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Français
Series:
Part 12 of Le Syndrome du Gisant ou le Rêve des Allégories The Recumbent Syndrome or the Dream of Allegories , Part 4 of Les Chroniques de Deux Âmes-Soeurs dans un Coeur-Ombre, Part 2 of Ce Temps qui défigure nos Âmes, et ce Destin qui se joue de nous - This Time that disfigures us, this Fate that plays with us
Stats:
Published:
2025-07-30
Updated:
2025-10-08
Words:
18,004
Chapters:
2/?
Comments:
12
Kudos:
948
Hits:
998

CE TEMPS QUI NOUS DEFIGURE, CE DESTIN QUI SE JOUE DE NOUS… - Acte II

Summary:

Une Prophétie a été écrite il y a des temps révolus, révélant l’avènement d’un Elu de Dieu, Champion de la Lumière, mettant à terre les sinistres Seigneurs qui se sont appropriés le monde mortel en déroute…

Subrepticement, une ombre se profile dans les couloirs secrets de l’abbaye de la Confrérie, et les rumeurs bruissent dans l'ombre des arches saintes, à la recherche d'une Mémoire tragiquement effacée lors d'une mission désastreuse...

Mais qui a écrit ledit Manuscrit tant convoité par une cardinalice capricieuse ? Quels secrets infâmes détient-il, et qui fait tant frémir les Fondateurs de la Confrérie ? Est-ce une œuvre d’art panthéiste ou un palimpseste effaçant les secrets les plus honteux que l’humanité ait pu écrire ?

Un long voyage se prépare où des âmes échoueront ou trouveront la rédemption...

Le grand Miroir révèle des prémonitions ironiques que les mortels ne comprennent pas, tandis que son pendant Jumeau déverse l’irréparable, là-haut, muré dans les fondations du Château du Chaos…

Notes:

« L’heure du loup se nichait dans l’impondérable de la Lumière de Ténèbres… et ce Rayonnement baroque émergeant des feux joyeux des cheminées, ondulait dans des vagues frémissantes comme des courbes de miroitements, de lampes astrales..."

"Nous n'écrivons pas des histoires,
"Nous nous contentons de saigner sur le papier...."

"Ce qui ne nous tue pas, nous rend plus fort..." F. NIETSZCHE

Chapter 1: EPIGRAPHE

Chapter Text

« CE TEMPS QUI NOUS DEFIGURE, CE DESTIN QUI SE JOUE DE NOUS… »

ACTE II « JE N’AI PAS PRIS LE TEMPS DE VIVRE »

 

Chapitre I : Prologue et présentation-trailer – Epigraphes

 

Tout au long de ces chapitres, des crédits sont à signaler, qui m’ont accompagnée dans l’écriture :

ALIEN IV La Résurrection Jean-Pierre Jeunet (1997) : Prologue par Helen Ripley; certains dialogues notamment dans le Chapitre VII

L’échine du Diable Guillermo del Toro (2001) : Prologue sur la quintessence des fantômes; phénomènes de nos propres hantises anthropomorphiques

« Les bases de la censure sont celles de la croyance… »: extrait d’interviews autour du concept sémantique et symbolique sur l’œuvre inoubliable de Umberto Ecco: Le Nom de la Rose – The Name of the Rose – film réalisé par Jean-Jacques Annaud.

« A force d’éons, les fantasmes deviennent foi, et bien peu obtiennent les révélations si ardemment désirées… »  (Prologue Lords of the Fallen)

Bien sûr, l’Imaginaire ne s’envole pas simplement sur un coup de tête, et est souvent soutenu allègrement par sa Sœur allégorique : Musique… Avec Elles, tout est possible au-delà de l’infini des obstacles qui pourraient s’amonceler devant nous…

Crédits d’artistes qui m’ont fait délirer les multitudes de syntaxes étranges et sibyllines, métaphores miroitant ces univers ouvrant grand leurs Portails sur l’Inconnu…

Lisa Gerrard/Dead Can Dance

Dernière Volonté (Geoffroy Delacroix ou Geoffroy D.)

Agnès Obel

Wolfsheim – Underneath the Veil

Blutengel – Behind the Mirror

Mylène Farmer et ses sémantiques savoureuses où de nombreuses lectures de compréhension cachent leurs petits secrets dans chaque phonème susurré de sa voix parfois au liminal de la brisure (« Ainsi soit-je »; « Pas le temps de vivre ») …

 

Personnages originaux ou nommés à travers les nombreux parchemins magiques « écrits » par les chevaliers défunts, et trouvés par les héros divers des 3 LoS : Gabriel Belmont LoS1 ; Simon Belmont/Alucard/Trevor Belmont LoS Mirror of Fate ; Dracula LoS2

Wygol et Danaşti : Abbaye de Wygol possède la plus belle et grande bibliothèque autrefois visitée, et témoin-lieux des événements se déroulant tout au long des chapitres… Notamment par l’intrusion d’un Chevalier inconnu surnommé par les villageois « Sauveur de Dieu », et dont la Croix de Combat avait été baptisée : Vampire Killer…

Wygol est tombée en tutelle sous l’égide de la Confrérie, les autres guildes ayant abandonné le village.

Danaşti est le village abrité dans les fondations de la Confrérie logeant dans le grand Donjon forteresse surplombant les lieux traversés par une rivière. L’énorme forteresse cache de nombreux artefacts à l’image exacte de leurs pendants ténébreux nichant dans le Château, comme le Miroir du Destin, ou la Tour de l’Horloge répliquée presque à l’identique, selon les très nombreux témoignages au cours des siècles, de ceux, - très rares survivants -, qui avaient réussi à revenir de missions périlleuses dudit Château, et avaient dressé des schémas et tentatives de plans plus ou moins conformes. Comme Chester d’Uries…

Danaşti a fondé le Quintemvirat constitué de : Braila, Targoviste, Poieşti, Gresit.

Miroir du Destin : ses origines sont très floues, même parfaitement inconnues par les Fondateurs de la Confrérie…Ces derniers ne savent pas que le Miroir est apparu avec Son Jumeau maléfique sis dans le Château, très certainement invoqué en même temps que l’édifice-Entité…Ils ont été déménagés par les Bernhard, supposera-t-on, l’un dans le Château, l’autre dévié au hasard par une main inconnue qui l’a ramené au sein de la Confrérie…Probablement l’un des Fondateurs de l’Ordre, dans un but à l’origine dénué de mauvaises intentions.

Il aura un rôle extrêmement important dans la direction existentielle des mortels croisant ses Prémonitions. Il délivrera une Prophétie millénaire, écrite durant la Guerre des Titans et des Nécromanciens, qui a vu la chute d’Agharta où vivait une civilisation ancienne et érudite, détentrice de Science unique disparue avec la chute, et de Connaissances perdues à jamais… Le Miroir montrera le sinistre Destin de certains personnages, comme Gabriel Belmont devenant Dracul. Et sûrement celui de Trevor destiné à tomber sous les coups de son propre Père.

Une partie du Miroir sera brisée en petits éclats que la Confrérie fera fondre dans des pendentifs bijoux uniquement offerts à quelques-uns des privilégiés dont la Destinée est liée à la Prophétie. Trevor en fera partie, et ce fut nul autre que l’ancien Dieu Pan qui déposera le morceau de Miroir dans les langes du Nouveau-Né Trevor. Ce Dieu ancien d’ailleurs, subira des visions terrifiantes qui lui inspireront l’enlèvement du bébé Trevor des bras de sa mère Marie. Solution qu’il s’empressera de confier aux Fondateurs, ces derniers emportant l’enfant dans les ténèbres et l’anonymat de leur Ordre, afin de l’élever loin du danger de son Père.

Pan se sacrifiera au nom d’une idéologie qu’Il pensait juste, alors qu’Il choie aux pieds mêmes de Gabriel, lors d’une lutte testant l’Âme torturée du Chevalier. Le Dieu comprendra trop tard son erreur devant la noirceur d’âme de ce Chevalier sur qui la Confrérie avait déposé tous ses espoirs ; le Dieu unique avait choisi Son Elu parmi les plus sombres, et la Prophétie fut réalisée dans tout son effroi. Le Destin n’acceptait nulle dérive dans ses plans, et les dés se révélaient pipés depuis le début. 

Le Miroir ne montrera jamais quoi que ce soit à Trevor, comme ce dernier le dira à son fils Simon, lui accrochant son morceau autour du cou, quand il partira en quête pour détruire Celui qui venait de lui être révélé comme son Père par la Confrérie : Dracula.

On ne peut que supposer que si le Miroir ne lui avait jamais rien montré comme Destin, c’est parce que Trevor Belmont n’avait pas de Destin. Du moins, en tant que Mortel…

Château du Chaos, Entité soumise à Son Maître, et invoqué par la Famille Berhnard, Nécromanciens à la sinistre réputation…On suppose qu’en plus d’être surgi des Enfers, ses origines seraient plus enracinées dans le Cosmos…Démon à part entière, pensant et conscient. Assujetti par les Bernhard, Il donnera allégeance ensuite à un des Seigneurs de l’Ombre, anciens Fondateurs de la Confrérie de la Lumière, ayant abandonné leur pendant jumeau sombre et maléfique sur Terre, la Reine des Vampires Carmilla…Pour ensuite, déposer son allégeance aux pieds de Son nouveau Maître : Gabriel Belmont, Chevalier de la Confrérie, tombé dans ses propres Ténèbres, s’étant emparé des pouvoirs des Seigneurs de l’Ombre qu’il a abattus dans sa quête, et devenant ainsi Le Dragon Dracula.

Les jardins et Labyrinthe du Château étaient visités par les pèlerins du monde entier, bien avant que l’édifice ne devienne le gouffre de l’Enfer pour tout mortel…et certainement avant que ledit Château ne soit «déménagé» aux pieds des montagnes blanches aux neiges éternelles, aux abîmes vertigineux, devenant son éternelle toile de fond pour les reliefs ruinés de Ses fondations…

Le Château étant une Entité puissante tirée des profondeurs cosmiques et des dimensions troubles d’un Enfer que même Dante n’aurait pu imaginer, par cela donc, l’Entité se joue allègrement de ceux qui tenteraient d’en dresser des plans concis. Se transformant, s’étirant, en perpétuel mouvement destiné à déstabiliser le voyageur malheureux qui voit d’une minute à l’autre, un couloir devenir salle de torture, ou des catacombes cachées derrière les rideaux sournois d’un harem démoniaque. Cela grouille dans chaque espace infini, de carcasses se trainant dans une fausse vie de langueur; d’égéries au grade de Chevaliers, uniquement présentes pour vous divertir avant que de vous faire passer de vie à trépas très rapidement. Sans compter toutes les engeances horrifiques que seul cet effroyable Aleph fait édifice, peut accoucher dans des cris d’agonie qui n’appartiennent qu’aux imprudents s’étant perdus irrémédiablement dans ses entrailles…

Trevor Belmont: Notre héros, orphelin, arraché le soir de sa naissance des bras de Marie, sa Mère assassinée, et élevé par la Confrérie dans le secret de sa naissance, sur les conseils empressés de Pan…Il doit être protégé, car la Prophétie millénaire annonce que «Seul le Sang combattra le Sang pour l’Eternité…», et le Miroir du Destin a montré que le Dragon chuterait par la main de son propre Fils que la Confrérie lui a caché: Trevor lui-même, qui connaitra les revers d’un Destin impitoyable…

Acthéean de Rem: Novice guerrier tourné vers l’apprentissage de la Médecine qu’il apprend auprès d’Efrain. C’est lui qui convainc Trevor de se faire soigner après la punition sauvage donnée par le tuteur. Il est la Cause du bouleversement dans la vie de Trevor, en devenant son ami et amant lui apprenant à vivre…Il est le fils unique de Guilhyem de Rem…originaire de Poieşti, une des villes structurant le Quintemvirat, de par son appartenance à Guilhyem de Rem.

Guilhyem de Rem, grand Chevalier-Général des Milites et Armées de la Confrérie de la Lumière; Héros puissant reconnu dans les innombrables Chroniques qui lui sont consacrées, il a, par de nombreuses occasions, guerroyé contre le Dragon, et a mené beaucoup de missions dans les labyrinthes du Château. Haut-Dignitaire Général influent ayant pratiquement atteint le grade de Père Fondateur, s’il n’avait succombé suite à une blessure dont il agonisa durant quatre jours, dans un combat contre Dracul. Il se murmure que Guilhyem aurait écrit des Chroniques sulfureuses, nichées désormais dans une cachette connue que de quelques-uns des Fondateurs, dont les Cardinaux impliqués dans leurs disparitions.

Efrain d’Aloisius: Herboriste-Médecin-Hippocratien sous serment, Aristotélicien connaissant la partie officielle de l’histoire de Trevor, et l’histoire du chevalier mystérieux tombé dans l’échec. Efrain deviendra le Tuteur attitré de Trevor: récompense fabuleuse accordée lors de l’intercession de l’herboriste auprès des Cardinaux et Fondateurs. Le titre lui sera acquis en tant que cadeau de gratitude envers l’adolescent courageux ayant volé au secours de Danaşti attaquée par les hordes. Efrain deviendra le formateur-tuteur d’Acthéean, Norton et Trevor.

Andréas de Wygol: Frère Bibliothécaire responsable de la grande Bibliothèque de l’Abbaye de Danaşti. Ami de longue date d’Efrain. Il a quitté Wygol très jeune, dans un temps où le village n’était pas encore asservi sous le joug du Château et de son Maître…Andréas devra faire face à de nombreux secrets inavouables qui auraient dû rester enterrés avec leurs détenteurs.

Chester d’Uries: Grand Chevalier-Général de la Confrérie, par ses nombreuses missions et ses actes de bravoure, il a atteint les hautes sphères le nommant Père-Fondateur-Commandeur suprême de la Confrérie…Il doit gérer toutes les connivences, complots, mensonges accumulés au cours des siècles par l’Ordre…Il semblerait être le seul véritable témoin des prémonitions troubles se reflétant dans le tain atone du Miroir du Destin…

Les Cardinaux Volpe et Vicus: Volpe par ses caprices égocentriques incessants, commet d’énormes erreurs en envoyant les hommes dans des missions vouées à l’échec…Aigri et misanthrope enragé, il mène un combat sans merci pour sa suprématie contestée en permanence par Chester d’Uries en qui il voit un ennemi obstiné mettant frein à ses ambitions mégalomaniaques…

Vicus est plus humble dans ses démarches, et tente par tous les moyens de réglementer les ordres insensés de son homologue qui risquerait de précipiter tout l’Ordre dans l’anarchie la plus complète, si d’aventure, Volpe obtenait les Lauriers espérés et le rang tant convoité au sein de l’Eglise…

Les deux ne sont pas en reste quand il s’agit de faire disparaitre certaines preuves, ou d’imprégner le doute dans les pensées populaires. Néanmoins, sous leur régence, des Palimpsestes s’écrivent, des manuscrits s’évaporent. Seules restent les paroles de menaces sous-jacentes…

Norton de Riv: fils unique dont le père a guerroyé sous les ordres de Guilyem de Rem. Famille à problème, les parents le confie à la Confrérie pour son éducation en tant que Novice guerrier…Il aspire à une formation médicale comme Acthéean, plutôt que d’être adoubé Chevalier…

Norton de Riv souffre du Syndrome du Gisant à travers son frère Ledorinian décédé à 19 ans au cours de sa toute première mission, considéré comme un Martyr dévorateur de Norton.

La famille a traversé les malheurs pour concevoir et Norton a dû s’occuper de sa mère handicapée à vie suite à une fausse-couche ayant facturé le bassin.

