez, je pense que le rôle de votre taupe se trouve encore avant, dans cette histoire. Yann Allée, vantard, qui parle de tout à tout le monde, a très bien pu obtenir l'information de qui était la taupe de la part de Bailey. Peut-être que ce dernier espérait que sa vie serait épargnée s'il donnait l'information ? Mais si Allée était aussi idiot qu'on le décrit, il posait le risque de se vanter de posséder une information sur qui était la taupe dans la police. C'est une info vitale, et si elle s'ébruitait, elle ferait rapidement tomber cette taupe. Peut-être que les Families ont justement assassiné Allée afin de l'empêcher de diffuser cette information.

- Si on considère cette option comme la bonne, cela lie immédiatement l'affaire du braquage et celle de l'assassinat de Bailey. Si les Families ont une taupe dans la police, il n'est pas étonnant qu'ils échappent à toutes les investigations, et que l'enquête sur le braquage n'avance pas. Là, Bailey s'apprête à sortir son scoop, les Families l'apprennent, et envoient Allée pour le tuer, car le journaliste menace leur sûreté et risque leur découverte si ils n'ont plus de taupe pour les protéger. Allée apprend qui est la taupe, une information bien trop importante pour un petit bras comme lui, surtout vu le risque qu'il pose de tout dévoiler par stupidité, et les Families l'assassinent. Après qu'il ait tué Bailey, il les appelle, leur dit ce qui est arrivé, ils comprennent qu'ils sont en danger et lui donnent rendez vous. Une fois sur le lieu de rendez-vous, ils l'étranglent et coulent sa voiture, et ils sont alors débarrassés en une journée de deux éléments problématiques. Ca me semble très clair soudainement.

- Il reste encore de nombreuses questions. Où est l'argent ? Pourquoi ne pas fuir l'île et rester à la place caché dans un bar miteux ? Et évidemment, l'identité de la taupe reste inconnue."

Peine finit son repas. Sa colère avait grandement diminué, maintenant que les différents éléments se liaient et que l'histoire se dénouait. Il en voulait toujours à la journaliste, d'autant qu'elle semblait particulièrement hostile à la police malgré le fait qu'elle sache qu'une taupe était responsable de leurs déboires. Cependant, la sensation d'avancer et d'avoir enfin une chronologie plausible des évènements, en partie grâce à elle, le rendait bien moins rancunier. Si ce rythme se maintenait, la taupe finirait démasquée. Il paya et se leva, imité par Sarah, et ils sortirent dans la rue. Tandis qu'il partait de son côté, la jeune femme affirma :

"Je vais rentrer chez moi. Mais n'oubliez pas, si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas à passer au journal. Et je maintiens ce que j'ai dit ce matin : vous feriez un bon journaliste. Vous aurez du mal à aider les gens en restant dans la police.

- J'aide déjà les gens, vous savez. Mon travail dans la police me convient. Mais vous devriez essayer, on recrute, vous vous ferez un avis.

- J'y penserais. Oh, une dernière chose, suis-je toujours promise à une arrestation pour obstruction si vous me voyez à côté d'une intervention ?"

Peine eut un petit sourire et convint, malgré son agacement toujours quelque peu présent :

"On verra bien. Ca dépendra de mon humeur, comportez vous bien et tout se passera sans problème.

- Remarquez, si vous étiez celui chargé de mon interrogatoire, je ne serais pas mécontente, les discussions avec vous sont stimulantes !

- Mais les menottes font mal au poignet, et je ne pense pas que le pantalon orange fluo vous aille au teint. A une prochaine fois, madame Carter."

Chapter 14

Summary:

TW : alcool, mention de mort, trauma, mention de TCA

Chapter Text

Les yeux plissés, tenant leur menton entre leurs mains, les cousins regardaient avec attention Lorenza, une jeune femme travaillant au domaine, cueillir une grappe de raisin. Le soleil était haut dans le ciel, et les températures étaient remontées depuis plusieurs jours, sans toutefois atteindre leur niveau d'avant les orages. Pour plusieurs jours, Antoine et Daniel avaient aidé à la récolte dans les vignes, mais malgré leurs progrès, les grappes qu'ils ramenaient étaient toujours en partie écrasées ou manquaient la moitié de leurs fruits. Donatien, devant ce spectacle et une fois qu'il eut fini de se lamenter, avait fini par demander à Lorenza de leur montrer comment faire. Devant leur regard émerveillé, elle montra alors la grappe en parfait état :

"Et voilà ! Vous voyez, c'était pas compliqué !

- Ouaaaah !" s'enthousiasma Antoine "C'est trop bien !

- Ah bah oui alors, vous le faites drôlement mieux que nous !

- Rooh, Daniel, je t'ai déjà dit que vous pouviez me tutoyer.

- Oui, désolé Lorenza !"

Souriante, elle se releva, époussetant le t-shirt rouge vif qu'elle mettait lors de la récolte.

"Allez, à votre tour, récoltez-en une et montrez moi !"

Les cousins ne se firent pas prier et s'agenouillèrent devant la vigne. Daniel fut plus délicat que d'habitude, et seuls deux raisins furent écrasés, tandis que les mouvements de Antoine se firent plus lents qu'auparavant, ne faisant tomber qu'un fruit de la grappe. Fièrement, ils se relevèrent et montrèrent leurs progrès à l'employée, qui les applaudit en sautillant :

"Bravo les garçons ! C'est très bien ! Encore un peu d'entraînement et vous maitriserez parfaitement la récolte !

- Antoine, Daniel ?"

Une voix presque identique à celle de Lorenza s'éleva depuis le domaine, bien moins enjouée cependant que celle de la jeune femme. Il s'agissait de Lara, sa sœur jumelle, qui avait tendance à rester davantage seule et à moins parler. Les deux garçons allèrent dans sa direction, accompagnés de Lorenza, et virent alors Lara en compagnie de Juan, l'un des Vagos. De sa voix rauque, il demanda :

"Les garçons, vous confirmez que la dame à l'extérieur est votre psy ?"

Derrière la barrière se trouvait Vanessa, habillée de sa chemise blanche, qui leur adressa un geste de la main et un gentil sourire. Antoine hocha la tête et Lara grommela au gangster :

"Vous voyez, je vous l'avait dit, c'était pas la peine d'être parano.

- Je suis pas parano, je fais juste mon travail. C'est bon hermana, vous pouvez entrer !"

Vanessa s'avança alors de manière à déclencher l'ouverture automatique, et arriva dans la cour du domaine :

"Bonjour bonjour, ne vous inquiétez pas Juan, je ne vais pas les manger.

- Vous faites des blagues mais on sait jamais avec ce qu'il se passe en ville.

- Je suis psy, pas tueuse en série. Vous savez, ça vous ferait peut-être du bien de voir un psy d'ailleurs, vous m'avez l'air tendu.

- Oouh elle va pas me saouler longtemps celle là, puta ! C'est vous qui me rendez tendu, dépêchez vous de faire votre rendez-vous ou je vais m'énerver."

D'une démarche volontairement lente, elle se dirigea alors vers les deux jeunes garçons, qui ne disaient rien et évitaient son regard. Voyant cela, elle les rassura :

"Vous savez, on va faire les choses à votre rythme, si vous avez du mal à parler, je ne vous forcerais pas. Il y a un endroit un peu isolé où on pourrait faire notre entretient ?

- Euh..." suggéra Daniel "Y a le salon, personne est dedans là.

- Dans ce cas, direction le salon." Voyant le regard de Juan tandis qu'elle s'y rendait, elle lui sourit "Ne vous inquiétez pas, ils devraient survivre une discussion de trente minutes."

Tandis qu'il maugréait des insultes en espagnol, ils disparurent dans la maison avant de s'installer dans le salon à la décoration surchargée hors de prix. Les cousins s'assirent sur le sofa, tandis que la psychiatre se mettait au fond d'un canapé, un calepin dans les mains. Calmement, elle demanda :

"Alors les garçons, comment vous allez ?

- Bah ça va, enfin je crois !" répondit Antoine "Enfin c'est difficile de savoir, des fois c'est bon et d'un coup pouf, ça va pas.

- Pareil" admit Daniel "Et des fois ça re-va bien après alors que j'allais pas bien.

- Bah oui bah oui, tout comme il a dit Daniel !

- Et quand ça ne va pas bien alors" les interrogea le docteur "C'est à cause d'une raison particulière ?

- Euh, des fois oui, et des fois non." réfléchit Daniel "Parfois j'mange le p'tit déjeuner, ou j'regarde la télé, et ça m'tombe dessus d'un coup. Et des fois j'y r'pense. Surtout la nuit.

- Oui, la nuit on a du mal à dormir madame, on r'voit tout dans notre tête.

- D'accord. C'est entièrement normal, il faut que vous le sachiez. Les victimes de traumatisme vivent pour beaucoup ce que vous vivez, certains pendant toute leur vie s'ils ne sont pas pris en charge. Heureusement pour vous, monsieur Peine vous a immédiatement dirigé vers moi, et votre prise en charge est rapide. Est-ce qu'il y a des raisons particulières, des sensations, des odeurs, qui vous font avoir les souvenirs ?

- Les endroits sombres." approuva Antoine "Des fois le soir, quand j'vois une pièce sombre, j'ai l'impression que dans l'coin du fond j'vais encore voir le journaliste.

- Et moi c'est l'essence." Compléta Daniel "Quand je sens l'odeur, ça me rappelle le parking, et tout me revient en tête.

- Est-ce que ça a un impact sur votre vie ? Autre que mentalement j'entend. Des problèmes pour manger, des réactions bizarres...

- Oui..." affirma Antoine en hochant la tête "J'ai pas très faim en ce moment, mais je sais pas si c'est que ça, ou si c'est aussi qu'on est loin de chez nous.

- Pareil" répéta Daniel "J'ai pas vraiment faim, et puis des fois je suis tout vide, j'ai pas envie de faire de chose"

Leur discussion continua ainsi pendant plusieurs dizaines de minutes. Vanessa les laissait dire ce qu'ils avaient sur le cœur, puis, lorsqu'ils avaient fini, elle les rassurait et leur posait de nouvelles questions ou leur donnait des conseils. Après pile une demi-heure, Juan arriva :

"C'est bon, trente minutes, vous y allez !

- Je n'ai pas fini, monsieur ! Vous voulez que les cousins soient traumatisés toute leur vie ?

- Bien sûr que non, enfin !

- Alors laissez nous, sinon je vous fait sortir moi même de la pièce.

- Je vais vraiment m'énerver un jour, vous allez pas comprendre."

Il quitta alors la pièce en bougonnant, tandis que le rendez-vous se poursuivait. Un quart d'heure plus tard, la psychiatre rangea son calepin après avoir à nouveau rassuré les Croute.

"J'ai un autre patient à voir, il faut que j'y aille. On se revoit dans une semaine ? Prenez soin de vous, essayez de faire ce que je vous ai dit, les exercices de respiration, les petits jeu, les moments de réflexion, et vous me direz si ça fonctionne la semaine prochaine, d'accord ?"

Les deux adolescents la raccompagnèrent vers la sortie, tandis que Donatien de Montazac arrivait en même temps au domaine dans sa limouzine. Tandis qu'ils saluaient Vanessa, le vigneron sortit du véhicule en compagnie d'un homme d'une cinquantaine d'années, corpulent et habillé d'un costume noir. Ses cheveux bruns étaient plaqués en arrière, et il parlait fort avec un accent du sud de la France prononcé :

"Eh bien cher ami, c'est un plaisir de faire affaire avec vous ! Votre commande devrait aller d'autant plus vite que j'ai deux nouveaux employés qui vont m'aider pour la récolte, d'ailleurs les voici !"

Il les montra à l'homme, et les deux jeunes garçons lui firent un signe de la main en souriant. L'inconnu s'exclama alors :

"Eh mais Donatien, ça serait pas les deux gamins qui ont trouvé Bailey ça ?

- Un peu de délicatesse, monsieur Rotarez, ils sont ici pour se reposer et changer d'air ! Mais oui, ce sont bien eux.

- Je pensais pas les voir ici, con ! Les jeunots, reposez vous bien hein, c'est toute une histoire tout ça ! Au fait, je peux vous poser une petite question ?

- Je vous attendrais à l'intérieur cher ami !"

Donatien entra alors dans sa maison, tandis que Rotarez s'approchait des deux cousins, intimidés. De près, ils sentaient une odeur d'alcool et d'eau de Cologne se dégageant de lui, mais firent mine de ne rien remarquer. Il se pencha légèrement et demanda d'une voix plus basse :

"Le Yann Allée, celui que vous avez vu là, il vous a dit quelque chose quand vous l'avez vu ?"

Antoine et Daniel secouèrent négativement la tête, et l'homme d'affaire eut une petite expression indescriptible avant de se redresser :

"D'accord, merci bien !"

Il leur fit un signe de main et entra à la suite de Donatien.

Chapter 15

Summary:

TW : mention de noyade

Chapter Text

Franck gara doucement sa voiture sur le parking du domaine. Il avait profité du fait que son tour était venu de patrouiller dans les environs dans le cadre de la protection des cousins pour aller leur rendre visite. Lorsqu'il sortit de la voiture, Kim le reconnut et vint vers lui :

"Alors, elle avance votre enquête ? Pas que je m'impatiente mais si les petits pouvaient revenir à la maison je serais contente.

- Je ne pense pas qu'on puisse dire qu'elle avance vraiment, surtout vu ce qui est arrivé avec les Pichon, la disparition des preuves, ce genre de chose. Mais disons qu'on solidifie les bases, et que dès que la bonne pièce de puzzle se mettra en place, ça devrait avancer.

- Eh bien, trouvez la vite alors. Vous venez voir comment ils vont ?

- C'est ça ! Vous savez où je peux les trouver ?

- Ils doivent être dans les vignes, en train de récolter du raisin avec une des sœurs Blake.

- Les sœurs Blake ?

- Des employées du vigneron. On leur fait confiance, on a deux ou trois petits arrangements avec elles depuis bien avant toute cette histoire.

- Si vous le dites. Gardez un œil sur elles quand même, on ne sait jamais.

- Eh, je suis une Vagos, et surtout je suis mariée à Miguel. Si y a bien un truc auquel je me suis habituée, c'est devoir me méfier de tout le monde. Dont des flics, d'ailleurs.

- Est-ce que c'est une façon de me dire que vous ne me faites pas confiance ?

- C'est une façon de dire que je fais partie d'un gang, que vous êtes littéralement mes ennemis, que en plus je ne suis pas certaine que les flics soient capables de résoudre cette enquête, et donc que les petits soient en sécurité.

- Je ne peux pas vraiment vous reprocher de penser ça, à vrai dire. Je suis aussi de cet avis dans l'état actuel des choses.

- Vous savez trouver les mots pour être rassurant vous."

Kim le mena alors en direction des Croute. Ils traversèrent le parking et s'éloignèrent du domaine, passant sur un petit pont au dessus d'un fossé, et Peine aperçut alors les habits colorés des deux jeunes garçons. Il remercia la gangster et s'avança vers eux, passant entre les vignes dont les grappes avaient déjà en grande partie été récoltées. Lorsqu'ils le remarquèrent, les deux cousins se mirent à courir vers lui, mais Daniel dut s'arrêter à mi-chemin pour attendre Antoine, qui avait trébuché sur une racine et s'était étalé de tout son long dans la terre. Il se releva cependant avec un grand sourire et de la crasse plein les cheveux avant de reprendre sa course en direction du policier. Une fois devant lui, ils le saluèrent avec un grand enthousiasme :

"Bonjour m'sieur !" dit Antoine "Ca fait longtemps !

- Bah oui bah oui !" renchérit Daniel "Y a genre au moins deux jours qu'on est là !

- Vous avez avancé m'sieur ?" demanda Antoine "Vous savez qui c'était le méchant ?"

Peine sourit et leur répondit d'un ton bien plus calme :

"Non, je ne sais pas qui c'est pour le moment. Mais je travaille dessus, et les indices s'accumulent !

- Donc on rentre pas encore à la maison ?" demanda Antoine, déçu "C'est ça ?

- Non, pas encore, je suis désolé. Vous vous plaisez ici au moins ?

- Bah oui bah oui !" s'enthousiasma Daniel "C'est super !

- Alors, dites moi, vous avez fait quoi de vos journées ?

- Euh" commença Antoine" ben quand on est arrivés on a mis nos affaires dans le placard, c'était un grand placard un peu comme chez les vieilles grand mère riches.

- Ouais, comme dans Narnia un peu !

- Oui ! Et puis après on a mangé parce que quand même c'est important, et puis ensuite on a dormi, mais on a pas beaucoup dormi.

- Oui, on a du mal à dormir, on pense beaucoup à... à euh, à l'enquête ! Et du coup le lendemain, Fab il nous a montré comment récolter le raisin.

- Ouais, même qu'on avait du mal, on en faisait tomber la moitié par terre, hein Daniel ?

- Bah oui ! Du coup m'sieur Dona il s'est un peu énervé, mais il nous a pas trop grondé parce qu'il essayait de vendre une bouteille au policier donc il voulait pas être trop distrait !

- Même qu'il était très content quand le policier il a acheté la bouteille ! Mais le policier il a pas bu parce qu'il a dit qu'il était en service de vadrouille pour nous surveiller !

- Non en patrouille !

- Ah oui c'est vrai !

- Et puis on a encore mangé, puis on a récolté, et puis on a re-mangé et re-dormi, et puis ensuite on a récolté mais cette fois y a Lorenza qui nous a montré comment faire !

- Oui, elle est trop gentille Lorenza ! Et du coup on en fait presque plus tomber maintenant ! Du coup il est content Dona !

- Et pis après, y a Vanessa qui est arrivée, du coup elle a parlé et on a fait la séance de soutien traul...traumo...traumin... On a fait la séance de psy, et du coup après on allait mieux, même qu'on a réussi à bien manger !

- Oui, on était content, on a même mieux dormi qu'avant ! Ah et y avait le monsieur en costume qui a failli rester à manger mais il a dit que c'était urgent donc il est parti !

- Oui, m'sieur Rotzater j'crois ! Même qu'il était inquiet pour nous, il nous a demandé si le m'sieur noyé il avait dit un truc quand on l'a vu ! Mais nous on a dit non parce qu'il nous a rien dit."

Peine fronça les sourcils :

"Monsieur Rotarez ?

- Oui, c'est ça !" sourit Daniel "C'était Rotarez !

- Et vous dites qu'il vous a dit quoi ?

- Euh" réfléchit Antoine "il nous a demandé si le monsieur noyé il nous a dit un truc.

- Est-ce que vous vous rappelez précisément ce qu'il a dit ?

- Il a dit" tenta de se rappeler Daniel "Il a dit que m'sieur Yann Allée, le monsieur qu'on a vu, est-ce qu'il nous a dit quelque chose quand on l'a vu ?

- Oui c'est ça qu'il a dit Daniel !"

Peine leva un sourcil. Pourquoi donc Rotarez s'intéressait-il à Yann Allée ? Et plus précisément encore, à ce que Yann Allée avait dit quelques instants avant sa mort ? De toutes les questions qu'il aurait pu poser par curiosité malsaine, celle-ci était étrangement spécifique. De plus, comment un homme d'affaire tel que lui, responsable d'une entreprise de convoyeurs de fonds, pouvait-il connaître une petite frappe comme Yann Allée, le genre d'individu sans envergure ni intérêt qu'il ne devait que rarement croiser, et plus rarement encore faire affaire avec. Il allait falloir enquêter, une visite des locaux s'imposait.

Chapter 16

Summary:

TW : menaces, alcool

Chapter Text

Les locaux du Gruppe6, l'entreprise de convoyeurs de fond de Marius Rotarez, étaient situés en grande partie au rez-de-chaussée du siège de la banque Union Depository, accessible via Low Power Street, à Pillbox Hill. Peine tourna et s'arrêta devant la barrière bloquant l'accès au parking extérieur. L'employé le fit attendre quelques instants lorsque Peine demanda à entrer, et finit par le laisser passer. L'officier de police gara alors sa voiture et en sortit avant de se diriger en direction des locaux, accessibles en entrant dans le parking sous l'immeuble. L'éclairage y était faible et jaune, avec des ampoules laissant échapper un constant grésillement. Plusieurs fourgons noirs ornés d'une bande verte claire et du nom de l'entreprise y étaient garés, attendant d'être emmenés pour un transfert. Une forte odeur d'essence et de gomme brulée flottait dans l'air, et le son des aérations ne parvenant qu'à peine à empêcher le lieu de surchauffer soufflait en permanence. Un employé sud-asiatique habillé d'un uniforme noir de l'entreprise arriva alors vers l'agent et demanda :

"Bonjour, est-ce que je peux vous aider ?

- J'aurais besoin de voir monsieur Rotarez, dans le cadre d'une enquête pour le LSPD, est-ce qu'il est là ?