Ledorinian: soldat de la Confrérie qui s’est sacrifié pour nourrir ces semblants d’enfants que sont Euryale Sthéno et Medusa, trois Sœurs-Gorgones survivantes de la chute des Dieux d’Agharta. Son nom a été donné en hommage de son courage au frère de Norton.

Anselme d’Aljibareţž: Tuteur de Trevor, par lui, tout a commencé…Il est originaire d’Albarante, aux confins de la Styrie bordant les neiges du Nord-Ouest…Tuteur violent, ayant intégré l’Ordre grâce aux appuis de Volpe…Famille très puissante et influente depuis plusieurs générations…Les membres soutenants, ainsi que certains membres de la famille, tomberont sous le couperet de la justice et la disgrâce, de par leurs très nombreux méfaits et malversations commis à travers les différentes villes environnant la région de Danaşti.

Eddar: complice de Anselme, et responsable des dortoirs privés. Responsabilité dont il abuse envers les novices…Ancien confesseur destitué de ses fonctions…Il continue quand même son état de confesseur envers Anselme…C’est à lui que se confie le tuteur dans le 3e chapitre de JNPPLTDV, quand il s’est acharné sur Trevor…

Ezebia de Norvège: descendant de Thorir de Norvège, Ordonné spécial du Tribunal condamnant Anselme, avec Mikha de Stern.

Thorir de Norvège: sous un commandement affronta Médusa et vit ses compagnons figer en pierre.

Mikha de Stern: Les décisions principales sont prises par lui dans les ordonnances…Haute position sociétale. Ordonné spécial dans le Tribunal jugeant Anselme.

Milites Généraux responsables Grégoire, Eléas et Norin: présents durant les missions, sauf Eléas qui meurt lors de l’attaque de Danaşti.

Cleric deGrey: Chevalier-Général des Armées, Ambassadeur de Missions à l’Etranger pour la Confrérie de la Lumière. Cleric deGrey est un proche descendant de Walter (Walter deGrey chevalier ayant combattu Sauraganthorix le Dragon – son histoire est narrée dans le chapitre du Toy-Maker dans Lords of Shadow2)

Il sera accompagné dans la mission par un Witcher qu’il a connu lors de ses nombreuses campagnes qui l’ont emmené loin dans les confins des frontières éloignées à L’Est. Il a été assermenté également dans l’Ambassade spéciale portant aide à un Peuple de la Terre-du-Milieu située sur le Continent d’Arda, dans la quête de Neuf Joyaux nommés «Anneaux», distribués à trois peuples: Rois-Elfes, Seigneurs-Nains et les Hommes Mortels.

Jirel de Joiry: Witcher venu des contrées voisines, apporter son aide à la Mission de Chester, et devenu compagnon d’armes de Cleric deGrey. De l’Ecole des Loups, (comme Geralt ou Eskel), Jirel a subi les Epreuves inhumaines pour sa mutation, et devenir Witcher. Il présente les mêmes particularités physiques de tout Witcher: yeux dorés avec pupille de chat, cheveux blanc-argent, le temps n’a plus de prise sur leur biologie mutée, si bien qu’on ne peut leur donner un âge véritable. Certains dépassent les siècles d’existence (comme Vezemir dans le roman éponyme: The Witcher de Andrzej Sapkowski 1986 - 2013).

En l’occurrence, Jirel comptabilisera 237 années d’existence…

 

 

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« Dans les brumes du village encore ensommeillé et engourdi, les lourds portails de l’entrée gigantesque pivotèrent silencieusement malgré leur poids, ouvrant leurs larges gueules vers l’inconnu de l’extérieur, et laissant s’exfiltrer une longue procession.

Probable que les fins rubans vaporeux colmataient intimement tout bruit intrusif, ouatant en douceur les cliquetis des armures et caparaçons savamment réglés sur les hommes et animaux, si bien que le défilé disparût lentement dans à peine des bruissements ou chuintements qui auraient éveillé la vigilance vers un danger quelconque.

Personne ne fut réveillé. Les masures étroitement reliées entre elles, entre les ruelles du village, gardaient leurs volets clos, frémissaient à peine sous la rosée fraiche du matin tout jeune éclos, encore agrippé à la Nuit d’opale l’ayant précédé.

Personne, aucun habitant niché au sein de la forteresse de la Confrérie, aucune âme inconsciente, n’aurait pu suspecter une seconde que le grand défilé s’étirant gracieusement hors des fondations, partait au-devant de son Destin. Au-devant de révélations risquant de peser lourdement dans la balance des destinées propres à ces hommes chevauchant vers l’Enigme se profilant tout là-haut, dans les nuées menaçantes… »

 

C’est ainsi que se termine le dernier chapitre de « Je n’ai pas pris le temps de vivre »… Du moins, tel que je voulais le transcrire, si je n’avais pas été restreinte par le nombre de 500.000 mots accordés à chaque texte. C’est avec ce dernier paragraphe que je reprends la narration de cet Acte II qui s’intitule:"Ce Temps qui nous défigure, ce Destin qui se joue de nous…» et figurera dans les séries du « Syndrome du Gisant ou le Rêve des Allégories », ainsi que « Les Chroniques de deux Âmes-Sœurs dans un Cœur-Ombre », et la dernière-éponyme créée pour l’occasion: «Ce Temps qui nous défigure, ce Destin qui se joue de nous»…Avec ces trois séries, la couleur et le ton sont donnés dans les écrits qui y seront reliés au fil de la narration holistique.

‘Lords of Shadow’, je le rappelle, est un reboot de l’ensemble des jeux Castlevania, et dont le Lore est totalement différent de l’histoire d’origine. Nous pouvons également nous référer à ‘Castlevania: Lament of Innocence’ se révélant sans doute comme un spoiler-spin-off du projet futur de LOS. Du moins, pour beaucoup de fans. Donc, ceux qui connaissent l’histoire dramatique touchant le Clan Belmont, savent pertinemment qu’il n’y aura pas de ‘bonne fin’ pour tous les personnages. D’ailleurs, qu’est-ce qu’une ‘bonne fin’? C’est complètement subjectif à chacun qui joue ces jeux. Certes, l’attrait est là dans les multiples finissions alternées, mais ce qui est estimé par l’équipe de développeurs comme étant la ‘bonne fin’, peut être aux antipodes des attentes des gamers, et donc être finalement une ‘mauvaise fin’, voire une déception.

Ainsi, pour le nom et la famille de Marie, comme les développeurs ont été flous à ce sujet, LoS étant inspiré de Lament of Innocence, j’ai pris le nom de Sara TANTROUL, la malheureuse sacrifiée et bien-aimée de Léon Belmont, premier des Belmonts Chasseurs de Vampires. J’y ai ajouté le nom de l’actrice prêtant sa voix à Marie dans les jeux: Natasha McElhone, ce qui donne Marie Tantroul-McElhone, et une famille de riches marchands venus des confins de l’Ouest pour les origines (Ecosse par le nom McElhone). Certainement un petit clin d’œil aux voix prêtées à Simon et Trevor-Alucard, car à forte accentuation écossaise, très discernables dans MoF. Quant au nom de Belmont, il peut s’étudier dans les variantes françaises, en l’occurrence, le très vieux français ‘bel’ pour ‘beau’ (Philippe le Bel) accolé à ‘mont’ pour montagne: ce qui donne bel-mont, ancienne appellation pour ‘belle montagne’. Mais je suppose que les développeurs japonais ne se sont pas tiré les cheveux en quatre ainsi, puisqu’au départ le nom d’origine était BELMONDO, en hommage à l’acteur français: Jean-Paul Belmondo. Ah, interprétation suggestive, quand tu nous tiens!...

Quant à la fabuleuse silhouette du Château d’origine dans CV, tout le monde sait que nos amis japonais ont largement ‘louché’ vers la splendeur du Mont Saint Michel, situé dans sa Baie en Normandie, Merveille Mondiale classée PRATRIMOINE UNESCO, et qui suscite depuis très longtemps la ‘bagarre’ de son appartenance au sol entre la Bretagne et la Normandiemais ça, c’est une autre dispute dont nous ne nous mêlerons pas…

Mais là n’est pas le débat. LOS a fait court, et a tranché en limitant sa liste excentrique de personnages, beaucoup trop chargée dans les CV classique. Ceux qui ont joué aux 2 LOS, plus celui que l’on considère comme l’intermédiaire 1.5 Mirror of Fate, et qui apporte des précisions dans le Lore bien sombre des Belmonts, savent vers quels horizons s’avancent nos héros. Comme je l’ai déjà dit dans les premiers chapitres de JNPPLTDV/IDNTTTTL, si l’histoire n’avait pas pris cette direction dans MoF, nous n’aurions pas grand-chose à supposer, sauf de totalement réécrire une franchise qui a déjà vu ses changements importants dans les directions développementales. Cela nous laisse donc de larges possibilités quant à imaginer tout ce qui pourrait se dérouler entre les siècles multiples supposés à trop grande (?) mesure par les scripteurs.

Ce premier chapitre sera un résumé de ce qui s’est passé dans l’Acte I de JNPPLTDV/IDNTTTTL, et il s’en est passé des choses! Je ne veux pas non plus trop spoiler, évidemment, par respect pour les lecteurs qui auront eu le courage de lire ce texte qui était au départ une simple idée dans la vie du jeune Trevor…et qui est devenu quelque chose prenant une ampleur dont parfois il semblait que je ne dirigeais plus…L’évolution de la narration a radicalement changé dans les projets et les idées surgissant souvent à l’improviste, et générant ainsi une complexité plus élaborée dans chaque personnage qu’il me fallait étoffer de manière plus stricte et descriptive.

Ainsi, pendant que j’écris cette suite, je relis et corrige également l’intégralité du premier acte, corrigeant des anachronismes et des logiques appartenant désormais au bon déroulement de ce qui, ne l’oublions pas, ne devait être qu’une petite nouvelle de quelques chapitres. Donc, des mises à jour régulières interviennent dans le texte d’origine, et certains chapitres sont, soit délestés de paragraphes trop lourds pour la narration, mais jugés préférables d’intégrer dans cette longue suite Acte II, soit partiellement réécrits. C’est le cas notamment des chapitres VI et VIIX-XI et XVI-XXIII. Mais il y en aura certainement d’autres qui seront radicalement modifiés. Comme pour le Xe, presque complètement transformé et soulagé de quelques paragraphes qui n’avaient plus de légitimité dans le contexte, alors que je commence seulement de partager ce 1er chapitre de ce qui sera, je n’en doute pas, une très, très longue aventure emportant nos héros vers des horizons incertains, et bien des déconvenues et déceptions.

Avant d’attaquer la Nouvelle Vie de Trevor en tant qu’Alucard. Mais ceci sera pour d’autres histoires en parallèle, tout en faisant attention dans mes narrations à ne pas spoiler l’intrigue principale développée ici. L’exemple avec: «Vers ton Cœur-Ombre, un petit galet a cheminé…», ou «Quelques reflets dans les brumes d’un étang, là-bas…».

«Ce fut un long voyage…» dira Alucard à son Père retrouvé, dans Lords of Shadow2. Avec la splendide voix au doux baryton de Richard Madden GoT, et dieu que les sonorités vocales de l’acteur s’imbriquent parfaitement avec le caractère tempéré, doux-amer de Trevor/Alucard. Mais ceci peut paraître totalement et gratuitement subjectif, et uniquement soumis à l’appréciation de la narratrice!

Ce long Voyage ne fait que commencer…et il sera très, très long. D’une durée infinie dont même Dracul et son Fils n’auraient jamais espéré voir défiler…La Malédiction du Clan Belmont commence avec cette Quête maudite qui verra la chute des Lords of Shadow…et leur terrifiante identité que la Confrérie tentera en vain d’occulter, avant de chuter avec le reste de l’édifice de complots devenu Colosse aux pieds d’argile…

Confortant désormais en lieu et place, sur le Trône infernal, ce que ces hommes de l’Ordre avaient tenté désespérément d’empêcher l’avènement… Le Destin se rit bien de Son jeu de dupe, et de ces hommes si fragiles essayant par tous moyens de le changer obstinément… De toutes ces petites poussières de Cosmos, Trevor a été une des particules frêles, mais étrangement il avait été écrit qu’il serait révélé par le biais d’une Rédemption inattendue, et seul à pouvoir enfin prendre les rênes de son propre Destin… et marcher à jamais aux côtés du Seul ayant tout pouvoir sur l’entièreté de ce Monde voulu stérile par la seule Entité contre laquelle le Dragon se battra pour l’Eternité…

 

Ce combat n’esquisse que ses premiers balbutiements en cet An de Grâce: 1046…

 

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Résumé « Je n’ai pas pris le temps de vivre » Acte I :

 

Une Prophétie a été écrite il y a des temps révolus, révélant l’avènement d’un Elu de Dieu, Champion de la Lumière, mettant à terre les sinistres Seigneurs qui se sont appropriés le monde mortel en déroute…

Subrepticement, une ombre se profile dans les couloirs secrets de l’abbaye de la Confrérie, et les rumeurs bruissent dans l'ombre des arches saintes, à la recherche d'une Mémoire tragiquement effacée lors d'une mission désastreuse...

Mais qui a écrit ledit Manuscrit tant convoité par une cardinalice capricieuse ? Quels secrets infâmes détient-il, et qui fait tant frémir les Fondateurs de la Confrérie ? Est-ce une œuvre d’art panthéiste ou un palimpseste effaçant les secrets les plus honteux que l’humanité ait pu écrire ?Un long voyage se prépare où des âmes échoueront ou trouveront la rédemption...

Le grand Miroir révèle des prémonitions ironiques que les mortels ne comprennent pas, tandis que son pendant Jumeau déverse l’irréparable, là-haut, muré dans les fondations du Château du Chaos…

 

Trailers :

 

« En ces temps troublés où l’ennui d’une vie trop appauvrie en émotions, côtoyait le merveilleux et l’horreur dans les phénomènes ingérables par la main de l’Homme, même les troupes aguerries de l’armée, connaissaient une même effervescence émotionnelle qui faisait battre leurs cœurs, et suer leurs corps d’appréhension et d’espoir. Et les empêcher totalement de trouver le sommeil, trop énervés par la mission à venir.

Même les Cardinaux, dont la tâche était simplifiée de toutes les responsabilités pouvant y affairer. Ourdir des tâches spécifiques dans les défenses magiques avec les Prêtres Invocateurs qui partiront avec les factions, et jacasser comme des oies prises de folie sur les masses apeurées se présentant aux diverses prières de rigueur dans une journée, somme toute, banale à pleurer –

 

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« Ce ne fut guère une situation insolite dans le fait que le jeune Belmont eût tout de suite adoré cet endroit. Ça lui collait à la peau, à l’Âme. Oui, un second derme qui se calquait à l’albâtre, et étirait ses effritements douloureux comme une plèvre sournoises gangrenant progressivement chaque atome, chaque particule de son Essence.

Anselme avait même songé, dans sa folie paranoïaque, à une personnification sulfureuse de la niche, de sa fontaine aux gargouilles effroyables et si magnifiques à la fois, dans la personne même de Trevor. Tout ce qui suintait de cette vasque abondamment rincée par les larmes des cascades cristallines jaillissant des gueules grimaçantes, semblait être absorbé goulument par la jeunesse fougueuse du jeune homme.  

Ainsi, aller se baigner tous les matins de cette eau, - qui parfois prenait des nuances vertes et bronze, une réverbération subtile des mousses qui s’y accrochaient, avant que Trevor ne les détache et nettoie le fond de la vasque de ses fanges paresseuses -, était vraiment une idée suggérée par nul autre que le Malin, Anselme en était persuadé… 

 

°°°°°°°°°°°°

Là-bas, la meute infernale du Dragon menait sa guerre dévastatrice; ici dans l’abbaye, les Frères Fondateurs misaient leurs illusions sur quelques reflets distribués avec parcimonie par un Miroir taillé dans le bronze et l’obsidienne, poussant la folie aveugle de leurs espoirs à s’en réserver la signification par de petits morceaux enserrés dans l’argent poli: artefacts glissés sous le manteau des plus érudits qui pensaient connaître les messages sibyllins.

Et personne n’avait remarqué que le Divin avait détourné le regard de cette scène de catastrophe consommée, alors que les Fondateurs apposaient leurs Sceau sur des parchemins signant leur propre mort…

Tandis qu’ils s’acharnaient à effacer le nom terrible et craint de leur plus grand Chevalier saint qu’ils n’aient jamais élevé dans leurs rangs… 

 

…Derrière les yeux fermés, des mondes perdus enchâssés dans un labyrinthe sans fin de la conception de l'esprit hébété. Un leurre bienvenu vers un destin inconnu où les souvenirs oubliés guettent une seconde venue. Rayons d'espoir consumés par la peur; esprit captivé, marionnettiste du sommeil comme une sournoiserie. Des mondes subconscients, de vieux feux incendient et consument, d'où il se réveille, pour ne jamais revenir au sein de leurs brûlures… 

…Au-delà de ces rives, les braises sont éternelles; dans les ondes d’une Perception si ténue, se perdent les yeux du soleil. Naufragés à jamais dans les Limbes et les feux de joie, quelque part ailleurs, où se consume une Mémoire perdue… 

…Il a vu sa vie dans la gueule de mûre du Loup ; Il a entendu l'adieu dans le bec du corbeau à la robe de nuit bleue...

…Une ode à la nuit, à l'obscurité qui ne l'est pas aveuglement, à la quiétude intense et au désert intérieur sans limites. Regarder les étincelles vaciller dans la nuit, se baigner dans la lumière noire. C'est une méditation lente et planante sur la mortalité et la grande incertitude de la vie, la certitude totale de la mort, et comment nous faisons face à cette connaissance. Ça conserve l'expression sacrée de son prédécesseur, mais pas dans le confinement oppressant de vieilles voûtes en pierre, mais au-dessus d'une mer déchaînée, de rivages rocheux et de cieux assombris.  De la musique pour contempler l'océan sans fin de l'infini; essayer d'entrevoir le sens à travers les minuscules déchirures du tissu de l'existence; sa magie et sa perte…

…D'en haut, des cieux corrosifs à la dérive avec des nuages gris. À travers des vides en spirale défaits par des étoiles qui se heurtent. Passé des éons infinis de brumes spectrales oubliées. Le cosmos pleure le battement incessant des ailes brumeuses. Libérant des vagues de magie dépressive. Hurlant des tempêtes de douleur perçante. S'écraser contre le rivage effiloché de la chair humaine. Ainsi se présenta l’Entité intemporelle, dont les racines plongeaient bien loin de la physicalité humaine… 

 

…Les trois hommes ressentirent la même chose, à la même seconde, car ils se regardèrent dans un ébahissement le plus total. La seconde suivante, leurs regards tombèrent à l’unisson sur les croquis pleurant leurs encres s’étalant en nappes comme se flétrissant sous le souffle putride du temps vertigineusement accéléré. Ils fixèrent les enluminures fusionner leurs lavis sépia en taches presque écœurantes, exacerbant les auréoles plus sombres dans le pourpre sanguin; les charbons huileux en éphélides soudain rousses et cramoisies; des altérations devenant flétrissures dans leurs mouchetures insolites. Les vélins et parchemins débordaient de panachures piquetées par les pigments dilués. Le plus frappant, ce fut que les estampes et croquis ne furent nullement dégradés dans une laideur prévisible par les maculatures corrompues. Au contraire, cela eut le résultat incroyable d’émerveiller les tracés, de les rehausser dans leur expression réaliste. Ce fut comme si une main invisible avait trempé les supports, et la moindre délinéation bavait dans des compositions surréalistes d’une sauvagerie extrême. Le pinceau du Hasard dressait un tout autre portrait différent dans ses anamorphoses infernales…

 

 

« Poussières et cendres sur des vêpres

La Corne de Bromios psalmodie sa complainte pour les séides endormies

Des nuées s'évaporent dans une nuit éternelle

Les paysages chantent leur Dichotomie en cycle sans fin

Brumes et vapeurs, chaleur et parfums dans une Pénombre fauve

... et les étoiles qui meurent sans cesse dans le Suaire du grand Infini... »

 

°°°°°°°°°°°°°°

 

Où iront-ils jusqu’à découvrir une Vérité absolue qui n’en est pas vraiment une. Ou tellement subjective

A la recherche d’une Rédemption qui pourrait soigner leur Narcissisme blessé, ils ne pourraient que trouver ressentiments et rancœurs, dégoût et déception, tandis que ces cauchemars récurrents qu’ils font chaque nuit, deviennent sinistrement cette Vérité qui aurait dû être ignorée obstinément…c’eut été préférable pour tous…

Les Allégories chantent leurs plaintes endeuillées sur leurs dépouilles déjà condamnées, tandis qu’eux, écoutent sagement les psalmodies de Légendes murmurées par les lèvres d’un étrange allié venu grossir les rangs de leur mission insolite…

S’ils savaient écouter, ils auraient pris en conséquence les litanies proférées par des Banshees. Ils auraient su interpréter les signes sur les tombeaux profanés. Ils auraient compris qu’ils ne pouvaient franchir les horizons de Miroirs flous, sans en payer chèrement l’audace…

L’un pleure sa Mémoire lui faisant défaut; l’autre se lamente sur ses origines obscures…

Aucun d’eux ne soupçonne de funestes présages les guidant, les manipulant vers encore plus de destinées obscurcies par les mensonges et les complots…

Tandis que des mains embrumées feuillètent le grand Grimoire du Destin. Le Vrai. Celui qui a jeté Ses dés depuis des éons. Depuis la Guerre millénaire qui avait vu s’affronter Nécromanciens et Titans, où une ville détentrice de la Connaissance absolue y creusa Sa tombe pour l’Eternité, ne laissant pour toute Legacy, le Voile enténébré interdit à tout Mortel…

D’aucun ne soupçonne l’importance de l’Hérésie infernale qui s’est abattue sur le Monde humain, fomentée uniquement par les désirs humains, et une soif de pouvoir inextinguible…

Des cendres de ce Monde, renaîtra le dernier Dragon endormi… Suivi dans les siècles, par ce Fils inconnu…

 

« … Même les plus édifiants, horribles, et démesurés carnages, génocides, émaillant l’Histoire humaine, ont été commis pour la plupart au nom de l’Amour… » (Anonyme)

 

 

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Là où tout a commencé : quelque part dans l’An de Grâce 1047

(Tirés des écrits secrets de Zobek : Fondateur primaire de l’Ordre de la Confrérie de la Lumière)

 

…Une tempête grondait. L’humanité faisait face à la ruine et au désespoir. Le monde changeait, irrémédiable, pris dans les crocs implacables des engrenages érodés par une époque déjà très ancienne, et pourtant l’espoir subsistait dans le cœur des hommes, s’accrochant invariablement quelles que soient les intempéries qui fouettaient les accores auxquelles les mortels s’agrippaient. Nous poursuivons nos vies, ignorant les forces capables de changer nos destinées pour l’éternité.

…Cette nuit, en l’An 1047 de notre Seigneur, marqua le commencement d’un voyage commun. Un voyage dans les ténèbres et la folie. Dans l’ombre, Il était observé. Etait-il cet Elu dont tous parlaient dans le secret des alcôves d’un Ordre établi au nom du Divin?

…Il était déjà allé très loin, mais il serait rudement mis à l’épreuve jusqu’à l’ultime limite de l’endurance humaine…et bien au-delà.

…En cette nuit, il chevauchait à la recherche des anciens Dieux, muni de l’amulette qui l’avait conduit jusqu’ici. L’espoir en son cœur noble que ces Dieux anciens répondraient à son appel le plus fervent, et seraient en mesure de lui faire comprendre cette coalescence subliminale et ses mystères géométriques qui modelaient l’Univers dans de nouvelles perspectives désolantes et confuses pour le simple peuple voyant le Divin se détourner de lui.

…Ce soir-là, commençait son voyage dans l’Oubli…

…La lutte pour la suprématie était, est et sera à jamais éternelle, inévitable…La Victoire a été, est et sera toujours le but naturel de chaque créature vivante de ce monde. Elles tueront et mourront pour leur propension à dominer. Certains nomment cette lutte éternelle ‘équilibre’. La balance entre l’ombre et la lumière.

…Nous vivions un âge sombre. Un âge dénué d’espoir. Les hommes de foi clamèrent qu’il s’agissait une épreuve de Dieu pour renforcer notre esprit. Peut-être était-ce la vérité, ou bien peut-être n’était-ce qu’un pieux mensonge.

…Si tout cela était vrai, les ténèbres étaient venues pour engloutir l’humanité orgueilleuse, et nous devenions alors les témoins de sa fin, de sa déchéance…

…Nul n’aurait pu appréhender en ces temps obscurs, basés uniquement sur la foi unique et indéfectible, que l’Univers avait bien d’autres projets dans Ses mystères géométriques régissant sa coalescence en éclats sublunaires au-dessus des têtes simples et mortifiées de ces mortels fourmillant sur les strates terrestres nimbés des énigmes ancrées dans les époques révolues…

 

…Pourtant, je ne peux pas mourir, et je ne peux pas vivre…

…Quel dilemme…Il est trop tard pour moi, même si je suis le seul et unique à pouvoir faire fléchir le Dragon…

…Les racines du mal sont profondes en moi, et nul ne pourra plus les en arracher sans subir un prix lourd à payer…

…Mais ce sont des racines également irréversiblement ancrées dans le cœur des hommes, c’est là leur vraie nature…leur destinée…

…J’étais le plus dévoué des guerriers, un champion de la Lumière…mais j’ai chuté…Chuté dans les ténèbres…

…Et maintenant, on me craint car je suis le Prince de ces Ténèbres: eu sunt Dracul

…Ironique, n’est-ce pas? J’ai fait fléchir le puissant Zobek, Seigneur Nécromancien parmi Ses Frères-Sœur qui ont abandonné derrière eux le pendant le plus maléfique de leur Âme décomposée, afin d’atteindre le Nirvana promis pour la paix de leur Être vérolé par la soif de puissance et de pouvoir… Même Satan s’est soumis à mon aleph, et s’en est retourné dans les remugles de ses Enfers, attendant son tour à nouveau, dont je sais qu’Il saisira un jour l’opportunité de bouleverser ce monde dans ses plans pervers de perte de l’humanité… Il est le Premier de ce Dieu qui m’a choisi également, Il ne mourra jamais, sauf l’endormir pour les siècles sous les sceaux sacrés qui le retiendront le temps qu’il faudra…

…Sommes-nous donc les deux Enfants chéris et maudits de ce Dieu, voués à être bénis un jour, et relégués, la nuit, dans le domaine putride du Mal absolu ? Je serai à jamais et pour toujours une écharde dans Son flanc, j’en fais la promesse devant l’Eternité

…Mais si je mourais maintenant, que l’on puisse m’éradiquer de ce Monde perdu, ils prendront ma place, ces rats peureux et pusillanimes qu’ils sont. Le Mal aura gagné. C’est l’ordre naturel des choses. Le monde deviendra ainsi, comme cette Croix de combat que j’aie brisée autrefois, en devenant ce que Je suis: Abandonnez. Tout. Espoir…

… Encore une fois, le Fatum démontre toute l’ironie de cette situation prise entre Charybde et Scylla…

 

‘L’histoire en était simple dans ses nombreux paragraphes décrivant des utopies infaisables, des mondes dystopiques où le venin servait à embaumer des plaies gangrenées irrévocables dans une Foi engloutie dans l’absence d’anathèmes, et symbole axiomatique d’une démission par le Divin. D’étranges Chroniques qui suscitaient la convoitise de la Confrérie, pour les posséder et les stocker dans leurs sanctuaires littéraires secrets. Rumeurs ou légende, un Chevalier parmi les plus puissants de l’Ordre, aurait écrit ses Mémoires. Personne n’en avait lu une ligne, mais il semblait que la Confrérie enquêtait depuis des années, afin de mettre la main avide sur ces écrits que les Fondateurs voulaient absolument faire disparaître. Et pour cause : ledit Chevalier, auteur de ces Chroniques qui faisaient frémir une des plus puissantes Guildes, ne mâchait pas ses mots sur l’Ordre inhumain qui n’avait jamais hésité à fracasser les vies, même celle des plus fervents pratiquants dans leur rang, pour un mensonge éternel de sédition. Dieu avait abandonné tout sur Terre, et le constat écrit était affligeant.

Surtout que les plus hauts Pères Fondateurs, connaissaient parfaitement à qui avait appartenu la main graphant les mots honnis dans ces Témoignages vindicatifs. La gravité mise à la lumière des faits, indiquait également que les Fondateurs étaient bel et bien informés sur l’identité des anciens Lords of Shadow, dans une tournure ironique qui ne faisait qu’en faire rire à s’étouffer un Fatum implacable. Ce n’était pas seulement du bout d’une plume, que les mots assassins avaient épandu leur venin, mais plutôt de la pointe d’une aile ‘dracholiche’. Tout était bon pour mettre, de toute urgence, la main sur ces écrits maudits qui se devaient d’être absorbés dans les abysses de l’Oubli. Quitte au sacrifice incontournable de quelques vies humaines; tout pourvu que Volpe et ses acolytes eussent entre leurs griffes le précieux Sésame, le Saint Graal ouvrant les portes d’un Enfer prévisible, la confirmation d’une Prophétie intemporelle qui murmurait ses relents putrides aux oreilles des hommes saints, tétanisés devant ce qui devait se dérouler sans que personne ne puisse altérer le flot du Fatum sinistre.’

 

Du Chaos, naquit l’Innommable…

 

Les fleurs étaient comme des baromètres fiables, quand il s’agissait de prendre une température sur l’humeur ambiante générale, et surtout sur celle du Miroir. Invariablement, les Fondateurs avaient appris avec effroi qu’une catastrophe arrivant à grands pas, s’annonçait par le flétrissement glauque des floralies fraichement coupées, et dont les arcs gracieux pliaient dans la courbure de la Mort. L’évaporation de relents de pourriture et de terre envahissant les lieux, obligeait les hommes à aérer l’immense auditoire dont les dimensions étaient dignes d’une salle du Trône.

Sauf qu’au lieu d’un siège royal y imposant sa structure compliquée, c’étaient les lignes tortueuses et agonisantes d’un Miroir dont le lac impavide était méchamment ridé de fissures nombreuses, notamment dans les hauteurs impressionnantes des rebords supérieurs d’un côté.

Chester n’aurait su dire exactement dans quelles circonstances ce puissant Artefact avait intégré leur Ordre, comme un Don extraordinaire s’étant matérialisé sous essence divine, dans une époque très reculée et sombre, peut-être avant même la naissance de la Confrérie sous les premiers Fondateurs. Probablement même du temps de la Terreur née des remugles de la Guerre des Nécromanciens et des Titans; la perte d’un Joyau qui unirait les différences humaines; la naissance d’un Oublié invoqué parmi les nuées troublées où le Futur se débattait furieusement dans les rais de projets génocidaires.