- Je vais voir ça tout de suite.

- Pas besoin, Bobby !" affirma une voix teintée d'un fort accent du sud "Je m'en charge !"

Marius Rotarez, habillé d'un costume noir et la peau perlée de sueur à cause de la chaleur du lieu, s'approcha en souriant, tandis que son employé le saluait et retournait à son poste. L'homme d'affaire tendit sa main au policier et demanda :

"Bonjour monsieur l'agent, alors dites moi tout, à quoi est-ce que je dois votre visite ?

- Bonjour monsieur Rotarez" le salua Peine en lui serrant la main "J'aurais quelques questions à vous poser, est-ce qu'il serait possible qu'on le fasse dans un lieu un peu plus privé ?

- Oui, sans problème, comment est-ce que vous vous appellez ?

- Je suis l'agent Peine, du LSPD.

- Enchanté Monsieur Peine. Je vous guide !"

L'homme d'affaire le fit alors entrer dans les locaux. Ces derniers étaient éclairés, climatisés, et bien plus respirables, l'absence des odeurs du parking laissant cependant la place aux vapeurs d'alcool entourant Rotarez. Il le guida jusqu'à un bureau, avant de l'inviter à s'assoir en face de lui. Il sortit alors une bouteille de whisky et la proposa à Peine, qui refusa d'un petit mouvement de main.

"Alors, dites moi tout !"

Demanda le sudiste tout en se versant un verre. Peine se redressa légèrement et demanda :

"Vous avez probablement entendu parler de ce qui est arrivé à monsieur Bailey ?

- Quoi le journaliste ? Oui, j'en ai entendu parler. J'vais pas vous baratiner, c'était pas particulièrement quelqu'un que j'appréciais, le genre à fourrer son nez là où les gens raisonnables évitent de le faire, si vous voyez ce que je veux dire. Mais bon" plaisanta-t-il en buvant une gorgée dans son verre "quelqu'un a eu la bonne idée de le faire dormir avant que j'ai à le faire."

Peine leva un sourcil et inclina légèrement la tête sur le côté, interloqué, avant de demander :

"Vous vous rendez compte que c'est assez compromettant comme déclaration ?

- Si vous aviez pas attrapé son tueur, oui ! Mais vous l'avez trouvé, je me trompe ?

- Vous ne vous trompez pas.

- Eh bien voilà. Et ce tueur, aux dernières nouvelles, c'est pas moi ! Donc pas besoin d'être dramatique.

- Vous savez que son tueur a été retrouvé mort, lui aussi ? Et qu'on a pas retrouvé son assassin, dans son cas ?

- Et donc vous pensez que je suis responsable ?" Il but une nouvelle gorgée avec un petit rire avant de poursuivre "Vous allez avoir du mal à le prouver.

- Je n'ai pas dit que c'était le cas. Je ne suis pas venu avec des accusations mais avec des interrogations. Vous n'aurez aucune raison de vous inquiéter si vous coopérez, je ne fais que mon travail, monsieur.

- Vous savez, monsieur Peine, je pourrais bien refuser de parler et je n'aurais pas besoin de m'inquiéter non-plus. Vous connaissez mon influence, vous savez que j'ai raison.

- Vous pourriez être le président, ça ne changerait rien. Est-ce qu'on peut en revenir à mes questions, monsieur Rotarez ?"

L'homme d'affaire grogna en finissant son verre avant de s'en resservir un, et le policier continua :

"Est-ce que vous pourriez me parler de vos relations avec le club Unicorn ?

- Oh, mais quel rapport ave Bailey là ?

- Répondez moi, s'il vous plaît.

- C'est des bons clients. On vient souvent pour transférer leurs recettes. C'est bon, ça vous convient ? Ou il faut que je vous apporte nos contrats ?

- Non, ça ira merci. Est-ce que vous avez déjà, vous, vos employés ou votre entreprise de façon générale, eu affaire au gang des Families ?

- Oh, ça a pu arriver pendant des transferts. Mais on a des fourgons blindés, ils sont pas de taille avec leurs bagnoles.

- Aucune relation amicale, voire même de simple fréquentation sur le temps libre ?

- Pas que je sache. Je dois avoir le numéro du chef, pour tout vous dire, mais c'est juste parce qu'il m'a appelé pour me menacer.

- Et si je vous donne les noms de Twain Logan, dit MT, Liam Dunne, Marcello Capone, Thomas Giorno, Yann Allée, ça ne vous dit rien ?

- Ah mais si, Marcello ! J'ai oublié de vous le dire, mais avant qu'il rentre dans les Families, quand c'était encore un gars qui travaillait dans la scierie au nord de la ville, on a déjà fait un peu de pêche ensemble. Mais ça fait des années qu'on a pas parlé.

- Et les autres noms ?

- Je connais MT quoi, c'est le chef. C'est la même avec Lenny Johnson chez les Vagos.

- Aucun autre ?

- Non, aucun autre. C'est quoi cet interrogatoire, vous pensez qu'on pique-nique tous les samedis sur la plage avant de jouer au volley en maillot de bain ?

- Donc vous maintenez, vous n'avez aucun contact particulier avec les Pichon, et vous ne connaissez les Families que grossièrement ?

- Je maintiens, oui, et je maintiens que tu commence à beaucoup me rappeler Bailey. Te mêle pas des affaires de Gruppe6, et tout se passera bien.

- Vous êtes en train de me menacer ?

- Je suis en train de sous-entendre. Mais ça peut venir, si tu fais pas attention.

- Vous savez que je vais devoir faire mon rapport au capitaine ?"

Rotarez finit alors son verre d'une traite avant de frapper le bureau et de se lever, postillonnant en beuglant de son haleine alcoolisée :

"J'en ai rien à foutre de ton rapport ! Le capitaine me connait, tes collègues me connaissent, et t'as pas intérêt à faire le main parce qu'ils risque de pas te défendre. Compris, Peine ?"

Le policier se leva à son tour, rajustant son uniforme, avant de déclarer :

"Je conclue que notre entretien est terminé ?

- T'as bien conclu. Dégage de mes locaux"

Il quitta alors le bureau, tandis que Rotarez se servait un troisième verre, les mains tremblantes et le visage rouge de colère. Il traversa à nouveau le parking souterrain et sa chaleur lourde avant de retourner à l'air libre, le brise, bien que chaude, lui faisant l'effet d'une bouffée d'oxygène après l'atmosphère pesante de Gruppe6. Alors qu'il allait rejoindre sa voiture, il remarqua alors une jeune femme blonde qui se dirigeait vers l'entrée. Elle le remarqua également et vint vers lui avec un sourire :

"Bonjour madame Carter !

- Bonjour monsieur Peine ! Qu'est-ce que vous faites ici ?

- Mon travail, et vous ?

- La même chose ! J'ai appris que Rotarez était ami avec Capone il y a quelques années, alors je me suis dite qu'il y avait peut-être quelques liens avec l'affaire en cours !

- Pardon ? Qui vous a dit ça ?

- Je suis retournée au Unicorn, comme il a rouvert. C'est Bernard Pichon qui me l'a dit !

- Comment ça se fait que Pichon vous a donné ce genre d'info ?

- Il a bien aimé l'article que j'ai fait sur votre petite opération, vous vous en rappelez ? Avec la photo de votre belle figure en une !

- Oui, pas la peine de remuer le couteau dans la plaie.

- Eh bien voilà, on a discuté, je lui ai posé quelques questions sur les Families, évidemment il a fait comme s'il n'avait aucun lien avec eux mais il m'a dit quelques anecdotes qu'il connaissait à leur sujet. Sans grand intérêt, sauf celle sur Rotarez ! Et me voilà. Et vous ?

- Il est passé chez Montazac et a posé une question aux Croute sur Yann Allée, et pourtant il vient de me soutenir qu'il ne connaissait pas ce nom.

- Suspect, donc.

- En effet. Je vous déconseille d'y aller, honnêtement, il m'a dégagé comme un malpropre quand j'ai posé trop de questions, et il m'a dit presque sans subtilité qu'il aurait fini par faire assassiner Bailey si quelqu'un s'en était pas chargé avant lui, et que justement, j'avais tendance à un peu trop lui rappeler Bailey.

- Il a presque autant de considération pour le LSPD que moi, on risque de bien s'entendre ! Ne vous faites pas de bile, je sais ce que je fais. A une prochaine, monsieur Peine !"

La journaliste se détourna en direction de l'entrée, et l'agent la rappela :

"Sarah ?

- Oui ?

- Faites quand même attention à vous !

- Je vous l'ai dit, je sais ce que je fais."

Chapter Text

Laissant Sarah à son projet, Peine prit alors sa voiture et retourna au commissariat. Il se gara, décidé à mener discrètement l'enquête sur la taupe des Families au sein du LSPD. Il parcourut les couloirs avant de se rendre dans l'open-space, où il espérait pouvoir parler à Chloé, afin de comprendre la raison de sa présence régulière au Unicorn, comme Monnay le lui avait signalé. Cependant, dans la pièce, son bureau était vide. Michael était en train de travailler, et l'agent lui demanda :

"Excusez moi, vous savez où est l'agent Sterling ?

- Panis est parti en patrouille, elle doit être avec lui.

- Ok, merci, je lui parlerais quand elle reviendra."

Il s'approcha alors de l'agent et engagea l'air de rien une conversation :

"Est-ce que vous arrivez à avancer, depuis l'autre jour ?

- Non, c'est catastrophique. Avec la disparition des preuves, c'est presque comme si on était revenus en arrière. Et vous, ça bouge ?

- Disons que ça se met en place. Dites, c'est peut-être sans aucun rapport, mais j'ai cru comprendre que Rotarez avait des connaissances dans la police, vous savez de qui il parlait ?

- Eh bien, il y a le capitaine, même si c'est pas vraiment des amis, et sinon il y a moi ! J'ai bossé à Gruppe6 pendant quelques années avant d'entrer dans la police. C'est un beau métier de protéger notre économie a-mé-ri-caine.

- Je ne savais pas du tout ! Et pourquoi vous avez changé ?

- J'avais simplement besoin de nouveauté, et quoi de mieux après avoir protégé notre économie que de protéger nos citoyens a-mé-ri-cains ? Sauf les communistes, évidemment.

- Et vous êtes toujours en contact avec Gruppe6 ?

- Pas vraiment non. Parfois je prend une bière avec Angelo, le fiston de Rotarez.

- Eh bien je n'étais pas du tout au courant, c'est intéressant de découvrir l'histoire de ses collègues comme ça. Vous savez si il y en a d'autres dans le commissariat avec un métier dont on ne se serait pas douté ?

- Panis a été bucheron il me semble.

- Ben vous voyez, ça, ça ne m'étonne pas. Je trouve que ça correspond au personnage.

- Je suis d'accord. Sinon Monier est un sale communiste.

- Vous savez, ce n'est pas un métier ça.

- Non, c'est une idéologie de fils de pute.

- Enfin, c'est de vos collègues dont vous parlez ! Comment vous pensez pouvoir défendre l'Amérique si vous n'êtes pas solidaire ?

- J'défendrais pas l'Amérique avec des traîtres de communistes ! Surtout quand c'est sûrement sa faute si on a perdu les preuves.

- Pardon ?

- Déjà, il était chargé de la perquisition de la salle principale du bar, rien dit qu'il a pas aidé les Families à s'enfuir pendant que Jean et moi on faisait évacuer les clients.

- Mais pour les preuves ?

- Je sais pas, c'était pas lui qui était chargé de les transporter jusqu'au commissariat ?

- J'étais déjà parti à ce moment là, mais si vous le dites !"

Après quelques minutes d'échanges de banalités sans apprendre de nouvelle information, Peine alla dans son bureau pour avancer sur sa propre enquête. Cependant, son esprit s'échappait toujours et il n'arrivait pas à cesser de penser à cette taupe des Families se cachant au sein de la LSPD. La voix de Monier s'éleva alors de la radio, informant de son retour de patrouille, et Peine se leva immédiatement avant d'aller le retrouver tandis que le rouquin sortait du garage.

"Salut Monier.

- Salut Peine ! J'peux faire quelque chose pour vous ?

- J'aurais deux trois questions, j'essaie d'éclaircir un peu les évènements.

- Sur ce qui s'est passé avec les Pichon ?

- C'est ça. Il me semble que c'est vous qui avez perquisitionné la salle principale du bar, vous n'y avez rien vu ?

- Non, ou alors si les Families étaient là, ils m'ont filé au nez et à la barbe.

- D'accord. Et concernant les sacs de couchage, on m'a dit que c'était à vous de les acheminer au commissariat pour les analyses ?

- Vous seriez pas en train de dire que c'est moi qui les ai fait disparaître, quand même ?

- Je n'ai rien dit, Monier, j'essaie de comprendre.

- Oui, c'était moi qui les ai acheminés. Quand on allait repartir du Unicorn, Panis m'a averti qu'il les mettait dans mon coffre, et on est tous rentrés au commissariat. Quand on est arrivés, on est allés faire un rapport rapide et quand je suis retourné chercher les sacs dans mon coffre, il y avait plus rien.

- Et vous avez aucune idée de qui les a volés ?

- Non, sinon on les aurait retrouvés rapidement !"

Peine fronça les sourcils avant de le remercier et de retourner dans son bureau. Il ne tenta même pas d'avancer, et laissa son esprit vagabonder. Monier aurait pu se débarrasser des sacs sur le trajet, ou les dissimuler le temps de dire qu'ils avaient disparu, avant de s'en débarrasser plus tard. Michael, lui, avait fait partie de Gruppe6 durant un temps. Si Rotarez était bien en lien avec les Families, Michael aurait pu être dans le coup, et par conséquent devenir un informateur au sein de la police. Il avait aussi pu voler les sacs dans le coffre. Il y avait également Sterling, qui se rendait parfois au Unicorn et laissait facilement échapper des informations. Elle aurait pu voler les sacs dans le coffre de Monier. Peut-être encore était-ce quelqu'un d'autre ? Avec un peu de chance, la journaliste Sarah Carter reviendrait des locaux de Gruppe6 avec quelques informations plus intéressantes ?

Chapter 18

Summary:

TW : mention d'alcool, de mort et de nudité

Chapter Text

Le téléphone de Peine sonna, signalant que quelqu'un demandait un agent à l'accueil. Agacé par son incapacité à avancer, et par l'absence totale de preuves, il se leva afin d'aller se changer les idées, et descendit, pour trouver Sarah Carter. La journaliste lui fit un signe de la main avant d'affirmer :

"Vous savez, ça serait bien plus simple si on échangeait nos numéros, vous ne trouvez pas ?

- Vous avez obtenu des infos ?

- Une chose à la fois, d'abord on échange nos numéros. Si on continue à se croiser comme ça pour cette enquête, autant avoir un moyen de se contacter rapidement."

Franck soupira avant de sortir et d'échanger son contact avec Sarah, qui eut un petit sourire satisfait, avant de déclarer :

"Est-ce qu'il serait possible de parler autre part ? Figurez vous que je n'ai pas confiance quant à notre discrétion ici."

Peine hocha la tête et ils sortirent sur le parvis. Quelque peu frustré, il demanda :

"Est-ce que cette fois je peux savoir ce que vous avez appris ?

- Mais tout à fait ! J'ai appris : pas grand chose. En tout cas, pas grand chose qui puisse nous éclairer sur le double meurtre. J'ai prétexté vouloir faire un article sur l'économie de la ville, et donc vouloir interviewer Rotarez. Il a accepté sans problème. Vous ne mentiez pas d'ailleurs, vous me l'avez perturbé, il était tout grognon au début.

- S'il vous plaît, on peut en venir aux faits ?

- Oui, oh mais quel impatient vous faites ! En bref, il m'a dit qu'il était en bon termes avec les Pichon, et qu'ils se rendaient souvent des services. Il m'a aussi dit qu'il attendait de grosses rentrées d'argent prochainement, qui allaient aider l'entreprise, sans vraiment préciser leur provenance. Je suppose que vous pensez comme moi ?

- Le pactole de la Pacific.

- Exactement ! En tout cas, ce serait logique. Il m'a aussi dit qu'il avait passé une grosse commande au domaine Montazac-Torez, justement pour fêter cette rentrée d'argent. Et devinez quoi ? Il m'a dit que la commande était pour dans deux jours, et qu'il s'y était pris un peu au dernier moment car la fête est dans cinq jours, mais que devant la somme, Montazac l'a fait passer immédiatement en priorité. Et évidemment, il s'est vanté sur le fait que ça aidait l'économie de la ville, tout ce tintouin, comme c'était soi-disant le sujet de mon reportage.

- Donc on a Rotarez qui va dans quatre ou cinq jours recevoir un gros pactole, possiblement venant de la Pacific ?

- Evidemment, il ne s'agit que de suppositions. Mais je me suis demandée : pourquoi quatre ou cinq jours ? Comment se fait-il qu'il n'ait pas encore eu son argent ? Et je me suis rappelé : l'argent volé était en liquide, évidemment, mais il serait difficile de l'écouler ici alors que la police est sur les dents.

- Donc un transfert du pactole vers le continent aurait lieu d'ici quelques jours. Enfin, si ce que vous dites est vrai, et qu'on ne part pas sur une totale fausse piste.

- Si Gruppe6 est vraiment impliqué, alors tout se lie. Les Families braquent la banque, cachent leur pactole chez Gruppe6, donc le dernier endroit où on penserait à regarder pour le trouver, puis vont se cacher chez les Pichon, qui les hébergent. Là, la taupe dans la police fait en plus de son mieux pour ralentir vos efforts, et une fois le pactole en sécurité, ils peuvent bien faire ce qu'ils veulent : ils sont tellement riches qu'ils sortiront de prison en quelques mois.

- Et par conséquent, si la taupe est découverte, toute l'opération est en danger, sans compter le fait que des figures comme les Pichon ou Rotarez risquent de se faire pincer. Donc quand Bailey fait son article, ils envoient Allée le tuer, puis tuent ce Allée car il est connu pour être trop bavard, et que le risque est bien trop grand."

L'excitation grimpait en Peine. Si ils parvenaient à faire tomber la moindre de ces personnes, alors les Families tombaient, et avec eux tout un réseau de corruption qui leur était complice. Cependant, il était nécessaire d'agir vite. S'il ne restait effectivement que quatre à cinq jours, peut-être même encore moins, alors ils étaient dans une course contre la montre pour trouver cette taupe, et découvrir la date du transfert ou sa localisation, le tout sans aucune preuve concrète à présenter au capitaine pour déclencher une quelconque opération. Le policier déclara :

"Le temps nous est compté, on a plus le droit à l'erreur. J'irais avertir les cousins que si Rotarez revient au domaine, alors il ne doivent lui donner aucune informations. Et pour la taupe, on a plus vraiment le temps de se poser des questions, il faut la pousser à se dévoiler.

- Mais la pousser à commettre une erreur va être compliqué. En admettant qu'on ait raison, que tout ce beau monde soit impliqué et qu'un transfert arrive dans quelques jours, alors sa vigilance sera d'autant plus grande. Je vois difficilement comment il serait possible de trouver la taupe sans aller directement devant elle et lui dire Hé toi, je sais que t'es la taupe, rend toi !, en espérant qu'elle avoue tout."

Peine soupira, en pleine réflexion. Soudain, une idée lui vint :

"Peut-être qu'on peut faire croire à la taupe qu'on est sur le point de découvrir qui elle est, et lui donner l'occasion de nous en empêcher ?

- C'est-à-dire ?

- Votre patron, son article était sur son ordinateur, non ?

- La seule copie oui, mais l'ordinateur a disparu ! Vous savez où il est ?

- Moi non, mais la taupe ne le sait pas. On pourrait faire croire qu'on a récupéré l'ordinateur, ce qui la forcerait à tenter de le prendre.

- Vous ne pensez pas que ceux qui ont tué Bailey l'ont récupéré ? Et donc que la taupe saura qu'il s'agit d'un mensonge ?

- On a plus vraiment l'occasion de douter. Rien ne coûte de tenter !

- Vous n'avez pas tort.

- Bon, je vais aller au domaine pour prévenir les cousins. Vous pourriez essayer de retrouver le modèle d'ordinateur qu'avait Bailey ?

- Le modèle je ne sais pas, mais je me rappelle de sa sacoche. Je passerais prendre un vieil ordinateur qui ne fonctionne plus chez moi, je le mettrais dans la même sacoche, et je vous le donnerais."