Il se murmurait également que les origines sulfureuses de la Psyché avaient pris racine dans l’humus exécrable d’un Jumeau infernal né des astres morts dans l’Univers infini, attiré sur la Terre avec le Démon du Chaos invoqué, et incarnation effroyable nichée dans la moindre parcelle de ce Château maudit doué de sa propre existence. Ceci par la faute de nécromanciens avides ayant donné tout pouvoir à des entités inimaginables qu’ils avaient alléguées dans cette idée suprême d’éradiquer toute misérable vie humaine de la planète.

S’il ne devait en rester qu’un, ce serait cet infâme Nécromancien qu’avait été Bernhard. Avant d’être foudroyé par un de ceux qui allaient devenir Lords of Shadow ayant rejoint le combat pour mettre hors d’état de nuire l’Oublié. Ces futurs Seigneurs des Obscurs réclamèrent alors le Trône et l’Empire prométhéen que les Bernhards avaient invoqués, s’attelant à la tâche titanesque de faire édifier des ailes supplémentaires sur le gouffre qui avait absorbé le Démon des Abîmes. Les dotant de la puissance protectrice de nombreux Sceaux qui resteraient inviolables, pour le bien et la sécurité de l’humanité. Le reste se perdait dans les obscurations d’écrits nichés dans les tomes disparus depuis longtemps. En apparence.

Des origines dantesques décrites par les mains de ces nécromants et pythies dans des palimpsestes ayant effacé les encres sanglantes, espérant étouffer une histoire obscure des plus malsaines ; dans des manuscrits qui prenaient vie, hantés par les engeances avilies, et eux-mêmes donnant naissance à des égides mortelles. Le moindre souffle de vie méphitique engendrant des balbutiements nés des furoncles couvrant les fondations les plus approfondies dans ce Tartare.

Mais il se susurrait aussi que les Prolégomènes du Miroir plongeaient encore plus loin son ancienneté. Il était né Souche développée à partir d’un éclat d’argent, un seul, comme des atomes implosant en pulsations avides de vie, provoquant un Big-Bang phénoménal dans l’invisibilité de la Construction cosmique. Une Loi physique qui se suffisait à Elle-même. Incarnation impassible d’un objet anthropomorphique à qui on pouvait aisément imputer une Essence réelle, une Existence sournoise et pensante, attendant patiemment au fil des millénaires.

Survenu des mains-mêmes d’un Destin à la patience d’ange, ayant fait un pari osé avec la Mort et l’Ephémère sur cette humanité dont ces Allégories se gaussaient sans vergogne. Mort avait Ses propres symboles incarnés sur cette Terre où le Vivant courbait l’échine invariablement sous sa Herse ; Ephémère construisait Ses illusions moqueuses dans les architectures que l’homme s’arrogeait le droit de créateur pédant à la face de l’Inconnu ; Fortune possédait Sa Roue qu’Elle faisait tourner au gré de Ses envies, entrainant les mortels dans sa folle ronde d’espoirs brisés, ou de rêves utopiques tournant à la dystopie amère. Alors Fatum avait décidé de forger Son Emblème qui ferait se tétaniser ces myriades d’humains enclins à trembler sous les auspices de la moindre Prophétie, l’esprit tellement imbu de craintes et de superstitions envers un Divin invisible, que cela en était devenu une occasion hilarante à mettre en pratique.

Et, disait-on, le Miroir du Destin naquit de cette fusion d’ironie méchante et de complots ourdis par les Allégories impliquées.

Donc ces Bernhard, précédents propriétaires du Château bien avant les Lords of Shadow, avaient réussi le tour de force impensable d’amener ce Pandémonium jaillissant des profondeurs de l’espace, sur la Terre-même. Certes, ils en avaient payé le prix fort, mais en disparaissant, ils avaient légué un sinistre héritage entre les mains d’une Humanité qui avait complètement oublié comment gérer les forces de l’Univers en abandonnant sa responsabilité dans les mains d’un Divin sournoisement silencieux et impavide devant sa Destinée si terriblement mortelle.

La Guerre des Nécromanciens…Tout ce que cela avait engendré comme conséquences désastreuses auxquelles les hommes ne savaient plus comment faire face en tout pragmatisme et solutions stratégiques intelligentes, totalement dépendants des forces aléatoires qui en résultaient, esclaves des avertissements et des prophéties écrites dans des temps oubliés depuis lors.

 

 

(Paragraphes figurant dans le Chapitre XXIV JNPPLTDV)

 

“There’s no shortcut. Nothing shelters grief better than memory.”

« Il n’y a pas de raccourci. Rien n’abrite mieux le chagrin que le souvenir »

Noor Unnahar

 

« Peut-être est-il pire d’aimer quelque chose ou quelqu’un que le temps ne peut pas toucher. Plus fort que la vie elle-même. À cette fin, on ne peut qu’espérer. »

 

« Derrière les yeux fermés, des mondes perdus enchâssés

Dans un labyrinthe sans fin de la conception de l'esprit hébété ;

Un leurre bienvenu vers un destin inconnu

Où les souvenirs oubliés guettent une seconde venue ;

Rayons d'espoir consumés par la peur

Esprit captivé, marionnettiste du sommeil comme une sournoiserie ;

Des mondes subconscients, de vieux feux incendient et consument

D'où je me réveille, pour ne jamais revenir au sein de leurs brûlures… »

 

« Au-delà de ces rives,

Les braises sont éternelles ;

Dans les ondes d’une Perception si ténue,

Se perdent les yeux du soleil,

Naufragés à jamais dans les Limbes et les feux de joie,

Quelque part ailleurs, où se consume une Mémoire perdue… »

 

(« Les Contes d’un Cœur-Ombre » Chinon D’Ysandreux)

 

 

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Chapter 2: Chapitre II : « Des souvenirs aux fragrances de cendre et de soufre, des ressouvenances suffoquées sous des larmes d’airain… »

Summary:

Quelques sept années avant la Grande Quête de 1047: le mariage de Gabriel Belmont et Marie est célébré dans la liesse et la désinvolture.
L'Effet Papillon: un battement d'aile du Papillon entraîne un enchaînement de causalités-effets qui vont définitivement changer la Destinée de beaucoup, avec des dommages collatéraux irrémédiables...
Des portes s'ouvrent sur des déferlements meurtriers, à l'insu de tous...
Il faudra un jour, réparer ce qui a été brisé, mais jamais sans en payer le prix fort...

""En cette journée de mariage,--qui en verrait d’autres car ces célébrations se déroulaient toujours sur plusieurs jours, selon la richesse des familles impliquées--, il se déroula deux incidents très fâcheux, qui allaient avoir des répercutions terribles sur les destins de tous. Des occurrences malheureuses qui allaient lourdement peser dans la Balance; des entrefaites entremêlant vicieusement les décisions qui seraient prises; des circonstances où rebondiraient les causes-à-effets désastreux, assombrissant définitivement de son Voile de Deuil ce mariage qui se déroulait jusque-là si bien.""

Notes:

Là où tout se déclenche...Là où les répercussions faucheront sans pitié les victimes innocentes, par la faute d'une avidité égoîste...

ANNIE : toujours pour toi, présente à mes côtés dans ton silence résigné...J'espère que ton regard pourra à nouveau s'ouvrir à la lecture...Tes conseils restent précieux...

Chapter Text

« Venue des milliers d’années de Labyrinthes gravés dans le sol maudit, la Prophétie s’était écrite lentement dans l’encre obscure du désarroi et de l’implacabilité quant au futur des hommes… C’était un chant dessiné en notes progressives dans les lamentations cristallines des fontaines débordant leur chagrin en échos menaçants… Une spirale en Cycle de statuvolence irrépressible, dans lequel aucun esprit n’aurait la force nécessaire de s’en dessaisir, prisonnier dans ces circonvolutions hypnotiques tel un insecte fou scellé dans l’ambre qui se referme sur sa maigre carcasse… Un Spectre qui se serait délesté de sa fragile substance d’Âme le faisant autrefois vibrer d’empathie pour son prochain, et gratter les mots acides dans l’Annonciation et le renoncement d’une Vie sacrée, entrainant l’ensemble d’un Tout dans le plus pur Chaos irréversible… »

 

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"Émergeant d'un sommeil narcotique, mes souvenirs des Minions du Château qui allait devenir mien irrémédiablement, étaient une série d'épisodes fracturés d'événements étranges, traumatisants et passionnants--l'empreinte visuelle de souvenirs obscurs qui auraient pu être des rêves, mais pour les signes que je portais de leur véracité - un sceau tatoué sur l’ensemble de mon Essence désacralisée, des preuves d'imprégnation à la lame de ma Void-Sword - une preuve saillante de ma sombre aventure.

Le cadre était celui d'un temple souterrain situé dans un vaste intérieur de manteau évidé. La paroi rocheuse naturelle du sous-sol formait la plus grande partie de ses murs prodigieux. Le plafond était perdu dans une énigme de ténèbres, fou avec les intercalations de nuances virevoltantes et de luminosité marbrée. Les torches grillaient dans leurs appliques cachées.

 

« Ce fut avec ce nouveau décor, que mes yeux durent s’habituer, tiré de cette somnolence léthargique trompant mes impressions. Quand je songe au passé, puisant dans les fosses de mon enfance, je tente vainement d’en extraire quelques indices qui prouveraient qu’il reste encore un peu de mon humanité. Mais toujours, à la place, ce Vide, ce Néant qui m’ont vu naitre.

 

« Je vis désormais cette existence de pénombres, d’horizons obscurcis ondulant dans la fadeur empoisonnée de la rancœur. Je vis par mon épée baptisée de ce Vide, ce Berceau de mon Ire implacable.

« Et personne, aucun, ne pourra se targuer de continuer à fouler le sol terrestre, sans s’effondrer dans les océans de ma vengeance… »

 

« Je ne peux pas mourir maintenant… Je ne peux pas vivre… »

 

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Quelques sept années avant la grande Quête de 1047 :

 

L’heure du loup se nichait dans l’impondérable de la Lumière des Ténèbres…et ce Rayonnement baroque émergeant des feux joyeux des cheminées, ondulait dans des vagues frémissantes comme des courbes de miroitements, de lampes astrales…

Cela voltigeait partout en éclats de rire poudré de constellations volatiles; se mêlant parmi les scories tendres et capiteuses des flammèches furieuses de braises incandescentes; pétillant le temps d’un clin d’œil pour retomber dans les empreintes fardées de poussières saines et odorantes, et soupirer entre les lattes disjointes à quelques endroits sur le parquet lardé de nœuds ébène, poncé par l’usure à certains angles.

Lesdites lames du plancher tremblaient par saccades sous les pas virevoltant des danseurs, certains maladroits, d’autres plus expérimentés. Qu’importe: aujourd’hui était jour d’abondance, jour de joie. D’aucun, présent dans la grande salle apprêtée pour l’occasion dans un corps de ferme appartenant à une famille renommée, n’aurait levé un sourcil pointilleux sur le matraquage bruyant scandé à grand renfort de talons surélevés et précieux. Des nuées de cendres et de paillettes raffinées étaient soulevées joyeusement, nimbant la volte lourdaude des trémoussés improvisés d’une mantille éthérée fort délicate, ajoutant à l’atmosphère comme une pincée poudrée de délires où tout était autorisé, en ce jour de liesse.

Une sorte de quadrille royal archaïque aux accents français, dénotant l’envie des mouvements frêles et aériens des corps se frôlant dans une mixité de sensualité réservée et de débauche paillarde mal réfrénée. L’ensemble frissonnant de soie et de tissus riches se polissant dans les attouchements faussement pudiques, faisait vibrer l’éther lourd de joie sous les chansons chuintantes des vêtements crissant tels des psalmodies entêtantes de grillons pris d’ivresse. Mélangé à cette rapsodie vertigineuse des sens, des accents de volte aux saveurs de la Cour d’Angleterre. Le tout donnait un bel ensemble de corps parfois figés dans la complainte du partenaire, ou dans une envolée gracile très précieuse. Les membres se tendaient, flottants, suspendus le temps d’un souffle, pour retomber en arabesques grandiloquentes signifiant un geste de respect. Dans l’ivresse des danses, ça n’empêchait nullement les mains de flotter plus longtemps que de raison sur les courbes des danseurs entrainés dans l’oubli procuré par les noces. Il eut été impossible de définir si l’aspect général débordant sa joie en ces lieux, frisait souvent le ridicule du mouvement compassé, ou prenait la saveur des esprits se désinhibant le temps d’une cérémonie.

En ce jour de Grâce du Seigneur, quelque part dans l’An 1040, une célébration avait été bénie par nuls autres que les Pères-Fondateurs de la Confrérie de la Lumière. Ces puissants dirigeants saints avaient apposé leurs mains ointes de l’onction sacrée sur les fronts humbles d’un de leurs Chevaliers les plus fidèles, le plus dévot et pratiquant, le plus grand dans les capacités stratégiques dans l’Art de la Guerre, et sur celui de sa fiancée-amie d’enfance, devenant ainsi par le Saint-Sacre, époux devant l’Eternel et la Loi des Hommes.

Le sacrement avait été mirifique, et faisait la continuité d’un amour pur et sincère entre deux jeunes gens ayant grandi ensemble. Le jeune Chevalier avait été adoubé à ses dix-neuf ans, car très prometteur dans une carrière où ses exploits seraient contés dans multiples Chroniques. Le mariage était seulement validé quelques années plus tard, le Chevalier s’étant soumis dans des missions ordonnées par la Confrérie, et l’ayant envoyé sur les sentiers souvent très éloignés et obscurs. De ce fait, son absence se faisait ressentir durant des semaines, voire des mois, et la jeune fiancée se devait d’attendre. Attendre que son bien-aimé lui revienne, et qu’enfin les dignitaires de l’Ordre octroient un congé exceptionnel afin de permettre les fêtes de l’union. Ainsi que la bénédiction du patriarche de sa famille renommée et puissante dont les racines plongeaient profondément dans les brouillards insondables d’une culture étrangère, opaque et ésotérique. Là où l’Invisible, l’Indiscernable, devenaient croyances et accomplissements; exploits et réputation taillée dans le granit de l’impitoyable faisant frémir les autres peuples qui voudraient se frotter en conquérants envers ces îles de fer.

Ainsi, en ce jour baignant dans la douceur d’un printemps renaissant, celui qui avait été un nouveau-né vagissant, abandonné sur les marches de l’abbaye de la Confrérie; élevé dans la sainteté de l’Ordre; éduqué dans la rigueur du combat au corps-à-corps et la manipulation pointilleuse et intelligente des armes les plus affûtées–-Gabriel, ainsi baptisé faisant référence à l’Archange, et nommé Belmont, parce qu’il adorait les montagnes couronnant magnifiquement la région de leur pureté nuageuse et l’immortalité de leur neige étincelante—tissait son existence aux sonorités des sacrements du mariage avec son amie d’enfance, Marie McElhone-Tantroul de Lupu. Fille unique d’une famille aisée et noble de commerçants émigrés depuis plusieurs générations de ces paysages lointains nichés dans leurs brumes mystérieuses. Là où il était chanté des psaumes magiques où Leprechaun et Gobelins prenaient des allures coquines aux couleurs de ce pays vert-émeraude. Là où des falaises vertigineuses affûtées comme des couperets, plongeaient dans les eaux sombres entre Mer épicontinentale d’Océan Atlantique au Nord-Ouest de l’Europe.

De leurs origines, les générations qui s’étaient succédées, avaient gardé une intonation subtile et légèrement gutturale dans leur accent. Les mots prononcés trébuchaient plus que de raison sur des phonèmes étranges et compliqués, définissant un dialecte incompréhensible à tous ceux qui n’étaient pas nés là-bas, parmi les flots mousseux d’une Mer aiguisant les accores de granit provoquant le naufrage de nombres de navires sur les lames impitoyables de ces paysages légendaires.

Marie McElhone-Tantroul de Lupu, devenant Marie Belmont, ne dérogeait pas à la règle, distillant une prosodie délicate dans ses propos, contant les racines anciennes de son Berceau envoûtant venu d’un peuple fier et impavide qu’on appelait Celte. Elle possédait également, dans la profondeur aquatique de ses prunelles, une tempérance lumineuse et apaisante, faisant merveille bien souvent sur le caractère sombre et taciturne de Gabriel. Peut-être que le mystère sur sa naissance qui avait soulevé de nombreuses rumeurs quant à ses géniteurs, était un poids énorme pour l’enfant précoce révélé extrêmement talentueux et développant une maîtrise des arts martiaux sans précédent au sein de la Confrérie. Aussi, Gabriel en grandissant, était sujet à des humeurs obscurcies et des moments de rumination que seule sa bien-aimée d’enfance pouvait apaiser.

Lorsque les frères de l’Ordre avaient ramassé le petit paquet, longtemps les soupçons s’étaient portés sur une des familles nobles dans la région–-les Cronqvist, riches propriétaires terrestres locaux–-qui se seraient débarrassés du bâtard indésirable en le délaissant sur le parvis de l’abbaye. Mais comme cela touchait une maisonnée puissamment enracinée dans la région, il fut à jamais impossible de réfuter ou valider toute forme de conjecture. Ainsi, Gabriel fut élevé au sein de la Confrérie comme l’un des leurs, natifs de Danaşti ombré sous la silhouette impressionnante du Donjon trônant depuis l’élévation des remparts et la fondation du village, s’éparpillant à l’image de ses ‘frères’ telles des semences jetées aux vents de la Destinée, par les mains avides d’étendre leur acerbité par les bouches des missionnaires ordonnés par l’Ordre saint. A l’égal de sa fratrie de pierre et de mortier boueux, Danaşti pliait le front devant la terre sacrée lui donnant naissance, et ronronnait depuis sous les doux murmures d’exploits et de complots écrivant leur Histoire dans les Chroniques jalousement conservées hors des regards profanes.

Les épaules lourdes déjà d’un passé flou et ténébreux, Gabriel épousait la lumineuse Marie, phare imperturbable dans sa Nuit hasardeuse. Danaşti aurait dû résonner longtemps de la fête joyeuse et la folie tendre qui s’étaient emparées des habitants profitant des libations généreuses et du banquet offert par la Maison de Marie.

Aurait dû. Car bien loin des esprits désinvoltes et insouciants de ceux qui se remplissaient la panse; riaient à gorge déployée aux blagues salaces criées à travers les tablées appesanties de victuailles à profusion; dansaient jusqu’à mourir d’essoufflement sous les accords des bardes venus d’horizons lointains égailler toute cette foule, s’effilochaient les rais amers d’évènements prenant les allures de hérauts sinistres et malveillants qui allaient bousculer le bon agencement de la cérémonie, et donner cet aspect malsain de malédiction nimbant l’esprit festif du moment.

En cette journée de mariage,--qui en verrait d’autres car ces célébrations se déroulaient toujours sur plusieurs jours, selon la richesse des familles impliquées--, il se déroula deux incidents très fâcheux, qui allaient avoir des répercutions terribles sur les destins de tous. Des occurrences malheureuses qui allaient lourdement peser dans la Balance; des entrefaites entremêlant vicieusement les décisions qui seraient prises; des circonstances où rebondiraient les causes-à-effets désastreux, assombrissant définitivement de son Voile de Deuil ce mariage qui se déroulait jusque-là si bien.

Il n’y avait pas de petits liens faussés, s’étant trompés de route dans leur tissage, ou de hasards malencontreux qui auraient pu bousculer un peu trop fort les pions de ce Monde, désolés d’avoir temporairement parasité les évènements où ils n’auraient pas dû avoir accès. Non. Ce Monde prouvait encore une fois que dans son agencement bien organisé par la Mécanique de l’Ombre, il se révélait bien petit. Tout petit, petit. Et les graciles pièces de l’Echiquier, menaient leur ronde inlassable, ritournelle enivrante entrainant de minuscules pantins fauchés par un Destin implacable.

 

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Il est étrange de remarquer qu’un son né de deux phénomènes totalement différents, en des lieux complètement opposés, parfois à l’autre bout du monde, peut avoir une similarité saisissante avec son ‘jumeau’ projeté à la même seconde, dans cet ailleurs impensable. Cette similitude dérangeante qui n’existe qu’à travers des multitudes d’équations instinctives, et qui révèle subrepticement ce qu’on appelle ‘Le battement d’aile du Papillon’…

Ça n’a pas une grande importance aux yeux des mortels qui en sont totalement ignorants, mais cet Equilibrium revêt indéniablement la Toge complexe des phénomènes de cause-à-effet, déclenchant les réactions en chaine venant travestir, falsifier ceux que le Temps a pointés de Sa griffe dévoratrice.

Pauvres mortels que Kronos défigure impitoyablement, et dont Fatum se joue en accord avec son Frère-Titan. Tandis que la Roue tourne, tourne inlassablement, et grince de sa chanson funeste tandis qu’Elle broie les minuscules grains de sable coincés dans les dents des rouages.

A travers les siècles, tout se met en place, imperturbable. Chaque pièce du Puzzle s’emboite dans l’échancrure de la suivante. A l’inconscience des hommes, une fortification abyssale s’érige; renait de ses cendres, et reconsolide ses bases avec le sang et les larmes des milliers d’orphelins du bonheur.

Quand la Fin des Temps se concrétiserait-elle? Il y avait tellement d’exemples où cela aurait pu se produire, selon les mots d’une Prophétie qui se faisait attendre–-mais cela ne s’était pas produit. Était-ce un dernier Acte de Grâce de la part du Géomètre d’en haut-–ou ces Allégoriques rêveuses jouaient-Elles simplement avec toute l’humanité une dernière fois? Avant d’abattre le couperet définitif sur ce Monde aveugle…

Il semblait bien que, déjà, la lourde tenture souillée d’incidents les plus improbables, fût retombée sur les scènes de désolation s’enchevêtrant sur le champ de bataille. D’où cette insondable analogie entre les sons vibrant dans l’éther en suspens comme un souffle d’agonisant. Cela attendait. Cela observait. Cela était modelé dans une patience infinie. Les Eons étaient Ses alliés.

Partout, il se murmurait que Dieu avait abandonné cette Terre, séparant Son Royaume des Cieux de la ligne d’horizon floue émergeant du trouble et de l’incohérence. Ce ‘son’ qui en avait résulté, était partout le même, identique dans les échos parasitant les strates paisibles d’une vie agencée lentement dans les difficultés intrinsèques rencontrés par l’humanité.

Et puis, ce son. Particulier. Répliquant exact à son Autre. Quand cela impliquait l’impact mortel de la chair contre la pierre glaciale.

La rivière pourpre étalant ses rigoles sinistres autour d’un corps brisé, serait une analogie jumelle à la rivière d’encre étirant ses arabesques dans une calligraphie soignée sur un parchemin bruni. Ou des filets gras scintillant d’une forme d’aura entre les doigts avides du voleur n’ayant pas hésité à frapper son comparse pour s’approprier le ‘Saint-Graal’ qui le protégerait, lui et personne d’autre, dans sa folie paranoïaque générée par la terreur absolue de l’Ombre dansant dans les coins de son abbaye meurtrie.

Il aurait été intéressant de relier chaque seconde de ces évènements presque intimes, entre toutes les secondes s’égouttant dans la Clepsydre cynique. Et constater l’ironie des incidences devenant malédiction dans chaque vie des individus impliqués.

Mais bien loin de tout cela, un jeune Chevalier épousait son amie d’enfance, sans se douter un instant que sa cérémonie était entachée à jamais de maléfices, et qu’il devrait un jour faire face à ces quelques battements d’aile de Papillon-du-Destin.

«Il me le faut, il me le faut…» répétait en leitmotiv dément le petit homme rabougri, trottinant nerveusement dans sa robe de bure couleur brun sale. Les pavés moites renvoyaient le staccato régulier et les glissements de ses pieds chaussés de sandales solides. Maigre silhouette recourbée parmi les ombres qu’elle fuyait, la bouche édentée ânonnant sans cesse des mots heurtés par la peur, l’individu hantait les couloirs, répandant l’odeur âcre de ses troubles phobiques sur son passage.

«Il est à moi, il me revient à moi…Il est pour moi…» crachotait-il dans ses mains noueuses d’arthrite déformante qu’il maintenait devant son visage buriné, tel un masque honteux couvrant l’acte odieux qu’il allait commettre. Les sclérotiques étaient trop blanc-laiteux pour ne pas indiquer un début de cécité ou de cataracte aggravée; les yeux épuisés de forcer quotidiennement à travers les lueurs blafardes des bougies. A fatiguer la vue ainsi dans les demi-pénombres de scriptorium, la plupart des hommes liés aux bibliothèques, devenaient aveugles.

Celui-ci, malgré l’acuité défaillante, savait encore très bien trouver son chemin, tellement habitué depuis l’enfance à sillonner tous les virages, recoins, angles de corridors, d’allées couvertes d’obscur, de l’abbaye et sa Bibliothèque immense. En ce jour, il ne perdit jamais sa destination, uniquement dirigé vers un seul but, plus par instinct ancré dans sa mémoire, que par sens d’orientation quelque peu flouté par les brumes de la cécité occultant lentement son environnement.

Il parvint dans la nef par une porte déviée, presque cachée entre les différents retables ornant le saint lieu. Tremblant soudain sous l’audace de ce qu’il s’apprêtait à faire, il eut un moment de suspension devant l’objet convoité, pour lequel il marmonnait depuis des jours des supplications insensées.

L’objet du délit; la Relique toute-puissante; l’Artéfact inébranlable qui le protégerait de l’Ombre inéluctable s’avançant au-dessus du village maudit. Cela flottait dans son aura éblouissante du Sacré, béni par les Forces de l’Equilibrium, et la Foi indéfectible ayant forgé le récipient-Célicole, entre les mains entrecroisées d’un Séraphin aux ailes à demi-déployées, dont les doigts maintenaient fermement le pommeau d’une Claymore gigantesque. La forme du flacon restait indéfinissable dans les auréoles vives et coruscations qui le nimbaient, mais on discernait élégamment l’aleph en découlant au risque de s’y brûler la peau en commettant le péché de vol. Une menace lourde de désintégration pour celui qui oserait porter la main sur cet Artéfact-Célicole. A tel point, que le témoin d’une telle merveille, pouvait penser que l’épée ne touchait pas la Relique parce qu’elle se serait réduite en cendres dans l’instant.

L’homme n’eut pas de telle pensée, s’apprêtant à commettre la profanation ultime, uniquement dans le but de sauver sa misérable carcasse. Il n’y avait qu’une seule défense suffisamment puissante face à l’invasion pernicieuse qui frappait régulièrement le village: c’était cette Relique, et rien d’autre. Elle se devait d’être à lui.

«Qu’est-ce que vous faites? intervint une voix à ses côtés, ce qui le fit brutalement sursauter. Le prêtre qui surveillait et protégeait l’abbaye, avait été interloqué par l’apparition de l’abbé Dorin venant d’un coin reculé d’une entrée. Il connaissait les divagations de l’homme d’église et ses frayeurs face aux attaques régulières des séides vampiriques. Bien que l’abbé fût son supérieur, l’homme se défiait de lui, et rechignait souvent à l’obéissance des étranges caprices naissant dans cet esprit visiblement perturbé.

«Il me le faut, absolument, se contenta de répliquer Dorin, les yeux exorbités dans sa démence grandissante. Le blanc laiteux des sclérotiques, mettait un peu plus de malaise chez l’interlocuteur de l’abbé.

«Notre Relique nous protège, Wygol et tous ceux qui s’y abritent, vous le savez, abbé Dorin. Elle est en bonne place, les créatures n’approcheront pas nos gens,’'tenta de raisonner le prêtre comprenant soudain l’horreur du geste de son supérieur.

En vain. Le malheureux ne vit jamais le mouvement rapide de son abbé. Quelque chose de lourd le frappa à la tempe, et quand son corps bascula contre l’autel protégeant l’alcôve où se dressait l’Ange, la vie s’était échappée déjà de lui. Ainsi, il n’entendit pas le méfait commis à grands renforts de soupirs et de lamentations, tandis que les mains tordues de l’abbé s’emparaient avidement de l’Artéfact.

Dans sa crise de démence paranoïaque, l’abbé Vincent Dorin venait de sceller le destin des villageois de Wygol qui allaient tomber comme des mouches sous les coups des vampires envahissant les lieux n’étant plus protégés par l’aura de la Relique sainte. Il trotta, ivre de soulagement, débitant des diatribes insensées où se mélangeait le Latin, le Valaque ancien ou Slavon archaïque, et quelques mots bâtardés de langues diverses qu’il avait entendues durant ses voyages. Berçant le récipient précieux qui persistait à jeter ses auréoles bénies tout autour de l’homme.

Les couloirs résonnèrent encore longtemps de ses jappements hallucinés et ses pas trébuchant, hagards vers sa tour dans laquelle il allait s’enfermer pour un temps trop long sous la protection du Célicole,-jusqu’à ce qu’un jour, un noble Chevalier et son Frère viennent lui arracher le trésor et l’abandonnent à son sort. Ignorant dédaigneusement la vie qu’il venait d’éradiquer, et les dizaines d’autres qui allaient être sacrifiées impitoyablement par son égoïsme monstrueux.

Rien n’était pire qu’un homme de Dieu se détournant de sa tâche sacrée envers son peuple trop fragile, trop dupe. Et lui, d’une lâcheté méprisante…

 

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Confiné dans sa cellule enveloppée de semi-ténèbres permanentes, le moine Béranger s’acharnait dans sa tâche de traduction et de copiste avec obstination malsaine. Le monde qui continuait sa ronde autour de lui, ne lui importait que peu, obsédé qu’il était dans une perfection dévorante ruinant sa santé mentale et physique. D’ailleurs, tous les stigmates d’une vie austère et silencieuse étalaient des indices partout sur son visage et son corps trop voûté d’être recroquevillé sur les écritoires.

Béranger n’était guère vieux en âge, à peine une quarantaine d’années, mais son aspect affichait tout le contraire par une peau bien trop blafarde par manque d’exposition au soleil; une silhouette presque squelettique, affamée par l’absence de sustentation régulière; une anémie générale due aux carences innombrables résultant de pitances minimum et pauvres en vitamines. Le visage aurait pu être agréable, s’il était agrémenté de chair tendrement tendue sur le crâne. Mais au lieu de cela, des rides méchantes creusaient les joues lymphatiques; le front voilé de mèches bien trop transparentes dans leur coloris délavé, et le grisonnement précoce. Les lèvres fines étaient scellées depuis longtemps, par le vœu de silence fait par le moine lorsque le temps vint pour lui de prendre la bure monacale. Quant aux prunelles translucides, elles avaient perdu de leur éclat marron-chaud qui les baignait autrefois. Un regard fatigué de percer les semi-ténèbres nimbant la pièce, occasionnées par des chandeliers parcimonieusement disposés et chargés de bougies maigres, fondant trop rapidement durant les longues veilles de travail du moine sur ses grimoires à traduire.

Ces yeux-là avaient lu bien trop de choses épouvantables. Disséminées dans les registres qu’on lui confiait à la chaîne, et qu’il lui fallait transcrire dans des traductions souvent très difficiles, voire impossibles, pour un autre que lui, spécialisé dans les langues anciennes. Il étudiait depuis son enfance une quantité incroyable de langages différents, reliant leurs phonèmes et leurs alphabets complexes dans les racines gréco-latines, pour certains. Pour d’autres, l’exploration de signes cunéiformes, cyrilliques ou idéogrammes,-même le Sumérien n’avait pratiquement plus de secret pour lui,-était nécessaire, et en cela, Béranger était passé maître pour le décryptage de manuscrits absolument abscons pour tout autre connaissance.