Ils se séparèrent alors, et la journaliste partit de son côté. Peine prit une voiture dans le parking, mais au moment où il allait sortir, vit que Panis et Sterling étaient eux-mêmes en train de rentrer. Faisant semblant de ne pas leur prêter attention, il prit sa route normalement, avant de se rendre chez Montazac. Le trajet fut plein de petites peurs dues aux excès de vitesse du policier, dans sa précipitation. Le soleil commençait à descendre dans le ciel, illuminant les vignes d'une lueur orangée particulièrement jolie. Une fois arrivé, il fut accueilli par un jeune homme en veste jaune portant des favoris courts, qui se plaça au milieu de l'entrée, l'empêchant de passer. Peine fronça les sourcils et sortit de la voiture :

"Je peux savoir ce qui se passe ?

- Y a déjà un policier qui patrouille ici señor, vous êtes pas censé venir. Pourquoi vous êtes là ?

- Je suis l'officier Peine, je suis chargé de l'enquête sur le meurtre de Bailey. C'est moi qui ai demandé à mettre en place la protection des cousins. Est-ce que je peux les voir, j'ai quelque chose à leur dire ?

- Désolé mais j'ai pas envie de faire une bêtise. Je préfère demander au jefe.

- Le jefe j'ai son numéro, je peux l'appeler devant toi et te montrer que j'ai le droit de venir."

Devant l'air circonspect du jeune homme, Franck sortit son téléphone et composa le numéro de Lenny Johnson avant de se mettre sur haut parleur. La voix du chef des Vagos ne tarda pas à sortir de l'appareil :

"Ouais, allo ?

- Allô, monsieur Johnson ? J'ai une jeune homme de votre bande qui m'empêche de rentrer chez Montazac, vous pouvez confirmer que je peux venir ?

- Quoi, Matéo ? Ouais ouais, ben si il m'entend, m'sieur Peine peut passer, ok niño ?

Sí jefe !"

Le Vagos ne perdit pas davantage de temps et raccrocha immédiatement. Le dénommé Matéo se dégagea alors de la route de Peine, qui fit entrer sa voiture dans le domaine avant de rapidement se garer.

"Ils sont où les cousins ?

- Ils sont à l'intérieur, ils regardent un film. Je vais les chercher señor."

Quelques instants plus tard, il revint avec les deux jeunes garçons. Devant leur air interrogatif, il affirma :

"Il faut que je vous dise quelque chose en privé, est-ce que votre ami peut s'éloigner ?"

Matéo hocha la tête et alla s'adosser au mur, les gardant en visuel sans pouvoir entendre ce qu'ils disaient. Le policier demanda :

"Alors les garçons, tout va bien depuis ce matin ?

- Bah oui m'sieur !" affirma Daniel "On a continué à récolter du raisin, et Matéo il nous a aidé !

- Oui" continua Antoine "Et là on regarde Le Loup de Wall Street, m'sieur Don Tello il a dit que c'était un de ses films préférés !

- Après c'est un peu bizarre comme film.

- Oui, dedans y a des dames toutes nues.

- Moi j'pense qu'on est un peu jeunes pour regarder.

- Oui j'pense aussi Daniel. Mais c'est rigolo !

- Euh, oui ? Enfin j'crois.

- Excusez moi les garçons ?" demanda Peine "Il faut que je vous dise une chose importante.

- Allez-y" l'encouragea Daniel "Moi j'vous écoute !

- Bah oui bah oui !" continua Antoine "On vous écoute m'sieur !

- Vous vous rappelez de monsieur Rotarez ?

- Le monsieur avec un accent du sud ?" demanda Antoine "Celui qui sentait le vin ?

- Celui là. Bien, je peux pas trop vous en dire, mais si il vous pose des questions, vous donnez aucune info, d'accord ?

- Ok m'sieur !" s'enthousiasma Daniel, en faisant un salut militaire "Tout comme vous dites, pas vrai Antoine ?

- Bah oui bah oui !" Fit Antoine en imitant son cousin "On dira rien de rien !

- Et si jamais vous l'entendez dire quelque chose sur un transfert, vous prévenez les Vagos, ils me transmettront, d'accord ? C'est très important.

- Oui m'sieur !" répondirent les cousins à l'unisson.

Franck sourit, et regarda le soleil se coucher. Il était trop tard pour tenter quoi que ce soit le jour même, mais le lendemain, à la première occasion, il allait tenter de démasquer cette taupe.

Chapter Text

Le lendemain matin, Peine rejoignit Sarah non-loin du commissariat, dans une petite ruelle. Elle avait avec elle une sacoche en cuir brun, qu'elle tendit à Peine :

"Voilà, la même que Bailey.

- Merci beaucoup." Répondit-il, en prenant l'accessoire "Pour ce qui est de payer…

- Pas besoin de me rembourser.

- Vous êtes sûre ?

- Trouvez cette taupe, ça me suffira. Débarrassez moi la ville des Families, de ceux qui les aident, et rendez la police un tant soit peu compétente. Je pense que c'est un bon payement.

- Je ne peux rien promettre, mais je ferais de mon mieux. J'espère que vous verrez la police sous un meilleur jour si j'y parviens.

- Il y a peu de chance que ça arrive" fit la journaliste avec un petit rire amer "Pas tant que le capitaine Boid sera en poste, ou même Kuck et les autres.

- Mais qu'est-ce qu'ils vous ont fait à la fin ?

- Je vous pose des questions moi ? Trouvez la taupe, c'est tout.

- Sarah…

- Appelez moi Carter, monsieur Peine. Et arrêtez d'essayer d'à tout prix me faire aimer le LSPD.

- Je suis désolé, je pensais que nos relations étaient cordiales !

- Elles le seraient si vous ne défendiez pas ces incompétents en permanence, d'accord ? Maintenant, allez bosser, et ne me contactez que si il y a du nouveau. Bonne journée."

Elle mit sèchement fin à la conversation avant de quitter la rue et d'entrer dans sa voiture, laissant Peine décontenancé devant son hostilité soudaine ainsi que sa haine apparemment injustifiée de la hiérarchie du LSPD. Il resta immobile quelques instants avant de prendre conscience du poids de la pochette sur son épaule, et se mit en chemin pour le commissariat. Il le savait, à cette heure-ci, tous ceux qu'il soupçonnait seraient dans l'open space. L'occasion idéale pour leur faire voir l'appât. Il entra dans le bâtiment et alla se changer. Cependant, alors qu'il allait monter, il croisa le capitaine Boid, qui affirma d'un ton sans réplique :

"Peine, venez dans mon bureau tout de suite."

Sans prendre le temps de lui expliquer la raison, il traversa l'accueil et y entra, et Peine le suivit. Boid lui montra le siège, où l'officier s'assit, posant la pochette à côté de lui, plein d'appréhension. Le capitaine resta silencieux un instant, cherchant quelque chose dans ses papiers, puis déposa une petite pile de feuille sur le bureau. Peine reconnut là ses rapports d'enquête, mais ne préféra rien dire. Boid demanda :

"Alors ?

- J'ai peur de ne pas comprendre, mon capitaine.

- Ah, vous ne comprenez pas ? Moi non-plus figurez vous.

- Je vous demande pardon mon capitaine ?

- C'est quoi ces rapports, Peine ? Je vous file une enquête très importante, et vous me faites des rapports bâclés, où la moitié des éléments ont l'air d'être omis. Par exemple, ce rapport" dit-il en saisissant une feuille et en la montrant à l'officier "C'est celui d'hier. Où est Rotarez ? Pourquoi vous ne mentionnez pas une seule seconde le fait que vous êtes allé à Gruppe6 pour lui poser des questions ? Et d'ailleurs, pourquoi vous y êtes allé, est-ce que vous aviez la moindre raison pour ça ?"

Devant l'air circonspect de Peine, Boid reposa la feuille et affirma, haussant le ton :

"Oui, je sais que vous êtes allé le voir, il m'a téléphoné hier, complètement saoul, pour me parler de votre intervention. Je me suis dit que vous aviez sûrement une bonne raison d'y aller, que je verrais dans votre rapport, et que j'allais passer sur le fait que vous ne m'aviez pas averti de votre initiative. Mais quand j'ai lu votre rapport, il était bâclé comme tous les autres. Si vous ne mentionnez pas ça, il y a quoi d'autre que vous m'avez caché, Peine ? Comment vous voulez que je vous fasse confiance sur votre capacité à enquêter ?

- Je suis désolé mon capitaine.

- Vous avez intérêt à être désolé. Je vous retire l'affaire, je vais la donner à quelqu'un d'autre et vous allez bosser comme tout le monde sur le braquage de la Pacific."

Peine sentit son ventre se contracter tandis que son anxiété le prenait à la gorge. Il se leva et demanda d'une voix qu'il peinait à maîtriser :

"Mon capitaine, ne faites pas ça s'il vous plaît.

- Ah oui, pourquoi ça ? Vous pensez que vous êtes meilleur que les autres agents ?"

L'officier regarda rapidement derrière lui, afin de vérifier que personne ne se trouvait derrière la vitre de la porte, puis se pencha légèrement en avant en baissant le ton :

"Je suis presque certain qu'il y a dans le LSPD une taupe des Families."

Le capitaine fronça les sourcils et demanda :

"Dites m'en plus ?

- Mon enquête tend à le montrer."

Boid s'assit avant de baisser le ton et de s'avancer légèrement puis confessa :

"Ca fait un moment que je suspecte ça, mais je n'en ai parlé à personne. D'autres personnes le savent, à la LSPD ou à l'extérieur ?

- Une personne extérieure."

Le capitaine soupira et se frotta les tempes, avant de poser son regard sur les rapports incomplets :

"C'est pour ça qu'il manque des infos ?

- Oui mon capitaine. Je ne savais pas à qui je pouvais faire confiance, ni qui aurait accès aux rapports.

- Je comprend mieux. Bon, suivez moi."

Le capitaine se leva et amena Peine au garage avant de sortir une voiture, où il invita Peine à rentrer. Il démarra ensuite et averti à la radio qu'il partait en patrouille.

"Ici, personne ne va pouvoir nous écouter. Donc maintenant, je veux toute l'histoire. N'oubliez pas un seul détail."

Tandis que le capitaine conduisait, Peine lui raconta alors tout ce dont il arrivait à se rappeler, chaque petit élément de l'enquête, chaque conclusion, chaque discussion. Lorsqu'il eut fini, il montra la sacoche en bandoulière :

"Madame Carter m'a donné la sacoche juste avant notre discussion de ce matin. J'allais passer dans l'open space avec, sous-entendre que c'était celle de Bailey, et espérer que la taupe tente de la voler une fois entreposée.

- Eh bien vous savez quoi Peine ? Votre plan est excellent, mais je vais ajouter ma contribution. Je vais vous ramener, vous aller entrer, passer dans l'open space mais ne rien sous entendre. Je passerais un appel radio, et je dirais ce qu'est la pochette. Ok ?

- Reçu mon capitaine.

- Parfait. Ah et, si vous revoyez Carter à un moment ou un autre ?

- Oui ?

- Dites lui… Dites lui que je suis désolé. Oui voilà, dites que je suis désolé."

Le capitaine déposa alors Peine à une centaine de mètres du commissariat avant de repartir en voiture. L'officier resta immobile quelques instants, sans vraiment comprendre la volonté du capitaine de présenter ses excuses à la journaliste, puis rentra et se rendit dans l'open space pour y trouver Michael, Guy, Panis et Chloé, qu'il salua. Ils le saluèrent en retour, sauf Monier, qui semblait ne pas l'avoir entendu, trop concentré sur son ordinateur. Peine l'appela, afin d'être certain que tout le monde prête attention à l'appel :

"Monier ?

- Mmh ?

- Bonjour peut-être ?

- Hein ? Ah oui, bonjour Peine. Désolé.

- Pas de problème."

Quelques secondes plus tard, la voix du capitaine s'éleva de la radio :

"Bravo Peine, pour la sacoche de l'ordi de Bailey. Allez la poser dans la salle des saisies, demain je ferais analyser les données.

- Reçu mon capitaine."

Franck alla alors poser le sac au milieu des autres affaires saisies et referma la porte, avant de s'installer non-loin et de lire divers papiers, afin de s'assurer que personne ne vienne. Si tout se passait bien, cette soirée serait décisive.

Chapter 20

Summary:

TW : armes, sang, violence

Chapter Text

Le midi, Franck prit une pause dans son service et sortit du commissariat. La chaleur, après avoir diminué durant plusieurs jours, faisait son grand retour, et l'air était déjà particulièrement lourd et sans brise. Plissant les yeux devant les intenses reflets du soleil sur le sol blanc de l'esplanade devant le LSPD, il demanda par messages à Sarah si ils pouvaient se voir, afin de l'informer de l'avancement de leur stratégie. Ils se donnèrent rendez-vous à quelques rues du bâtiment, à l'ombre d'un des grands immeubles du centre-ville. La journaliste le rejoignit alors qu'il venait de finir le sandwich qu'il s'était fait, et il s'essuya en hâte la bouche en y passant sa manche avant de la saluer. Visiblement toujours rancunière après leur conversation du matin, elle répondit à sa salutation sans un sourire :

"Venons-en aux faits, est-ce que ça a fonctionné ?

- Le capitaine Boid m'a pris à part, j'ai été forcé de lui expliquer. Il m'a dit qu'il soupçonnait également l'existence d'une taupe dans la police, donc il m'a aidé, et la pochette a été déposée dans la salle où on entrepose les saisies et les preuves. On se relaie pour surveiller.

- C'est Boid qui vous aide ? Vous êtes sûr de votre coup ?

- Oui. D'ailleurs, j'ai dû lui résumer notre conversation de ce matin.

- Vous lui avez dit ce que je pensais de lui ?

- Oui…

- Bien.

- Et en parlant de ça, il m'a demandé de vous dire qu'il était désolé.

- Désolé ?

- C'est le mot qu'il a utilisé. Il a un peu hésité, il n'avait pas vraiment l'air à l'aise."

Sarah eut un petit rire amer, levant les yeux au ciel et cherchant ses mots. Pour la première fois durant une discussion avec Franck, elle semblait ne pas entièrement maîtriser la situation, et le contrôle de ses émotions la trahissait. Cet instant fut cependant court, et elle reprit avec aigreur :

"S'il est désolé, tout va bien alors.

- Je ne suis pas sûr de comprendre, madame Carter.

- Ne vous inquiétez pas, rien de grave. J'ai simplement attendu des années pour recevoir un "désolé", même pas de vive voix mais (sans vouloir vous offenser) via un intermédiaire.

- Est-ce que vous voulez que je transmette le message ?

- Pas la peine. Débarrassez cette ville des Families. On verra, peut-être qu'ensuite je serais disposée à accepter ses excuses. 

- Entendu… Je vous contacte si on y arrive ?

- Ca me convient. Je fais de même si je découvre de nouveaux éléments."

La journaliste repartit alors de son côté, et Peine reprit le chemin du commissariat. Lorsqu'il arriva, il descendit prendre le relai du capitaine Bill Boid, qui faisait mine d'y faire du tri. Le policier demanda :

"Vous avez vu Carter ce midi ?

- Oui mon capitaine.

- Vous avez transmis comme j'ai demandé ?

- Oui, j'ai dit que vous étiez désolé.

- Et ? Elle a réagit comment ?"

Franck détourna le regard, quelque peu embarrassé, puis admit :

"Elle n'a pas très bien réagit.

- Comment ça ?" s'agaça le supérieur "Je me suis excusé, alors que je m'étais juré de pas le faire.

- Elle a dit qu'elle avait attendu des années pour avoir un simple désolé. Et que vous ne lui aviez même pas dit en face."

Le capitaine soupira et se remit à faire du rangement sans lâcher un mot. Peine resta silencieux, ne sachant pas quoi dire et étant dans une incompréhension totale de ce qui liait Bill Boid à Sarah Carter. Alors qu'il ouvrait la bouche pour demander s'il devait prendre son poste à surveiller la salle, le capitaine frappa du plat de sa main l'une des étagères en métal et se mit à parler d'une voix tentant de cacher un mélange de colère et de regret :

"Pendant des lustres j'ai refusé d'admettre que j'avais merdé. J'y repense chaque jour, j'y repense dès qu'on parle des Families. Plus de six ans où j'ai fait de mon mieux pour ne pas la croiser, pas lui parler, pour ne pas me faire confronter. Et le jour où je m'excuse, elle me remercie comme ça ?"

Surpris, Peine n'osa pas répondre. Boid se tourna vers lui et haussa le ton :

"Bon, allez bosser vous, menez l'enquête, faites quelque chose. Revenez juste à 21 heures, et discrètement. Ne vous faites pas voir, annoncez votre fin de service comme tout le monde."

L'agent ne protesta pas et remonta. L'après-midi lui sembla interminable. Il fit une patrouille au plus chaud de la journée, la climatisation ne suffisant pas à rafraichir l'habitacle de la voiture bombardée des rayons intenses du soleil. Avec la température, presque personne ne sortait, faisant qu'aucune intervention n'était nécessaire. Après la patrouille, il tenta de se concentrer, d'écrire un rapport, de discuter avec les collègues qu'il croisait, mais ne grapillait à chaque fois que quelques minutes ne soulageant que bien peu son impatience. Lorsqu'il vit le soleil lentement s'approcher de l'horizon, il sentit son cœur faire un bond. Finalement, alors que ses collègues commençaient à partir, il sortit et dissimula son arme de service dehors avant de rentrer et de se changer en compagnie des autres. Tous les agents étaient présents, et il était impossible de savoir si l'un d'entre eux prévoyait de repartir. Il resta avec certains d'entre eux sur l'esplanade pour discuter, certains fumant une cigarette, jusqu'à ce que les lieux se vident et que tous partent de leur côté. L'horizon rougissait énormément, et Peine fit mine de partir également, prenant le chemin de son logement, avant de faire un grand tour et de se retrouver de l'autre côté du commissariat, par la sortie utilisée pour emmener les criminels en prison. Il entra dans la cours et retrouva son arme avant d'entrer dans le bâtiment par la sortie des cellules. Il descendit lentement les escaliers avant de marcher vers la salle des saisies. Là, il entra dans la salle la plus proche et ferma la porte, y posant son oreille afin d'entendre si quiconque approchait. Le bâtiment était silencieux, et les lumières éteintes, créant une obscurité quasi complète où ne perçaient que quelques diodes des caméras de sécurité ainsi que l'éclat vert des panneaux de sortie de secours. Plus d'une heure passa sans que rien n'arrive. Franck avait fini par s'assoir dos à la porte, arme en main. Cependant, aux alentours de 23 heures, un grincement de porte se fit entendre. Le policier se leva immédiatement et se prépara. Le son de pas tentant d'être discrets se fit entendre dans le couloir, se dirigeant vers la salle des saisies. Alors qu'ils passaient devant sa porte, Peine posa doucement la main sur la poignée, prêt à intervenir. Des cliquetis retentirent dans le couloir, puis le son d'une serrure que l'on travaillait. Après plus d'une minute, un déclic se fit entendre et la porte s'ouvrit. Le temps resta suspendu durant un instant, avant que la voix du capitaine ne s'élève :

"LSPD, mains en l'air !"

La personne inconnue se mit alors à courir dans la direction opposée, et Peine ouvrit la porte avant de la menacer de son arme, la prenant en tenaille. Cependant, il prit un coup dans le torse qu'il ne vit pas venir dans le noir, qui le fit tomber au sol. La lumière du couloir s'alluma soudainement et plusieurs coups de feu résonnèrent dans le bâtiment. Peine se redressa, le souffle partiellement coupé, et vit le capitaine se tenant à côté d'un interrupteur, son arme toujours devant lui. A l'opposé, une personne habillée de noir et portant une cagoule tactique était effondrée au sol, du sang s'écoulant de sa jambe. Son torse se soulevait irrégulièrement dans une respiration précipitée et saccadée à cause de la douleur. Les deux policiers coururent dans sa direction, et le capitaine saisit sa radio :

"LSPD pour LSMS, on a un criminel blessé dans l'enceinte du commissariat, tir dans la jambe. On est au sous-sol."

Une fois fait, il fouilla rapidement l'intru et lui retira un couteau ainsi qu'un fil d'étranglement, puis, avec un petit sourire, saisit sa cagoule tactique et la retira.

Chapter 21

Summary:

TW : fusillade, mort, feu

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Quelques minutes plus tard, les docteurs Maison et Holloway étaient sur place, leur matériel sorti. Ils s'affairaient autour de Alain Panis, dont la respiration était toujours aussi saccadée, tandis que le capitaine les observait, sa main toujours posée sur son arme. Peine, quant à lui, ne prêtait pas entièrement attention à la scène. Pensif, il tentait de retrouver tous les indices qui auraient pu le rendre certain de la culpabilité de Panis. Ce dernier, d'après Michael, avait été bucheron, or, selon Rotarez, le membre des Families Marcello Capone avait travaillé dans la scierie au nord de l'île. Certainement s'étaient-ils connus à ce moment là. Chloé Sterling, quant à elle, était régulièrement au Unicorn, mais patientait toujours avec les clients. Cependant, elle était toujours en duo avec Panis. Il devenait évident maintenant que ce dernier trouvait un prétexte pour aller donner des informations aux Pichon, laissant sa coéquipière dans la salle principale. Enfin, pour les sacs de couchage, probablement Panis ne les avait-il jamais mis dans le coffre de Monier, faisant croire à un vol dans sa voiture alors qu'ils ne s'y étaient jamais trouvés en premier lieu. Les médecins hissèrent la taupe sur un brancard, sa jambe enveloppée de bandages. Le capitaine demanda alors :

"Est-ce qu'il serait possible de le soigner à la prison ? Je préfère ne pas prendre de risque en l'amenant au LSMS.