Phraséologies et logorrhées décrivant toute l’Histoire humaine dans des emphases sinistres et verbomanies alambiquées, avec un seul point commun, semblait-il: jeter l’effroi et le défaitisme, largement illustrés à travers les traits de plume rageurs neurasthéniques. A croire que tous ceux qui s’étaient penchés sur la lourde tâche d’être les scribes impuissants d’époques apocalyptiques, s’étaient accordés pour plonger le lecteur dans les tréfonds d’un désespoir sans fond pour l’humanité. Où étaient donc passés tous les dieux de Bonheur, de Lumière et Béatitude, du Pardon et de la Rédemption?...On n’y trouvait plus trace depuis des éons essoufflés; plus une identité chargée d’espoir, parmi les mémoires délitées.

Dans cette journée qui prenait doucement fin, nimbée des chromatiques tendres et chaudes d’un début de printemps, Béranger convulsait sauvagement une main crispée de tremblements, dressant une copie fidèle d’un de ces documents obtus révélant des pans effroyables d’une Prophétie. Les détails suggérés par divers parchemins écrits dans différents langages, réunissaient les pièces innombrables d’un puzzle vieux de plus de mille années.

Béranger était sur ce travail de longue-haleine depuis des mois, à la demande des Fondateurs de la Confrérie de la Lumière. Ces derniers montraient tous les signes d’une inquiétude obsédante qui les rongeait, et étaient harcelés régulièrement par des songes, des cauchemars d’avertissements épouvantables. Les Anciens de l’Ordre s’étaient réunis afin de partager ces visions exponentiellement dantesques, présageant du pire à venir pour ce monde et l’humanité. Cette Terre des Mortels et le Royaume des Cieux, allaient être irrémédiablement scindés et séparés l’un de l’autre par des forces défiant le Divin. Illusions, phantasmes, hallucinations, mirages, mensonges et falsification, l’harmonie ordonnée par l’Equilibrium, allait être renversée sous le tsunami déferlant de l’autre côté du Miroir du Destin, Artéfact apotropaïque gérant les Mondes inversés et parallèles où sévissaient toutes races mélangées: celles des créatures de Dieu, et celles de l’Obscur omnipotent.

Quand, rejoignant l’Ordre saint des Fondateurs, un ancien Dieu confia à son tour ses ‘visions’, tous surent que l’inévitable était installé déjà depuis un temps sur le grand Métier à tisser du Fatum. Puis le Cercle restreint des Anciens chercha des solutions dans les écrits indéchiffrables. Sauf pour un. Auquel ils firent appel. L’Artéfact puissant se mit à chanter d’obscures scènes de désolation à travers le bronze-argent de son tain, et les rides sinuèrent sur l’airain de Son lac flou.

Des tréfonds désertiques du pays d’Agharta battu par les flots insondables de mers atones, aux rives enneigées des accores aiguisées, tranchants meurtriers encerclant des fondations venues de l’Enfer; des marécages hantés par les Naïades entrainant le voyageur imprudent, au Bois de Véros détenteur de lieux secrets engloutis dans l’ostracisme; de nécropoles sombrant dans la fange et les algues ensablées, au cimetière nécromantique où étaient couchés les restes affligés des Titans tombés durant la Guerre-Millénaire; d’un étang né de l’éradication, jusqu’à sa Tour résonnant des pleurs des Ainés psalmodiant des langues archaïques, aux territoires désacralisés par ceux,-émergés de la boue et la poussière, des cendres et braises détruisant d’antiques palaces-,-qui en avaient pris possession. De partout, vibraient les accents d’une Legacy écrite à l’encre des larmoiements des nouveaux Seigneurs ayant vaincu le paysage statufié d’effroi: les Lords of Shadow, ainsi appelés par une humanité dévastée, abandonnée par son Divin.

Il se murmurait…il se contait des choses…des abominations. Des accusations féroces mettant la Confrérie dans le doute. Et derrière le doute, naissaient les rumeurs. Derrière les rumeurs, la Vérité s’effaçait inéluctablement. L’espoir de quelque chose, quelqu’un, tenait fébrilement sur ses pattes maigres, et les fondateurs se prirent à rêver que peut-être l’Elu surgirait enfin du Lac de bronze. Le magnifique Artéfact n’avait-il pas esquissé déjà dans leurs songes l’ombre de cet Ange de Lumière? L’Ancien Dieu Pan Lui-même, avait discerné l’Ombre parmi les ombres qui allait redéfinir le profil de ce Monde. Mais à quel prix…Pan avait des convictions pour lesquelles Il mettait bien volontiers de côté Son instinct d’auto-préservation. Lui-même ne s’exprimait que par énigmes occultes, par mots sibyllins, comme par peur que les Mortels puissent enfin comprendre les mécaniques infernales à l’œuvre dans leur univers.

Tandis que dans les esprits déroutés, résonnait alors une Question, primordiale et insensée dans cette débâcle digne du Tartare, infernale Prison dans l’Abîme des Enfers. Il semblait bien que le triple rempart d’airain, baigné par le Phlégéthon, avait eu Son portail forgé par Poséidon, arraché de ses gongs par Plus-Puissant que Lui. De ce fait, les geôles infernales semblaient vomir leur contenant d’âmes damnées vouées aux châtiments éternels, sur cette Terre désolée et incendiée dans ses strates les plus ardemment englouties. LA Question obsédante: où étaient disparus les Fondateurs primaires de la Confrérie? Qu’étaient-Ils devenus dans cette dissolution des univers?

Pan était un très ancien Dieu, en harmonie avec le Divin unique, et observait à l’écart les Forces en jeu dont la décrépitude des Lois établies pour les Mortels, en résultait. Plus que tout, Il était conscient que cet effondrement était principalement dû à cette humanité revancharde, pharisaïque, vaniteuse, hautaine et arrogante, possédant une soif de pouvoir inextinguible, destructrice, quand il s’agissait de faire ‘table rase’ afin d’obtenir au prix fort l’Innommable convoité.

Béranger avait devant lui toutes les parties signées par le sang, de Pactes qui faisaient froid dans le dos. Les nombreuses calligraphies obscures suggéraient un pan mince du Voile couvrant les esprits retors et assassins de ce monde. Tous les défauts les plus hideux qui soient, dénaturant l’Essence-même de l’Homme, dans toute son horreur. Etait-ce cela qui allait fondre parmi eux? Par de pieux mensonges, l’univers entier allait courber l’échine aux pieds de l’Enfer, et prêter l’allégeance à un Aleph plus puissant que l’Entité silencieuse qui semblait bien avoir abandonné Ses Créatures misérables aux griffes de Ténèbres dévoratrices. Les Anciens étaient-ils réellement conscients de l’inéluctable s’étant répandu sur cette Terre, telle une nappe enténébrée de fiel corrosif, de marasme plus noir que les tréfonds de la Voûte céleste au-dessus de leurs têtes, où se reflétaient les divers Acteurs de cette pantomime grotesque et cynique? Les Anciens de l’Ordre avaient-Ils perdu la mémoire? S’étaient-Ils fourvoyés dans l’abjecte et l’acrimonie, sans espoir de retour, dans une haine sans borne pour leurs confrères en qui ils voyaient constamment des rivaux?

Tout le long de ses traductions, le moine grattait et extirpait, de chaque rouleau abîmé, des révélations effroyables injectant un peu plus le doute sur la Nature perverse de l’humanité, et de ses comparses. Faisant paraître les bêtes sauvages pour des ‘civilisés’, tandis que l’homme barbottait dans sa fange.

La transposition qu’il était en train de coucher fébrilement sur le vélin, à grands traits de plume déformant une calligraphie habituellement soignée et ordonnée dans son esthétique, en était un témoignage direct. Ça ‘hurlait’ des tréfonds d’un Passé qui refusait de s’estomper dans un oubli négligent. Son esprit faisait des suppositions, cherchant désespérément le personnage le plus apte et de confiance à qui divulguer ce qu’il terminait de traduire. Il s’apprêtait à révéler un pan très obscur d’une histoire déjà lourdement entachée, qu’il pensait lui-même connaitre parfaitement avec les années.

Tellement de manuscrits à interpréter, avaient déroulé des annales étranges contant des divergences Daedalian; des autobiographies couvertes de honte sous-jacente; des confessions larmoyantes sur des faits et malversations criminelles; des généalogies politiques où les Branches des Arbres étaient sciées sous le poids infâme de la culpabilité; hagiographies et palimpsestes impardonnables, recouvrant une Vérité dissolue dans les ères antédiluviennes. Toute la laideur humaine afin d’atteindre un but, et un seul: Pouvoir absolu, Autocratie et Orgueil nimbé de son Linceul sanglant, tel un Wraith trainant la charge incommensurable des actes ignominieux jamais punis. Tous ces épistolaires chargés de bassesse, de turpitudes, de scandales, déversaient leur contenant de sang en large quantité, qui aurait pu exsanguiner ce monde de falsifications.

Devant ses yeux épuisés et brûlants de concentration, défilaient des noms de haute-noblesse éclaboussée de vilenie. Un Pacte signé par la déchéance et le déshonneur absolu. Béranger sentait les larmes incendier le bord rougi des paupières, et sa gorge se contracta dans un énième spasme pour repousser la bile de rancœur, à la transcription du langage. Ce dernier, très ancien et pratiqué uniquement par l’Obscur, lui avait donné des suées d’effroi, lorsqu’il avait réussi à repérer les lettres premières définissant le dialecte. A l’instant où il avait cerné la phraséologie, il regretta amèrement son intelligence exceptionnelle pour les idiolectes variés et ramifiés dans des double-sens labyrinthiques. De l’Enochien. Le Pacte était rédigé et signé avec du sang, dans le langage de l’Enfer: Enochien. Les Anciens de la Confrérie allait avoir encore des raisons valables de cauchemarder, puisque ça impliquait directement l’un de leurs pupilles abandonnés entre leurs mains.

Dans ses très nombreuses recherches et transcriptions plus ou moins correctement traduites par ses prédécesseurs, Béranger s’était attelé à la tâche assidue de récolter les multiples pièces anachroniques pour certaines, et les recoller en une structure de puzzle abscons. Il avait fouillé pendant des semaines dans les archives inapprochables lestées de sceaux de plomb, voire d’estampilles monogrammées par le Sacré et la Magie. Donc, que nul n’avait eu l’audace de briser pour en lire les contenus sibyllins. Pour cela, il avait dû communiquer avec Andréas de Wygol, responsable bibliothécaire qui, respectant son vœu pieux de silence, et sachant la tâche bienséante de Moine-Traducteur officiel pour la Confrérie, lui avait ouvert les portes de l’Antre gisant dans les profondeurs de l’oubli des salles-arrière de la bibliothèque abbatiale. Là où reposaient de nombreux Pactes archivés dans une Mémoire que tous espéraient effacée dans une abnégation austère et démissionnaire. Une forme de charité qui aurait pu passer pour veule et miséricordieuse face aux écrits dantesques. Une indigence que l’on inhumait sous les traces sanglantes du passé. Une lâcheté impardonnable qui permettait aux hommes de bonne volonté de se déresponsabiliser face au Mal pandémique.

Tout ce salmigondis sybarite aux saveurs de dépravation de l’Âme, remontait aux origines floues d’une famille de nobles, riches propriétaires terrestres, tragiquement disparus dans le vortex de complots les ayant dépossédés, spoilés, disgraciés, voire excommuniés et condamnés à mort, s’ils n’avaient pas été déjà éradiqués par une autre généalogie avec qui ils avaient eu la très mauvaise fortune de passer des accords.

Les Cronqvists. Famille trouble envers qui une majorité de la contrée n’exprimait aucun sentiment cordial. Les seigneurs environnants et le peuple se défiaient de cette engeance qui s’était toujours confortée dans le flou de leur histoire. Les rumeurs grandissantes, les ragots venus d’une autre époque, avaient fini de brosser un portrait outrageux et abominable dans les déviances, suscitant une haine féroce envers les membres auréolés par l’opprobre, frappés par l’anathème, et affichant une richesse outrageante même pour les puissants châtelains environnants. Les hommes de ce lignage subissaient la flétrissure, depuis que l’un de leurs premiers ascendants avaient mis le pied dans la chevalerie, suscitant jalousie, envie meurtrière, détestation due à l’incompréhension. Mais personne, à ce jour, n’aurait pu expliquer concrètement le pourquoi de cet ostracisme sauvage envers, finalement, une Maisonnée méconnue. Simplement parce les membres de cette Dynastie caracolaient bien loin dans l’avant-gardisme, déroutant sans égard les illusions de la moralité et de l’éthique prude conservatrice.

Par le rejet, naquit le Monstre. Par la solitude et l’absence d’amitiés haut-placées, émergea le Mal. Discriminés par l’imperméabilité contemptrice notoire, le Sang se tourna vers une Hérédité encore pire qu’eux-mêmes. Les Cronqvists n’étaient pas les seuls à être frappés d’hérésie, et d’infâmie, d’autres brandissaient le pavillon de l’anathème encore plus haut que le leur. Joint au mépris et la haine envers la Dynastie sus-citée, une terreur sans-nom hérissait les chairs de ceux qui osaient prononcer leur nom: Bernhards. Possesseurs d’un château démentiellement gigantesque, auquel tous s’accordaient à attribuer des origines infernales venant du Cosmos-même, voire d’autres dimensions parallèles à ce monde. A la différence près, ce fut que les Bernhards se confortaient dans leur effroyable réputation de Nécromanciens dont la puissance surpassait, ou du moins égalait, celle du Divin. Dans l’esprit de ceux qui tremblaient de peur, ils s’octroyaient les droits de blasphème suprême en souffletant impunément la Face de l’Entité-Créatrice des hommes.

Il se murmurait timidement, que l’édifice était hanté par une engeance venue des confins abyssaux, donnant ‘vie’ et indépendance aux pierres bénies par l’Obscur. Nul n’ignorait que le Château était ‘vivant’ et pensant. Dans lequel croupissait depuis très longtemps Celui qui avait été baptisé par les Bernhard, l’Oublié.

Scellé par des sorts nécromantiques Lui interdisant toute tentative d’infraction dans ce monde, avant d’en avoir reçu l’ordre. Les Bernhards, dans leur folie mégalomaniaque et leur soif de puissance, avaient invoqué un des pires démons dévorateurs d’univers qui soit. Et prirent peur soudain, mais trop tard, de leur invocation, et les conséquences risquant d’être impliquées, si jamais ils devaient disparaitre de la surface de la terre.

Ce qui arriva. Les Bernhard virent leur filiation se perdre définitivement dans le Tartare, destination finale pour laquelle ils avaient signé de leur sang, lorsque l’Oublié parvint à briser Ses chaines et se retourner contre eux. Ce fut l’avènement des trois premiers Fondateurs de la Confrérie qui se jetèrent dans le combat contre l’Entité impitoyable. Les Bernhard disparurent jusqu’au dernier dans le conflit, tandis que les Fondateurs prenaient conscience qu’ils ne pouvaient détruire l’Oublié. Seule solution pour eux: profiter du combat, pour créer une faille dimensionnelle dans laquelle ils parvinrent à aspirer le Démon, et sceller l’abîme l’enfermant à jamais, en combinant leurs pouvoirs. La forteresse interdimensionnelle servirait de prison, et la Confrérie fit bâtir de nouvelles structures tout autour du Château, afin d’y enfouir profondément l’Aleph.