- Au vu de sa blessure, cela devrait pouvoir se faire, cher ami" affirma le docteur Maison, en se frottant la moustache "Mais il faut se dépêcher. Si nous attendons trop, il ne sera possible de le soigner qu'à l'hôpital.

- Entendu. Peine, sortez une interceptor, j'escorterais l'ambulance. Quant à vous, vous serez à l'intérieur pour surveiller Panis.

- Reçu mon capitaine !" approuva Franck

Il traversa le couloir et les cellules avant de ressortir et d'entrer dans le garage. Il en sortit un véhicule, qu'il alla garer à côté de l'ambulance postée derrière le LSPD, gyrophares allumés et illuminant les murs de lueurs bleues. Quelques minutes plus tard, les médecins sortirent en portant Panis sur son brancard, qu'ils firent rouler jusqu'à la porte arrière du véhicule. Holloway entra à l'avant er démarra le moteur, tandis que le capitaine entrait dans son interceptor. Peine, lui, monta avec le docteur Maison à l'arrière de l'ambulance, et ils partirent alors en direction de la prison fédérale, les sirènes hurlantes. Tandis que le docteur Maison faisait divers examens à Panis, qui se contentait de serrer les dents, les yeux fermés, il demanda à Peine :

"Dites moi cher ami, ce monsieur Panis n'était-il pas normalement un membre de vos effectifs de police ?

- Si, monsieur Maison. Mais c'est visiblement une taupe au service des Families.

- Oh seigneur Dieu ! Des membres de gang au sein du LSPD, quelle horreur !

- Bailey l'avait découvert bien avant nous.

- Seigneur, c'est donc pour ça qu'il...

- Exactement.

- Cher ami, félicitation pour cette capture dans ce cas. Votre enquête est donc terminée ?

- Pas vraiment, mais je pense que le reste des informations est confidentiel.

- Je le comprend parfaitement, cher ami."

Ils se retinrent quelques instants, tandis que l'ambulance prenait un virage serré, puis le docteur reprit ses examens. Soudainement, Peine entendit la voix faible de Panis, qui tentait de parler. Il s'approcha, et le criminel demanda à nouveau, tendu par la douleur :

"Comment... L'ordinateur..."

Peine haussa les sourcils, sans comprendre. Puis il se rappela des réserves qu'avait eu Sarah Carter : si les Families avaient déjà volé l'ordinateur, la taupe ne pouvait pas tomber dans le piège. Franck demanda :

"Comment avons nous su que vous ne l'aviez pas ?"

Panis hocha la tête en grognant de douleur, et le policier eut un petit sourire :

"On en avait aucune idée. Du pur bluff, et ça a fonctionné."

La taupe serra les poings, visiblement en rage, puis ouvrit les yeux. Cependant, ce n'était pas de la colère qui s'y trouvait mais une peur soudaine. Il cracha :

"Où est-ce qu'on va ?

- En prison, cher ami" l'informa Maison "Nous allons y soigner votre blessure par balle, puis vous fournir une jolie cellule.

- Est-ce que...y a une escorte ?" demanda-t-il avec difficulté "Une protection ?"

- Oui, le capitaine nous suit en interceptor." déclara Peine "Pourquoi ça ? Vu votre état, il va être difficile de s'échapper.

- Non !" gémit Panis.

Il se redressa avec difficulté avant de saisir Franck par le gilet parre-balle et de le tirer vers lui. Le policier attrapa son poignet et le tordit, obligeant Panis à le lâcher, et lui fit savoir :

"Essayez même pas de résister, Panis, vous êtes fichu."

Le criminel se mit à se débattre et cria :

"On est tous fichus ici, tous, vous comprenez ?"

Peine fronça les sourcils devant cette panique soudaine, tandis que Panis affirmait :

"On va jamais arriver à la prison !"

Le docteur maison tenta de le rassurer, sans grand succès :

"Nous vous inquiétez pas, personne ne sait ce qui est arrivé ni où nous allons."

Cela ne calma pas les choses, tandis que la taupe continuait à se débattre. Alors que Peine sortait ses menottes, avec l'intention de l'attacher au lit, une détonation retentit et leur véhicule fit une embardée. La panique du criminel ne fit qu'augmenter, tandis que le son d'une fusillade se faisait entendre en dehors. Plusieurs impacts de balle apparurent sur la carlingue, mais ils ne pouvaient rien faire. Impuissant, les trois occupants du véhicule durent saisir ce qui les entourait afin de ne pas tomber, projetés au sol par les mouvements erratiques de l'ambulance.

"Seigneur Dieu, mais accélérez !" fit Maison, en tapant sur la cloison séparant la cabine de l'arrière, urgeant Holloway d'échapper à leurs poursuivants.

De nouveaux impacts firent cette fois des trous dans la carlingue, et Peine y jeta un œil, voyant alors une voiture verte dont la fenêtre avant était ouverte qui roulait à toute vitesse à côté d'eux. Il se baissa juste à temps pour éviter la détonation suivante. Leur vitesse ne faisait qu'augmenter, et le policier tenta de regarder à nouveau dehors, juste à temps pour voir leur poursuivant tourner dans leur direction. Il n'eut pas le temps d'avertir les autres avant que l'ambulance ne soit percutée. Ils cognèrent une barrière à leur droite, qui les fit tomber par terre, juste avant que leurs poursuivants n'assènent un nouveau coup. Cette fois, l'ambulance, par l'effet du choc et de sa vitesse, fit une embardée trop violente et perdit son équilibre. Elle se renversa sur le côté, projetant tous ses occupants les uns sur les autres. Le choc étourdit Peine, qui secoua la tête et tenta de se dégager des équipements qui lui étaient tombés dessus. A côté de lui, le docteur Maison se frottait la tête, visiblement bien plus sonné, et Panis était complètement inconscient. Le policier ouvrit tant bien que mal une porte, qu'il laissa tomber sur le sol. Le véhicule était touché sur le flanc dans le désert, à quelques kilomètres seulement de la prison. La voiture verte qui les avait attaqués était en train de faire demi-tour plus loin sur la route afin de revenir à la charge. Le policier tendit sa main à Maison et cria : 

"Il faut sortir d'ici ! Dépêchez vous !"

Le vieil homme tenta de reprendre ses esprits et saisit la main de Peine afin de s'extraire de l'ambulance. Il se dirigea immédiatement vers l'avant, où il aida son collègue à sortir de la cabine. Peine s'affaira ensuite à tirer Panis hors du véhicule, mais ce dernier était particulièrement dur à sortir. Le vrombissement du moteur de leurs attaquants augmentait toujours plus, et Peine dut se résoudre à laisser le criminel dans le véhicule le temps de prendre couverture. Cependant, la voiture ralentit une fois à proximité, et ne tira pas de coup de feu. A la place, un petit objet fut jeté dans l'ambulance. Comprenant qu'ils n'avaient que quelques secondes, Peine cria à Holloway et Maison de courir, et quelques instants plus tard, l'ambulance explosait, les projetant au sol. Les attaquants repartirent, suivis par une autre voiture verte, et disparurent dans la nuit. Un sifflement constant dans les oreilles à cause de l'explosion, Peine se redressa avec difficulté et observa le brasier entourant une structure métallique informe, qui se trouvait désormais à l'emplacement de l'ambulance. Il cria de frustration et de colère, réalisant que Panis avait été tué. Les deux médecins se relevèrent avec difficulté, s'entraidant, et observant les flammes projetant une lumière jaune sur le sable. La voix du capitaine s'éleva de la radio :

"Peine, est-ce que vous me recevez ?

- Capitaine ! Où êtes-vous ?

- Je vois du feu d'où je suis, c'est vous ?

- Oui mon capitaine.

- Ok, je suis à quelques centaines de mètres. J'ai une voiture qui m'a tiré dessus et m'a crevé les pneus, j'ai juste pu me garer sur le bord de la route et continuer à pied. Vous avez été attaqués par la deuxième voiture ?

- Oui mon capitaine. Panis est mort, les médecins ont besoin de soins mais ils ont l'air d'aller bien. Je ne garanti pas l'absence de commotion cérébrale passée sous le radar.

- Reçu. Putain mais comment ils ont su ?"

 

Chapter 22

Summary:

TW : mention de mort, de drogue, d'alcool, de violence, d'intimidation

Chapter Text

Les couloirs du LSMS étaient presque vides de toute activité. Quelques médecins de garde passaient entre les salles afin de surveiller que les patients n'avaient besoin de rien, dans un silence quasi total, brisé seulement par le son de moniteurs et l'eau passant dans la tuyauterie. Les urgences, cependant, étaient bien plus occupées. Le docteur Holloway y recevait un examen, surveillé par le docteur Maison, qui avait insisté pour être présent malgré ses ecchymoses et un œil au beurre noir qui gonflait de plus en plus malgré la glace qu'il appliquait dessus. Peine avait déjà été examiné, mais il avait été conclu qu'il n'avait rien de plus que des blessures superficielles. Seule une coupure assez profonde sur son arcade sourcilière avait nécessité des soins plus importants. Ils avaient été ramenés en hélicoptère peu de temps après l'attaque, et les pompiers avaient été envoyés pour éteindre le feu ravageant l'ambulance. Bill Boid était également resté à l'hôpital, malgré son absence de blessure, afin de s'assurer que tout le monde aille bien après cette opération qu'il avait ordonné. Il ne perdait cependant pas son temps, et avait déjà prévenu les autres membres du LSPD qu'une réunion se tiendrait le lendemain à la première heure afin de les informer des évènements. Lorsque l'examen de Holloway confirma qu'il n'avait rien de grave, le capitaine poussa un soupir de soulagement discret et se dirigea vers la porte de la salle. Cependant, la psychiatre Vanessa, suivie par Sarah Carter, y entrèrent en vitesse. La journaliste et le gradé échangèrent un regard surpris et mal à l'aise avant de reprendre leurs chemins respectifs. En voyant Peine, Carter se dirigea immédiatement vers lui d'un air soulagé :

"Monsieur Peine, vous allez bien !

- Madame Carter ? Qu'est-ce que vous faites ici ?

- Je mangeais en ville avec Vanessa pendant la pause de son service de nuit, et elle a reçu des appels radio qui la prévenaient de ce qu'il se passait. On a écourté le repas pour venir."

Peine pencha légèrement la tête sur le côté, sans comprendre vraiment pourquoi Vanessa avait autorisé une personne complètement étrangère au service à venir assister à ce qui s'y déroulait. Sarah comprit sa confusion et l'invita à sortir de la pièce avec elle, afin de lui donner d'autres explications. Ils allèrent alors dans le couloir et s'assirent sur un banc. Carter hésita légèrement avant d'affirmer :

"Désolée pour ce matin. Vous n'avez rien à voir avec mes problèmes, j'aurais dû mieux vous parler.

- Pas de problème, je comprend.

- Pas que ça vous autorise à encore faire de la copagande mais... voilà, désolée, ce n'est pas à vous que j'aurais dû m'en prendre.

- Je m'excuse pour mon insistance alors, je ne tenterais plus de vous faire avoir une bonne image de la police.

- Merci. Je suppose que Boid vous a demandé ma réaction ?

- Oui. J'ai l'impression qu'il vous considère ingrate de ne pas accepter ses excuses."

Sarah détourna le regard, visiblement énervée. Elle souffla du nez dans un agacement palpable, ouvrit la bouche pour parler, puis se ravisa. Ils restèrent silencieux durant une minute entière, tandis que Peine attentait patiemment. La journaliste finit par demander :

"Vous voulez savoir pourquoi Vanessa m'a autorisé à venir assister à des affaires privées du LSMS ? 

- Je me posais la question, oui. Je ne vous en voudrais pas si vous ne voulez pas en parler.

- Non, je pense que je vous doit quelques explications. Vanessa m'a autorisé à venir car elle sait que je travaille sur cette enquête, tout d'abord. Mais aussi car c'était une attaque des Families, qui plus est sur vous. Et vous êtes, en exagérant un peu, mon coéquipier sur cette affaire. D'après ce qu'elle m'a dit, vous savez qu'elle est psychiatre. Et je suis une de ses patientes. Elle a estimé que m'autoriser à venir serait la meilleure solution pour que j'aille mieux."

La jeune femme se tut et fixa le mur devant elle. Peine la laissa rassembler son courage, ayant bien constaté qu'elle n'avait pour le moment que distillé quelques informations superficielles, tournant autour du pot sans oser expliquer les détails de sa situation. Elle était, à cet instant, plus vulnérable qu'il ne l'avait encore jamais vue. Elle s'apprêtait à ouvrir la carapace d'assurance et de maîtrise qu'elle affichait depuis leur première rencontre, et probablement depuis des années avant cela. Après plusieurs minutes sans parler, à plusieurs fois inspirer comme pour commencer à s'expliquer puis à se raviser, elle finit par lâcher, d'une voix plus faible que d'usuel :

"Il y a six ans, je n'avais même pas fini mes études. J'étais juste une gamine de 20 ans, qui espérait devenir journaliste. Mes parents étaient morts depuis quelques années, et je vivais dans la maison qu'ils m'avaient laissés. Je m'occupais de Lucy. Ma petite sœur."

Elle s'interrompit un instant. Il s'agissait vraisemblablement de la première fois qu'elle parlait de ce sujet à quiconque en dehors de Vanessa depuis des années.

"C'était une petite d'à peine 16 ans. Elle avait du mal avec l'école, l'autorité… Elle avait très mal vécu la mort de nos parents. Elle a fait plusieurs passages en hôpital psy qui… n'ont pas aidé du tout, disons. Elle fuyait souvent la maison, pour rejoindre ses connaissances. C'est là que j'ai commencé à apprendre à connaître les petits malfrats de la ville, à force de leur parler pour retrouver ma sœur, toutes ces fois où elle partait. Au fil du temps, elle a commencé à avoir des problèmes. Je devais souvent aller la chercher au commissariat après qu'elle se soit faite arrêter pour du vol à la sauvette, de l'ivresse ou de la consommation de drogues en pleine rue, parfois des bagarres. Elle s'est mise à fréquenter des gens de moins en moins recommandables, dont beaucoup profitaient de sa fragilité pour la faire acheter la merde qu'ils vendaient. Je savais plus quoi faire, à chaque fois qu'elle disparaissait de la maison, qu'elle séchait les cours, je me demandais dans quel état j'allais la retrouver quelques heures ou jours plus tard. Mais j'ai jamais cessé d'essayer de l'aider. J'étais toujours là pour parler, pour comprendre, et elle le savait. Malgré tout ce qu'elle me faisait voir, on s'aimait. Vraiment fort. Elle pouvait juste pas s'empêcher d'y retourner. Et moi j'avais 20 ans, un job et des études en plus, et j'étais complètement perdue. Et un jour… Elle n'est pas rentrée."

Sarah cessa de parler, reniflant légèrement avant d'essuyer les larmes qui perlaient dans ses yeux à l'aide de sa manche. Elle reprit d'une voix légèrement tremblante, la gorge serrée :

"J'ai appelé la police , mais ils m'ont dit qu'ils ne l'avaient pas récupérée. J'ai passé des jours à être morte d'inquiétude, à ne pas réussir à sortir de mon lit le matin. Et j'ai finit par recevoir un appel. Ils l'avaient retrouvée morte, sous un pont, en centre-ville. Et là, j'ai appris que la police savait pour sa disparition depuis le début. Elle avait vu je ne sais quelle affaire illégale des Families, qui l'avaient enlevée, devant des témoins. Mais le LSPD a à peine essayé de négocier. Ils se sont dit que les Families n'oseraient pas tuer une gamine, qu'ils allaient la relâcher après lui avoir fait peur. Ils m'ont délibérément caché la vérité quand je les ai informés de sa disparition. Et quand elle est morte, ils ont refusé de s'excuser. Ils ont prétendu avoir fait de leur mieux mais avoir échoué. Tout ça n'a eu aucune conséquence sur eux. Pour la presse, c'était juste une camée de plus, tuée dans des affaires de gangs. J'étais toute seule, à insister pour au moins avoir droit à des excuses, un aveu du fait qu'ils auraient dû mieux faire, mais je n'ai rien eu. On m'a intimidée, menacée même. Boid, Kuck, Harris et d'autres de la hiérarchie, ont préféré faire pression sur une gamine de 20 ans à deux doigts d'abandonner ses études, dont la sœur était morte à cause de leur incompétence, plutôt que d'admettre qu'ils auraient dû faire plus. Quand je suis devenue journaliste, ils faisaient toujours en sorte de m'empêcher de parler d'eux. Evidemment, Bailey les écoutait, et ne me donnait jamais une seule affaire en rapport avec la police, jamais un article en lien. J'en ai rédigé quelques uns, mais ils n'ont jamais dépassé le stade de brouillon."

Elle reprit son souffle, les mains tremblantes et les jours humides, et continua, la voix vibrant de colère :

"Vous comprenez maintenant, pourquoi je veux débarrasser cette ville des Families ? Pourquoi à la première occasion qui m'a été donnée après la mort de Bailey et avant que Kenneth puisse avoir le moindre accord avec votre hiérarchie, j'ai fait un article incendiaire sur le LSPD ? Pourquoi un simple "désolé" de Boid ne me suffit pas ?"

Peine hocha la tête, compréhensif, et Sarah affirma :

"Demain, c'est le jour de la commande de Rotarez. On a que quelques jours pour que les Families reçoivent ce qu'ils méritent.

- Je vous promet que je ferais mon possible pour les arrêter.

- Si ça ne tient qu'à moi... Pas la peine de les arrêter. Donnez leur le même traitement qu'ils donnent au reste de la ville depuis des années. Ils ne méritent pas mieux."

Elle essuya une dernière fois ses larmes et répéta pour elle-même, fixant le sol :

"Ils ne méritent pas mieux"

Chapter 23

Summary:

TW : Alcool et mention de mort

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"Daniel ?"

Antoine déambulait dans les vignes autour du domaine. Le soleil était haut dans le ciel et d'ici peu, allait commencer à entamer sa descente. Se protégeant les yeux avec sa main, plissant les paupières, le jeune garçon continua de chercher son cousin, commençant à sentir la chaleur lui peser. Ils avaient été envoyés chacun de leur côté pour aider Lara pour Antoine et Lorenza pour Daniel. Cependant, ils n'avaient pas fini à la même heure, et Daniel avait prévenu par sms qu'il avait été libéré plus tôt que son cousin. Malgré ses coups de téléphone, ce dernier n'avait pas eu de réponse et ne parvenait pas à le retrouver pour manger avec lui. Il finit par baisser les bras et retourna vers la maison, se disant qu'il tenterait de demander à Fab ou Donatien s'ils l'avaient vu. Tandis qu'il s'approchait, un son constant lui titilla les oreilles. Le grondement s'intensifiait au fil de son arrivée, et lorsqu'il entra dans le vestibule, Antoine constata qu'il venait de sa chambre commune avec son cousin. Il monta en vitesse les escaliers et arriva devant la porte, reconnaissant alors le son comme étant un morceau de Heavy Métal. Le volume avait été tourné si haut que le plancher en vibrait, et que Antoine entendait à peine le son de ses propres pas. Il toqua à la porte, sans résultat, et finit par entrer. Daniel était en train de hurler dans une brosse à cheveux qu'il tenait comme un micro, les yeux fermés, à genoux par terre. Sans remarquer l'arrivée de son cousin, il se leva et commença à headbang au rythme enragé de la musique, ses cheveux blancs fouettant l'air. Antoine s'approcha et lui tapota l'épaule, faisant sursauter Daniel qui sourit et alla baisser le volume tout en continuant à agiter la tête.

"J'arrivais pas à t'retrouver Daniel !

- Désolé, avec le son j'ai pas dû entendre que t'appelais ! J'ai trouvé une super radio en bas du coup j'l'ai montée et j'ai mis les CD qu'j'ai ramené !

- On a jamais le droit de mettre aussi fort la musique chez les Vagos, Dona il t'a laissé ?

- Il est pas là ! Il avait un truc à faire mais il a dit qu'il rev'nait pour midi, du coup j'profite !

- Bah oui bah t'as raison ! Tu r'met en attendant qu'il arrive ?"

Daniel monta à nouveau le volume au maximum, et se remit à hurler sur sa brosse à cheveux, tandis que Antoine montait sur le lit et sautait, en levant les bras de façon chaotique, lâchant sans rythme précis des cris de joie et autre "lezgooo". Après un bon quart d'heure à continuer le même manège, Fab entra dans la chambre et baissa le volume :

"Eh dites les minots, moi j'ai rien contre cette musique mais Dona il va pas tarder à arriver et c'est pas vraiment son style !

- Ok, on va baisser alors !" affirma Daniel "J'commence un peu à être fatigué

- Et puis" poursuivit Fab en faisant un clin d'œil "On a un invité ce midi, il faudrait pas le faire fuir.

- Ah oui ?" demanda Antoine "C'est qui ?

- Rotarez ! On fait sa livraison aujourd'hui, alors il vient manger ici pour marquer le coup"

Le vigneron sortit de la chambre afin d'aller commencer la préparation du repas, et les deux cousins se regardèrent avec de grands yeux :

"Daniel !

- Antoine !

- Daniel, on va faire les espions !

- On va faire plaisir à m'sieur Peine !

- Let's go !"

Ils descendirent alors pour aider Fab à cuisiner et mirent la table. Quelques minutes plus tard, De Montazac arriva avec une mine satisfaite :

"Bonjour mon p'tit Fab, bonjour les cousins ! Alors, comment allez vous aujourd'hui ? Moi, magnifiquement bien. Rendez-vous compte, la plus grosse livraison du trimestre est enfin prête !"

Juan entra alors dans la pièce :

"Dites, le type qui est devant la grille, c'est celui que je dois laisser entrer ?

- Oui !" approuva Montazac "C'est monsieur Rotarez, ce cher monsieur Rotarez !"

Le Vagos ressortit, grommelant comme à chaque fois qu'il devait accepter de laisser entrer une personne ne travaillant pas au domaine. Peu de temps après, Rotarez entra, avant de les saluer d'une voix dont les hésitations trahissaient une légère ivresse :

"Bonjour tout le monde !"

Montazac et lui se mirent à table et discutèrent des affaires, tandis que les cousins et Fab les servirent, puis tous mangèrent. A la déception des cousins, cependant, Rotarez ne parla jamais de transfert. Il mentionna une fête qui aurait lieu dans les prochains jours, ainsi qu'une grande entrée d'argent, mais se contenta principalement de plaisanter et d'écouter Montazac et Fab parler des affaires. De plus, il ne commit cette fois pas l'erreur de parler du meurtre de Bailey. Le sujet fut cependant amené sur la table par Fab :

"Tiens, vous avez entendu ce qui est arrivé hier soir ?

- De quoi donc mon p'tit Fab ?

- Ya les Families qui ont attaqué une ambulance et le capitaine Boid !

- Pardon ?" s'exclama Rotarez "Pourquoi ?

- Apparemment y avait un type du LSPD qui bossait pour eux, et quand il a été transféré vers la prison ils ont attaqué.

- Y a eu des morts ?

- J'ai cru comprendre que le type qui bossait pour eux était mort. Les autres sont juste blessés. Y avait le flic qui vous aide d'ailleurs, les Croute.

- M'sieur Peine ?" demanda Antoine, horrifié "Il va bien ?

- Il a été blessé ?" s'inquiéta Daniel "Il va comment ?

- Honnêtement j'ai pas le détail" avoua Fab "Mais il est pas mort, c'est déjà ça.

- C'est celui qui vous aide, Peine ?" fit Rotarez, surpris.

- Oui !" répondit Montazac "C'est lui qui a proposé à Fab de les amener ici le temps de l'enquête.

- Vous le connaissez ?" demanda Daniel, feignant une curiosité innocente.

- Il est passé à Gruppe6 l'autre jour pour son enquête. Pas sûr qu'il ait appris grand chose."

Il se tut alors pour boire un verre de vin, mais Antoine ne put s'empêcher de remarquer le petit regard qu'il leur jetait. Avait-il compris qu'ils étaient ceux lui ayant parlé de ses interrogations sur Allée ? Le repas se poursuivit sans autre discussion sur le sujet, les affaires de leurs entreprises respectives retrouvant leur place de sujet discuté. Le repas se termina et ils rangèrent la table, quand Rotarez reçut un appel.

"Excusez moi, il faut que je prenne ça !"

Il sortit alors de la maison et se dirigea vers le garage. Antoine et Daniel se regardèrent, regardèrent à nouveau Rotarez, puis Antoine dit, en commençant déjà à sortir par la porte de la terrasse :

"On revient tout de suite m'sieur Don Tello !

- Oui" continua Daniel "On fera la vaisselle !"

Il sortirent sur la terrasse avant de courir vers les vignes. Là, ils se rendirent discrètement vers le muret qui se trouvait derrière le garage, et marchèrent derrière, leur permettant de s'approcher de Rotarez sans être vu. Tendant l'oreille, ils l'entendirent parler dans son téléphone :

"Ouais, t'es sûr de toi ? Parce que ma livraison va être faite dans moins d'une heure... Eh bien décale le décalage, le transport vers le transfert était prévu pour vingt heures au départ, au lieu de le faire à quinze heures, on le fera à seize heures, c'est tout !...Mais tu crois que c'est de ma faute si la police est sur les dents ? C'est pas moi qui a un gars qui se fait baiser par le capitaine."

Il s'interrompit durant plus d'une vingtaine de secondes, écoutant son interlocuteur, avant de reprendre :

"Bon, écoute, le camion est dans le hangars. Je fais ma livraison, et dès que les bouteilles sont transférées, on le sort, ok ? Gonzalès arrive qu'à vingt-deux heures de toute façon... Maintenant ? Oh, tu me laisse peu deux minutes pour souffler aujourd'hui !... Bon, ok, je demande à Monbazillac là."

Il raccrocha et retourna dans la maison. Les Croute se regardèrent et Daniel proposa :

"Viens on monte dans le camion et on donne sa position.

- C'est ce que je voulais proposer !

- M'sieur Peine et sera trop fier."

Chapter Text

Les cousins se ruèrent alors à l'arrière du camion servant à la livraison du convoyeur de fond. Daniel ouvrit les portes tandis que Antoine faisait le guet, et il monta dans le véhicule rempli de caisses contenant des bouteilles. S'appuyant contre la cloison, il poussa l'une des piles afin de dégager un interstice suffisant pour se faufiler, puis recommença en poussant plusieurs piles vers l'arrière du camion, dégageant un espace étroit mais suffisant pour lui et son cousin. Une fois fait, il appela Antoine en chuchotant, et ce dernier monta et ferma les portes derrière lui, avant de se glisser dans la cachette que Daniel venait d'élaborer. Un mélange d'appréhension et d'excitation avait envahi les deux cousins, qui souriaient dans l'obscurité. Quelques minutes plus tard, le son des voix de Fab et Rotarez se fit entendre, augmentant progressivement en volume. Le sudiste monta à l'avant du véhicule et le démarra, tandis que le son du moteur de la voiture de Rotarez se fit entendre un peu plus loin. Le camion se mit alors en branle et commença son trajet, secouant les deux jeunes garçons. Dès le départ, Antoine commença à regretter leur idée tandis que le mal des transports le prenait à l'estomac. Respirant profondément, il tenta de ne pas y penser, et son cousin lui prit la main en l'entendant peiner à garder son calme, l'aidant quelque peu. Après une quinzaine de minutes de trajet, qui sembla une éternité aux cousins, le camion se mit à ralentir, manœuvrer, puis s'arrêta finalement. Fab coupa le contact et en descendit, avant d'ouvrir les portes arrières. Il monta et saisit une caisse, commençant à décharger la cargaison. C'est à cet instant que Daniel réalisa qu'ils n'avaient pas pensé à la suite de leur expédition, et qu'ils allaient être rapidement découverts. Il sortit alors son téléphone à toute vitesse et tapa un message au sudiste le plus vite possible, sans même corriger ses fautes de frappe :

"Y a Dona il dit que tu devrais faire une dégustation avec msieur Rotarez avant de décharger"

Il éteignit ensuite l'écran, priant pour que le sudiste reçoive la notification et prenne le temps de lire ses messages. Alors qu'il revenait pour retirer une autre caisse, accompagné des employés de Gruppe6, Fab proposa soudainement :

"Dites les gars, Dona propose qu'on goutte le vin avant, histoire de se donner du courage, ça vous dit ou bien ?"

L'ensemble des employés approuva, et Rotarez accepta avec engouement. Antoine et Daniel, toujours coincés entre les caisses, peinèrent à retenir un soupir de soulagement de leur échapper. Tandis que les voix s'éloignaient dans les bureaux, les deux cousins s'extirpèrent de la remorque et regardèrent autour d'eux sur le parking glauque du groupe de transfert de fonds. A quelques places de parking de là se tenait un fourgon, visiblement prêt à servir, qui ne pouvait être que celui dont Rotarez avait parlé. Se hâtant afin d'éviter d'être surpris par quelqu'un, ils coururent comme des dératés vers le véhicule. Antoine trébucha soudainement et tomba sur le goudron, mais se releva immédiatement en faisait un pouce en l'air à son cousin afin de signaler que tout allait bien. Une fois devant le fourgon, cependant, Daniel demanda :

"Tu sais comment déverrouiller ces trucs toi ?

- Quoi ? Bah non, c'est pas toi qui sait croch'ter les serrures ?

- J'sais crocheter les cadenas qu'on met sur les journaux intimes, c'est tout !

- Mais du coup on fait comment pour entrer ?

- Attend, on va trouver, faut juste qu'on s'dépêche !

- Ben oui ! C'est la galère là !

- C'est l'adversité Antoine !

- La diversité c'est quand il nous arrive des soucis, pas quand on s'met dedans nous même comme ça !

- Oui ben euh, on va trouver une solution !"

Il se tourna vers les portes, étudiant la serrure, et affirma :

"De toute façon j'ai pas d'quoi déverrouiller, il faut des outils !

- Y a pas des outils ici ?

- C'est vrai qu'c'est pas propre, y a ptêtre des trucs qui trainent.

- Oui, Dona il nettoie bien chez lui au moins.

- Ok, reste ici, j'vais j'ter un coup d'œil !

- Tu fais attention hein ?

- Oui !"

Le jeune garçon s'éloigna du véhicule, à la recherche d'outils, tandis que son cousin restait à côté, tendu et surveillant l'entrée des bureaux d'où les employés pouvaient ressortir d'une minute à l'autre. Après une rapide inspection, Daniel revint bredouille. Passant sa main dans les cheveux, il se mit à se parler à lui-même, énumérant diverses options pouvant leurs permettre de sortir de là sans être vus. Antoine, frustré, se tourna à nouveau vers le véhicule et poussa un peu la porte, puis y donna un coup. Sans vraiment y penser, il saisit la poignée, et la porte s'ouvrit sans aucune difficulté.

"Daniel ?

- Ya peut-être des outils sur le parking dehors ?

- Daniel ?

- Sinon peut-être qu'on peut retourner dans le camion et faire comme si c'était une farce ?

- Daniel !?

- Quoi ?

- C'était pas fermé.

- Hein ?"

Il se retourna pour tomber sur le fourgon ouvert, et son cousin qui commençait déjà à rentrer à l'intérieur. Clignant des yeux dans une incrédulité totale, il monta à son tour sans croire à sa chance :

"Mais pourquoi ils ont laissé ouvert comme ça, Antoine ?

- J'sais pas, Lorenza a pas dit qu'une fois elle s'est faite voler la moitié d'une cargaison parce qu'elle avait pas fermé le camion alors qu'elle était en pleine ville ? Pt'être que c'est pareil ?

- Mais moi je pensais que les criminels ils étaient un peu classes, non ?

- Ben moi aussi !

- En même temps quand on voit Juan ou Hayley…

- J'l'aime bien Hayley mais c'est vrai qu'des fois elle fait des trucs un peu bêtes."

Ils refermèrent les portes derrières eux et Daniel déclencha la lampe torche de son téléphone afin de voir où se cacher. La lumière révéla des piles de mallettes noires renforcées, portant le logo de la Pacific Bank. Antoine les regarda avant de s'interroger :

"C'est un peu risqué de laisser des mallettes comme ça dans un fourgon ouvert.

- Ben oui, c'est des belles mallettes !

- Elles doivent valoir super cher.

- Oui, elles ont l'air super résistantes et tout ! Trop bizarre.

- Peut-être que si on réussit bien, m'sieur Peine il nous laissera en avoir une ?

- Bah oui bah oui !"

Alors que Antoine allait répondre, le son de voix s'éleva à nouveau des bureaux, signalant le retour de Fab et des employés de Gruppe6. Les deux cousins poussèrent les mallettes et se dissimulèrent derrière, tandis que le camion du domaine se faisait décharger. Après de longues minutes, ils entendirent ses portes se refermer et le moteur démarrer, tandis que Fab retournait au domaine. Presque immédiatement, le ton de Rotarez se métamorphosa, passant de jovial à bien plus froid :

"Bon les gars, MT veut qu'on fasse le transfert de suite. Bobby tu prend le volant, Tim tu vas avec lui, je prend ma bagnole. Angelo et les verts seront déjà sur place pour nous attendre."

Les portes s'ouvrirent brusquement, illuminant les mallettes derrière lesquelles étaient cachés les cousins. Rotarez cria alors :

"Putain, qui s'est occupé de fermer le camion là ? Vous savez la merde dans laquelle vous nous mettez si quelqu'un voit ça ?

- C'est moi, désolé.

- Bobby t'es vraiment un con hein."

Le son d'un taquet asséné sur le haut du crâne de l'employé résonna dans le parking, avant que chacun n'aille à son poste. Le fourgon démarra et sortit du parking avant d'entamer un long trajet.

Chapter 25

Summary:

TW : armes à feu, armes blanches, menaces de mort

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Le fourgon continua longuement son chemin, sur une distance bien plus importante que celle qui séparait le domaine de la ville. La route serpentait, tournait, plus encore que sur le chemin de montagne menant aux vignes et qui avaient déjà donné le mal des transports à Antoine. Après un moment, cependant, le fourgon sembla quitter la route. Au son de ses pneus, il roulait désormais sur du sable et du gravier secs, bien plus lentement. Enfin, il s'arrêta. Le moteur de la voiture de Rotarez se coupa également, et les portes claquèrent. La voix du convoyeur de fond appela joyeusement :

"Les gars, on est là, c'est pas les flics ! Arrêtez de vous planquer !"

Une voix grave et posée lui répondit :

"Vaut mieux être prudent mon frère, on sait jamais.

- Je comprend bien, et puis c'est pas moi qui est recherché.

- Y a moyen de voir la cargaison ?

- Pas de problème oui, Bobby, va ouvrir le fourgon."

L'employé ouvrit les portes, mais seule une lumière diffuse entra dans le véhicule, visiblement garé dans un lieu abrité du soleil. Le convoyeur de fond s'enquit :

"Il arrive quand Gonzalès ?

- D'ici une heure. Il atterrit, on lui donne tout, il repart direct. Il prend aucun risque.

- Une heure ? On va faire quoi en attendant, tu sais que j'ai une entreprise à faire tourner moi ?

- Eh, calme toi mon frère, vu le pactole, t'inquiète que ça va tourner.

- Ouais, t'as pas tort. Tu m'excusera hein, j'suis un peu tendu.

- T'inquiète. Marcello, tu m'amène une valise ? J'vais faire deux ou trois vérifs histoire d'être sûr.

- Eh, tu me fais pas confiance dis ? Marcello, sérieux ?"

Une voix calme où un accent italien était particulièrement audible lui rétorqua :

"Moi je fais que faire c'que MT me dit tu sais, c'est pas contre toi Marius.

- Ouais je sais bien, enfin je pensais qu'on avait dépassé ce stade.

- Ben t'as mal pensé mon frère" rétorqua le dénommé MT "Luigi, tu te bouge ?

- Ouais ouais, deux secondes non ? T'es le premier à marcher à deux à l'heure.

- T'es sérieux mec ?"

Marcello fit semblant de ne pas entendre les protestations de son chef et marcha vers le Fourgon, dans lequel il entra. Il leva les bras pour saisir une valise, tandis que les cousins retenaient leur respiration pour ne pas se trahir. Au même moment, cependant, le téléphone de Antoine se mit à sonner. Le sortant en catastrophe pour refuser l'appel, il eut tout juste le temps de voir le nom de Juan sur l'écran avant que les piles de mallettes dissimulant son cousin et lui ne soient envoyées par terre. Marcello Capone, derrière, les menaça d'une arme, et ils levèrent immédiatement les mains en l'air, terrifiés. MT sortit une arme et la pointa immédiatement sur Rotarez, tandis qu'un troisième homme habillé d'un col roulé vert foncé, portant des cheveux roux plaqués en arrière et des favoris de la même couleur, prenait en joue ses employés. Le chef du gang réclama des explications :

"C'est quoi ça Marius ?

- Je savais pas qu'ils étaient là dedans, j'te jure MT !

- Marcello, fais les sortir de là."

L'italien agita son arme et les cousins descendirent du véhicule, les mains toujours en l'air, les yeux fixant le sol, réalisant l'ampleur de leur erreur et de leur manque de planification. Rotarez affirma alors :

"C'est les gamins que Montazac garde là, ceux qu'ont trouvé Bailey !"

L'intérêt de MT changea soudainement. Il s'approcha des deux cousins, lentement, dans une démarche intimidante. Il portait des survêtements gris, ainsi qu'une veste de basket verte. Sa tête était surmontée d'une casquette verte, et le canon d'une AR-15 dépassait dans son dos. Sa peau était noire, et ses sourcils froncés.

"C'est vrai c'qu'il dit ?"

Les cousins hochèrent la tête, et Antoine jura :

"On savait pas, on voulait juste s'amuser ! On dira rien, promis !"

Daniel approuva, sans oser regarder le membre de gang. Marcello se frotta la barbe, mal à l'aise :

"Bon, on en fait quoi boss ?

- J'ai un avis perso, mais j'vais attendre de voir c'que dit Gonzalès quand il arrive.

- Mais du coup ?

- Bah si il dit de les buter, on les bute. M'fais pas croire que tu peux pas, ça s'ra pas la première fois que tu le feras.

- C'est vraiment obligé ?" demanda Rotarez, particulièrement inconfortable à cette idée.

- Déjà, toi, c'était ton taf de t'assurer que tout se passe bien. Si on les butte, c'est en partie ta faute, ok ? Et fais pas comme si tu trempais pas dans d'autres trucs.

- Je trempe dans d'autres trucs mais je tue pas des gosses."

MT se tourna à nouveau vers lui et posa son arme sous son menton, n'écoutant pas les protestations des employés :

"Nous si. Et tu le savais en traitant avec nous. Donc maintenant tu la ferme et tu attends.

- Tu sais que Angelo va pas apprécier ce que tu viens de faire ?

- Ca tombe bien, il surveille dehors pour voir si l'avion arrive donc il a rien vu, et toi tu vas gentiment fermer ta gueule, deal ?"

Se tournant vers l'homme roux, il lui ordonna :

"Bon, Liam, va les foutre dans la caravane à côté et surveille les. Marcello fait sa princesse."

Baissant son arme, ce dernier hocha la tête et s'approcha avant de tendre sa main vers les deux cousins, puis demanda d'une voix bien moins grave et bien plus enjouée que ses deux collègues :

"Bon, vous m'donnez vos téléphones vous deux ?"

Sans avoir vraiment le choix, les jeunes garçons lui tendirent. Lorsqu'il les eut en main, il en retira les cartes SIM et les laissa tomber avant de les écraser, puis les rangea dans sa poche. Il fit ensuite un petit mouvement de main pour les inciter à avancer :

"Allez, on se bouge. J'vous rend vos téléphones quand c'est fini, enfin si MT est ok.

- Et si il est pas ok ?" demanda Antoine, la gorge serrée

- Ah bah là désolé mon pote, c'est plus moi qui décide. C'est mon chef hein."

Ils sortirent du hangars, contemplant alors le panorama ensablé. Ils étaient entourés d'un désert rocailleux parsemé de plantes sèches, et une longue piste d'atterrissage au goudron usé s'étendait sur plus d'une centaine de mètres. Il les fit alors se diriger vers un vieux camping-car gisant non loin, les pneus crevés et la peinture blanche et bleue commençant à sérieusement s'écailler, révélant un métal rouillé. Il les fit entrer et s'assoir sur les sièges, restant sur le seuil de la porte, un couteau dans la main.

Chapter 26

Summary:

TW : couteau, menace de mort

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Daniel hésita et demanda :

"Vous voulez pas faire semblant qu'on vous a assommé, et vous nous laissez partir, et on dit rien à personne ?"

Liam, qui s'amusait à ouvrir et fermer son couteau, l'épaule appuyée contre l'embrasure de la porte, émit un petit rire :

"T'es un p'tit malin toi, hein mec ?"