Mais c’était sans compter sur cette incommensurable ambition qui dévorait tout être humain, même les trois Fondateurs pourtant investis de pouvoirs inégalables octroyés par le Divin. Des années plus tard, les Fondateurs succombèrent à leur soif dévoratrice, s’affranchissant de leurs pendants de chair, pour atteindre l’état suprême d’Esprits sacrés, et s’installer aux côtés du Divin. Mais leur folie des grandeurs leur fit abandonner leurs Jumeaux maléfiques qui allaient se charger de semer discorde et désolation dans le monde fragilisé, au bord de l’agonie.

Ce pan de l’histoire sinistre ne fut jamais inscrit dans les registres, et l’humanité balbutiante perdant tout repère, vit fondre sur leurs échines les malfaisances nommées ‘Lords of Shadow’. Comme pour toute histoire sale et honnie, le peuple n’avait aucun droit de regard, sauf de subir. Les Fondateurs se haïssaient les uns, les autres, se méprisant, se jalousant. Il ne fut pas un hasard si Carmilla, une des trois Fondateurs, porta son choix sur le Château, nourrissant une terreur absolue à l’idée que l’Oublié ne se libérât un jour.

Les rapports que Béranger traduisait, évitaient scrupuleusement d’étaler les conséquences et la finalité de tout cet imbroglio désastreux, qui n’avait sa source que dans l’ambition démentielle détruisant même les esprits les plus purs. Ce n’étaient finalement que des allégations peu fiables, disséminées à travers quelques documents faisant office de rapports concis, ou vagues procès-verbaux avortés, dressés en mots brefs, laconiques. La plupart des feuillets rédigés sous format de correspondances ayant souvent très peu d’accointance entre elles, et suggérant bien plus des dénonciations calomnieuses, des indiscrétions fielleuses dont le seul but était de vilipender la situation de certains hauts-dignitaires. Ces sombres déclarations avaient été écartées, mises à l’écart, avec le temps, dans un coin de pupitre relégué sous la poussière de l’oubli par un ordonnancier ou Père-Fondateur blasé par toutes ces stupidités infantiles, et ne donnant aucun crédit à ces propos susurrés à l’encontre de leurs Saints-Fondateurs-Premiers.

Mais dans son acharnement d’enquêteur, désireux de donner une légitimité aux paroles, en additionnant deux-plus-deux, le Moine traducteur avait réuni suffisamment de preuves écrites, pour comprendre que ce monde ne tournait que sur les apparences, et les mensonges. Quand il y réfléchissait bien, tout s’était déclenché en fait sur une demande floue par un cardinal, de réunir et catégoriser des Scripta délaissés dans l’oubli, qui éclaireraient très certainement l’Histoire de la Confrérie et ses antécédents, afin d’éduquer les futurs novices dans leur tâche d’apprentissage de l’Art de la Guerre contre l’Obscur, et les ordres et Codes d’Honneur de la Chevalerie dans les Croisades.

En quelques fouilles balbutiantes, lui parvint à son expertise, un Pacte monstrueux et répugnant, conclu entre les Cronqvist et les Bernhard. Tout alentour de cet Ecrit, Béranger avait accumulé beaucoup trop de textes divergents, contant d’autres aspects historiques qu’il se serait bien gardé d’exhumer de leurs monticules de crasse. Souvent, il était préférable de laisser croupir des événements trop gênants du Passé sous les croûtes de Paralipsis. Des omissions qu’il valait mieux laisser dormir.

L’ouvrage décrivait succinctement l’appel à l’aide de la lignée mourante et désespérée, vers celle farouche Toute-Puissante des Bernhards. Détaillé sur un feuillet et demi, suivi de statuts d’accord entre les deux parties, le tout validé par les signatures et sceaux respectifs. Les Cronqvist commirent l’irréparable en s’acoquinant avec des Nécromanciens notoires. Peut-être pensèrent-ils pouvoir atteindre une forme de Rédemption? Ils conclurent un Pacte par dépit, sans se douter que leur chute viendrait fatalement par la main des Bernhard censés les protéger. Les protéger de quoi?

Avant de s’éteindre à jamais sous les complots ourdis par leurs propres ‘bienfaiteurs’, Cronqvist dut se débarrasser d’un fardeau supplémentaire, fécondé hasardeux d’une orgie récurrente, malgré les précautions prises par le couple. L’opportunité infernale se présenta comme argument dans l’écriture du Pacte par la main-même de Bernhard. Où il était dûment calligraphié à l’encre de la résipiscence, la pénitence envers l’enfant à naître, et non-désiré, serait ‘béni’ par l’Obscur, et se développerait dans les Ténèbres ancrées en lui.

Ensuite, la graine maudite née de l’Accord, serait déposée sur le parvis d’une abbaye appartenant à la Confrérie de la Lumière. Baptisé par l’Abscons insondable, il deviendrait Celui annoncé par la Prophétie. Un Chevalier de Lumière, un Elu que tous croiraient volontiers choisi par Dieu Lui-même. Dans la tromperie, Il serait en mesure d’agir sans prendre mesure des conséquences désastreuses y afférant. La Prophétie annonçait un Destructeur des Lords of Shadow, le Bras-Armé de Dieu, mais sans révéler l’effondrement qui s’ensuivrait. Dépossédés de leurs pouvoirs, les Seigneurs abandonneraient ce monde entre les mains de Celui qui deviendrait plus puissant que le Divin; Maître absolu sur l’Ange-Déchu qu’Il fera ployer; s’assoir sur le Trône des Ténèbres, et engloutir sous son Ire insatiable l’Ordre qui le sacrifiera par ignorance stupide. Dans cette débauche de traîtrises, l’Aleph Lui-même serait floué, abusé, cédé à l’échec cuisant dont personne ne se relèverait.

Les dernières parties du Pacte restaient floues, mais Béranger en comprit la teneur menaçante, liant ce qu’il connaissait de la Prophétie avec les allusions métaphoriques et symboliques des invocations écrites en différents langages, dont l’Enochien concluant le Contrat. Le Moine avait saisi toute l’étendue de l’horreur signée sur les supports tachés d’auréoles brunes, dont la provenance ne laissait aucun doute. D’une tâche qui aurait dû se révéler aussi simple que possible dans l’archivage et la mise à jour historique, Béranger avait dérangé le sordide, enseveli dans les couches les plus reculées d’un Héritage amoral et contre-nature.

L’Elu était né. Il marchait parmi eux désormais. Et selon ce ‘marché’, Il évoluait au sein-même de la Confrérie. Mais qui? L’Ordre accueillait relativement souvent des nourrissons abandonnés par des familles pauvres, incapables de les nourrir, ou des nobles désireux de cacher la honte de l’adultère.

Béranger sentait son univers s’écrouler sous ses pieds, tandis qu’il terminait les traductions, assemblant les feuillets dans un dossier qu’il avait soigneusement rédigé, et relié par différents sceaux attestant que les documents, pour l’instant, n’étaient mis à la connaissance de personne d’autre que lui.

Ce jour était jour-de-liesse pour une bonne partie du village: le mariage d’un des tout-jeunes Chevaliers adoubés, était célébré, et comme la famille de l’épousée était vraisemblablement aisée, cela allait occuper les responsables de la Confrérie durant quelques jours encore.

Béranger ne se préoccupait pas beaucoup de ce qui faisait vivre la communauté autour de l’imposant Donjon de l’Ordre, trop occupé lui-même par ses livres précieux où se cachaient des interprétations fantastiques d’exploits; des hagiographies suscitant l’envie sur des personnages ayant œuvré il y avait très, très longtemps, et aujourd’hui n’existaient plus qu’à travers les récits de leur bravoure. Le Moine ascétique adorait explorer ces histoires improbables pour certaines, et extirper jusqu’à épuisement les derniers mots de la fin, dans un travail minutieux se révélant toujours de véritables challenges pour chaque traduction.

Ermite enfermé dans sa cellule, il aimait le travail bien fait, parfaitement ordonné, et ne souffrait pas d’à-peu-près qui auraient pu parasiter les transpositions dans leur signification. Ses comparses ne le connaissaient qu’à peine. Muré dans son silence volontaire, il était tel un spectre sur lequel personne n’aurait su exactement décrire un trait de son visage toujours voilé du capuchon, lorsqu’il s’accordait une sortie seulement pour aller prier et se ‘confesser’ par écrit. Il ne faisait pas de ‘vague’, ne faisait pas parler de lui. Rasait les murs, aussi furtif que les ombres qui se courbaient sur son passage. Quand il trépasserait, nul doute que sa dépouille disparaitrait dans un cortège aussi discret qu’il l’avait toujours été dans cette vie.

Donc, les épouvantables secrets qu’il venait de déterrer, devraient attendre quelques jours, avant d’être dénoncés, et de toute façon, rien n’aurait pu être bousculé, désormais, les faits s’étant déroulés depuis des années. Un jour de plus ou de moins, ça ne changerait strictement pas l’ordonnance des évènements.

Béranger ressentit un profond malaise exponentiel, tandis qu’il reposait presque tendrement les plumes calligraphiques aux côtés des encriers ventrus et dégoulinants des liquides s’étant échappés de leurs cols encroûtés. Ce petit mouvement automatique de rinçage sur le fil du verre dépoli, afin d’évacuer le trop-plein de pigment épais sur le bec de la plume. Ce discret frottement tintinnabulant comme l’airain en soupir dans l’éther chargé de brume gracile, était toujours un son délicat dont il ne se lasserait jamais. Quand il lui arrivait de traverser la salle des scribes-enlumineurs, son oreille s’attardait languissamment sur la mélopée cristalline contre les petits flacons d’aquosités licoreuses de toutes les couleurs.

Il nettoyait méthodiquement ses plumes après usage, dans un trouble obsessionnel compulsif, ne supportant pas l’insubordination dans le rangement de chaque objet. C’était sans doute cette psychorigidité instinctive et obsédante qui en faisait un des plus grands et expérimentés Traducteurs pluri-langagiers que la Confrérie n’ait jamais eus dans ses rangs. Sa Mémoire eidétique et son intelligence idiolectale, en faisait une source de trésor inestimable dont les Fondateurs se rengorgeaient volontiers auprès d’autres abbayes qui ne possédaient pas ce type d’Erudit aussi rigoureux.

Mais en cette journée prenant lentement fin dans les ocres-or crépusculaires, Béranger ne sentait pas l’orgueil habituel de l’accomplissement. Il se sentait abattu. Jeté dans l’effroi par ce qu’il avait mis tant de soirées pour traduire. Une appréhension sourde qui se saisissait sournoisement de tout son être, et exsudait lâchement par tous les pores. Il lui était nécessaire de prendre un bain de lavande et de genévrier, qui lui calmerait peut-être les nerfs, tout en désinfectant la chair et l’âme trop transie par ce qu’il avait lu.

Tout d’abord, il lui fallait absolument cacher ses découvertes, le temps de son absence. Il se rendrait ensuite auprès du responsable des bains, qui lui préparerait un bac bien volontiers. Une fois propre et purifié, il irait au confessionnal. En attendant de pouvoir déranger un de leurs Fondateurs auquel il songeait, afin de confier le dossier hyper ‘sensible’ résultant de ses recherches.

Quelque part, là-bas, un peu excentré du village, un lieu résonnait des rires et chants dus à une cérémonie d’amour, et il serait inconvenant de déranger les participants à cette joie, pour leur faire part de révélations sinistres. Instinctivement, Béranger avait opté pour un autre personnage à qui confier ses découvertes, plutôt qu’au cardinal impliqué dans la demande. Il n’aurait su dire pourquoi, mais sa décision fut prise quand il franchit le seuil de sa chambrette, les manuscrits liés sous les plis de sa robe de bure.

Il n’aurait su dire pourquoi quand, son esprit assombri par les nombreuses questions afférant au dossier, il n’eut aucune réaction quant au bruit à peine soufflé dans le corridor. Ça aurait pu être à peine un soupir provoqué par un vêtement ample volant dans le mouvement fluide de l’ombre fondant sur lui. Ou une onde gravitationnelle née de capacités infernales d’un Maître-télékinésiste. Il ne put même pas esquisser un geste de défense. Ce fut à peine si sa vision périphérique perçut l’onde fluide très sombre. Il était avant tout un Moine-Traducteur-Erudit, engourdi dans ses livres précieux écrits dans des langues disparues depuis des éons. Pas un soldat. Pas un guerrier aux réflexes affûtés.

Il trottinait légèrement le long du grand hall bordé d’encadrements en ogives, ouverts aux vents, sans fenêtres pour contrer les souffles parfois arides des hauteurs. Il aimait souvent se pencher sur l’accotement vertigineux de la muraille puissante du Donjon, quand il avait besoin de réfléchir. Quand il rencontrait des difficultés particulières sur des manuscrits babillant dans des dialectes trop anciens. Avant de revenir se murer dans sa cellule plus douillette que d’autres, envahie de parchemins, de vélins; de tomes pesants qu’il compulsait fébrilement à la recherche d’une interprétation archaïque qui l’éclairerait; de cadavres de plumes usées jusqu’à la trame d’avoir gratté le papier fibreux; d’encriers dégorgeant leurs liquides éparpillés en taches indélébiles dans les veinules du bois ancien.

Il se pencha une fois de trop, oubliant la gravité. Oubliant que l’homme n’était pas fait pour voler. Mais cette fois, la margelle de l’ogive sculptée ne retint pas son poids.

Il avait fait vœu de silence. Jusqu’au bout, il fut fidèle à ce vœu. Du moins, il n’eut jamais le temps de pousser ne serait-ce qu’un couinement sous l’abîme qui lui ouvrait sa gueule rocailleuse. Juste une idée stupide qui le frappa: son manuscrit soigneusement enroulé dans sa robe, ne suivit pas son mouvement, étrangement arraché dans une absorption sifflante. Les feuillets voletèrent dans le sens contraire de son corps désarticulé plongeant vers le sol aride.

Après tout, qu’avait-il à perdre?...Fut le paradoxal éclair de pensée qui subsistât quelques micro secondes après qu’il eût quitté ce monde…

 

 

Fugace battement d’ailes du Papillon. Une toile complexe étalée sur le parvis luisant des pierres usées par les pas quotidiens. Ça ruisselait lentement, miroitant quelques angles obscurs du Donjon, dans des monochromes cuivrés-or-pourpre que Béranger aurait pu apprécier à travers les enluminures qui ornaient ses grimoires. D’infimes petits ruisseaux aquarellant patiemment les rides rocheuses. A l’identique de leurs frères tissant une tulle microscopique sur les dalles lustrées de l’abbaye de Wygol.

Dans les rainures sombres du bois noueux de l’énorme table chargée de victuailles, s’écoula joyeusement un trop-plein d’excellent vin rouge-pourpre délicat. Sous les rires et les moqueries de celui, déjà bien éméché, qui en avait renversé une large rasade par maladresse. Le jeune Chevalier et son épousée entrelaçant leurs mains portant les coupes, avait libéré une nappe s’écrasant en clapotis sourds.

Jolie dentelle en résultant, se frayant un passage dans les frêles excavations, que le Chevalier contempla une seconde, à travers son regard flouté par l’alcool. Mais aujourd’hui, était un jour à commémorer pour l’éternité. Et il se détourna du petit gâchis pour dévorer les lèvres de l’épousée presque aussi enivrée que lui. Et tous rirent. Se tapant les cuisses en éructant des plaisanteries salaces.