Antoine, prenant son courage à deux mains, continua :

"Vous voulez quand même pas nous faire du mal ! On est juste des enfant !

- Tu sais, ça m'fait pas plus plaisir qu'à toi ! 'Fin si , j'exagère, si c'est toi qui meurt, je vais difficilement aller moins bien que toi. Mais tu vois l'idée !

- Ben… J'sais pas, j'ai jamais voulu tuer des enfants moi.

- Tu crois que j'me suis dit un matin Oh tiens, tuer des gosses c'est ma passion ?

- Quand même" rétorqua Daniel "C'est bizarre comme carrière, vous aviez pas d'autres projets ?

- Des projets ? T'es conseiller d'orientation mon pote ? J'défend mon business, c'est tout.

- Et votre business c'est de tuer des enfants ?" demanda Antoine.

- Mon business c'est de faire un max de thune mec. Et ça fonctionne bien.

- On dirait quand même drôlement que votre business c'est de tuer des enfants" signala Daniel.

- Mais t'as pas fini toi ? Là y a un avion qui va arriver, on va lui donner les mallettes, on aura plein de thune, point ! C'est ma faute moi si vous vous êtes planqués dans l'camion ? Ben non, si vous êtes couillons c'est votre dos !

- M'sieur Donatien" répondit Antoine "quand on fait des bêtises, il nous dit juste qu'on est des idiots, mais il dit pas qu'il va nous tuer.

- Bah j'suis pas Montazac mes couilles, ok mon pote ?

- Donc vous allez nous tuer ?

- Eh par contre mon pote, si c'est pour m'tenir la grappe pendant des plombes, vous allez juste finir bâillonnés et attachés, donc tu la boucle."

Constatant qu'il avait obtenu le silence en voyant l'expression frustrée mêlée de peur des deux garçons, il regarda autour de lui, chantonnant une musique irlandaise tout en continuant de jouer avec son couteau. Les cousins, eux, étaient assis sur une banquette défoncée dont le similicuir partait en lambeaux. Ils voyaient de temps en temps une voiture passer à une dizaine de mètres d'eux, à travers la vitre sale, mais savaient qu'ils pourraient bien crier et s'agiter dans tous les sens sans que quiconque ne les remarque. La chaleur de l'extérieur leur pesait de plus en plus, et Antoine demanda :

"On peut avoir de l'eau ? Il faut chaud."

Liam entra dans le camping car d'un air agacé :

"Tu crois qu'j'ai pas chaud aussi mec ?

- Ben si, mais vous avez pas d'eau ?

- Doit y en avoir dans la bagnole, mais vous allez survivre pendant une heure non ?

- Quand même" répliqua Daniel "Si on fait un malaise ça va être votre faute.

- Rien à faire mon pote, fais le ton malaise.

- Vous êtes pas très gentil" fit remarquer Antoine "Les Vagos ils sont gentils eux.

- J'ai l'air d'être un Vagos ?

- Non ! C'est juste que…

- Ben voilà, j'suis pas un Vagos, donc t'arrête les comparaisons de merde.

- Quand même, votre chef il nous a demandé de nous surveiller" rappela Daniel "Si on fait un malaise pendant que vous nous surveillez c'est votre faute.

- Oui !" approuva Antoine "Et comme votre chef il a dit qu'on allait peut-être pas mourir, si au final il nous libère, ben vous aurez l'air tout bête si on est morts de chaud.

- Bah oui bah oui !" confirma Daniel "Et puis votre chef il a pas l'air gentil donc si vous faites une bêtise il risque de se fâcher."

L'irlandais eut un petit sourire et se passa sa lame dans ses cheveux pour se coiffer avant de s'approcher d'eux, prenant un ton à la fois amusé et menaçant :

"Il a pas l'air gentil MT, hein ? Ben c'est parce que c'est vrai. C'est pas un gars cool, surtout pour les p'tits emmerdeurs."

Voyant que les cousins s'étaient tus, pleins d'appréhension, il continua, satisfait de son effet :

"Vous dites que vous êtes juste des enfants. Vous avez quel âge ?"

Antoine, terrifié, lâcha :

"On a 16 ans."

Liam eut un petit instant de réflexion et continua :

"Eh bien ça l'a jamais arrêté. Et c'est pas moi qui va pouvoir l'en empêcher t'façon. Donc vous vous tenez à carreau, parce que c'est pas en râlant que vous mettez les chances d'vot'côté. Ok ?"

Il attendit de voir les cousins hocher la tête doucement et se redressa avant de retourner dans l'embrasure de la porte, tourné vers eux. Après un petit instant, il plaisanta :

"Vous êtes quand même bien plus agréables quand vous êtes ca…"

Il ne termina pas sa phrase. Dans un son métallique, une barre en fer heurta son crâne et il s'effondra sur le sol, inconscient. Les deux jeunes garçon se redressèrent, sans savoir si on venait les aider ou si la situation allait empirer. Une jeune femme blonde entra alors dans le camping car et observa un instant l'homme assomé avec un petit sourire de satisfaction, puis les pressa en chuchotant :

"Ok, je m'appelle Sarah Carter, je suis une amie de monsieur Peine ! Venez avec moi, je suis garée pas loin !"

Antoine s'avança en souriant, mais Daniel demanda prudemment :

"Comment on peut savoir qu'on peut vous faire confiance ?

- J'ai pas vraiment de preuve, mais tu peux rester ici si tu préfère.

- Non, je viens."

Ils sortirent alors du véhicule, et Antoine demanda :

"Comment vous avez su qu'on étais là ?

- Je savais pas. Je suis journaliste, Bailey c'était mon patron. Avec mon enquête j'ai appris plein de choses, et aujourd'hui, quand le fourgon est sorti de Gruppe6, je l'ai suivi. Quand il est entré dans le hangars, je me suis garée plus loin et je suis venue à pied, et je vous ai entendus. Donc je me suis dite que je pouvais pas vous laisser !

- Et msieur Peine ?" demanda Daniel "Vous lui avez rien dit ?

- Oh que si, dès que j'ai coupé le contact je lui ai envoyé la position. Mais maintenant que tu le dis, je vais lui dire que vous êtes là."

Elle sortit son téléphone et envoya rapidement un message tout en marchant dans le sable, le long du hangars rouillé, et regarda les cousins avec un air rassurant. Sa voiture était à une cinquantaine de mètres de là, garée en bord de route, prête à repartir pour laisser la police faire son travail. Dans le même temps, un grondement sourd commença à s'amplifier, tandis qu'un avion entamait sa descente vers la piste.

Chapter 27

Summary:

TW : armes à feu, menaces de mort

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Le grondement assourdissant des réacteurs continua de s'intensifier tandis que la journaliste courrait vers la voiture avec les cousins, longeant le hangars rouillé. Alors qu'elle allait se tourner vers eux pour leur dire de s'élancer vers le véhicule, elle remarqua à travers les tôles mal alignées qu'une personne arrivait vers elle. Sans prendre le temps de réfléchir, elle se tourna vers Antoine et Daniel et pointa la petite station essence désaffectée à quelques mètres d'eux avant d'ordonner :

"Allez vous cacher là-dedans tout de suite !"

Sans discuter, ils coururent et se ruèrent à l'intérieur. L'endroit était sale, poussiéreux et en désordre. Ils entendirent alors la voix de Marcello s'élever :

"C'est bon, j'ai la journaliste ! Ils sont où les deux gamins là ?

- Je leur ai dit de s'enfuir dans le désert, ils sont déjà trop loin pour que vous puissiez les rattraper.

- MT ? On a le temps tu crois ?

- Ramène toi mon reuf" lui ordonna MT "Y a les flics qu'arrivent, faut qu'on décharge le max de mallettes dans l'avion.

- Et les gamins ?

- Tant pis pour les gamins, ramène juste la journaliste."

Antoine et Daniel se regardèrent sans comprendre. Antoine demanda :

"Comment ils ont su que y a la police qui arrive ?

- Comment ils ont su que Sarah elle était là ?

- Au moins y a de l'aide qui arrive là !

- Bah oui bah oui, y a m'sieur Peine qui va la sauver !"

Ils marquèrent une pause, mais Antoine finit par s'interroger :

"Mais ils vont lui faire du mal non ?

- On peut pas l'aider…

- Elle nous a aidé nous, on va quand même pas la laisser !

- Mmh… Mmmh… Allez t'as raison, je te suis. On fait quoi ?

- On sort d'ici, on fait diversion, on les retarde, et comme ça la police arrive et tout le monde va encore bien !

- Ok !"

Ils se préparèrent à sortir, mais Daniel retint son cousin :

"Et si ça se passe pas bien ?

- Faut pas dire ça Daniel, ça va bien se passer !

- Oui mais… Si ça se passe pas bien ?"

Antoine détourna le regard un instant, puis prit son cousin dans ses bras en fermant les yeux, resserrant son étreinte. Un peu surpris au départ, Daniel fit alors de même. Ils restèrent plusieurs secondes collés l'un à l'autre avant de s'écarter, et Antoine lui souhaita :

"Fais attention à toi mon Daniel.

- Toi aussi Antoine."

Ils sortirent alors en se tenant la main, et coururent vers le hangars, où Marius Rotarez laissait éclater sa colère :

"C'était pas dans notre accord ça !

- De quoi, que les flics se ramènent ?" ironisa MT "Dans l'nôtre non plus bizarrement mon frère.

- Tu crois qu'j'avais envie de m'prendre une torgnole mon pote ?" demanda Liam

- Je devais vous amener le camion, on déchargeais et je repartais, ni vu ni connu." s'emporta le convoyeur de fond "Là si je part pas tout de suite, je suis foutu. Et mon seul moyen pour repartir, c'est le fourgon.

- Et nous, on a besoin de ta cargaison" répliqua Marcello "Donc maintenant tu te calmes.

- Tu connaissais les risques il me semble" l'interrogea faussement MT "Tu savais dans quoi tu t'embarquais, non ? Ben maintenant t'es dedans avec nous.

- Vous êtes tous fichus." affirma Sarah, d'une voix dont la colère empêchait de percevoir sa peur "Dans cinq minutes vous serez au fond d'une voiture de flics.

- Nan frangine" rétorqua MT "Dans cinq minutes t'aura un flingue sur la tempe et tu sera notre tiquet de sortie.

- Vous pourrez pas vous en sortir comme ça. Rotarez est déjà fichu, même s'il s'échappe.

- Et toi, tu vas finir comme ta sœur si tu te calmes pas, c'est pigé ?"

Alors qu'elle allait rétorquer, l'avion entama finalement son atterrissage, arrivant en vitesse sur la piste, ses réacteurs cessant progressivement de tourner. Tout le petit groupe sortit alors et se rendit dans la direction du véhicule, afin d'expliquer la situation et leur temps limité. Daniel se tourna vers Antoine et suggéra :

"Antoine, ça te dis qu'on fasse la même chose pour la troisième fois ?

- Quoi ?

- Ben là, ils sont tous dehors, non ?

- Bah oui.

- Donc ils ont laissé le fourgon sans surveillance et ouvert.

- Oh… Oh

- Alors ?

- Carrément.

- Let's goo !

- Et Sarah ?

- Peut-être qu'on peut leur foncer dessus ?

- Et du coup ils auront peur et Sarah pourra monter ?

- Oui !

- Allez !"

Ils passèrent alors la tête dans l'angle, constatant bien que les Families et les employés de Gruppe6 étaient rassemblés autour d'un homme en costume, au pied de l'avion. Rapidement, ils coururent se dissimuler derrière le fourgon, à l'intérieur du hangars, et montèrent dans la cabine. Daniel tourna les clefs dans la serrure, sans résultat :

"Antoine !

- Quoi ?

- J'arrive pas à démarrer !

- Faut appuyer sur la pédale de gauche, c'est Inigo qui m'a dit ! Mais t'as jamais conduit ?

- Bah non, quand est-ce que tu veux que j'ai appris à conduire ? Et toi ?

- Bah non !"

Appuyant sur l'embrayage, il tourna la clef dans le contact, faisant vrombir le moteur. Antoine enclencha la marche arrière, tandis que Daniel appuyait pied au plancher sur l'accélérateur, faisant sortir le fourgon du hangars à reculons et bien trop vite. Daniel freina et Antoine remit la première puis la deuxième, à mesure que Daniel accélérait. Leur mauvaise coordination et connaissance purement théorique de la conduite les faisait avancer par soubresauts, avec un moteur à l'agonie qui vrombissait bruyamment entre deux à-coups. Lorsqu'ils furent bien orientés cependant, Daniel accéléra à fond en direction du petit groupe. Les malettes se mirent à se déverser par les portes arrières qui étaient restées ouvertes, laissant comme une piste du petit poucet. Les cousins ne purent s'empêcher de rire devant les visages terrifiés des malfrats et leurs sauts maladroits pour s'écarter de la trajectoire du véhicule. Ils s'arrêtèrent dans un crissement et Antoine cria par la fenêtre :

"Sarah ! Monte !"

La journaliste ne se fit pas prier et sauta maladroitement à l'arrière du fourgon avant qu'ils ne repartent en vitesse, fonçant au hasard dans le désert avec comme objectif de rejoindre la route plus loin. Plusieurs coups de feu retentirent, mais aucun ne toucha le fourgon, qui slalomait dans le sable plutôt par manque de talent de Daniel que véritable volonté de rester imprévisible.

Chapter 28

Summary:

TW : armes, sang, violence physique, mort

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"C'est là !"

Avertit Michael en pointant du droit le hangar rouillé dans la voiture qu'il partageait avec Peine, sirènes hurlantes. Franck freina immédiatement et eut le temps de voir quelques silhouettes se réfugier dans le bâtiment et dans les environs, entre les carcasses de voitures et autres petites structures dégradées. Il gara en vitesse la voiture en travers de la voie, bouchant partiellement l'accès à la route. Derrière lui, trois autres voitures firent de même, bouchant totalement la voie à un véhicule qui tenterait de fuir par l'autoroute. Tous les policiers sortirent alors en vitesse de leurs véhicules, et Boid fit différents signes pour montrer aux équipes où se rendre, afin d'encercler le hangars et l'avion, dont les réacteurs commençaient déjà à tourner à nouveau. Peine et Michael se virent assigner de contourner le bâtiment, afin de prendre les malfrats dans leur fuite. Arme en main, ils se mirent immédiatement à courir dans cette direction, baissés et attentifs. Aucun coup ne fut cependant tiré durant leur course, et ils se plaquèrent alors contre la tôle sale, longeant doucement le mur pour se rendre vers la porte arrière. Peine chuchota :

"Vous êtes prêt Michael ?

- Prêt Franck. Depuis le temps qu'on bosse à les chopper, j'arrive pas à croire qu'on soit si près du but.

- Concentrez vous, il faut pas qu'on les rate. On aura sûrement qu'une chance."

Michael ne répondit pas durant un moment, contournant un gros morceau de métal qui avait dû servir de treuil sur un camion. Ils continuèrent leur progression, et l'agent fit remarquer :

"C'est quand même incroyable que votre affaire vous ait mené directement à résoudre la notre.

- Dit comme ça c'est sûr, mais je vous rappelle que c'était juste la même affaire depuis le début.

- Oui, c'est vrai. Il manquait juste le bon déclencheur pour que tout s'aligne et qu'on comprenne.

- Voilà. Maintenant, concentrez vous, on est en terrain dangereux, il vaut mieux pas parler.

- Quand même, que Earl Bailey soit la clef de cette enquête, j'en reviens pas. Il aura jamais causé que des problèmes.

- Tout peut arriver." répondit Peine, ne faisant plus vraiment faire attention à ce que disait son partenaire.

- Et vous avez réussi à résoudre l'enquête quand même, malgré les taupes, bravo à vous.

- Merci bien, je n'ai fait que mon travail, mais maintenant…"

Peine s'interrompit. Il cessa de marcher et fixa le sol. "Les taupes" ? Comment Michael pouvait-il avoir cette information, alors même qu'il était encore peu clair à Franck même si l'arrestation de Panis avait été divulguée par l'intérieur ? Alors qu'il allait se retourner, il sentit le canon d'une arme se poser à l'arrière de son crâne, et la voix de Michael s'éleva, bien moins sympathique :

"J'ai encore trop causé, hein ? Allez, lève les mains."

Peine leva doucement les mains et laissa tomber son arme par terre. Il s'insultait mentalement, se traitant d'idiot pour avoir tourné le dos à un autre agent du LSPD alors qu'il savait que ses rangs étaient toujours potentiellement infiltrés. Et maintenant, il payait cette erreur. Il le savait, Michael n'allait pas le laisser en vie, sans quoi sa couverture serait immédiatement détruite. Pour gagner du temps, il demanda :

"Et tu vas faire quoi de moi maintenant ?

- Je vais tranquillement t'amener à MT. Avoir un otage risque de lui être très utile, vu la situation. Et fais pas le malin, un accident est vite arrivé dans un contexte si tendu."

Peine réfléchit à toute vitesse, puis affirma en se retournant très doucement, les mains toujours en l'air :

"Je te propose quelque chose : tu me laisses partir, et je te dis qui est la taupe des Vagos dans le LSPD."

Michael fronça les sourcils, légèrement déstabilisé :

"La taupe des Vagos ?

- Ah, vous êtes pas au courant dans les Families ? Pourtant, Bailey avait trouvé la taupe des Vagos tout comme il avait trouvé les vôtres. Peut-être que vous l'auriez su si vous n'aviez pas tué Yann Allée.

- Je l'ai pas tué, ok ? Je sais pas qui l'a fait.

- Alors, tu dis quoi de ma proposition ?"

Le traitre hésita de longues secondes, visiblement peu à l'aise avec l'idée de prendre ce genre de décision. À quelques dizaines de mètres de là, des coups de feu furent tirés tandis que le grondement des réacteurs de l'avion grandissait. La distraction causée durant une fraction de seconde à Michael fut la chance que Peine attendait. Sachant qu'il n'aurait pas d'autre occasion, il sauta en avant, saisissant le canon de l'arme. Michael tira, mais sa balle partit bien au dessus de la tête de Franck, qui lui tordit alors le poignet, faisant tomber le revolver dans le sable. Grognant de douleur, le traitre répliqua alors d'un coup de coude que Peine reçut dans les côtes, crachant  de douleur. Le poignet de Michael toujours en main, il l'obligea à se baisser en lui tordant le bras dans un angle inconfortable avant de lui envoyer un violent coup de poing dans la tempe. La taupe s'écroula au sol, gémissant, mais tendit soudainement son bras vers son arme. Peine écrasa alors sa main de sa botte, et Michael cria avant de lancer un violent coup de pied vers le haut, touchant Peine derrière le genoux et lui faisant fléchir la jambe. Le policier, déséquilibré, tomba au sol et eut tout juste le temps de s'élancer en avant pour empêcher le traitre de saisir l'arme. Les deux hommes se mirent alors à lutter par terre dans le sable, soulevant des nuages de poussière, tandis qu'ils essayaient chacun de se rendre maitre du revolver. Après un effort qui lui sembla surhumain, Franck sentit l'arme doucement glisser des mains de Michael. Lorsqu'il le récupéra, le malfrat tenta alors de la reprendre. Incapable de viser correctement dans l'agitation, Peine la lança alors à plusieurs mètres de là. Michael se releva à toute vitesse et se précipita pour la récupérer. Il tomba presque dans da hâte et la reprit avant de se retourner vers Franck. Un coup de feu retentit. Le traitre tomba en arrière, laissant tomber son arme, une tâche de sang grandissant au niveau de son cou. Il regarda sans vraiment comprendre Peine, qui avait profité de la distraction pour récupérer sa propre arme qu'il avait laissé tomber sous la menace. Le policier se releva doucement, respirant avec difficulté tandis que la douleur du coup qu'il avait reçu dans les côtes continuait d'irradier son torse. Michael s'effondra finalement dans la poussière, cessant de respirer, les yeux mi-clos. Tentant de ne pas se laisser distraire, Peine saisit sa radio et annonça :

"Ici Peine, Michael était un double agent, j'ai été contraint de le neutraliser par légitime défense."

Sans vraiment prêter attention aux réactions qui sortirent de sa radio, il reprit alors sa progression vers l'arrière du hangars. Il se posta près de la porte arrière, attendant le signal de ses supérieurs pour entrer. Cependant, la porte s'ouvrit, laissant passer Rotarez, terrifié, mains en l'air. Ses yeux s'agrandirent lorsqu'il vit Peine, mais le policier lui fit signe de se taire. Sa respiration s'accélérant, le convoyeur de fond s'approcha de lui en vitesse, tremblant, et lui cria :

"C'est un piège, baissez vous !"

Immédiatement, les tirs d'une arme automatique se mirent à traverser la tôle dans un vacarme assourdissant. L'homme d'affaire sauta en avant, atterrissant dans la poussière avec un hurlement de douleur, se tenant l'épaule où sa veste de costume s'assombrissait progressivement. Peine également plongea au sol, sentant les balles le frôler et siffler autour de lui. Serrant les dents tandis que les rafales continuaient, il saisit le dos de la veste de Rotarez et le tira en avant, le forçant à se relever partiellement et ramper pour éviter d'être traîné dans la poussière. Tentant d'oublier la douleur, le convoyeur de fond se mit à ramper puis se redressa une fois suffisamment dissimulé avant de courir en direction des voitures de police, suivi de près par Peine. Au niveau des voitures, seul Kuck était encore dans l'un des habitacles, radio longue portée en main et prêt à démarrer si besoin. Franck poussa Rotarez dans sa direction, malgré les grognements de ce dernier, avant de le plaquer contre le pare choc. Le lieutenant sortit alors en voyant l'homme et aida immédiatement Peine à le menotter et lui bander grossièrement l'épaule avant de retourner dans la voiture en vitesse pour appeler le LSMS. Entre deux grognements de douleur, Rotarez cracha :

"Ils ont Angelo et mes employés en otage !

- Pourquoi vous vous battez entre vous ?

- Les gamins se sont barrés avec le fourgon, donc MT s'est dit qu'on était utiles en otage.

- Les gamins ?

- Les deux que Montazac garde là. Ils ont piqué le fourgon et ont foutu le camp avec la journaliste.

- Mais pourquoi les Croute sont là ? Pourquoi vous les avez amené ?

- J'ai rien amené du tout moi, ils étaient planqués dans le fourgon. Mais de toute façon ils se sont barré, je vous l'ai dit. Si ils avaient pas pris le fourgon, franchement, j'en serais même content, ils avaient rien à faire là.

- Ils vont bien ?

- Mais oui je vous dit ! Ils doivent être loin maintenant."

Peine ferma la portière en soupirant avant de prendre sa radio et d'avertir :

"Les employés de Gruppe6 sont pris en otage par les Families à l'exception de Rotarez, que j'ai sécurisé. Attention, présence d'armes automatiques"

Prêt à retourner sur le terrain, Peine entendit Rotarez taper sur la vitre. Il ouvrit la porte et le sudiste demanda, son assurance fuyant de plus en plus :

"Sortez juste mes employés de là et je coopère.

- On compte pas les y laisser."

Répondit sèchement Franck avant de refermer la portière. Du côté de l'avion, la fusillade continuait, et des tirs en provenance du hangars empêchaient quiconque d'approcher. La situation stagnait sur les deux fronts.

Chapter 29

Summary:

TW : armes à feu, mort

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Le petit avion s'était maintenant mis à lentement tourner afin de se repositionner sur la piste et de décoller en urgence. Des impacts de balles marquaient les vitres, qui n'avaient cependant pas cédées, et les policiers tentaient désormais de viser les pneus pour empêcher le décollage. Les Families étaient toujours coincées dans le hangar, mais l'avion semblait être l'affaire la plus urgente. Prit d'un doute, il se retourna vers l'entrepôt en tôles et y courut, restant hors de vue afin de ne pas attirer les tirs. Longeant le mur, il trouva enfin ce qu'il cherchait : l'imposant treuil de camion qu'il avait dû enjamber. Réfléchissant à toute vitesse, il regarda autour de lui. Le corps de Michael, toujours étendu dans la poussière, n'avait pas bougé. Franck vit alors entre les divers parties métalliques l'une des planches à roulette utilisées par les mécaniciens pour se coucher sous les voitures. Il alla la prendre et vérifia que ses roues fonctionnaient encore sans se coincer, puis la posa à côté du treuil. Inspirant profondément, il posa alors les mains sur l'appareil, fléchit ses jambes avant de le soulever et de le reposer presque immédiatement sur la planche. Il prit alors deux secondes pour récupérer de l'effort, de petites lumières voletant devant ses yeux, puis se positionna derrière le treuil, baissé en avant, avant de se mettre à pousser. Les roues fonctionnaient mais s'empêtraient dans la poussière, empêchant de progresser efficacement, tandis que l'avion avait déjà fait la majorité de son virage. Peine saisit sa radio et cria :

"Kuck ! Besoin d'aide !"

Le lieutenant sortit immédiatement de la voiture, le trouva du regard et courut à ses côtés. Voyant le treuil, il comprit immédiatement l'idée et aida l'agent à pousser, progressant alors bien plus vite. Passant derrières les voitures pour s'abriter d'éventuels tirs, ils s'approchèrent alors du petit bâtiment à côté du hangar et y placèrent le treuil. Les voyant faire, Boid envoya immédiatement Monier, qui les aida à pousser. Peine pointa alors l'appareil en ordonnant :

"Vous faites un tour avec le câble autour du bâtiment là, et vous vous assurez que le treuil est bien immobilisé. Je vais l'accrocher."

Il sortit alors son arme et tira sur la sécurité, la pulvérisant et permettant de dérouler le câble sans avoir besoin d'une alimentation électrique. Saisissant le crochet métallique plus lourd qu'il ne paraissait, Peine se mit alors à courir en direction de l'avion. Ce dernier était maintenant aligné avec la piste, et ses réacteurs voyaient leur grondement s'intensifier toujours plus. L'agent, tentant d'économiser son souffle, se positionna alors en dessous, pourchassant le train d'atterrissage arrière droit alors que le véhicule avait commencé à avancer. D'ici quelques secondes, il allait entamer sa prise de vitesse et décoller, rendant impossible sa capture. Intensifiant son effort, Peine parvint à rattraper le train d'atterrissage et fit passer le câble autour de l'amortisseur avant de l'attacher à lui-même avec le crochet. Les bras tremblants et à bout de souffle, il ralentit enfin, laissant l'avion le distancer. Il tomba alors au sol, ses jambes flagellant et la chaleur lui pesant soudainement sur le corps, tandis que ses poumons étaient en feu et que ses oreilles sonnaient à cause du bruit des réacteurs. Il se retourna et vit alors que le petit bâtiment avait également été entouré et le câble attaché. Dans un rugissement, l'avion se mit alors à accélérer, dévidant le câble à toute vitesse avant de finalement le tendre. Le bâtiment autour duquel il était attaché vit son béton éclater à divers endroits et le lien le reliant au véhicule vit plusieurs fils métalliques se briser. Sous le choc, cependant, le bas du train d'atterrissage se tordit, décalant les roues et faisant basculer l'avion vers l'avant. Continuant de rouler mais ralenti fortement, il se mit à tourner vers la droite, retenu par le câble, sortant de la piste et finissant dans les chaos sablonneux et parsemés de petits rochers. Incapable de regagner de la vitesse et de déchirer le métal du câble, le pilote sembla choisir de couper les moteurs. Kuck, Peine et Monier s'approchèrent alors de l'appareil, tandis que les autres agents étaient envoyés en couverture derrière les voitures afin de venir en renfort de leurs collègues surveillant le hangar. Le capitaine arriva également, équipé d'un mégaphone qu'il avait été prendre dans un des véhicules. Il l'alluma et prit la parole :

"LSPD, vous êtes cernés, rendez vous immédiatement !"

Il indiqua la rampe se trouvant sous l'appareil à Peine et Monier, qui s'y rendirent en courant, arme en main. Constatant l'absence de réponse, il insista :

"Sortez de l'appareil sans faire d'histoire et personne ne sera blessé."

Durant de longues secondes, rien ne se passa, mais dans un grincement métallique, la rampe commença lentement à s'ouvrir. Se mettant à couvert sur les côtés, Peine et Monier braquèrent leur arme dessus, la regardant lentement descendre. Il ne se passa à nouveau rien durant plus d'une quinzaine de seconde, et Boid annonça :

"Nous allons être forcés d'intervenir, descendez immédiatement !"

Presque immédiatement, une rafale de balles sortit de l'habitacle et faucha Monier, qui tomba au sol. Peine se montra alors, tirant vers l'intérieur plusieurs coups de feu. Dans un grand fracas, un homme s'effondra sur la rampe et glissa jusqu'au sol, un uzi en main. Une voix s'éleva alors depuis l'intérieur, avec un fort accent italien :

"Tout bien considéré, je me rend monsieur l'agent !"

Un homme d'une cinquantaine d'années, minces et en costume noir descendit alors lentement, les mains en l'air. Ses cheveux étaient plaqués en arrière et son visage dur était rasé de près. Boid et Kuck le pointèrent de leur arme et il s'immobilisa une fois les pieds sur le sable. Après un petit signe de son supérieur, Peine sortit ses menottes et lui saisit les poignets pour les lui ramener dans le dos et l'entrava. Les deux gradés s'approchèrent alors et amenèrent l'homme à l'écart, tandis que Peine courrait vers Monier. Avec soulagement, il vit que ce dernier était en vie. Il respirait avec difficulté, grognant de douleur. Son gilet pare balle avait arrêté toutes les balles de l'uzi, mais leur impact avait visiblement coupé le souffle au policier, qui allait s'en sortir au mieux avec un gros bleu, et peut-être une côte fêlée. L'aidant à se redresser, Peine l'amena avec lui en direction des voitures afin de le couvrir et si possible de vérifier l'état de ses blessures. Kuck et le capitaine, eux, étaient toujours avec l'homme en costume, qui ne semblait que peu impressionné :

"Vous savez, vous ne pourrez rien contre moi. Même si vous me condamnez, je serais sorti en quelques jours.

- Oui oui, c'est bien" rétorqua Boid en le faisant avancer vers la porte arrière d'un des véhicules.

- Je vois que vous êtes sceptiques monsieur le capitaine.

- Montez dans la voiture et fermez la.

- Un jour vous regretterez de m'avoir traité comme ça, vous savez.

- J'en ai rien à faire. Allez, montez."

L'homme entra dans le véhicule et s'installa, un petit sourire provocateur sur les lèvres.

"Faites attention aux ruelles sombres dans les prochains jours. Les accidents arrivent vite.

- Vous essayez de me menacer ?

- Je vous fais que vous donner des conseils, à vous de choisir de les suivre.

- Super. Moi je vous choisi une vie en cellule. Le pantalon orange fluo ça vous ira très bien.

- Vous ne devriez pas faire le malin comme ça. Vous ne me connaissez pas, je suis Aldo Gonz..."

Boid lui ferma la porte à la figure, empêchant d'entendre le reste de ses provocations, puis se tourna vers Peine, qui l'informa de l'état de Monier :

"Aucune balle ne l'a touché, mais le choc l'a mis dans un salle état, il a besoin de soins.

- Le LSMS est en route depuis quelques minutes déjà, leur hélicoptère ne devrait pas tarder. On va l'évacuer en priorité. Et pour Michael ?

- Complètement neutralisé, il n'avait pas changé de place quand je l'ai revu.

- Ok, on verra pour l'évacuation du corps une fois que l'endroit sera sécurisé."

Il se mit alors à regarder le hangar, d'où plus aucun tir ne provenait, et prit son mégaphone.

"C'est le moment d'en finir."

Chapter 30

Summary:

TW : menaces, armes à feu

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Allumant son mégaphone, le capitaine annonça alors :

"Nous avons arrêté Gonzales. Vous êtes cernés et sans aucun moyen de vous échapper. Libérez les otages et rendez vous !"

Durant un long moment, seul le silence lui répondit, perturbé par la brise chaude du désert et les moteurs des voitures passant sur la route non loin. Cependant, MT finit par élever la voix :

"Tu crois vraiment qu'on va se laisser avoir mon frère ? On sort pas d'ici, essayez même pas d'intervenir ou on tue les otages."

Boid soupira, s'attendant à cette réponse mais restant exaspéré. Il hésita un instant puis se tourna vers Peine :

"Si je leur propose l'envoi d'un négociateur, est-ce que vous seriez prêt à le faire ?

- Oui capitaine. Vous êtes sûr de vous ?

- Vous êtes bien le seul agent auquel je suis sûr de faire confiance. Je leur propose."

Il leva le mégaphone et demanda :

"Est-ce que vous seriez prêts à recevoir un négociateur ?

- Allez" répondit MT "Il s'amène sans armes, devant la porte, et il rentre pas."

Boid se tourna vers Peine, qui hocha la tête et posa son arme sur le capot de la voiture devant lui avant de lentement marcher, mains en l'air, vers le hangar. À chaque pas, il craignait d'entendre la détonation d'un coup de feu, mais rien n'arriva. Finalement, après quelques secondes qui lui semblèrent une éternité, il arriva devant l'entrebâillement de la porte et s'y signala :

"Je suis là pour négocier, comme convenu, sans arme."

MT s'avança alors dans sa direction, tandis que Liam et Marcello restaient en retrait, leurs armes pointées sur les trois employés agenouillés et les mains derrière la tête. De son ton flegmatique habituel, il remarqua :

"Eh mais c'est toi, Franckie. J'peux te dire qu'on en a entendu parler de toi ces derniers temps.

- Avant de m'exposer vos condition, je dois vous signaler que le LSMS est en train d'arriver, y compris par hélicoptère, afin d'emmener nos blessés. Est-ce que vous y voyez un problème ?

- Bah non mon reuf, c'est l'jeu.

- Ok, qu'est-ce que vous voulez alors ?

- Vous nous laissez partir et les otages iront bien, on les déposera dans les montagnes avec leurs téléphones et ils vous signaleront qu'ils sont là.

- Je peux pas vous laisser partir comme ça, surtout avec les otages.

- Déjà, virez vos bagnoles de devant la route, et je veux aucune grille au sol. C'est compris reufré ?

- Et les otages ?

- J'en libère un si vous virez les caisses.

- Et les autres ?

- On les garde, comme prévu."

Peine soupira, et saisit sa radio avant d'y résumer les demandes. Le capitaine répondit immédiatement :

"Pas question. On veut tous les otages libérés."

Peine tourna son regard vers MT qui secoua la tête.

"Et si on libère tous les otages, à quel moment on peut faire pression ? Il est teubé ton chef, Franckie.

- Écoutez, on ne peut faire un pas vers vous que si vous en faites un vers nous aussi.

- Ou sinon on peut tirer une balle dans la jambe de Grimaldi et empêcher que les soins n'arrivent.

- Et si tous les otages meurent, comment vous allez faire pression ?

- Les otages vont pas mourir mon frère, vous allez pas le laisser faire."

Peine s'approcha légèrement de MT, le visage particulièrement dur et parla d'une voix plus glaciale qu'il ne l'avait jamais eue :

"Peut-être que le capitaine ne le voudra pas, mais moi je m'en fiche. Ils ont choisi de bosser avec vous. Et si vous les tuez, vous aurez plus aucun moyen de vous en sortir, et vous finirez au mieux en tôle, et au pire six pieds sous terre. Vous préférez quoi ?"

Le gangster haussa un sourcil avec un petit sourire :

"Eh bah mon frère, j'comprend ta réputation, tu lâches rien dis moi."

Il se tourna en riant vers ses complices :

"Il est complètement taré le Franckie les mecs.

- Pas pour te manquer de respect" répliqua Marcello "Mais ça me rassure pas plus que ça que le type qui négocie soit stupido.

- La même mon pote" approuva Liam "Y a pas moyen de changer ?"

MT secoua la tête en riant puis se retourna vers l'officier :

"Bon, ça nous avance pas. T'es un taré ? Ok. Mais t'es pas le seul agent, et t'inquiète que le capitaine va te virer si tu merdes.

- Vous libérez les otages et on libère la voie, point.

- Libérez le passage d'abord, et après on verra pour les otages.

- J'ai aucune assurance que vous allez tenir parole là.

- Tu sais quoi ? T'as gagné. Les mecs, libérez en un. Pas Grimaldi. Allez, Tim ça sera nickel"

L'un des employés fut poussé en avant et se leva alors avant de marcher vers la porte. Peine parla dans sa radio :

"Un des otages est libéré. En échange, on doit dégager la voie."

L'otage sortit alors et avança doucement vers les voitures, les mains levées, avant d'être menotté et mis dans un véhicule. Le capitaine fit quelques signes, et les agents démarrèrent avant de se garer autrement, laissant un couloir d'environ quatre mètres pour passer. Alors que Peine allait reprendre, le bourdonnement d'un hélicoptère commença à se faire entendre. Durant les minutes qui suivirent, il emmena alors Monier et Rotarez vers l'hôpital. Une fois le son se perdant au loin, Franck demanda :

"Maintenant que la voie est libre, vous libérez les otages.

- Deux secondes, chill mon frère. Y a aucune grille ?

- Aucune.

- Ok. Si je libère les otages, j'ai rien qui garanti que vous allez pas direct nous poursuivre. Alors on fait quoi là ?

- Si on vous laisse de l'avance ?

- Cinq minutes d'avance et on en libère un maintenant et l'autre en partant.

- On est juste à côté d'une autoroute. On peut pas se permettre cinq minutes.

- Alors trois minutes.

- Avec une autoroute à côté, ça vous donnera quasiment 5 kilomètres d'avance. Je répète, on peut pas se le permettre. Trente secondes d'avance. On est pas loin des montagnes, avec des entrepôts où se planquer et des autoroutes pour fuir. Même avec trente secondes vous pouvez nous semer."

MT ferma les yeux un instant, afin de considérer ses options. Finalement, il se recula et fit quelques signes à son équipe. Bobby se releva et marcha vers la porte, tandis que Grimaldi était dirigé vers la voiture, où il monta à l'arrière en compagnie de Marcello. Liam, lui, monta à la place du conducteur. Peine se retourna vers les voitures et attendit la sortie de l'otage pour lui saisir le bras et l'y amener. Là, il fut immédiatement menotté et embarqué. Peine expliqua au capitaine :

"Ils vont sortir. Ils ont trente secondes d'avance. Ils vont libérer Grimaldi direct en sortant."

Boid approuva, et tous s'installèrent dans leur véhicule avant de mettre le contact. La porte du hangar coulissa lentement, révélant la voiture de sport verte qui s'y trouvait, et MT monta à son tour dans le véhicule. Son moteur rugit, et la voiture démarra immédiatement, une porte arrière entrouverte. À toute vitesse, il passa devant les véhicules de police, soulevant un imposant nuage de poussière. Angelo fut poussé dehors, roulant dans le sable sur plusieurs mètres. Il fut immédiatement menotté et amené dans une voiture. Le capitaine, radio en main dans la voiture de Kuck, fixait le tableau de bord pour signaler le départ de la poursuite. Peine, seul dans sa voiture après la trahison de Michael, était prêt à partir. Il ne restait qu'une dizaine de secondes. Une goutte de sueur roula le long de sa tempe. Quelques instants encore. Finalement, le capitaine les urgea :

"On y va !"

Chapter 31

Summary:

TW : armes à feu, arme blanche, sang, mort, accident de voiture

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Ils partirent immédiatement en poursuite dans un rugissement de moteur, gyrophares allumés et sirènes hurlantes. La voiture de sport des Families n'était déjà qu'un point sombre se détachant sur le fond clair du désert où l'air troublé tourbillonnait sous la chaleur. Au son strident dégagé par les véhicules de police, les conducteurs civils se déportaient sur le côté de la route, lorsqu'ils ne s'étaient pas déjà garés par prudence au passage de la voiture verte des gangsters. Continuant sur Panorama drive, ils se dirigeaient comme attendu en direction de la Seinora Freeway, afin de partir en direction du nord de l'île, possiblement pour aller se cacher à Grapeseed. Sans sirène, cependant, les Families étaient forcés de slalomer, leur faisant perdre du terrain malgré les capacités supérieures de leur moteur. Ils furent forcés de ralentir afin de prendre l'embranchement de la Senora Freeway, permettant à la police de gagner toujours plus de terrain. L'écart n'était désormais plus que d'environ trois cent mètres. La poursuite continua alors sur l'autoroute, où la ligne droite et les multiples files permit alors au gang de gagner du terrain à nouveau, parvenant à distancer le LSPD avec une certaine aisance. Boid en tête de file, la ligne de véhicules de police filait à toute allure à sa suite. Les mains de Peine étaient crispées sur son volant, ses dents serrées, son pied appuyant au maximum sur la pédale de l'accélérateur. Alors qu'il fixait droit devant lui, un éclair jaune passa à sa gauche. Une voiture de sport d'un jaune vif l'avait doublé, bientôt suivie d'un autre véhicule visiblement tuné, et lui aussi jaune vif. La voix du capitaine s'éleva dans la radio :

"C'est quoi ce bordel ? Pourquoi les Vagos sont là ?

- Capitaine ?" demanda Peine "J'ai le numéro de Johnson, est-ce que vous voulez que je le contacte ?

- Faites ça oui, dites lui de dégager, la situation est déjà assez tendue comme ça !"

Peine saisit son téléphone d'une main, sans quitter la route des yeux, et ordonna à l'assistant vocal de son téléphone d'appeler le jefe des Vagos. Le répondeur sonna quelques instants et Lenny décrocha :

"Oui, quoi encore ? Tu vois pas qu'on est occupés là ?