Il en eut un qui participait avec les autres, mais plus modérément. Dû à son rang. Un Général-Commandeur des Armées de la Confrérie qui portait ses cicatrices comme des trophées, fier de les avoir reçues lors des combats contre les forces des Ténèbres. Son physique imposait le respect effrayé, et son aura libérait un caractère endurci et impitoyable. Il se permettait quelques rares sourires, avare de démonstration. Personne ne savait vraiment ce qu’il pensait, ni ce qui aurait dû le faire réagir normalement comme tout être humain.

Dans ce moment de liesse maladroite et coquine, il se permit un ricanement. Mais étrangement, son regard ne quitta pas la surface de la tablée, examinant longuement les longues trainées du vin précieux se frayer un chemin fragile dans les nœuds en relief. Il lui vint une pensée saugrenue, baroque:‘on dirait un sang épais…ce vin a la couleur du sang…’. Peut-être que lui aussi naviguait en eaux-troubles d’un début d’enivrement. Les prunelles aux nuances châtain-cuivre,-couleur rare, qu’il donnera à son fils, dans un avenir proche-, restèrent fixées sur la nappe miroitant certains aspects de l’environnement, comme un miroir délivrant des sfumatos troubles.

Il était rigidifié dans une torpeur réflective, quand un mouvement lointain le tira de sa contemplation. Tandis qu’autour de lui, les camarades du jeune Chevalier étaient en train de discuter à voix trop fortes, sur un sujet quelconque, futile, pensa le Général Guilhyem de Rem.

Son attention se concentra sur une silhouette surgie de nulle part, et s’étant incrustée furtivement dans l’attroupement égaillé. Il fut interloqué de la présence du personnage qu’il pensait éloigné dans de très obscures missions, complètement indépendantes du fonctionnement interne de la Confrérie, le menant très loin vers les confins du pays. Mais surtout, Guilhyem émettait des débuts de soupçons envers cet individu qui ne quittait plus son observation devenue obsession avec le temps. Quelque chose ne passait avec cet individu qu’il ne parvenait jamais totalement à cerner, et cela depuis le début de leur rencontre au sein de la Confrérie.

Des années s’étaient écoulées, les deux hommes avaient atteint des âges honorables, quoique Zobek avait affiché toujours une apparence bien plus ancienne encore que la majorité des membres de l’ordre. Il donnait invariablement cette impression d’avoir toujours connu le Monde depuis ses origines. Sur les Trois Fondateurs, il était le plus ancien. Sa réputation s’était ancrée dans les croyances et la Culture universelle de ce pays sombrement ravagé par les puissances incommensurables franchissant le grand Portail séparant les enfers, la Terre, et le Domaine saint du Divin.

Comme tous, Guilhyem avait appris à connaître leurs trois Fondateurs, leur Legacy extraordinaire pour laquelle Ils s’étaient battus. Tout du moins, une infime partie du Paraître frigide auréolant leurs exploits. L’iceberg immergé dans l’océan de l’inconnu, ne révélerait jamais les sinistres vérités, et Guilhyem avait fait comme les autres: il n’avait jamais cherché à creuser plus profond dans ce qui pourrait être de la fange.

Jusqu’à une certaine période. Où les Seigneurs de l’Ombre imposèrent, d’année en année, leur omniprésence destructrice, envahissant les territoires plus gangrenés à chaque passage. Comme une nappe de suint corrosif, dévorant tout, avalant des environnements jusque-là intacts. Le doute s’installait dans le cœur des hommes, et les trois Fondateurs avaient mystérieusement disparus dans l’éther devenu irrespirable. On avait supposé alors que les Trois étaient partis sur les chemins de la guerre et de la Connaissance Primaire afin de contrer les mondes infernaux, et protéger leur peuple.

La Triade-Sainte, composée de Cornell, le plus jeune; Carmilla, guérisseuse-médecin, et Zobek, le plus insondable d’entre eux, s’était accordée une séparation, où chacun partirait à la recherche de l’Erudition suprême et la Sagesse dogmatique, afin d’atteindre les Terres sacrées du Divin, et faire profiter l’humanité de leur Science. La suite de l’exploration des Fondateurs tire son incompréhension la plus absolue dans les méandres brouillardeux, comme des secrets honteux. Les membres restants de la Confrérie ne pouvaient que compter sur des supputations dont quelques échos surgissaient de-ci, de-là, vaguement esquissés à travers des rêves, ou des formes cryptiques dans le lac de bronze d’un Artefact.

L’identité des Fondateurs n’était réellement connue que par les Pères dignitaires de l’Ordre. Le peuple, lui, se contentait de subsister difficilement dans leur vie devenue misérable et chaotique. Les chevaliers officiellement adoubés avaient une connaissance succincte des origines, et de beaucoup n’avaient même pas eu la chance de rencontrer leurs Fondateurs primaires. Seuls, ceux qui avaient atteint les rangs de généraux, presqu’au grade de Père-Fondateur succédant, avaient connu ce privilège. C’était le cas de Guilhyem.

Pourtant, un des Trois avait expressément émis la volonté que son implication au sein de l’Ordre en tant qu’édificateur, soit soumise à la plus stricte discrétion envers autrui. Zobek était ledit personnage. Ajoutant encore plus de mystère, s’il en était besoin, autour de sa haute stature puissante, à la chevelure précocement grisonnante, retenue dans un éternel catogan. Portant également une des plus vieilles tuniques emblématiques de la Confrérie, dont les bords élimés et les dorures arabesquées avaient pâli dans des nuances brunes délavées. L’ancienneté du vêtement tranchait étrangement avec l’aspect noble du visage buriné auréolé du gris-argent de la chevelure. Tout paraissait décalé chez lui, presque anachronique, hors cadre, hors logique. Comme venu des siècles oubliés dans une autre dimension.

Comme un miasme éthéré enveloppant ce Fondateur primaire, subsistait ce quelque petit ‘détail’ suggérant la méfiance, probablement le rejet aussi, de la part des ‘chanceux’ qui avaient croisé son chemin. Derrière le masque débonnaire du Saint-homme Fondateur, Guilhyem soupçonnait invariablement autre chose de plus…obscur, malsain. Délétère assurément, méphistophélique sournoisement. Son regard d’acier semblait souvent se figer dans le frimas d’un Au-Delà effrayant. Tout ceci avait immanquablement suscité la curiosité obsessionnelle chez le Général de Rem, et ce dernier, dans une minutieuse furtivité, avait entamé des recherches sur l’énigmatique Triade. Ce qui commençait à poindre, motivait Guilhyem un peu plus en avant, au fur et à mesure des difficiles résultats. La Confrérie était une Tombe de silence imposé, de paralipses balbutiantes, qui commençaient à donner des frissons au plus enhardi.

On se prenait alors à réfléchir sur le nombre de décennies pesant sur les épaules puissantes du grand Chevalier-Bâtisseur. L’âge aurait pu donner le vertige à quiconque ne connaissant pas les particularités octroyées aux Fondateurs-Primaires de la Confrérie, et beaucoup de rumeurs exagéraient la longévité de l’existence des trois Bénis de Dieu. Il se murmurait des siècles…Il avait bien fallu cela pour engendrer un Ordre aussi puissant, armé de l’étendard immuable du Divin.

Plus l’énigme s’épaississait, plus Guilhyem se faisait l’effet d’un chat s’approchant trop près du gouffre s’ouvrant sous ses pattes, et risquant de l’absorber définitivement. La curiosité a tué le chat, dit-on…De Rem était conscient qu’il entrait dans un domaine interdit aux simples mortels. L’abysse était personnifié par les intonations, certes très agréables, d’un baryton profond et apaisant, mais modulant des phonèmes dont les sonorités sonnaient plus sournoises qu’elles ne l’auraient dû, et des paraphrases à l’arrière-goût mi-figue, mi-raisin. Le chat était curieux, mais il sentait son poil s’hérisser insidieusement, au lieu d’onduler sans crainte sous la caresse promise par cette voix fardée par l’équivoque constante.

Pendant que le Général impassible ressassait les pièces de ce puzzle compliqué, se glissa une autre apparition à ses côtés, mais qui suggérait bien plus de sympathie à son encontre, qu’envers l’autre homme. Chester d’Uries affichait la même taille que Guilhyem de Rem, tous deux atteignant allègrement les deux mètres, imposant à son tour un respect indéfectible et un charisme extraordinaire dans l’éclat de sa chevelure longue et sa barbe soigneusement tressée et brossée. C’était dire que les deux personnages étaient une vue à eux tout seuls.

«Ne serait-ce pas…’murmura lentement Chester, se penchant vers son comparse.‘Zobek? Il garde toujours son ancien habillement…Mais que fait-il ici, je le pensais vers les terres d’Agharta?

«Moi aussi,''grommela Guilhyem.‘J’ignore la raison de sa présence ici…Il connait à peine le jeune Belmont. Etrange qu’il se soit détourné de son chemin de quête pour venir s’adonner à des libations de mariage…

Chester considéra pensivement son collègue, son visage de pierre immuable mais dont le front était légèrement plissé. Certainement sous des pensées intrusives le taraudant. Car il savait son Général très méfiant et hostile envers ledit personnage nommé Zobek. Il n’avait jamais réellement réussi à faire dire au dignitaire ce qu’il avait sur le cœur, seulement que ce dernier nourrissait une rancœur sinistre envers le membre-Fondateur-Primaire de la Confrérie. Ce qui avait paru déplacé comme comportement envers leurs saints Fondateurs, avait provoqué un amoncellement d’avertissements et de ‘remise en place’ de la part des cardinaux, à grands mots alambiqués crachés sur un ton fielleux, lors d’une entrevue exigée par les ecclésiastes.

Guilhyem s’en était ouvertement moqué, méprisant les deux cardinaux dans un acte éhonté de rébellion, et répliquant des mises en garde menaçantes si d’aventure la Confrérie persistait dans son aveuglement. Quelque chose n’allait pas avec Zobek, mais Guilhyem ne pouvait pas encore mettre le doigt dessus. Et depuis un trop long moment déjà, plus aucun contact avec les deux autres Fondateurs, n’était possible. En fait, quand lui et Chester y songeaient, tout avait commencé à divaguer dans un flou total depuis…l’avènement des Lords of Shadow.

Où étaient donc passés les Fondateurs? D’eux, l’apparition se faisant de plus en plus rare de Zobek à travers différentes contrées,-donnant de rare nouvelle, et l’impression qu’il était en quête permanente-, confortait encore un peu les Pères de la Confrérie dans l’assurance que leurs Fondateurs avaient toujours un œil sur l’humanité dont Ils avaient la charge. L’homme était devenu comme un fantôme, et au fil du temps, les témoignages attestant sa présence dans tel ou telle ville, village, hameau, s’effilochaient dans l’indécision.

En y réfléchissant, c’était également le cas pour Rinaldo Gandolfi qui paraissait s’être dilué dans l’espace, sans laisser de trace quelconque. De certains racontaient l’avoir entrevu, en haillons, tel un ermite fuyant ce monde. D’autres, qu’il fût devenu fou, et caché dans les profondeurs de forêts hantés par les restes fossilisés d’antédiluviens ayant foulé cette terre, et dont les os blanchis s’arque-boutaient parfois au-dessus de fossés profonds où attendaient des pièges bien plus mortels. D’autres encore, qu’il se serait niché entre les ruines de tombeaux oubliés de nobles chevaliers, pour y mourir. Comme les oiseaux. Sans sépulture. Ses ossements, ruisselant sans doute sous la clarté enténébrée d’une canopée abritant son sépulcre de mousse et de fougères.

Alors que ledit personnage de Zobek évoluait tranquillement entre les groupuscules joyeux, glissant sans faire de vague, sans que personne ne lui adressât la parole, Chester comprit que cela ne serait pas aujourd’hui que Guilhyem déverserait sa haine dans son oreille. Le Général gardait férocement la mâchoire crispée, sans jamais quitter l’individu des yeux.

Zobek sembla faire un simple tour d’horizon. S’approcha des épousés, mais sans directement les entretenir. Ses yeux transparents étaient des lames sournoises quand il darda son regard sur le jeune Belmont. Guilhyem n’aurait su dire quelles émotions pouvaient bien se battre à travers ce regard qui ressemblait plutôt à celui d’un basilic, mais cela lui fit froid dans le dos.

Il s’attendait presque à ce que l’ancien fondateur n’abordât Gabriel, dans un geste fluide. Pour retomber de suite, comme une hésitation de dernier instant. Guilhyem en fut frustré. Il aurait volontiers préféré que la confrontation, quelle qu’elle fût, se déclenchât. Au lieu de ça, il vit Zobek faire demi-tour, aussi furtivement que son entrée, et disparaitre très rapidement de son champ de vision. Le temps d’un clin d’œil, et Guilhyem n’aperçut plus la silhouette très grande et corpulente du Fondateur.

Encore une fois, tel un spectre s’évanouissant dans un sommeil qui prend fin, les deux hommes avaient perdu de vue Zobek s’étant dissout dans la demi-pénombre qui tombait dans un crépuscule d’or et de violine. Ils restèrent un moment, frustrés par l’absence d’action, et d’avoir raté l’occasion d’entreprendre l’ancien fondateur fuyant.

Ce dernier aurait peut-être apporté un peu d’éclaircissement concernant l’apparente disparition et le mutisme inquiétant des Fondateurs primaires de l’Ordre. Chester et Guilhyem allaient devoir motiver leur patience qui s’effritait lentement dans une angoisse pesante, dans l’attente d’un entretien qui ne viendrait pas.

Inconscients de l’évènement qui venait de se dérouler, Gabriel entrainait de nouveau sa belle et tendre épousée sur l’espace dédié à la danse et aux rires. Tandis que deux fronts se plissèrent davantage sur des sombres pensées échafaudant de sinistres esquisses menaçantes. Et l’absence de mots qui auraient pu soulager leur conscience.

 

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Des souvenirs aux fragrances de cendre et de soufre, des ressouvenances suffoquées sous des larmes d’airain… Gravés à jamais dans des cuirs douteux ressemblant plus à de la peau humaine. Dans des dialectes oubliés de tous, balayés par les vents de l’ignorance, ou une négligence paresseuse. Espérant qu’Eole fasse un meilleur travail que ces érudits dont on avait scellé les langues risquant d’être prises de folie sous l’aberration des confessions. Calligraphies convulsées dans l’Araméen, dialecte pratiqué en Syrie, très ancien, sémitique, dont on disait que le Christ parlait couramment de par Ses origines orientales. Ce langage si vieux et désuet, côtoyait outrageusement l’Enochian. Dichotomie stupéfiante dans les liaisons entre ces deux verbiages, mais qui ne laissait aucun doute sur le fardeau pesant sur l’humanité à la mémoire si fragile.

Vélins badigeonnés d’encres dessinant des coalescences entre deux mondes décrits à mots succincts, espérant que leur mémoire sera effacée à jamais. Ils ont voleté par-ci, par-là. Arrachés du textile de bure dans lequel ils étaient lovés. Pas longtemps. Tels des papillons agonisants dans un dernier soubresaut d’ailes déchirées, ils furent relégués dans l’Obscur les enveloppant. Loin de la connaissance humaine. Loin de la peur futile de ces êtres frêles, condamnés à l’extinction.

Un coulis maigre s’échappa des nœuds creusés de vergetures, pour atterrir en ‘plop’ ténu, éclatant en miscellanées de poussière et d’alcool. Une étendue, scintillant faiblement sous la lumière mourante du crépuscule, miroitant les gestes saccadés de danseurs, jusqu’au bout de la nuit. Une aquosité suave s’évaporant en fine toile d’araignée. Couleur pourpre riche, presque noire. Comme le sang de la terre sur laquelle elle se résorbait.

 

… Un battement d’aile du Papillon…

 

 

 

 

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