- Boid veut que vous dégagiez.

- Et tu crois que je vais rater une occasion comme ça de me faire les Families ?

- Il risque de tirer si vous vous mêlez de ça, je préfère prévenir.

- Eh bah on s'en fout. Ils auront déjà suffisamment de travail avec les corps de ces trois cons pour essayer de venir nous chercher des problèmes.

- Vous préférez pas laisser le LSPD s'en charger ? Les Croute sont perdus avec Carter dans le désert, allez plutôt les chercher.

- Matéo s'en charge. T'as fini là ?

- Aucun changement d'avis donc ?

- Non. Rappelle moi que si t'as des trucs utiles à me dire."

Le chef de gang raccrocha brusquement, et Franck jeta de frustration son téléphone sur le siège passager, tandis que les voitures jaunes filaient vers les Families, qui se rapprochaient toujours plus de Grapeseed. Par la radio, il prévint :

"Capitaine, Johnson refuse de laisser le LSPD s'occuper de ce cas.

- Ils ont pas autre chose à faire ?

- Je l'ai prévenu que vous allez tirer si vous les voyez sur place, mais ça l'a pas arrêté.

- Bon, on peut qu'espérer arriver avant."

La sortie vers Grapeseed en vue, les Families y sortirent alors, comme anticipé, suivit de toujours plus près par les Vagos, les voitures de police à plus de deux cent mètres derrière. Le capitaine alerta d'où sortir, et tous lui emboitèrent le pas, s'engageant sur la bretelle menant à la petite ville industrielle. Les rues étant bien plus sinueuses comparativement à l'autoroute, tout le monde devait ralentir. Peine continua cependant d'accélérer, traversant trottoir et terrains vagues, faisant tomber quelques panneaux et renversant quelques clôtures. En raison de l'intense chaleur, particulièrement dans cette zone sèche de l'île, presque personne n'était dans la rue, et Franck ne fut jamais réellement à risque de renverser quiconque. Sa prise de risque, cependant, lui permit de s'approcher efficacement des deux gangs, qui étaient maintenant suffisamment rapprochés pour échanger des coups de feu. Slalomant dans les rues, des rafales sortant de leurs fenêtres brisées, leurs véhicules à la carrosserie pleine d'impacts de projectiles se pourchassaient furieusement. Après plusieurs secondes, les pneus de la voiture verte furent crevés, faisant déraper le véhicule sur de longs mètres sans le faire se retourner grâce à son profil particulièrement bas. Les Families firent cependant un tête à queue et finirent sur le bas côté, non loin de grands silos rouillés au métal brûlant et stockant du grain. Les trois gangsters en sortirent alors et se mirent à courir en direction des grandes structures métalliques agricoles. L'un des véhicules jaunes s'arrêta alors, laissant descendre Lenny et Miguel, uzi en main. La voiture de sport, elle, continua sa route, faisant le tour du quartier. Presque immédiatement, les rafales reprirent. Peine continua de rouler dans leur direction, afin de se garer non loin et de garder sa couverture. Les autres voitures de police le talonnaient, leur sirènes retentissant à une centaine de mètres de là. Il freina brusquement sur l'herbe sèche, en biais, et sortit de son véhicule. Il se baissa immédiatement derrière, tandis qu'une rafale faisait éclater des étincelles sur sa carrosserie. De l'autre côté de la parcelle, la voiture de sport jaune passa lentement, fenêtre ouverte, puis accéléra soudainement après avoir jeté un petit objet. Les cris des Families résonnèrent alors tandis qu'ils étaient forcés de sortir de leur couverture. Une explosion retentit et le métal des silos se mit à se tordre, tandis que l'un d'entre eux tombait lentement sur le côté dans un long grincement assourdissant. Il finit par s'effondrer, déversant des tonnes de grain sur le sol. Une silhouette émergea alors d'un côté et commença à tirer, mais une rafale du côté des Vagos la fit tomber en arrière dans un cri. Les voitures de police finirent enfin par arriver et se garèrent dans un crissement de pneu. Lenny et Miguel remontèrent dans leur véhicule, échappant aux tirs du capitaine qui les avait immédiatement visés. Ils se mirent à rouler dans la direction de la couverture des Families et tirèrent à nouveau plusieurs rafales, avant de fuir rapidement, suivant la voiture de sport. Peine se précipita alors vers le silo restant et prit couverture. Il inspira profondément. Arme en main, il courut vers l'endroit où les Vagos avaient tiré. Là, Liam Dune était effondré sur Marcello Capone, qui était tombé dos au sol. Les deux avaient été fauchés à des instants différents. MT, lui, était juste à côté, du sang coulant de sa bouche et de son torse, respirant difficilement. Il entrouvrit les yeux, tandis que Peine le menaçait, et affirma d'une faible voix rauque :

"T'es content de toi mon frère ?"

Peine se contenta de l'observer froidement, et le gangster eut un petit rire en se redressant légèrement, son sang tâchant l'herbe sèche.

"Au final, cinq minutes ou trente secondes, ça aurait pas changé grand chose."

L'agent, pointant toujours son arme vers le chef de gang, répondit :

"Il aurait suffit de ne pas envoyer Allée tuer Bailey et jamais j'aurais pu vous retrouver."

MT détourna son regard vers le corps de ses deux complices, puis eut un long soupir.

"Bailey, Allée et Panis morts, Rixzy, Dunne et Capone morts... Une vie pour une vie."

Il commença doucement à tâter le corps de Liam.

"Moi j'en ai plus pour longtemps."

Sa main se fixa alors sur un objet sous la veste de l'irlandais. Il fit une pause durant un instant, luttant pour ne pas s'effondrer, et ferma les yeux, puis regarda Peine, immobile.

"Alors autant égaliser."

Il sortit alors sa main, dans laquelle il tenait un couteau, et s'élança sur Peine avec le peu de forces qui lui restaient. Le policier s'effondra sous son poids et un coup de feu retentit. MT cessa totalement de bouger, et la lame tomba lentement de sa main, après avoir légèrement entaillé l'uniforme de Peine. Ce dernier se dégagea avec difficulté avant de se relever. Il rangea doucement son arme et observa ses mains et son uniforme, couverts de sang.

Chapter Text

"T'as pas vu mon chargeur ?"

Demanda Daniel, fouillant la chambre sans succès. Antoine, affairé sur le rangement de ses propres affaires dans sa valise jaune posée sur le lit, réfléchit un instant puis fouilla dans son sac avant d'en sortir un chargeur blanc.

"C'est ça ?

- Oui ! Il était où ?

- J'me suis trompé, j'lavais pris dans mon sac."

Il le tendit à son cousin, qui le remercia et le rangea dans sa valise violette avant de continuer à y ranger ses vêtements. Après quelques minutes, ils tirèrent les fermetures éclair et posèrent les valises sur le sol avant de les descendre au rez-de-chaussée. Là, Fab et Donatien discutaient dans l'entrée avec Juan et Kim. Lorsque le Vagos vit les deux jeunes garçons, il s'exclama :

"Ah, ça y est ! Vous êtes prêts vous deux ?"

Les cousins hochèrent la tête et s'avancèrent dans leur direction. Par la fenêtre, ils virent la voiture jaune qui les attendait. Kim s'enquit :

"Alors, on y va ?"

Antoine hésita un instant puis demanda :

"On peut attendre quelques minutes, pour dire au revoir ?

- Passez moi vos valises, on va les ranger et vous attendre dehors"

Juan s'occupa alors de la valise de Antoine et Kim de celle de Daniel, avant d'aller vers la voiture pour les ranger dans le coffre. Les deux jeunes garçons se retrouvèrent alors seuls avec les deux vignerons, sans vraiment savoir quoi dire. Daniel prit la parole :

"Merci beaucoup de bien avoir voulu nous héberger.

- T'inquiète petit, c'est normal !" sourit Fab.

- Ce n'est que notre devoir d'humbles citoyens, après tout !" renchérit Donatien.

- Ben merci quand même" répondit Antoine "Parce que vous étiez pas obligés.

- Ce n'est pas faux, d'autant que vous nous avez causé un paquet de soucis.

- Désolé…

- Oh, ce n'est rien mes p'tits gars. Mais si vous revenez, évitez de nous refaire le coup de la disparition dans le camion destiné au client ! Vous avez bien de la chance qu'il ait été arrêté et mis en prison, sinon il aurait pu demander des dommages et intérêts ! Pire encore : j'aurais dû les payer ! Soyez plus calmes les prochaines fois.

- Alors…" demanda Daniel, avec un sourire "Vous voulez dire qu'on pourra revenir ?

- Eh bien, qu'en penses tu mon p'tit Fab ?" demanda Donatien à son collègue. Ce dernier sourit et ébouriffa les cheveux de Daniel avant de répondre :

- À part la frayeur qu'ils nous ont fait avant-hier, c'est des bons minots non ? Je serais pas contre les revoir un peu. Vous en dites quoi vous deux ?"

Les cousins se regardèrent avec un grand sourire et sautèrent sur place en répondant :

"Bah oui bah oui !"

Daniel approuva :

"Merci beaucoup, ça nous fait super plaisir !

- Oui !" enchaîna Antoine avec enthousiasme "C'est super gentil merci beaucoup m'sieurs, vous êtes trop sympas c'est trop bien, j'ai trop hâte de rev'nir pour voir les sangliers et me balader dans les vignes !

- Ben, euh… Tout pareil du coup."

Les deux vignerons échangèrent un regard amusé puis Montazac déclara :

"Il faudra que je vois avec monsieur l'officier Peine pour le dédommagement du loyer, tout de même. Oh, maintenant que j'y pense !"

Il sortit deux billets de sa poche et en tendit un à chaque cousin :

"Une centaine de dollars chacun, pour votre travail dans les vignes !

- Merci beaucoup m'sieur !" dit Daniel en prenant son billet "Vous êtes super généreux !

- Oui !" approuva Antoine en prenant le sien "Vous êtes vraiment un grand homme !

- Ah, c'est vous qui le dites !" opina Donatien "Même si pour le coup cet argent est déjà en dessous du salaire minimum pour ce que vous avez fait. C'est surtout pour éviter les ennuis, voyez vous !

- Oui ben c'est bien normal m'sieur !" affirma Antoine "Vous avez juste le sens des affaires !

- Bah oui bah oui !" abonda Daniel "Vous êtes fort pour gérer votre argent !"

Donatien se tourna vers Fab et lui tapota l'épaule en riant :

"Alalah, ils vont me manquer ceux là. Même toi t'es pas autant à fond pour me complimenter.

- Faut bien quelqu'un pour te faire garder les pieds sur terre, le sang."

Un klaxon retentit dehors, et Fab affirma :

"Bon, faudrait pas faire attendre Juan ! Il est pas beau à voir quand il se fâche !

- Oui, vous avez raison !" répondit Daniel "Bisous !

- Bisous !" répéta Antoine.

- Allez, bisous les minots !" fit Fab avec un signe de main. Voyant que Donatien ne répondait pas, il lui dona un petit coup de coude, et le vigneron eut un petit sursaut avant de répondre en bougonnant :

- Non, pas bisous non… Au revoir plutôt ! À bientôt. Salut, à la limite. Peut-être à toute. Mais pas bisous ! Enfin, nous sommes des adultes Fab !"

Devant le regard que Fab lui donna, il grogna et finit par dire, défait :

"Bon... Bisous les Croute.

- Bisous m'sieur !" répondirent-ils en souriant, avant de sortir.

Jetant un dernier regard à la décoration excessive de mauvais goût, ils se rendirent vers la voiture et montèrent à l'arrière. Les deux vignerons sortirent à leur tour et restèrent sur le porche tandis que la voiture manœuvrait. Lorsqu'elle sortit du parking et prit le chemin de la ville, Fab fit un grand mouvement du bras pour dire au revoir aux cousins, qui lui répondirent avec le même mouvement. Tandis qu'ils s'éloignaient, le sourire des jeunes garçons disparut petit à petit. Antoine, les yeux humides, demanda à son cousin :

"On y retourne vite, hein ?"

Daniel prit doucement sa main, une petite boule dans la gorge, et hocha la tête avant de répondre :

"On y retourne vite. Et cette fois, on se met pas dans des problèmes !

- Oui, on va juste se balader et cueillir du raisin.

- Juste ça, et rien d'autre !

- Ça sera bien tranquille, on pourra se détendre."

Ils cessèrent de parler durant plusieurs secondes, puis Antoine suggéra, avec un petit rictus :

"Quand même… C'est plus rigolo quand il se passe des choses.

- Oui… Peut-être qu'on pourra essayer de conduire des camions, c'était bien le fourgon.

- Ou faire du parachute au dessus des vignes, Inigo nous a promis qu'on en ferait un jour !

- Tu penses qu'un camion vide ça flotte ?

- Tu penses qu'on arriverait à atterrir pile devant la maison ?"

Leur sourire était maintenant bien plus franc et Daniel s'écria :

"J'ai trop hâte !

- Moi aussi Daniel !"

Leurs mains resserrèrent leur prise l'une sur l'autre.

"Je t'aime mon Antoine.

- Moi aussi je t'aime."

Chapter 33

Summary:

TW : mention de mort, de violence, d'étranglement, d'arme à feu, d'arme blanche, de sang

Notes:

(See the end of the chapter for notes.)

Chapter Text

Franck observa autour de lui, sur le parking vide à quelques rues du commissariat, où Lenny Johnson lui avait demandé de venir. Après quelques instants sans rien trouver, il finit par repérer le jefe en compagnie de Sarah Carter, de l'autre côté. Fronçant légèrement les sourcils, il ouvrit son holster au cas où, et se rendit vers eux. En le voyant, Lenny lui sourit, imité par Sarah. Le policier lui lança un regard interrogatif, et le Vagos prit alors la parole :

"Je me suis dit que c'était une bonne idée de vous faire venir tous les deux, j'ai quelques mots à vous dire. Tout d'abord, madame Carter, merci pour l'aide que vous avez apportée aux cousins. Sans vous, je ne sais pas ce qu'ils seraient devenus. Je ne sais pas si ça vous intéresse comme proposition mais... Les Vagos ont une dette envers vous maintenant. Si vous avez besoin de notre aide, appelez moi."

Sarah haussa les sourcils, surprise et sans vraiment savoir comment réagir face à une proposition si sérieuse de la part d'un des hommes les plus puissants et dangereux de la ville. Lenny continua :

"Je ne vous force pas la main, c'est à vous de voir. Ça tiendra toujours par la suite. Et Peine ?

- Oui monsieur Johnson ?

- Bravo pour cette enquête et ses résultats. Les cousins voulaient aussi venir pour vous dire merci mais ils avaient une séance avec leur psy, donc ils passeront plus tard. Pour ce qui est des malettes, il me semble que la Pacific a confirmé que tout avait été rendu. Tout rentre dans l'ordre. Quoi qu'il en soit... Félicitations."

Le gangster lui tendit la main. Franck sourit et la serra avant de répondre :

" Je n'ai fait que mon travail, monsieur."

Après un petit sourire, Lenny commença à s'écarter et les salua :

"Peut-être à une prochaine fois."

Il s'éloigna alors. Peine se tourna vers Sarah et l'interrogea :

"Il faudrait que je rentre au commissariat, je suis parti sur mes heures de travail quand j'ai vu qui m'avait envoyé le message. Vous voulez m'accompagner ?

- Avec plaisir."

Ils se mirent alors en chemin vers le commissariat et Sarah demanda :

"Vous allez bien Franck ? Pas trop fatigué après tout ce qui est arrivé ?

- Soulagé, plutôt. Cette histoire est enfin finie. Il reste quelques zones d'ombre, évidemment. Où est l'ordinateur de Bailey, qui s'est chargé du meurtre de Allée. Mais le plus important est là : plus d'enquête, meurtre résolu, plus de Families...

- Plus de Families. C'est le plus important. Malgré tout ce qui est arrivé, je suppose que c'était un mal pour un bien. Vous avez débarrassé la police de sa corruption et la ville de son plus gros cancer.

- J'ai l'impression" affirma doucement Peine "que vous êtes aussi... Presque heureuse, étrangement."

Sarah resta silencieuse quelques instants, réfléchissant tout en marchant, puis répondit :

"J'ai sauvé deux gosses de 16 ans des Families... Je suppose que... Enfin...

- Je comprend. Vous voyez ça comme une sorte de revanche ?

- Je ne sais pas. Sur la vie, peut-être. J'ai prouvé, je me suis prouvée, que j'étais capable de faire quelque chose de bien. Que je n'étais pas condamnée à ruminer ce qui s'était passé jusqu'à la fin de ma vie."

Constatant qu'ils arrivaient en vue du LSPD, Peine inspira puis proposa :

" Est ce que ça vous dirait qu'on en reparle ce soir ou demain ? En buvant un verre ?"

Sarah sourit plus franchement :

"Si vous n'aviez pas demandé, c'est moi qui l'aurais fait. Demain, vers 20 heure ?

- Entendu. Là où vous voudrez."

En arrivant sur l'esplanade devant le commissariat, ils tombèrent alors nez à nez avec le capitaine, qui eut un petit mouvement de recul. Alors qu'il allait s'excuser et passer, il sembla se résoudre et demanda d'un ton incertain :

" Est-ce qu'il serait possible que je vous parle, madame Carter ? J'aurais... J'aurais des excuses, à vous présenter."

Sarah hocha la tête, puis se tourna à nouveau vers Peine :

"Alors, à demain ?

- À demain Sarah"

Franck se mit à sourire puis entra dans le commissariat. Il monta doucement les marches menant au bureau qu'il avait utilisé durant le temps de l'enquête. Une fois devant, il poussa la porte et entra, puis se dirigea vers le tableau de liège sur lequel il avait relié des photos et de petits papiers. Il était maintenant l'heure de tout décrocher et de retourner à un rythme plus habituel. Au centre, la photo de Bailey semblait l'observer. Franck la regarda un long moment, puis avança sa main et la décrocha. Une éternité semblait s'être écoulée depuis le jour de sa mort. Quand Peine avait appelé en anonyme le journaliste pour lui donner rendez-vous dans ce parking, prétextant des informations. Puis qu'il l'avait surpris, caché derrière l'une des colonnes, et lui avait planté un couteau dans le cou avant de se saisir de son ordinateur, qui contenait l'article prouvant  l'affiliation de l'agent aux Vagos, son infiltration dans la police, et le nom des taupes des Families. Puis, Peine décrocha la photo de Yann Allée. Ce dernier était arrivé quelques secondes plus tard, exactement pour la même raison que Franck, et avait appelé Bailey à haute voix, stupidement. Lorsqu'il avait vu Peine, il avait tenté de fuir, mais ce dernier l'avait rattrapé et avait tenté de l'étrangler. Le Families s'était débattu, brisant l'ordinateur dans la lutte, mais avait fini par cesser de respirer. Constatant qu'il avait une arme, Peine avait compris que l'occasion était trop belle. Il pouvait désormais faire passer ce crime isolé en un crime des Families. Il s'était saisi du revolver et avait tiré dans la tête du journaliste déjà décédé, puis avait chargé le corps de Allée dans une voiture noire qu'il avait volé. Il était alors parti en vitesse, laissant la voiture noire près des canaux de Vespucci, là où il l'avait dérobée, avant de reprendre son véhicule policier qu'il avait laissé là. Quelques instants plus tard, les cousins avaient trouvé le journaliste, et il avait alors pris l'appel. La nuit même, il était retourné aux canaux de Vespucci et avait plongé la voiture contenant le corps du Families dans l'eau. À cause de la destruction de l'ordinateur, il avait dû enquêter lui-même sur ses rivaux au sein du LSPD. Le commissariat était dans un tel état de tension et de fébrilité dans sa recherche des Families qu'il avait été incroyablement simple de se faire charger de l'enquête de de relier les événements aux verts. Et désormais, le gang avait disparu, ses complices avaient été arrêtés, et un couteau ensanglanté dont les analyses ADN correspondraient avec Bailey serait mystérieusement retrouvé lors d'une fouille du Unicorn. Les Vagos n'avaient désormais plus de rival, et leur mainmise sur la ville était assurée.

Terminant de retirer les photos, Franck les déchira alors et les jeta dans la corbeille. Observant les confettis voleter jusque dans le sac poubelle, la petite discussion qui avait eu lieu quelques instants plus tôt avec Lenny Johnson lui revint en tête. Un sourire grandit sur ses lèvres, et il répéta en chuchotant pour lui-même :

"Je n'ai fait que mon travail, monsieur."

 

Fin

Notes:

Envie d'en savoir plus ? Franck se fera-t-il avoir ? Les cousins vont-ils devenir de vrais Vagos ? Découvrez ça dans le tome 2 !

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